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L A SOUMISSION DU CONTROLE DES MARCHES PUBLICS AUX ORGANES DE CONTROLE DE LA CONCURRENCE

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 165-172)

Les autorités chargées du contrôle et des sanctions en matière de concurrence, sont également celles qui interviennent dans celui de la passation des marchés. Le rôle fondamental des autorités de la concurrence dans la prévention, la détection et la sanction des pratiques anticoncurrentielles dans les marchés publics est toujours mis en exergue dans les réflexions sur l’articulation entre ces deux disciplines360.

Il ressort des articles 17 et 18 du règlement 04/99 que le Conseil régional de la concurrence (ci-après CRC), peut être saisi par toute personne ayant «un intérêt à

360 Comité de la Concurrence de l’OCDE, Lignes directrices pour la lute contre les soumissions concertées dans les marchés publics, Paris, OCDE, 2009, 18p, disponible sur le site de l’OCDE:

http://www.oecd.org/fr/concurrence/ententesetaccordsanticoncurrentiels/42340181.pdf (consulté le 07/04/2014). Elias BERKANI, «Droit de la concurrence et commande publique: état des lieux d’un vieux couple», Concurrences n°1, 2007, pp. 58-67.Voir aussi SECRETARIAT DE LA CNUCED, «Politique de la concurrence et marchés publics», Document GE.12-50650 (F), Communication à l’occasion de la Douzième session du Groupe intergouvernemental d’experts du droit et de la politique de la concurrence, Genève 9-11

juillet 2012, Disponible également sur le site de la CNUCED,

http://unctad.org/meetings/fr/SessionalDocuments/ciclpd14_fr.pdf, (consulté le 07/04/2014). Dans ce document, le Secrétariat de la CNUCED, après avoir relevé les contradictions pouvant exister entre la concurrence et les marchés publics, donne quelques solutions permettant de concilier les deux. Pour ce faire il met l’accent sur la participation des autorités de la concurrence dans le contrôle de la passation et de l’exécution des marchés publics.

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conclure» le marché et pouvant être lésée par les manquements aux obligations de publicité commise par l’administration. La saisine du CRC doit intervenir avant la conclusion du contrat. Il dispose d’un pouvoir d’injonction à l’encontre de l’administration fautive et peut suspendre la procédure de passation lorsque celle-ci ne donne pas suite à ses injonctions. Toutefois, lorsque le CRC est saisi après la conclusion du contrat, il perd sa compétence exclusive et doit renvoyer le différend devant la Cour de justice de la CEMAC.

Cette organisation du contrôle, est cependant appelée à évoluer car elle est en contradiction avec la configuration des institutions de la CEMAC.

Les fonctions du CRC dans le contrôle des marchés, telles qu'elles viennent d'être présentées figurent dans le règlement n° 04/99 du 18 août 1999 portant réglementation des pratiques étatiques affectant le commerce entre les Etats membres. Ce texte a été adopté à la suite du règlement n° 01/99 du 25 juin 1999 portant réglementation des pratiques commerciales anticoncurrentielles. Ce règlement du 25 juin 1999 avait institué l’Organe de Surveillance de la Concurrence (OSC ci-après) composé du CRC qui était l’organe de décision et de sanction et le Secrétariat exécutif dont le rôle de limitait à recevoir les plaintes, instruire les enquêtes et donner des avis. C’est la raison pour laquelle dans le règlement 04/99, le législateur communautaire donnait au CRC, une place importante dans le contrôle des appels publics à la concurrence et ne réservait au secrétariat exécutif qu’une place résiduelle dans le système de contrôle de la concurrence.

Mais le règlement n° 01/99 du 25 juin 1999 a été modifié par le règlement n°

12/05 du 27 juin 2005. Dans sa nouvelle version, la répartition des rôles a été inversée.

L’organe de décision dans le contrôle des pratiques commerciales anticoncurrentielles et des aides d’Etats est le secrétariat exécutif de la CEMAC (devenue la Commission de la CEMAC)361. L’organe consultatif est le Conseil Régional de la Concurrence362 (CRC).

361 Désormais, la Commission reçoit les plaintes relatives aux ententes, aux abus de position dominantes et aux concentrations, mène l’instruction et les enquêtes sur les infractions se rapportant aux règles communes

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La révision s’est limitée au règlement n° 01/99 du 25 juin 1999. Le règlement n°

04/99 du 18 août 1999 qui contient l’essentiel des dispositions relatives aux marchés publics n’a pas été modifié. Ainsi selon que l’on est dans le domaine des pratiques commerciales anticoncurrentielles ou celui des aides d’Etats et du contrôle des marchés publics, les rôles du CRC et du secrétariat exécutif sont inversés. Et même dans le cadre des pratiques commerciales anticoncurrentielles, le renversement de la répartition des compétences opéré par le règlement 12/2005 ne semble pas intégral dans la mesure où le CRC conserve encore des pouvoirs d’injonction importants en particulier dans le contrôle des ententes et des opérations de concentration.

de concurrence et aux aides d’Etat. A ces pouvoirs de police et d’enquête, s’ajoutent d’importants pouvoirs de décisions. Il lui appartient d’arrêter les décisions relatives aux infractions aux règles de concurrence et aux aides d’Etat.

362 A propos des autorités de régulation de la concurrence et des procédures de contrôle dans la CEMAC et l’UEMOA voir notamment: Marie-Colette KAWME-MOUAFFO, «Etude comparée des autorités CEMAC et UEMOA de la concurrence» Revue de droit uniforme UNIDROIT, vol. 16/4, 2011, pp. 891- 926. René NJEUFACK TEMGWA, «La fonction transactionnelle des organes communautaires de régulation de la concurrence en Afrique (cas de la CEMAC et de l’UEMOA)», Penant, 2007, n° 861, pp. 438-464. Jacques FIPA NGUEPJO, Le rôle des juridictions supranationales de la CEMAC et de l’OHADA dans l’intégration des droits communautaires par les Etats membres, Thèse de doctorat, École doctorale de droit privé, Université Panthéon-Assas, 2011, p. 97 et s. Marie-Colette KAWME-MOUAFFO, Droit de confidentialit et droits de la dfense dans les procdures communautaires de concurrence: Union europenne (U.E.) et Communautés d’Afrique subsaharienne (UEMOA et CEMAC), Thèse de doctorat, Université Montpellier I., 2007, 581 p. Mor BAKHOUM, L’articulation du droit communautaire et des droits nationaux de la concurrence dans l’Union économique et monétaire Ouest africaine (UEMOA), Bruxelles, Bruylant, 2007, 425 p. Mor BAKHOUM, «Répartition et exercice des compétences entre l’Union et les États membres en droit de la concurrence dans l’Union économique et monétaire Ouest-africaine (UEMOA)», RIDE, vol. 193, 2005, pp. 319-354. Mbissane NGOM, Droit et intégration économique dans l'espace UEMOA, op. cit.

Ramata FOFANA-OUEDRAOGA, «Droit de la concurrence UEMOA» Deuxième partie, Revue de droit uniforme africain/Actualité Trimestrielle de droit et de jurisprudence, n°5, 2011, pp. 19-24. Abdoulaye SAKHO, « La législation communautaire de la concurrence et les mécanismes alternatifs de règlement des conflits commerciaux», Revue sénégalaise de droit, pp 37-57. Amadou DIENG, «Les procédures contentieuses dans la législation communautaire de la concurrence de l’UEMOA», in Agence intergouvernementale de la francophonie, Sensibilisation au droit communautaire de l’UEMOA - Actes du séminaire sous régional, Ouagadougou 6-10 octobre 2003, Paris, Editions GIRAF, 2004, pp. 62-78. René NJEUFACK TEMGWA, «Étude de la notion de collaboration dans les procédures en droit de la concurrence:

une lecture du droit africain (CEMAC et UEMOA) sous le prisme du droit européen », Revue de droit international et de droit comparé, vol. 86 / 1, 2009, pp. 73-103. Jean Pierre Pedro DIANGA NGANZI, Le droit du march en zone de la communauté́ économique et monétaire de l’Afrique Centrale (C.E.M.A.C): du droit national du Gabon vers le droit communautaire, Thèse de doctorat, Université Montpellier I. UFR Droit, 2008, tome II, pp. 529-539. Ayawa Améhia TSKADI, «De la compétence exclusive de l’Union en droit de la concurrence dans l’espace UEMOA», Penant,  Revue trimestrielle de droit africain, n° 873, octobre-décembre, pp. 473-510. Abdrahamane Oumar COULIBALY, Le cadre juridique et institutionnel de la concurrence dans l'espace UEMOA, Thèse de doctorat, Droit, Universit de Nice-Sophia Antipolis, 2007, 317 p.

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Le moins qu’on puisse dire c’est que le dispositif actuel relatif à la répartition des compétences en matière de contrôle des marchés publics et des pratiques commerciales anticoncurrentielles est peu lisible.

Toutefois le droit communautaire de la concurrence est en cours de révision et l’avant projet de texte tend à réorganiser la répartition de compétences. En 2008, le traité instituant la CEMAC a été révisé ainsi que la convention régissant l’UEAC. Le secrétariat exécutif a été transformé en Commission. Pour adapter le droit dérivé à la nouvelle organisation institutionnelle de la communauté, le Conseil des ministres de l’UEAC a demandé, en décembre 2008, la révision du dispositif institutionnel de la concurrence. Un avant projet de «règlement unique relatif à la protection de la concurrence» a été élaboré en 2010. Ce texte maintient la Commission au centre du dispositif institutionnel de la concurrence. Il conservera le pouvoir de décision du Secrétariat exécutif. Mais l’enquête et l’instruction seraient à la charge d’une nouvelle entité dénommée «Conseil communautaire de la concurrence». Le contrôle des aides relèvera de la Commission et du Conseil des ministres363. Ce projet de texte ne fait plus référence aux marchés publics.

Cette exclusion pourrait s’expliquer par le fait que la question de l’harmonisation du régime des marchés publics a été inscrite à l’agenda des programmes économiques de la communauté et qu’elle doit déboucher sur un texte expressément consacré à la matière. La réforme des droits nationaux des marchés publics pour les besoins de construction communautaire fait depuis longtemps partie des questions que soulève l’intégration en Afrique centrale. Le programme Régional de Réforme UDEAC, adopté en 1991 et mis en

363 L’article 76 de l’avant projet de règlement dispose que «la Commission a compétence exclusive pour statuer sur la compatibilité avec le marché commun des aides d’Etat définies dans le présent règlement, le cas échéant, après consultation du Conseil communautaire de la concurrence» et l’article 77 «le Conseil des ministres définit sur proposition de la Commission une politique d’encadrement des aides (…)», Guy CHARRIER, Projet de révision du dispositif institutionnel concurrence de la CEMAC, étude réalisée pour le compte de la CEMAC dans le cadre du Programme d’appui à l’intégration régionale en Afrique centrale fiancé par la Commission européenne, Bangui, février 2010, p. 36.

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œuvre à partir du 1er janvier 1994364, évoquait déjà l’idée d’un réaménagement des systèmes nationaux de passation des marchés publics et l’adoption d’un texte servant de base juridique commune aux Etats en la matière365. C’est à partir de ce projet esquissé par l’UDEAC, que le secrétaire exécutif de la CEMAC a inscrit, dans le programme d’action communautaire 2002-2004, le projet d’adoption d’un texte d’harmonisation des législations relatives aux marchés publics366.

Aujourd’hui, la réforme est inscrite dans le programme économique régional (2010-2015)367. L’inscription de la réforme des marchés publics dans ce programme prouve une fois de plus encore, que l’intégration économique régionale ne peut exclure l’harmonisation des systèmes nationaux de gestion de ces contrats. Le programme économique régional définit quatre axes stratégiques, considérés comme étant les bases qui vont permettre le développement des piliers de croissance368. Le premier vise le renforcement de la gouvernance et de la stabilité macroéconomique369 et il inclut la mise en œuvre du programme régional de réforme des marchés publics. Mais pour une réforme dont la nécessité s’était fait ressentir depuis l’époque de l’UDEAC, elle n’a que trop tardé.

364 COMITE DE DIRECTION DE l’UDEAC, Acte n° 8/93-UDEAC-556-CD-SE1 fixant la date de mise en application du Programme Régional des Réformes fiscalo-douanières (PRR), disponible sur le site d’IZF, http://www.izf.net/pages/acte-8-93/3591/ (dernière consultation le 01/12/14).

365 Programme Régional des réformes UDEAC/CEMAC, Introduction, Bangui août 1991, p.14 cité par Edouard GNIPIEBA TONNANG, Droit matriel et intgration sous-rgionale en Afrique centrale:

contribution l’étude des mutations rcentes du march intrieur et du droit de la concurrence CEMAC, op.

cit., p. 258.

366Ibidem, p. 259.

367 CEMAC, Conférence des chefs d’Etat, Acte additionnel n°1/CEMAC/CCE/10 du 17 janvier 2010 portant adoption du programme économique régional et création du fonds émergence CEMAC, texte publié sur le site de la CEMAC, http://www.cemac.int/TextesOfficiels/Actes/ACA01_2010.pdf (consulté le 07/04/14).

Communauté Economique et monétaire de l’Afrique centrale, CEMAC 2025: Vers une économie régionale intégrée et émergente - Programme économique régionale 2009-2015, Vol. 1: Rapport d’étape, Janvier 2009, 30 p, disponible sur http://www.cemac.int/PER_Volume1.pdf (consulté le 07/04/14).

368 Ibidem, p.7.

369 Ibidem, p. 19. Les autres axes stratégiques sont la mise en place effective du marché commun et la facilitation des échanges, la construction d’infrastructures physiques d’intégration, la mise en place d’infrastructures et de services de soutien pour la compétitivité des moteurs de croissance.

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En attendant cette réforme, l'on peut voir qu’avec le droit de la concurrence, le législateur communautaire a mis en place un encadrement de certains aspects importants des contrats de la commande publique.

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171 concurrence applicables aux entreprises et aux aides d’Etat» fait partie des conditions de réalisation du marché commun. La convention relative à l’UEAC prévoit qu’il appartient au conseil des ministres de donner une substance à cette disposition en adoptant les règles garantissant la libre concurrence sur le marché entre les opérateurs publics et privés370. C’est conformément à ces dispositions que l’organe communautaire a adopté deux règlements en date du 25 juin et du 18 août 1999. Il s’agit respectivement des règlements n° 01/99/UEAC-CM-369 portant Règlementation des pratiques commerciales anticoncurrentielles (ci après règlement n° 01/99) et du règlement n° 04/99/UEAC-CM-639 portant Réglementation des Pratiques Étatiques Affectant le Commerce entre les États membres (ci après règlement n° 04/99)371. La même démarche a été entreprise dans le cadre de l’UEMOA sur le fondement des articles 76, 88, 89 et 90 du traité372.

370 Convention régissant l’Union économique de l’Afrique centrale, op. cit., pp. 23-26.

371 Règlement n°1/99/UEAC-CM-639 du 25 juin 1999 modifié par le règlement n°12-05-UEAC-639 U-CM-SE du 27 juin 2005, op. cit. Règlement n° 4/99/UEAC-CM-639 portant Réglementation des pratiques étatiques affectant le commerce entre les États membres», Les bulletins officiels de la CEMAC, publiés sur www.izf.net. Pour des études sur ces textes: Samuel-Jacques PRISSO-ESSAWE «L’émergence d’un droit communautaire africain de la concurrence: «double variation sur une partition européenne»», Revue Internationale de droit comparé, n°2, 2004, pp.329-354. Ahmed SEÏD, « Réglementation des pratiques commerciales anticoncurrentielles affectant le commerce entre les Etats membres de la CEMAC», in Agence intergouvernementale de la francophonie, Sensibilisation au droit communautaire de l’UEMOA - Actes du séminaire sous régional, Ouagadougou 6-10 octobre 2003, Paris, Editions GIRAF, 2004, p. 71-78.

En Afrique centrale, la CEMAC est la première organisation d’intégration à avoir réglementé la concurrence dans un cadre communautaire. Son dispositif vient encadrer un aspect de la vie économique dans les Etats, qui jusque là ne l’était pas ou l’était très peu Voir en ce sens Yves KENFACK, Réglementation communautaire de la concurrence et renforcement du processus d’intégration économique en Afrique Centrale, étude réalisée pour le compte de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement, New York, Genève, Nations Unies, 2000, 41 p.

372Sur le fondement du traité, ont été adoptés trois règlements et deux directives qui constituent le droit dérivé de la concurrence. Il s’agit du règlement n° 02/2002/CM/UEMOA relatif aux pratiques anticoncurrentielles à l’intérieur de l’UEMOA, n° 03/2002/CM/UEMOA portant sur les procédures applicables aux ententes et abus de position dominante et n°04/200/CM/UEMOA sur les aides d’Etat et sur

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