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Le rôle des organismes de bassins

Auparavant, la coopération africaine sur les questions de l’eau s’est faite par le biais d’or-ganismes intergouvernementaux de bassins hydrographiques et lacustres. Il y a eu aussi des accords bilatéraux entre pays, tels que l’Accord du bassin du Fleuve Sénégal (1963), l’Accord du bassin du fleuve Niger (1963), l’Accord du bassin du Lac Tchad (1964), l’accord du bassin du Fleuve Gambie (1965), l’Union du fleuve Mano (1974), l’accord du bassin du Kagera (1977) et l’accord du bassin de l’Okavango (années 1980).

Actuellement, pour d’autres bassins hydrographiques et lacustres transfrontaliers, tels que le Nil, le Congo, le Zambèze et le lac Victoria, des accords de ce type sont en cours d’instauration visant l’exploitation intégrée des ressources naturelles à l’échelle du bas-sin dans son ensemble. Ces basbas-sins ont un potentiel considérable pour la production hydroélectrique, l’irrigation à grande et moyenne échelles dans plusieurs pays à la fois, la navigation intérieure et de nombreux autres usages communs.

Certains organismes de bassin exploitent l’eau pour l’irrigation, la production d’énergie, l’approvisionnement en eau des communautés et pour l’exploitation minière. Certains coopèrent avec d’autres acteurs pour gérer des ports et améliorer la navigation en pre-nant en considération de tels besoins au stade de la conception des barrages. Par exemple, l’Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal a mis en place un certain nombre de projets tels que la régulation du fleuve, l’irrigation et la production hydroélectrique à partir du barrage de Manantali. Elle a aussi construit des barrages anti-sel et s’est lan-cée dans des petits projets de développement agricole ainsi que des projets de construc-tion de barrages hydroélectriques en Gambie, en Guinée-Bissau et au Sénégal. De façon similaire, l’Union du Fleuve Mano (MRU) a conçu deux très importants projets utili-sant les eaux du fleuve pour l’irrigation et la production hydroélectrique, mais l’instabi-lité politique et les conflits entre les Etats concernés ont entravé ces opérations. Par

Certains organismes de bassin exploitent l’eau pour l’irrigation, la production d’énergie, l’approvisionnement en eau des communautés et pour l’exploitation minière

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ailleurs, la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) et d’autres partenaires oeuvrent à la mise en place de la Commission du Fleuve Zambèze. La SADC encourage également les pays membres qui la composent à coopérer pour la mise en valeur intégrée d’autres cours d’eau et bassins lacustres transfrontaliers.

La mise en valeur et le partage des ressources en eau de certains cours d’eau africains a aussi fait l’objet d’initiatives bilatérales. Les plus remarquables sont les accords entre la Zambie et le Zimbabwe sur le fleuve Zambèze, et entre l’Egypte et le Soudan sur le Nil. L’Initiative pour le Bassin du Nil, créée pour gérer les ressources en eau de ce bas-sin où vivent 300 millions de personnes, est le programme le plus récent et le plus ambi-tieux en matière de gestion mutuelle des ressources en eau. (encadré 8.1).

A leurs débuts, certains organismes de bassin avaient conçu des projets ambitieux de mise en valeur des ressources naturelles et de partage des ressources en eau. Les agences de coopération apportaient leur appui et il y a eu des réussites notables. Cependant, au cours des années, la plupart des organismes de bassins ont rencontré de sérieux pro-blèmes, notamment:

• Un engagement politique trop faible et irrégulier de la part des Etats membres, entraînant perte de confiance quant aux capacités et à l’efficacité des organismes et difficultés à mobiliser des ressources extérieures et à mettre en œuvre les programmes;

• Des programmes trop ambitieux et une difficulté à définir et se tenir à des actions prioritaires. Souvent, les programmes ne coïncidaient pas avec les axes prioritaires des agences de coopération;

• Des problèmes financiers, techniques, de gestion et d’administration qui ont entraîné des pressions internes et externes obligeant un certain nombre d’orga-nismes de bassins à changer leurs cadres dirigeants;

• L’instabilité politique et les conflits civils qui ont eu un effet négatif sur certains organismes de bassin (l’Organisme du Bassin de Kagera, la Commission du Bassin du lac Tchad, l’Union du Fleuve Mano).

Par conséquent, la plupart des organismes de bassins n’ont pas réussi à répondre aux attentes de leurs Etats membres et certains semblent avoir perdu leur dynamisme.

Redynamiser les organismes de bassins en Afrique est une priorité absolue qui néces-site un soutien financier et politique. Ces organismes doivent s’efforcer de faire preuve d’une excellente gestion et d’un niveau d’engagement solide, tout en favorisant une coopération et une collaboration plus poussées avec d’autres organismes de bassin à tra-vers notamment le partage d’expertises, d’informations et d’expériences réussies. Les organismes de bassin ayant fait leurs preuves (tels que l’Organisation pour la mise en valeur du fleuve Sénégal, l’Organisation pour la mise en valeur du fleuve Gambie, l’Union du fleuve Mano, l’Autorité du fleuve Zambèze, l’Autorité du bassin du Komati) pourraient aider les moins performants avec une assistance technique s’exprimant à tra-vers des programmes d’échange.

Redynamiser les organismes de bassins en Afrique est une priorité absolue qui nécessite un soutien financier et politique

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Ressources naturelles et production 189 Encadré 8.1

Comment le partage des ressources en eau peut être un facteur d’intégration régionale: l’Initiative pour le bassin du Nil

Les cours d’eau ne respectent pas de frontières entre les pays. Ceux qui vivent dans un bassin hydrographique peuvent avoir des intérêts conflictuels ou complémentaires. La planification des ressources en eau au plan national ou du sous-bassin engendre rarement des bénéfices socio-économiques optimaux – alors qu’une planification de l’utilisation des eaux à l’échelle du bassin dans son ensemble peut engendrer des bénéfices supérieurs à la somme des bénéfices résultant d’initiatives nationales fragmentées. L’Initiative pour le bassin du Nil est un bon exemple où le par-tage des eaux est un instrument d’intégration régionale, exemple qui pourrait inspirer d’autres Etats partageant un cours d’eau en Afrique.

Le Nil est le plus long fleuve du monde (près de 6.700 kilomètres) et il a longtemps été l’un des plus importants actifs naturels du monde. Depuis les temps anciens, le fleuve a nourri les populations riveraines, engendré des écosystèmes et de cultures variés. C’est un fleuve trans-frontalier partagé par 10 pays africains (le Burundi, la République Démocratique du Congo, l’Egypte, l’Erythrée, l’Ethiopie, le Kenya, le Rwanda, le Soudan, la Tanzanie et l’Ouganda) qui comptent quelques 300 millions de personnes – environ 40% de la population africaine. Le bas-sin hydrologique du Nil couvre 10% de la superficie terrestre de l’Afrique.

Aujourd’hui, le bassin du Nil est confronté aux défis de la pauvreté (4 de ses pays riverains sont parmi les dix pays les plus pauvres du monde), de l’instabilité (conflits dans la région des Grands Lacs, au Soudan et dans la Corne de l’Afrique), de la croissance rapide de la population et de la dégradation importante de l’environnement (en particulier sur les hauts plateaux est-afri-cains). Pourtant, la gestion et la mise en valeur conjointes du Nil à l’échelle régionale peut servir de catalyseur de l’intégration régionale et du développement socioéconomique, lesquels sont nécessaires pour relever les défis indiqués. Les bénéfices socioéconomiques élargis seront supé-rieurs aux bénéfices immédiats de l’exploitation du fleuve.

Conscients de ce fait, le Conseil des Ministres des Ressources en Eau a lancé l’Initiative pour le Bassin du Nil en février 1999. L’initiative réunit tous les pays riverains du fleuve et fournit, à l’échelle du bassin, un cadre accepté par tous pour lutter contre la pauvreté et promouvoir le déve-loppement socioéconomique grâce à un usage équitable des ressources en eau communes du Nil et des bénéfices engendrés.

Cette vision deviendra réalité à travers un programme d’action stratégique fondé sur des projets d’investissement communs à l’échelle du bassin et des sous-bassins reposant sur des actions de collaboration, l’échange d’expériences et d’informations, et le renforcement des capa-cités. La première réunion internationale sur le Nil s’est tenue en juin 2000 pour trouver le finan-cement d’un premier ensemble de sept projets et pour appuyer le Secrétariat de l’Initiative pour le Bassin du Nil. Ces projets sont le Plan d’action environnemental transfrontalier pour le Nil, le développement du marché de l’électricité dans le bassin du Nil, l’utilisation efficiente de l’eau pour l’agriculture, Planification et gestion des ressources en eau, Formation appliquée, Développement socio-économique et partage des bénéfices. En plus de ces projets, des regroupements de pays – l’un concernant le Nil de l’Est et l’autre concernant les Lacs du Nil équatorial – ont identifié des investissements potentiels mutuellement bénéfiques à l’échelle du sous-bassin.

Source: Commission Economique pour l’Afrique, à partir de sources officielles.

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