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3.8 Autres comportements : stolon, rhizome, tubercule ligneux, suffrutex, caudex, apomixie

3.8.4 Apomixie

La MV peut adopter d'autres voies. L’apomixie donne naissance à une « graine » sans qu’il y

ait eu la moindre fécondation. Les graines « classiques » correspondent à un apport génétique d’une

mère et d’un père. L’apomixie est une forme de « reproduction » particulière dans laquelle la formation des fruits et des graines dans le gamétophyte femelle (c’est-à-dire le tissu où se différencie le gamète femelle ou oosphère) se fait par développement parthénogénétique d’un embryon à partir d’une cellule somatique diploïde (cellule du nucelle ou du tégument interne) de l’ovule (aposporie),

mais sans méiose ou à la suite d’une méiose escamotée (Marouf 2000). « Le gamète femelle, comme

l’ensemble du sac embryonnaire, est formé par mitoses successives de la cellule mère des mégaspores et reste ainsi diploïde. La formation d’un embryon, sans qu’il y ait eu fusion de gamètes et brassage génétique…conduit finalement à la production d’un individu génétiquement identique à la plante mère » (Université de Bourgogne, s.d.). Plus simplement, c’est la formation de graines avec des embryons parfaitement constitués, mais uniquement avec des tissus maternels (Blanc 2003). Agamospermie et apomixie sont synonymes (Finkeldey & Hattemer 2007) pour la plupart des chercheurs, mais Raynal-Roques (1994) préfère utiliser l’agamospermie, qui correspond à la production de graines susceptibles de germer, mais qui ne résultent pas d’une fusion de gamètes ; il n’y a généralement pas de méiose, pas de disjonction des chromosomes, pas de différenciation de gamètes. Les graines se forment sans intervention d’aucun phénomène sexuel. L’agamospermie est une forme de MV (Raynal-Roques 1994). Cassagnaud & Facon (1999) classent logiquement l’apomixie parmi les phénomènes de MV et considèrent qu’elle peut être assimilée à une dégradation de la sexualité. En France, Prat & Daniel (1993) notent que « chez les Sorbus, les espèces polyploïdes se reproduisent par apomixie, des cellules non réduites du nucelle forment un sac embryonnaire à côté de celui qui provient de la mégaspore et qui dégénère. Il s'agit d'une reproduction apomictique par aposporie, l'embryon est alors génétiquement identique à l'arbre-mère »… « Certains hybrides naturels ne fournissent que très rarement des graines, qui de plus ne germent pas. En France, Sorbus aria et S. torminalis s'hybrident ; leur descendance Sorbus x confus est parfaitement stérile, mais son aptitude au drageonnage est plus forte (Guinier 1951, in Prat & Daniel 1993). Par ailleurs, l'hybridation peut opter pour d'autres voies asexuées. L'hybridation interspécifique et intergénérique dans le genre Sorbus conduit à de nouvelles espèces. Mais la

125 reproduction de nombreux hybrides ne passe que par voie végétative, l'apomixie par aposporie, qui conduit à des graines dont les embryons sont génétiquement identiques à la plante-mère. Ainsi pour S. latifolia, la reproduction par graines de cette espèce ne semble pas possible par voie sexuée compte tenu de sa structure génomique (Prat & Daniel 1993)».

Selon Finkeldey & Hattemer (2007), l’aposporie est une méthode pour propager des clones grâce à des « graines » et elle est particulièrement avantageuse lorsque le transport de pollen d’autres arbres voisins est impossible ou très limité à cause de la rareté ou de l’éloignement des semenciers. Ces auteurs mentionnent que Juglans regia produit normalement des graines, mais en cas d’absence de pollinisation, il peut aussi opter pour l’apomixie et que les plants triploïdes de Casuarina nana se régénèrent par apomixie. Beaucoup d’espèces apomictiques seraient polyploïdes, dont par exemple Pachira oleaginea (Baker 1960) que l’on trouve en Afrique de l’Ouest. Plusieurs Diptérocarpacées seraient des espèces apomictiques facultatives : Stemonoporus oblongifolius, Hopea odorata (triploïde ?) et Shorea ovalis spp. sericea (Finkeldey & Hattemer 2007).

Dans le tableau ci-dessous sont citées d’autres espèces ligneuses qui peuvent se régénérer par apomixie ; pour de plus amples informations, il convient de se référer à ces espèces reprises dans le chapitre 7, dans lequel les auteurs des publications sont mentionnés, puis dans le chapitre 8 (bibliographie) où les références complètes sont précisées.

Clidemia hirta Commiphora wightii Erythroxylum pulsillum

Garcinia mangostana Haloxylon aphyllum Parthemium argentatum

Rubus alceifolius Sorbus aria Sorbus x confusa

Sorbus x thuringiaca Sygyzium paniculatum

L’introduction de l’apomixie chez le maïs, le blé ou d’autres plantes mondialement cultivées pourrait entrainer une nouvelle révolution verte, car il semble probable que dans un avenir proche les scientifiques parviendront à amener une planté sexuée à produire des « graines clonales ». Celles-ci auraient ainsi toutes les caractéristiques de leur mère (Autran et al. 2011).

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À l'évidence, tous ces termes (ou expressions), souvent peu précis, cités dans ce chapitre 3.8 révèlent la difficulté de décrire les divers phénomènes observés tout au long d’un continuum que la nature nous propose. La terminologie est souvent confuse. Il existe des termes courants qui

semblent impropres à utiliser à des fins botaniques, par exemple le plus commun : une souche. Et dès lors qu’est-ce qu’un RS ? Les RS, RB, RS, TL sont-ils issus d’une structure caulinaire ou racinaire ? Il semble que les diverses formes de MV devraient être caractérisées par leur origine organogénétique et ontogénique.

Il serait utile de réunir un groupe de travail international pour réfléchir à de nouvelles

définitions et, si c’est possible, proposer un guide simple permettant d'établir avec des arguments morphologiques et macro-anatomiques comment identifier l'origine morphologique d'une tige qui émerge du sol (avec un lien possible à la basitonie ?) (Raju et al. 1966 ; Lacey & Johnston 1990 ;

Klimes et al. 1997 ; Bond & Midgley 2001 ; Cornelissen et al. 2003 ; Klimesova & Martinkova 2004 ; Kleyer et al. 2008 ; Klimesova & Klimes 2008 ; Klimesova & de Bello 2009 ; Clarke et al. 2005, 2010, 2013 ; Cornelissen et al. 2014 ; Charles-Dominique 2015).

126 3.8.5 Bibliographie

Les références bibliographiques relatives aux quatre sous-chapitres 2.8.1 à 2.8.4 figurent dans la bibliographie générale (chapitre 8) afin d’éviter des redondances.

Figure n° 64. Difficile d’interpréter s’il s’agit de greffes naturelles, de MT, Rh, Dr sur ce Cecropia peltata sur l’île de Raiatea (côte est de la Polynésie) sous des précipitations de l’ordre de 3 600 mm (Photo F. Jacq).

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4 REPRODUCTION ET AMELIORATIONS A APPORTER EN PEPINIERES