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La réception implicite de l’économie des réseaux par la doctrine universitaire 423 Historiquement, ce type d’œuvre de définition de la régulation est ancien car lié à

Section II. La portée doctrinale de la transcription de l’économie des réseaux en droit de la régulation

A. La réception implicite de l’économie des réseaux par la doctrine universitaire 423 Historiquement, ce type d’œuvre de définition de la régulation est ancien car lié à

l’ouverture à la concurrence des industries de réseaux (1). Cependant, des travaux récents sou- tiennent toujours cette analyse (2).

1. La réception implicite de l’économie des réseaux par les définitions anciennes de la régulation

424. La doctrine la plus ancienne a, quoiqu’implicitement et sans doute en l’ignorant elle- même, consacré très tôt la conception de la régulation de l’économie des réseaux. Il s’agit ici de la conception de la régulation en tant que fonction économique visant à l’ouverture à la concur-

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rence de certains secteurs spécifiques. On peut en donner quelques exemples.

Ainsi, le manuel de Pierre Delvolvé, publié en 1998, associe la régulation à une police spéciale de la concurrence liée au mouvement de déréglementation et confiée à des autorités ad- ministratives indépendantes1084. Cette fonction est alors conçue comme une fonction provisoire,

caractérisée par le passage d’une situation de monopole à une situation de concurrence1085. Éga-

lement, le manuel de Jean-Philippe Colson publié en 2001 associait la régulation à la forme d’intervention de l’État dans l’économie après la phase de déréglementation de nombreux ser- vices publics1086. Soulignant les controverses pesant sur la notion de régulation1087, il précisait que

l’une des définitions possibles de celle-ci vise à séparer le pouvoir de régulation des pouvoirs légi- slatifs et réglementaires et à mettre en place une concurrence et un accès au réseau1088. Cette con-

ception a été maintenue partiellement, parmi bien d’autres cependant, dans le manuel de Jean- Philippe Colson et Pascale Idoux paru en 2010, mais ne semble plus être le type d’œuvre de défi- nition de la régulation emportant la conviction de ces auteurs1089.

Ces deux exemples suffisent en toute hypothèse à démontrer que les conceptions les plus anciennes de la régulation voyaient en elle une phase transitoire d’ouverture à la concurrence des industries de réseau. Cependant, cette conception trouve encore des échos dans des travaux plus récents, cette définition étant donc toujours actuelle.

2. La réception implicite de l’économie des réseaux par les définitions actuelles de la régulation

425. La même thèse est soutenue dans des travaux plus récents, qui, quoique ne faisant pas référence à l’économie des réseaux, en reprennent néanmoins les principes (a). Yves Gaudemet propose même d’ériger la régulation ainsi entendue au rang de fonction administrative (b).

a. La réception de la définition de l’économie des réseaux

426. Certains auteurs proposent une définition de la régulation conforme à l’économie des réseaux, en s’inspirant notamment du secteur des communications électroniques. C’est notam- ment le cas de Lucien Rapp qui reprend la lecture de l’évolution de la réglementation selon les trois phases de l’économie des réseaux1090 et conclut au passage progressif vers le droit commun

1084 DEVOLVÉ P., Droit public de l’économie, Paris, Dalloz, 1998, p. 42. 1085 Ibid., pp. 561-562.

1086 COLSON J.-P., Droit public économique, Paris, LGDJ, 2001, 3ème Ed., p. 499. 1087 Ibid., p. 509.

1088 Ibid., p. 516 et s.

1089 COLSON J.-P., IDOUX P., Droit public économique, Paris, LGDJ, 5ème Ed., 2010, p. 525.

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de la concurrence1091. Dans la même optique, on peut noter ici l’hypothèse adoptée par Laurent

Richer selon laquelle le secteur des communications électroniques est bien le secteur précurseur de l’ouverture à la concurrence des industries de réseaux dont l’exemple a vocation à être suivi par les autres secteurs d’industrie de réseaux1092.

427. En outre, il est tout à fait significatif de noter que l’on retrouve encore une telle concep- tion dans le cadre d’un rapport parlementaire récent, celle-ci servant de support à la proposition de l’intégration au sein de l’Autorité de la concurrence de l’ensemble des autorités sectorielles de régulation économique, exception faite de l’ARCEP en raison de la prise en charge de « bien cultu-

rels », un réexamen devant justifier tous les cinq ans de l’utilité du maintien de la régulation secto-

rielle1093. La conception de la régulation comme fonction provisoire continue donc d’être soute-

nue, et apparaît même susceptible de produire des conséquences politiques.

b. Une réception implicite érigée au rang de fonction administrative 428. Par ailleurs, et de façon bien plus significative, Yves Gaudemet, notamment dans son manuel de droit administratif1094, propose d’ériger la régulation entendue comme une fonction

transitoire d’ouverture à la concurrence au rang de fonction administrative.

Selon lui, la conception matérielle de la régulation conduit à la concevoir comme une po- lice économique visant à ouvrir à la concurrence un marché déterminé, dont la vocation est de disparaître progressivement au bénéfice du droit commun de la concurrence1095. Dans cette op-

tique, la régulation est considérée comme une fonction administrative, à l’égale de la police et du service public1096. La régulation, ainsi entendue, apparaît alors comme l’une des fonctions les plus

fondamentales du droit administratif.

On voit bien la portée théorique d’un tel raisonnement. En effet, il apparaît, quoiqu’ indi- rectement et implicitement, que par l’intermédiaire d’un processus de transcription en droit posi- tif et de réception par la doctrine universitaire, l’économie des réseaux se voit érigée au rang nor- matif de fonction administrative. Un tel résultat démontre toute la force structurante de l’économie des réseaux en droit de la régulation.

1091 RAPP L., « Le droit des communications entre réglementation et régulation », article précité, pp. 2048, 2052, 2054,

2058.

1092 RICHER L., « Droit d’accès et service public », AJDA, 2006, p. 74.

1093 DOSIÈRE R., VANNESTE C., Rapport d’information fait au nom du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques pu-

bliques sur les autorités administratives indépendantes, Tome 1, Rapport, 2010, pp. 79-80.

1094 GAUDEMET Y., Droit administratif, Paris, LGDJ, 19ème Ed., 2010, 550 p.

1095 GAUDEMET Y., « La concurrence des modes et des niveaux de régulation. Introduction », in La régulation. Nou-

veaux modes ? Nouveaux territoires ?, RFAP, n° 109, 2004, p. 14 ; Adde GAUDEMET Y., Droit administratif, op. cit., pp.

389-391.

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429. Il peut donc être démontré que la théorie de l’économie des réseaux fait bien l’objet d’un processus de réception par la doctrine universitaire, quoique celui-ci reste implicite. Cependant, la réception de la théorie de l’économie des réseaux connaît depuis quelques années un nouvel ap- profondissement puisque celle-ci se fait de plus en plus explicite. La doctrine universitaire con- sacre en effet désormais les concepts de régulation ex ante et de régulation ex post.

B. La réception explicite de l’économie des réseaux par la doctrine universitaire

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