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Rapport entre la structure instantan´ ee de la conscience et sa dynamique

complexe : jeter les bases

2.2 Aspects de l’´ etat instantan´ e de la conscience

2.3.4 Rapport entre la structure instantan´ ee de la conscience et sa dynamique

O`u l’on explicite deux cons´equences d’avoir repr´esent´e la dynamique de la conscience comme continue, c’est-`a-dire, de l’avoir repr´esent´ee de telle fa¸con qu’il y a un rapport ´etroit entre la structure instan- tan´ee de la conscience `a un instant et les structures `a des instants pr´ec´edents et suivants. D’un cˆot´e, certains aspects de la dynamique de la conscience peuvent ˆetre compris aussi bien comme synchro- niques, ayant trait `a une structure instantan´ee `a un instant seul, que comme diachroniques, r´ef´erant `a une succession de structures instantan´ees. De l’autre cˆot´e, certains propri´et´es d’une structure ins- tantan´ee peuvent entraˆıner des effets sur les propri´et´es des structures instantan´ees `a des instants voisins.

Dans un syst`eme dynamique pens´e de mani`ere continue, l’´etat instantan´e importe pour la dynamique, dans la mesure o`u elle pose une contrainte sur les ´etats instantan´es `a des instants imm´ediatement ult´erieurs (et ant´erieurs). Dans le cas de la conscience, c’est-`a-dire que la structure instantan´ee de la conscience importe relative `a la dynamique des structures instantan´ees. Dans la mesure o`u l’on con¸coit la structure instantan´ee ouverte comme r´egion, et le rapport avec d’autres structures ant´erieures ou ult´erieures comme chevauchement, le rapport ´etroit entre l’´etat instantan´e (la structure instantan´ee de la conscience) et sa dynamique consiste effectivement en un rapport entre un aspect de l’int´erieur de la structure instantan´ee de la conscience et des questions qui ne se posent qu’`a l’ext´erieur de la structure instantan´ee de la conscience – quelles structures suivent ou pr´ec`edent celle-ci (ou quelles propri´et´es ont-elles) ?

Ce rapport est d’une double importance ici. Premi`erement, il permet d’all´eger l’expression et de focaliser l’enquˆete, car il permet parfois d’aborder des aspects de la dynamique d’une succession de structures instantan´ees de la conscience – des questions externes – en consid´erant des aspects de certaines structures par- ticuli`eres de cette succession – des questions internes. Il ne s’agit nullement d’un artifice qui s’appuie sur la continuit´e, mais une propri´et´e d’importance cruciale que l’on a tendance `a sous-estimer : puisque l’´etat instantan´e (repr´esent´e cor- rectement) refl`ete des aspects dynamiques et que la dynamique est cons´equence des ´etats instantan´es, il ne fait pas toujours du sens d’insister pour qu’un as- pect soit diachronique (relatif `a la succession) plutˆot que synchronique (relatif `a un ´etat instantan´e particulier). Malgr´e les multiples d´ebats et discussions, il n’y a parfois aucun fait (« fact of the matter »). D’o`u l’on peut aborder

l’aspect tantˆot dans son versant diachronique (comme aspect de la succession) tantˆot dans son versant synchronique (comme aspect d’un ou des ´etat(s) instan- tan´e(s)) sans prendre partie dans ces d´ebats vides. Ceci vaut particuli`erement pour des aspects dynamiques de courte dur´ee (relatifs aux successions courtes), car la continuit´e implique que la mise en rapport des structures instantan´ees imm´ediatement voisines dans le temps.

On tire profit de cette possibilit´e dans les discussions ult´erieures, en abordant parfois des transitions particuli`eres entre structures instantan´ees de la conscience `

a des instants successifs en rep´erant certaines structures instantan´ees qui com- portent (ou, dans la mesure o`u elles sont vagues, peuvent comporter54) les deux

termes impliqu´es dans la transition. C’est-`a-dire, on aborde la transition en consid´erant la (les) structure(s) qui est (sont), pour ainsi dire, au « pivot » de la transition. Dans la mesure o`u les structures ant´erieures et ult´erieures sont continues avec celle-ci, c’est-`a-dire lui chevauche, des propri´et´es de la transition (dynamique) des premi`eres aux derni`eres « se refl`etent » comme aspects (ins- tantan´es) de cette structure instantan´ee. On pourrait aborder ainsi des aspects de la dynamique dans le cadre plus maniable d’une seule structure instantan´ee (`a un instant).

Deuxi`emement, ce rapport ´etroit entre aspects internes et aspects externes `

a la structure instantan´ee de la conscience entraˆıne la question des effets ou des influences ou du moins de la signification des objets, relations ou aspects d’une structure instantan´ee sur ou pour la dynamique. Si la continuit´e de la dynamique implique un rapport entre les aspects de la structure instantan´ee de la conscience `

a un instant et ceux des structures instantan´ees suivantes (et pr´ec´edentes), le fait pour la premi`ere structure de comporter certains objets, relations ou aspects peut exercer des influences voire des contraintes sur les propri´et´es des derni`eres structures, et on pourrait vouloir caract´eriser les diff´erents genres d’effets ou de contraintes impliqu´es par les diff´erents aspects. Par exemple, pour un aspect au premier plan de l’´etat instantan´e de la conscience, c’est-`a-dire un objet (ap- partenant pleinement `a la structure instantan´ee de la conscience), il faut que les structures suivantes comportent cet aspect, qu’il soit au premier plan, ou qu’il s’´evanouisse dans l’arri`ere-plan, tantˆot comme aspect focalis´e mais « au bord » de la conscience, tantˆot comme aspect non focalis´e (« en profondeur »

54Le vague ou le caract`ere ouvert de la structure est important ici : il permet de travailler

dans l’hypoth`ese que les deux termes sont dans la mˆeme structure. Pour ceux qui connaissent un peu la topologie, plus « l’instant temporel » est grossier (comme « intervalle » sur le continu du temps), plus la r´egion ouverte de la structure instantan´ee `a cet « instant » le sera ; d’o`u la possibilit´e de consid´erer dans une mˆeme structure ouverte deux ´el´ements qui pourraient ´eventuellement ˆetre distingu´es avec une ´echelle temporelle plus pr´ecis.

de la conscience ; voir §2.3.1). Que l’on consid`ere, en guise d’illustration de ces possibilit´es, un instant o`u le sujet lit « Holmes ouvrit la porte » – les deux ob- jets Holmes et porte sont au premier plan dans la structure instantan´ee de la conscience `a cet instant – suivi par un instant o`u il lit « Il ´etait en face d’un escalier, qu’il commen¸ca `a monter ». L’objet Holmes est semble-t-il retenu au premier plan dans les structures instantan´ees de la conscience aux instants sui- vants. L’objet porte s’en ´eloigne de plus en plus ; pourtant, il ne disparaˆıt pas de la structure instantan´ee de la conscience au prochain instant, en y demeurant toujours objet, mais, dans la collection ouverte des objets, son appartenance de- vient de plus en plus douteuse55. Or, alors que l’objet porte s’´evanouit comme

objet, elle pourrait demeurer sous forme de relation : par exemple, elle peut jouer un rˆole dans le fait de « connaˆıtre » la position de Holmes (sur l’escalier, `a l’int´erieur d’un bˆatiment), connaissance qui est probablement non focalis´ee, en se manifestant `a travers les propri´et´es des relations (de position entre le Holmes avan¸cant et la s´ecurit´e du dehors)56. Le premier cas est un exemple d’un aspect

au premier plan qui demeure au premier plan, les deuxi`eme cas est un exemple d’un aspect au premier plan qui tombe dans l’arri`ere-plan tout en restant fo- calis´e, et le dernier cas est un exemple d’un aspect au premier plan qui tombe dans l’arri`ere-plan en devenant non focalis´e.

Plus int´eressante que les effets dynamiques des objets (ou des relations) particuliers, est l’importance pour la dynamique des aspects « globaux » de la structure instantan´ee. C’est-`a-dire des aspects de la structure instantan´ee en tant que totalit´e, la « forme » de la structure, si l’on peut dire. Car, s’il y a chevauchement entre une structure instantan´ee particuli`ere et les structures instantan´ees ult´erieures, alors la forme de la structure, ou ses aspects d’en- semble, a un effet sur les objets et les relations qui figurent dans les structures ult´erieures. Par exemple, si la structure instantan´ee de la conscience `a un mo- ment ne comporte peu d’autre qu’un objet particulier, si, pour ainsi dire, la structure est concentr´ee sur cet objet, cela impose une forte contrainte sur les structures instantan´ees qui peuvent suivre. Il n’y a pas, hors cet objet, beau- coup d’autres aspects de cette structure qui peuvent ´etayer un chevauchement, en telle sorte que le sujet continuera (tout probablement) de s’en soucier. Cette importance de la totalit´e de la structure instantan´ee pour la dynamique a plu-

55Cf. la r´etention de Husserl (1928, §11 sq.). Or, contrairement `a l’analyse husserlienne, on

n’admet pas ici de diff´erence de genre entre l’objet pr´esent (la « conscience impressionnelle ») et l’objet pass´e (la « conscience r´etentionelle »). Voir aussi la note 73 de §2.5.1.

56En gros, la situation est pareille pour une relation d’une structure instantan´ee : elle

pourrait rester non focalis´ee, s’´evanouir des structures instantan´ees au fur et `a mesure que le temps passe, ou devenir focalis´ee (par exemple, lorsqu’elle est « remarqu´ee » par le sujet).

sieurs cons´equences int´eressantes. D’une part, elle implique une importance de l’arri`ere-plan de la structure, lequel, en raison de son caract`ere fugace (d`es qu’on souligne un aspect de l’arri`ere-plan, il n’est plus `a l’arri`ere-plan) ne pourrait ˆetre saisi ou repr´esent´e de mani`ere f´econde que dans la totalit´e de la structure. Par exemple, la concentration de la structure sur l’objet semble correspondre `a ce qu’on qualifie d’une ´etroitesse de l’arri`ere-plan de cette structure. D’autre part, puisque, comme on le verra dans §2.5.2, les aspects globaux de la structure instantan´ee de la conscience se rapportent aux sentiments du sujet, les effets dynamiques de tels aspects jouent un rˆole important dans la compr´ehension de ces sentiments.