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Attitudes ` a l’´ egard de la fiction

1.2 Approches g´ en´ erales de la fiction

1.2.2 Le jeu et la fiction

O`u l’on s’appuie sur le rapprochement bien connu entre jeu et fiction pour ´eclaircir quelques aspects de la relation entre la fiction et la r´ealit´e `a la lumi`ere des consid´erations relatives au rapport entre le jeu et la r´ealit´e. Ce rapport comporte deux aspects : d’un cˆot´e, le jeu s’oppose `a une partie de la r´ealit´e, dont les contraintes et les faits ne sont plus valables dans le jeu, de l’autre cˆot´e, il suppose ou se fonde sur une autre partie de la r´ealit´e, dont les faits et les contraintes sont admises, fˆut-il implicitement, dans le jeu. Quant `a la fiction, il s’av`ere que les deux premi`eres questions de §1.1.1 ont affaire `a l’opposition avec la partie de la r´ealit´e qui est « annul´ee », alors que les deux derni`eres concernent le rapport avec le fond r´eel.

Le rapprochement entre jeu et fiction est tellement commun qu’il n’est pas besoin de le justifier, d’autant plus qu’il est invoqu´e par les partisans des deux traditions d´ecrites dans le paragraphe pr´ec´edent. D’un cˆot´e, Walton, comme on l’a d´ej`a vu, con¸coit la fiction en termes des jeux de faire comme si. De l’autre cˆot´e, Iser th´ematise le concept de « jeu » dans le texte33. D’ailleurs, la structure

du jeu, et notamment de son rapport `a la r´ealit´e, apporte un ´eclaircissement par- ticulier `a la consid´eration relative `a la fiction. On reconnaˆıt deux caract´eristiques de ce rapport — d’une part, le jeu est s´epar´e de la r´ealit´e — d’autre part, la libert´e du joueur est contrainte non seulement par les r`egles internes du jeu mais

33Selon lui, « ce n’est pas seulement que le fictif et l’imaginaire constitue le jeu : ils sont en

´egalement par des contraintes impos´ees par la r´ealit´e. En un mot, le jeu s’oppose `

a une partie de la r´ealit´e, et il suppose ou se fonde sur une autre partie de la r´ealit´e, qui y est toujours « en vigueur », pour ainsi dire. Dans cette optique, le rapport entre la fiction et la r´ealit´e, et notamment les quatre questions pos´ees dans §1.1.1 , se pr´esente sous un nouveau jour : les questions A. et B., relatives aux cognitions, comportements et affects relatifs `a la fiction et `a leur sp´ecificit´e par rapport aux cognitions, comportements et affects ordinaires, ont trait au rapport entre la fiction et la partie de la r´ealit´e qui l’oppose, alors que les ques- tions C. et D., relatives aux chevauchements et transferts entre fiction et r´ealit´e, ont trait au rapport entre la fiction et la partie de la r´ealit´e qui l’´etaie. Cette perspective permettra, dans le paragraphe suivant, de se figurer une strat´egie « non mim´etique » pour aborder la fiction.

Souvent dans la litt´erature, on reconnaˆıt au jeu les trois caract´eristiques sui- vantes : un jeu est s´epar´e de la vie courante – il « s’accomplit en un temps et dans un espace express´ement circonscrits » ; un jeu est r´egl´e – il « se d´eroule avec ordre selon des r`egles donn´ees »34; le joueur « est libre dans les limites des r`egles »35. En approfondissant un peu la relation entre le r`eglement du jeu et la

« libert´e » du joueur, on en vient `a apercevoir une dimension du rapport entre le jeu et la r´ealit´e ; en consid´erant la relation entre le r`eglement et le caract`ere s´epar´e du jeu, on arrive `a en comprendre l’autre dimension.

Tout d’abord, pour ce qui s’agit du rapport entre le r`eglement et la libert´e du joueur, il est question de la libert´e en question relative `a la mani`ere de jouer le jeu, celle qui reste au joueur une fois qu’il a accept´e de jouer selon les r`egles du jeu, et non celle relative `a sa participation au jeu, `a son acceptation mˆeme des r`egles. En th´eorie, cette libert´e n’est d´elimit´ee que par les r`egles du jeu : hors ces r`egles, le joueur peut faire ce qu’il veut. Or, en pratique, elle est born´ee par des contraintes suppl´ementaires provenant de la r´ealit´e : par exemple, les coups que les joueurs sont libres de faire ne sont pas seulement fix´es par les r`egles du jeu (les r`egles du football, par exemple) mais aussi par des contraintes r´eelles sur les jeux (les faits « r´eels » que les joueurs ne peuvent pas survoler le terrain, les- quels ne sont pas sp´ecifi´es parmi les r`egles). Alors qu’il se pourrait que certaines r`egles du jeu entrent en conflit avec et ainsi « annulent » certaines « r`egles » de la r´ealit´e ou de la vie courante, il y a toujours des contraintes r´eelles, qui sont en l’occurrence des faits r´eels36, qui interviennent pour limiter la libert´e

34Huizinga (1951, p35). Voir ´egalement Caillois (1967, p43). 35Caillois, op cit., p39.

36Le rapport entre contrainte et fait est complexe mais bien connu ; d’ailleurs, comme l’a

« absolue » laiss´ee au joueur, en th´eorie, par les r`egles du jeu. Ces contraintes « r´eelles » qui s’ajoutent aux r`egles du jeu pour en donner le r`eglement « effec- tif » sont, dans un certains sens, suppos´ees par le jeu : notamment, les r`egles du jeu, en pr´ecisant ce qui est interdit et autoris´e dans le jeu, impliquent, quoique de mani`ere incompl`ete et approximative, quelles contraintes de la vie courante sont `a ignorer, et lesquelles sont toujours en vigueur.

Cette situation d´ecoule des propri´et´es fondamentales du rapport entre la libert´e et le r`eglement : l’opposition entre elles – on est libre de faire ce que les r`egles n’interdisent pas, les r`egles interdisent ce qu’on n’est pas libre de faire – ne peut ˆetre pens´ee que dans un espace commun, et abstrait, o`u elle a lieu. Or, cet espace mˆeme a ses propri´et´es `a lui ; par cons´equent il exige lui-mˆeme des contraintes sur ce qu’il contient. Ces contraintes doivent ˆetre suppos´ees lorsqu’on inf`ere les libert´es du joueur `a partir des r`egles du jeu, elles sont des contraintes communes aux r`egles et aux libert´es. Dans le cas des jeux, l’espace o`u s’opposent les libert´es du joueur et les r`egles du jeu est un espace r´eel, constitu´e de caract´eristiques de la r´ealit´e, et donc les contraintes qu’il exerce sont des contraintes r´eelles. Ainsi, on pourrait dire que le jeu s’´erige sur un fond de contraintes r´eelles. Autrement dit, le jeu suppose un fond des contraintes qu’il partage avec la r´ealit´e.

Par ailleurs, le rapport entre le r`eglement du jeu et sa s´eparation de la r´ealit´e est un rapport d’interd´ependance. D’un cˆot´e, ce sont des r`egles qui d´efinissent « un espace du jeu »37, un « monde temporaire au cœur du monde habituel »38, par affirmation ou par implication : pour reprendre les cat´egories employ´ees par Huizinga et Caillois, le lieu consacr´e au jeu est inscrit dans les r`egles qui d´eclarent ce qui est « hors jeu » ou non, le temps o`u se d´eroule le jeu est d´etermin´e par les r`egles qui d´ecrivent ce qui compte pour le d´ebut et pour la fin. Or, l’espace du jeu n’est pas compl`etement caract´eris´e par ses dimensions spatio-temporelles ; au contraire, les r`egles circonscrivent tout un espace abstrait du jeu, une r´egion abstraite. Les r`egles des ´echecs, en affirmant qu’il y a un certain nombre d’entit´es en jeu, chacune avec certaines propri´et´es, d´ecrivent un « monde abstrait », une r´egion o`u se meuvent, o`u op`erent, o`u « habitent » ces entit´es, une r´egion dont la limitation `a un ´echiquier pr´ecis et un temps pr´ecis n’est qu’une projection dans le milieu spatio-temporel, voire une projection contingente. Ou encore, les jeux des enfants se d´eroulent dans les mondes de leurs fantaisies mais se r´ealisent dans un lieu et en un temps r´eels dont la relation avec le monde abstrait est

sa v´erit´e). Voir par exemple Frege (1893, p xv).

37Caillois, op cit., p37. 38Huizinga, op cit., p30.

en grande partie arbitraire. Et la lecture de la fiction nous transporte dans un « univers fictionnel » qu’on reconnaˆıt comme « un espace de jeu »39o`u tout se passe ; dans ce cas, « l’espace » se projette tr`es librement dans le lieu et le temps – elle n’exige qu’un endroit quelconque et des moments quelconques pour que le jeu s’instaure.

De l’autre cˆot´e, c’est la s´eparation entre jeu et monde r´eel qui permet aux r`egles de s’appliquer : dans la r´ealit´e ou dans « la vie courante », ces r`egles sont d´elaiss´ees au profit des contraintes et des faits r´eels. « Dans les limites du terrain du jeu, dit Huizinga40, r`egne un ordre sp´ecifique et absolu » ; hors ces

limites, dans le « monde r´eel », les r`egles du jeu perdent leur sens et leur autorit´e. Les r`egles des ´echecs ou du football, l’identification avec des gendarmes et des voleurs, les ´ev´enements de l’univers fictionnel ne tiennent pas sans les bornes abstraites qui empˆechent la r´ealit´e d’entrer : bornes qui excluent le fait que ce ne soient que des figurines sur une surface, le fait que botter un ballon dans un filet n’ait pas de sens, le fait qu’il s’agisse des enfants et non pas de gendarmes ou de voleurs, le fait que ce qui est d´ecrit ne se soit pas vraiment pass´e. C’est pourquoi le pire ennemi du jeu n’est pas le faux joueur mais le « briseur du jeu » car c’est lui qui franchit les fronti`eres abstraites du jeu est faire entrer la r´ealit´e ; c’est lui, comme dit Huizinga41, qui « brise son monde magique ». Le

jeu s’oppose donc `a la r´ealit´e, dans la mesure o`u lui est n´ecessairement s´epar´e. Afin de pouvoir mettre en rapport aussi bien l’opposition du jeu par rapport `

a la r´ealit´e (des faits et des contraintes r´eelles sont « annul´es » par les r`egles du jeu) que son appui sur elle (des contraintes r´eelles toujours effectives dans le jeu), il faut distinguer deux sens d’espace. Pour ce qui concerne son opposition `

a la r´ealit´e, « l’espace du jeu » est un milieu d´esign´e, une r´egion circonscrite par des r`egles, une place distincte de celle de la r´ealit´e ; en revanche, les contraintes r´eelles qui s’imposent dans le jeu sont con¸cues comme des caract´eristiques d’un espace sous-jacent au jeu, qui le sert de fond, o`u espace est entendu ici au sens d’´etendue ind´efinie. Or ce fond r´eel est commun au jeu et `a la partie de la r´ealit´e qui s’y oppose ; autrement dit, la partie de la r´ealit´e `a laquelle s’oppose le jeu est une r´egion dans l’espace qui sert de fond pour le jeu. En cons´equence, l’opposition entre jeu et r´ealit´e se pense naturellement comme ayant lieu dans l’espace constitu´e par les contraintes r´eelles qui sont impliqu´ees dans le jeu. Dans cette optique, les r`egles du jeu d´elimitent une r´egion dans un espace abstrait ; le r´eel est la structure mˆeme de cet espace, mais elle est ´egalement une r´egion

39Par exemple, Schaeffer (1999, p176). 40Huizinga, op cit., p30.

dans cet espace qui est distincte de la r´egion du jeu. Les contraintes et les faits r´eels qui sont suppos´es par le jeu sont celles qui d´eterminent l’espace abstrait dans lequel le jeu se d´efinit ; les faits et les contraintes r´eels qui sont annul´es dans le jeu sont celles qui d´efinissent la r´egion du r´eel dans cet espace, r´egion `

a laquelle la r´egion du jeu s’oppose. Dans les ´echecs, les coups possibles ont un sens seulement dans un espace abstrait o`u sont respect´ees certaines lois logiques et topologiques – le fond commun `a la r´ealit´e et au jeu – ; or dans cet espace les possibilit´es des coups d´efinissent une r´egion restreinte qui se distingue de la r´egion r´eelle par la pauvret´e et la rigidit´e des coups possibles – dans la r´ealit´e ces r`egles ne s’appliquent pas et c’est ainsi que le jeu se s´epare de la r´ealit´e. Puisque ce sont les r`egles du jeu qui impliquent, de mani`ere approximative et incompl`ete, voire mˆeme instable et variable selon l’interpr´etation du jeu, quelle partie de la r´ealit´e est `a supposer dans le jeu et laquelle est `a opposer au jeu, ce sont des r`egles du jeu qui exigent cette topologie. On pourrait donc dire que les r`egles esquissent une sorte de « nivellation » locale autour d’elles : les contraintes de la r´ealit´e qui se trouvent sur le mˆeme niveau que les r`egles du jeu entrent en opposition avec le jeu et sont annul´ees dans le jeu , alors que celles qui se trouvent sur un niveau plus basique sont maintenues voire suppos´ees dans le jeu.

En conjuguant cette perspective sur les jeux avec le rapprochement entre fiction et jeu, on arrive `a un nouvel aper¸cu sur les structures relatives `a la fiction qui sont identifi´ees par les questions de §1.1 et accentu´ees par divers philosophes. L’univers fictionnel qui se distingue du monde r´eel se rapproche d’un « espace de jeu » ; on comprend maintenant que ce sont les « r`egles de la fiction » qui `a la fois soutiennent cet espace et d´ependent de lui. Comme l’a anticip´e Caillois et l’a affirm´e Walton, la r`egle de la fiction est celle du comme si42 : pour « jouer le jeu », on doit « imaginer » les ´enonc´es du texte ou « faire

comme si » ils ´etaient vrais, et r´eciproquement, le fait d’imaginer ainsi implique la cr´eation d’une r´egion abstraite (« espace de jeu », « univers fictionnel »), qui s’oppose au « monde r´eel », o`u se d´eroule le faire comme si. La question A. de §1.1.1 a trait `a ces aspects.

En outre, puisque l’opposition entre l’univers fictionnel et le monde r´eel n’a lieu que dans un espace d´ej`a r´eel, ce qui a ´et´e appel´e le fond r´eel du jeu, les « transferts » entre fiction et r´ealit´e auxquels ont trait les questions C. et D. sont reconnus avoir affaire au fond commun `a la fiction et au r´eel.

42Caillois, op cit., p40 : « le sentiment de comme si remplace la r`egle et remplit exactement la

mˆeme fonction » ; Walton (1990, p40) : « Le fait pour un ´enonc´e d’ˆetre fictionnel (fictionality) [. . .] consiste dans le fait qu’une r`egle du jeu prescrit que l’on l’imagine ».

D’un cˆot´e, les entr´ees de la r´ealit´e dans la fiction rep´er´ees par la question C. trouvent un ´equivalent dans le jeu : dans le jeu d’´echecs, il faut s’appuyer sur certaines propri´et´es topologiques et logiques de base ; dans les jeux d’enfants, la connaissance des autres joueurs et de leurs propri´et´es (qui est « rapide » ou non) r´eelles peuvent intervenir. Ces aspects du r´eel `a qui il est permis d’entrer dans le jeu sont les ´el´ements du « fond r´eel » commun au jeu et aux aspects de la r´ealit´e auxquels il s’oppose.

De l’autre cˆot´e, les effets et les influences de la fiction sur la r´ealit´e aux- quels r´ef`ere la question D., trouvent eux aussi un analogue dans les jeux. A proprement parler, les notions d’´echec et mat, de marquer un but, d’arrˆeter un autre enfant n’ont pas de sens hors les jeux respectifs ; n´eanmoins on en parle en dehors des jeux, de mˆeme qu’on parle des personnages fictionnels hors de l’immersion fictionnelle. La th`ese de Huizinga – que les notions telles que la vertu et l’honneur se d´efinissent, s’attribuent et proviennent en grande partie des jeux43 – constitue un exemple plus int´eressant. Ces notions-ci ne sont pas

seulement attribu´ees et consid´er´ees dans le jeu ; au contraire, leur importance dans la r´ealit´e constitue un exemple des « transferts » du jeu dans la r´ealit´e44.

On entend retentir ici les th`eses de Goodman45 relatives `a l’applicabilit´e r´eelle

de pr´edicats saisis d’abord dans la fiction, ou de Ricoeur46, pour ne prendre qu’un seul exemple, sur la teneur morale de la fiction, et de l’importance de cette caract´eristique. Il s’agit encore des rapports entre le jeu et son fond r´eel : dans le jeu (et donc dans la fiction) peuvent apparaˆıtre ou ˆetre « soulign´ees » des propri´et´es de l’espace abstrait sous-jacent au jeu (par exemple, la propri´et´e de pouvoir accueillir les ´el´ements du jeu, telles les notions de l’´echec et mat, du but, de l’arrestation, des personnages fictionnels, munis de certaines propri´et´es, telles que la vertu et l’honneur). Or, puisque cet espace est commun au jeu et au r´eel, puisqu’il est un espace r´eel, une dimension du r´eel, les propri´et´es qui sont « d´ecouvertes » dans le jeu sont des « propri´et´es r´eelles », de sorte qu’elles demeurent mˆeme apr`es la disparition du jeu. Le transfert du jeu `a la r´ealit´e se comprend comme le rep´erage dans le jeu des faits relatifs `a l’espace sous-jacent r´eel : inversement, la question de ces transferts est reli´ee `a la question du fond commun, et aux modalit´es de sa d´etermination (incompl`ete) par les r`egles du

43Huizinga, op cit., par exemple p112 : « Vertu, honneur, noblesse et gloire se trouvent ainsi

d`es le d´ebut dans le cadre de la comp´etition, c’est-`a-dire du jeu. »

44Il ne s’agit pas ici de souscrire `a la th`ese d’Huizinga, mais seulement de l’employer comme

exemple.

45Goodman, op cit., §VI.5.

46Ricoeur, op cit., p113-117. Ce rapprochement entre la fiction et le moral, apparent´e au

rapprochement entre l’art et le moral, connaˆıt une longue histoire, remontant au moins jusqu’`a Hegel, voire Platon.

jeu.

La conception du jeu d´evelopp´ee ci-dessus permet donc de comprendre l’enti`eret´e du rapport entre fiction et r´ealit´e – l’opposition entre fiction et r´ealit´e sur fond d’un espace qui est lui-mˆeme r´eel – aussi bien que les questions pos´ees `a son ´egard. Pour dire vite, les questions A. et B. ont affaire `a l’opposition, alors que les questions C. et D. ont affaire au rapport entre fiction et son fond r´eel. Cette structure est enti`erement g´en´erale, s’appliquant de fait dans un grand nombre de cas ou de « domaines » diff´erents, ayant trait aussi bien aux conceptions sociales impliqu´ees dans la fiction qu’`a la notion de v´erit´e que lui est associ´ee, aussi bien aux « entit´es » de la fiction qu’aux activit´es, du lecteur ainsi que de l’auteur, relatives `a la fiction. Pour le propos de ce travail, il importe seulement que, comme on le montrera dans la suite, cette structure s’applique `a la psychologie du lecteur.

Non seulement ce d´etour par les jeux aboutit-il `a une perspective diff´erente du probl`eme entier, `a savoir celle du rapport entre la fiction et la r´ealit´e, mais de plus, il permet de bien apercevoir une autre strat´egie pour aborder la question g´en´erale de ce rapport (dans la psychologie du lecteur). On se charge, dans le paragraphe suivant, d’expliciter maintenant l’id´ee de cette strat´egie.