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Les réseaux sociaux comme appui informatif : chercher, apprendre et rendre

Chapitre 4 : Les stratégies d’intégration : réseaux sociaux et autres avenues, les femmes immigrantes en tant

4.2 Les réseaux sociaux comme appui informatif : chercher, apprendre et rendre

En plus du soutien émotionnel, la recherche d’informations à travers les réseaux sociaux semble être un aspect important pour les femmes immigrantes ayant pris part à l’étude; elles recherchent un appui informatif concret plutôt que virtuel. On peut distinguer deux phases distinctes au niveau du support informatif. Premièrement, il y a celle où les femmes sont à la recherche d’informations diverses pour faciliter leur installation ainsi que leur intégration dans un nouveau milieu. Puis, il y a une seconde phase où elles deviennent elles-mêmes un point de référence et un pont entre la société d’accueil, ses structures et ses services, et les nouvelles arrivantes vivant dans le quartier.

4.2.1 Découvrir une personne-ressource dans son nouveau milieu, une aide

précieuse

Dans la majorité des cas, les femmes ont identifié une personne facilitatrice qui a été une source d’information et de soutien très importante. Évidemment, l’ampleur de l’aide ou ses effets sont variables d’une femme à l’autre, mais il y a souvent un élément déclencheur, la personne par laquelle le reste de la communauté d’accueil devient plus accessible, plus intelligible. Cette ressource clé peut être par exemple une personne qui connaît bien le quartier, qu’on l’ait connue dans la rue, au dépanneur, ou dans une association, un organisme communautaire ou encore un lieu de culte, ou encore, occasionnellement, ses propres enfants.

Dans le cas des femmes hispanophones, c’est un homme québécois très impliqué auprès de la communauté colombienne qui est mentionné par toutes. Teresa, elle l’a rencontré à l’école de son fils, alors qu’il avait servi d’interprète pour faciliter une discussion avec son enseignant :

Et à partir de ce jour-là, il a pris le numéro de téléphone et moi aussi et c’est une amitié que j’apprécie beaucoup, beaucoup, beaucoup. Parce qu’il est un grand homme, très gentil. Il nous a permis de connaître la ville, quelles sont les choses que nous pouvons faire ici. Il nous a aidés avec le français. (Teresa)

Pour les femmes maghrébines, en fait pour les femmes de toutes origines résidant dans la paroisse, une femme d’origine algérienne est au cœur des activités du quartier. Elle agit comme facilitatrice pour plusieurs. Khaira, elle, avait sa propre mine de renseignements, « son internet » comme elle la surnomme, la gardienne québécoise d’un de ses fils. Magda a mentionné, de son côté, l’importance de son église (volet religieux).Quant aux femmes brésiliennes, l’Association brésilienne (accessible en plateforme virtuelle sous la forme d’un forum ou concrètement dans différentes activités) est une ressource importante pour elles, pour la transmission de l’information. La création d’une association est en effet une stratégie qui permet de regrouper le pouvoir d’agir des individus qui la composent.

De son côté, Pauline a bénéficié des conseils d’une amie qui a résidé dans le quartier pendant une dizaine d’années et qui lui a indiqué, dès son arrivée, les personnes et services à contacter pour obtenir le support nécessaire. Elle a aussi un autre compatriote, qui réside dans un immeuble voisin, qui l’a beaucoup appuyée. Pour ce qui est de Flavie, c’est l’animatrice d’activités pour les tout-petits, en lien avec l’organisme-contact, qui l’a croisée sur la rue avec ses enfants puis qui est devenue sa planche de salut : « elle a été la personne qui

m’a sortie de ma bulle. Voilà. Elle a crevé la petite prison dorée dans laquelle je m’étais installée » (Flavie).

Elle lui a indiqué les endroits où se tenaient différentes activités dans le quartier et les coordonnées des gens à contacter.

Évidemment, ce que les femmes recherchent comme informations varie en fonction de leurs situations; elles n’ont pas toutes les mêmes besoins, par exemple : accéder à l’aide alimentaire, trouver l’épicerie qui offre un meilleur rapport quantité/prix ou celle qui offre la livraison; dénicher des vêtements usagés pour les enfants qui grandissent vite ou quand les vêtements d’automne ne sont plus assez chaud pour affronter l’hiver; ou encore, découvrir les programmes d’accessibilité aux loisirs et les activités du quartier pour les enfants et les adultes.

De plus, la personne-ressource agit aussi comme décodeur de la société d’accueil, notamment pour comprendre les expressions courantes, comme le fils de Khaira qui dit « bedaine » de retour à la maison ou le fils de Flavie qui se fait réprimander à l’école de ne pas sortir son « cartable », qui fait référence pour lui à son sac d’école et pour son enseignante, à son cartable à anneaux.

Le développement de contacts permet aussi d’avoir de l’information sur des emplois disponibles. Sur les conseils et l’appui d’une personne à qui elle enseignait le portugais, Olivia a déposé sa candidature et a

obtenu un poste dans un magasin. Pauline a bénéficié des contacts d’une amie pour obtenir un emploi en cuisine, dans un centre d’hébergement pour personnes âgées.

Bref, la personne-ressource devient la clé qui ouvre la porte de la nouvelle communauté dans laquelle ces femmes viennent de s’installer. Elle joue, tout à tour, le rôle de « bottin des ressources », car elle oriente vers différents services, de « dictionnaire », car elle traduit mots, expressions langagières ou physiques et aussi parfois de « doudou », car elle permet de réconforter dans le cas d’incompréhensions ou d’incertitudes.

4.2.2 Le retour du balancier : les femmes immigrantes comme source d’information

Quelques femmes se retrouvent en situation d’être à leur tour un point de référence dans la communauté. C’est un rôle que certaines prennent volontairement et s’y impliquent avec cœur. Salma n’a pas besoin d’une structure de référence pour aller vers les femmes, elle les aborde parfois au parc, surtout les femmes qui portent le voile, puisqu’elle est d’origine tunisienne.

Quand je vois une femme voilée […] moi, je l’aborde parce que je sais que si elle n’est pas Tunisienne, elle est Marocaine ou Algérienne. Et puis surtout si elle est nouvellement arrivée, moi, je vais essayer de lui donner de l’information, je vais essayer de savoir si elle a besoin d’aide, je vais lui donner les réseaux nécessaires pour ça. Comme on a été aidés en arrivant ici, donc, j’essaie de faire la même chose avec ceux qui viennent d’arriver. Ça m’est arrivé à plusieurs reprises, surtout après le premier juillet. Donc tu vois, tout le monde il arrive dans le quartier après les déménagements. Je vois des nouveaux visages au parc et je vais les aborder, si c’est des femmes et tout, avec leurs enfants. (Salma)

Le mari de Clara est très impliqué auprès de l’Association brésilienne pour accueillir les nouveaux arrivants; elle-même contribue à l’effort, même si elle aimerait en faire davantage :

On essaie d’aider les gens qui arrivent. C’est dur. On n’a pas vraiment le temps pour s’impliquer totalement. C’est qu’on aide, on aide dans notre temps libre, mais encore, je ne trouve pas que c’est assez. De toute façon, toute l’information que nous avons, on la fait passer pour tout le monde. Si jamais j’ai une nouvelle information, on va la transmettre, on va essayer de la transmettre à tout le monde. C’est ça qui se passe. (Clara)

En fait, il semble que la majorité des femmes ayant elle-même bénéficié du support de l’une ou l’autre des ressources mentionnées (interlocuteur clé, organisme communautaire, association) est sensibilisée à l’importance de la transmission de l’information.

Dans cette section du chapitre 4, j’ai exploré de quelles façons les participantes à ma recherche comptaient sur les réseaux sociaux comme appui informatif. À travers leur processus d’intégration, ces femmes ont

bénéficié du support d’un informateur-clé. Certaines d’entre elles ont par la suite souhaité rendre la pareille et sont devenues à leur tour une source d’information pour leur entourage et voisinage.

Attendu que j’ai abordé les deux types d’appuis principaux recherchés à travers les réseaux sociaux par les femmes immigrantes de l’échantillon, à savoir l’appui émotionnel et l’appui informatif, il faut maintenant se demander quelles sont les autres stratégies qu’elles mobilisent pour atteindre leurs objectifs d’intégration. Très certainement, grâce à certaines pistes découvertes au fil de l’analyse, il est possible d’en envisager quelques autres.

4.3 Les stratégies d’intégration : y a-t-il d’autres possibilités que