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Résultat : L’« être-auprès-de » de la figure de référence créée la

9. PREMIERE SERIE D’ETUDES : L’ETRE-AUPRES-DE

9.2 Etude 2 : Le destin de l’agressivité primitive, en sport, semble

9.2.5 Résultat : L’« être-auprès-de » de la figure de référence créée la

Dans le phénomène de la rencontre sportive, nous venons de voir que la figure de l’arbitre, dans une proximité « vivante », est disposée à ordonnancer sans cesse la relation mouvante qu’un individu (le joueur) entretient avec son milieu (le match). Avant d’incarner la loi, il s’agit pour l’arbitre d’autoriser sans cesse l’émergence d’un préalable de vie415 . Ce faisant, l’arbitre semble porter la responsabilité de préserver un espace commun (l’être-ensemble) qui, s’il se réduit, risque de porter atteinte à l’intégrité psychique du joueur. Nous différencions ici le donnant-donnant de l’arbitre (présomption qui consiste à ne pas se

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L’interdit ne vaut que dans le cadre d’un lien préalable, dit autrement. La figure d’autorité, qui incarne le droit/le pouvoir de commander, s’entend d’abord par l’enaction d’une autorisation. « autorisation » signifie étymologiquement « auteur » [du latin auctor qui signifie « celui qui pousse à agir » ou « créateur » ; lui-même venant du mot augere signifiant « croître ; rendre plus grand »]. Certeau, M. La faiblesse de croire Paris, Giard, 1987.

L’autorité, selon le philosophe français Kojeve, ne se réduit pas à une forme de domination mais elle implique une reconnaissance. Elle doit être reconnue comme légitime. Kojeve, A. 1942. La notion d’autorité. Paris, Gallimard, 2004.

Du coté des sciences de l’éducation, Guillot ajoute que l’autorité de « bientraitance » consiste à « autoriser les commencements dans le cadre d’interdits structurants » c’est-à-dire, nous le comprenons ainsi, d’appeler à la création de soi. Guillot, G. L’autorité en éducation Sortir de la crise. Paris, ESF, 2006, p. 9

182 déprendre de ses propres enjeux narcissiques)416 , du don sans retour417. Dans le premier cas de figure, la prévalence des enjeux narcissiques engendre une attente de l’arbitre vis-à-vis d’un retour (c’est-à-dire une « obligation de rendre ») tandis que dans le deuxième cas de figure, la liberté de rendre est donnée au joueur authentiquement.

L’agressivité primitive du joueur peut, nous l’avons vu, basculer en agressivité destructrice afin de « reconquérir » l’espace intersubjectif qui lui a été retiré (qui a été dénié). Aussi, la dynamique de performation de l’agressivité sportive en capacité d’être (soi) avec autrui dans un monde

commun partagé semble directement dépendre de l’arbitre

« atmosphériquement bon » ; c’est-à-dire d’une figure de référence (non pas « tierce » mais « une », c’est-à-dire créant de « l’unité soi-monde») capable de se préserver elle-même de toute attaque afin de demeurer là pour autrui. La capacité d’une figure d’autorité à « demeurer auprès de » initie, en retour, « un élan de promotion mutuelle ou chacun se façonne en se donnant à l’autre »418. « L’être-auprès-de »419 est un mode d’être au monde qui se distingue, chez Heidegger, de « l’être-à-dessein-de-soi » et de « l’être-avec ». Cet existential incarne l’idée étymologique (par la locution prépositive « auprès de ») et phénoménologique d’une proximité et d’un séjour dans l’atmosphérique (ce que Tellenbach décrit spécifiquement en termes de don de soi). Ici, le don de soi témoigne de ce que l’arbitre est suffisamment « là » dans la spatio-temporalité du jeu

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Ici, l’arbitre ne peut être senti que comme une idéalité car il donne pour recevoir.

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Là l’arbitre autorise l’émergence de l’être-soi d’autrui.

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Labelle, J-M., op. cit. p. 180

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L’être-auprès-de [Sein bei] atteste, chez Heidegger, que le Dasein est essentiellement, dans l’analytique du temps, un être-pour-la-mort (dans l’épreuve de l’autre).

183 sportif c’est-à-dire qu’il rayonne suffisamment dans l’espace intersubjectif afin d’être flairé par les joueurs. Et ce, malgré les attaques destructrices (par hasard) des joueurs. Tellenbach parle précisément d’une libre « neutralité de rayonnement propre » en ce sens que, nous l’avons compris ainsi, aucun enjeu narcissique ne vienne interférer sur la qualité de présence.

Selon nous, l’être-auprès-de caractérise bien l’idée qu’une

reconnaissance, davantage qu’une connaissance (émanant de « l’être- avec »), est à l’œuvre dans le parcours qui mène à la mutualité : ici l’espace commun est reconnu et non pas renié420. Si le contexte pousse l’arbitre à se conduire dans une manière d’être qui n’engage que « l’être- à-dessein-de-soi », alors il apparait que la conscience de l’arbitre semble se réduire à une conscience qui s’isole du monde. Par voie de conséquence, il ne garantie plus la création de l’être-ensemble. Ce que nous qualifions d’être-auprès-de, ce don de soi à l’atmosphérique du Nous, est ce que nous souhaitons étudier en tant qu’existant, chercheur et enseignant. Comment, en effet, dans le contexte actuel, où les attaques de cadre gangrènent nos institutions, pouvons-nous déjouer les pièges de la division sociale?

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Renegare latin signifie « récuser » : renier renvoie à quelque chose ou quelqu’un que l’on repousse, que l’on rejette, auquel nous avons cru et que nous croyons plus ; et non à quelque chose ou quelqu’un auquel on ne croit pas ou que l’on méconnait d’emblée (nier).

184 Résumé : Notre première série d’études montre qu’un phénomène pré- psychique est à l’œuvre dans la spatio-temporalité de la rencontre (sportive) : le processus de réciprocité. L’étude 1 et 2 tendent à valider l’hypothèse selon laquelle la qualité de présence d’une figure de référence (ici l’arbitre), l’être-auprès-de, favorise la reconnaissance mutuelle des consciences. L’être-soi et l’être-ensemble émergent mutuellement dans ce cas.

10. DEUXIEME SERIE D’ETUDES : LA CONSCIENCE

D’INTERSUBJECTIVITE

Les résultats de la première étude ont montré que l’être-soi ne peut advenir lorsque l’être-ensemble n’est pas préalablement flairé/ne rayonne pas dans une spatio-temporalité donnée. Dans ce cas, l’agressivité primitive devient destructrice. Elle témoigne d’un mode palliatif d’être-au-monde qui autorise maladroitement la recréation d’une Nostrité. Nous avons donc conclu que la figure de référence421, pour rendre opérante la fonction paternelle, déploie une manière d’être-au- monde particulière, l’être-auprès-de, afin d’incarner une atmosphérique « suffisamment bonne ». Si la réciprocité incarne une circularité Soi- Univers qui préserve la mutualité des consciences, comment la figure de référence peut-elle initier le mouvement de la réciprocité si elle-même évolue dans un monde qui n’est pas réciproque ? Il est apparu, à l’issue du chapitre 9, qu’une conscience particulière de la figure de référence

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Nous abandonnons ici l’expression « figure d’autorité » pour privilégier l’expression « figure de référence » car la figure d’autorité est d’abord une figure à laquelle il est possible de se fier.

185 (l’arbitre) semblait être à l’œuvre dans la manifestation d’une reconnaissance mutuelle des consciences.

Les deux prochaines études vont tenter d’amener quelques éléments de compréhension sur les conditions d’émergence de la conscience d’intersubjectivité. L’étude 3 concerne l’étude phénoménologique d’une prise en charge psychothérapeutique qui a eu lieu en 2009, dans le cadre de notre mémoire professionnel. Ici, nous comprendrons en quoi la conscience d’intersubjectivité à favorisé l’émergence d’une « Nostrité primordiale » dans la prise en charge d’un jeune garçon trahissant des conduites de toute puissance. L’étude 4 permettra de poursuivre notre compréhension phénoménologique de la conscience d’intersubjectivité en mettant en exergue, à travers une expérience vécue d’entraineur, l’essence même du phénomène de réciprocité : l’élan d’amour. Finalement nous mettrons en évidence le versant passif mais aussi actif de la réciprocité.

10.1 Etude 3 : La conscience d’intersubjectivité ouvre la possibilité