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Thies (1995) signale que « de nombreuses espèces des savanes … sont caractérisées par une très bonne aptitude à rejeter ou à drageonner…Le développement des rejets et drageons peut être beaucoup plus rapide que celui des tiges qui proviennent d’un semis…Un inventaire doit informer sur le nombre et la répartition des souches et des sujets drageonnants ». En Afrique de l’Ouest, les écosystèmes à Daniellia oliveri (Bellefontaine et al. 2000 ; Houehouna et al. 2009, 2010), Detarium microcarpum (Bationo et al. 2001) ou à Isoberlinia doka (Dourma et al. 2003, 2006) semblent dans une large mesure dus au Dge. « Si l’on se base sur la littérature africaine existante en 1997, plus d’une centaine de ligneux rejettent de souche et parmi eux, 56 % eux auraient également la capacité d’émettre des Dr en zone soudano-sahélienne » (Bellefontaine 1997-a).

Figure n° 90. Dessins de profil et vu du ciel d’un groupe de drageons de Detarium microcarpum au Burkina Faso (Dessin de Bationo 2002).

147 Dans le tableau présenté au chapitre 8, récapitulant la littérature scientifique et technique internationale à notre disposition et consultée jusqu’au début 2016, quelque 1700 espèces de ligneux drageonnent, dont environ 700 en Afrique. En Afrique de l’Ouest, les jeunes forestiers semblent plus sensibilisés que leurs collègues orientaux à la présence dans les espaces forestiers de Dr (et de RB, RC, Rh, St), ce qui est confirmé dans la bibliographie internationale (chapitre 9).

En Afrique de l’Est, Strang (1966) observe des Dr sur Brachystegia spiciformis et Julbernardia globiflora et pratiquement aucun semis, malgré qu’en octobre et novembre, ils émettent une profusion de graines.

Dans un dispositif à cinq répétitions avec des parcelles de 0,24 ha, en Zambie sur les Monts Makulu, Rees (1974) dénombre respectivement 1 088, 851, 742, 970, et 702 Dr de Julbernardia globifera, soit en moyenne 3 628 Dr par ha, représentant 62,1 % du total de la régénération locale. Celander (1983) admet qu’une partie très importante de la régénération des miombos, et particulièrement des Brachystegia et des Julbernardia, est dûe aux Dr et RS (« coppice shoots ») (Encadré n° 6). Les racines de Baikiaea plurijuga sont considérées comme un réservoir résilient de Dr (van Gils 1988 ; SARCDC 1993).

En Tanzanie, la régénération de Milicia excelsa, Ocotea usambarensis, Brachylaena hutchinsii, Dalbergia melanoxylon est obtenue par Dr (Kimariyo 1990). Dans les miombos, Desanker et al. (1997) estiment que les arbres sont difficiles à éradiquer, car la plupart des ligneux rejettent vigoureusement par RS et par Dr.

Plusieurs espèces (Ochna pulchra, Brachystegia boehmii, Dichrostachys cinerea, Acacia erioloba, Baikiaea plurijuga, etc.) se régénèrent par MV (Coates-Palgrave & Tiffin 1997) ; de plus, complication supplémentaire, certaines espèces développent des TL, suffrutex et caudex (chapitre 3.8) au fur et à mesure que les conditions écologiques se détériorent (aridité accrue, périodes de froid intense, inondations temporaires par exemple pour certains massifs suffrutescents). Coates-Palgrave (1998) admet, qu’en Afrique de l’Est, cette conception de la régénération par Dr et MT est loin d’être universellement acceptée (Coates-Palgrave 1998 ; Bellefontaine et al. 2003-a, 2003-b) et est convaincue que dans les formations naturelles zimbabwéennes, le nombre de ligneux provenant de semis naturels est très réduit.

En Afrique de l’Est, Timberlake et al. (2010) comparent deux parcelles, l’une dans un miombo de Zambie un an après une coupe rase et l’autre dans les formations soudaniennes du Burkina Faso deux ans après une coupe à blanc. Le miombo présente 56,4 % de semis (14 575 semis par ha), 38,1 % de « seedling sprouts » (= 9 850 rejets de semis par ha : ce sont des semis détruits par les animaux et qui rejettent – Encadré n° 6), 5,5 % de RS, pas de Dr, ni de RB (« water sprouts »), alors que les proportions sont très différentes au Burkina Faso : 3,5 % de semis (1 154 individus par ha), 84,5 % de « seedling sprouts » (28 269 par ha), 6 % de RS (2 000 par ha), 3,9 % de Dr et 2,2 % de RB.

En Ouganda, plusieurs livres, articles et communications ont permis de mieux connaître les aptitudes au Dge et à la MVfc de plus d’une quarantaine de ligneux (Meunier 2005, 2006, 2007, 2008 ; Meunier et al. 2006-b, 2006-c, 2007, 2008-a ; Morin et al. 2006). Elles ont été résumées dans les publications de Meunier et al. 2006-a, 2008-b, 2010 et de Morin et al. 2010).

148 Dans l’île de Mayotte, Litsea glutinosa, introduit dans la deuxième moitié du XIXème siècle, doit son caractère envahissant notamment à son grand potentiel d’émission de Dr. Pour les peuplements de l’île, Jacq (2001) retient en moyenne un taux minimal de Dge de 42 %.

Figure n° 91. En Polynésie, après avoir déterré la racine superficielle, on voit de jeunes drageons de Litsea glutinosa (Photo F. Jacq).

En Inde, Troup (1921) signale que plus de 120 espèces drageonnent, citées et reprises dans un premier tableau par Bellefontaine (2005-a). En Inde Centrale, dans la forêt de Govindgarh, Awasthi (1986) observe un Dge relativement important chez Diospyros melanoxylon et suggère son utilisation dans les jachères et les zones considérées comme marginales pour couvrir le sol.

Dans le continent nord-américain, de vastes forêts mixtes à base de conifères et de peupliers (Populus tremuloides) sont assez régulièrement dévastées par des feux. Dès lors, les peupliers colonisent l’écosystème et envahissent tout l’espace (Schier 1973-a ; Jones & Trujillo 1975 ; Bartos & Mueggler 1982 ; Corns & Maynard 1998 ; etc.) grâce à la MV, par RS et Dr surtout. Ainsi par exemple, Hinds & Shepperd (1987) rapportent la production de milliers de Dr de P. tremuloides par acre après une mise à blanc dans l’Ouest des Etats Unis. Ces perturbations détruisent les arbres parents, ce qui induit le processus de Dge par contrôle hormonal (Steneker 1974 ; Navratil 1991). Au Canada, Lavertu et al. (1994) affirment que plusieurs études relatives aux coupes à blanc et aux feux contrôlés ont montré que le Dge de P. tremuloides est déclenché par ces perturbations.

Après ce très rapide tour d’horizon mondial, nous essaierons de condenser dans ce chapitre,

la plupart des facteurs influençant le Dge qui sont cités dans de très nombreux articles traitant

principalement des régions boréales, tempérées et parfois – plus récemment – méditerranéennes et tropicales. Suite logique à la synthèse des principales caractéristiques du Dge, l’induction artificielle du drageonnage (I°D - chapitre 5.8) et ses avantages seront alors présentés comme conclusion à ce chapitre.

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