• Aucun résultat trouvé

Dans son Projet de la proposition d’Accusation contre M le Duc Decazes 401 , le député Jean-Claude CLAUSEL DE COUSSERGUES exposa les vingt chefs d’accusation retenus à

§1 La conception du contreseing dans l’Histoire du parlementarisme français

A. Le contreseing sous les Chartes : ébauche d’une fonction politique

59. Dans son Projet de la proposition d’Accusation contre M le Duc Decazes 401 , le député Jean-Claude CLAUSEL DE COUSSERGUES exposa les vingt chefs d’accusation retenus à

particulier, il propose des moyens d’assurer « que la Chambre exerce une influence utile sur sa formation [celle

du Gouvernement] et que les ministres puissent à leur tour trouver dans cette majorité un appui continuel »

(p. 69). L’adjectif continuel est à entendre au sens le plus fort. Cet ouvrage a été publié en ligne par la revue Jus

Politicum dans le cadre du projet de recherche ANR-09-BLAN-0359 (disponible en ligne :

http://www.juspoliticum.com/Baron-de-Vitrolles-Du-ministere.html).

395 Sur le modèle anglais, voir D. B

ARANGER, Parlementarisme des origines : essai sur les conditions de

formation d’un exécutif responsable en Angleterre (des années 1740 au début de l’âge victorien), PUF, coll.

« Léviathan », 1999, 408 p. ; voir également, Ph. LAUVAUX, Le Parlementarisme, op. cit., p. 5-14.

396

La mise en accusation est effectivement la procédure la plus extrême. Les ministres purent être mis en cause par d’autres « moyens de contrôle » : l’adresse, les pétitions et la discussion du budget et de la loi de comptes (M. MORABITO, Histoire constitutionnelle (…), op. cit., p. 199 et s).

397

« Le ministère Richelieu se retire en décembre 1818 après le rejet par la Chambre basse d’un projet de loi électorale. Mais ses divisions internes le rendaient difficilement viable. De plus, le roi prétexte de l’état de santé du duc de Richelieu pour justifier sa démission », écrit le professeur MORABITO (souligné par l’auteur. Ibid., p. 201).

398 Marcel MORABITO estime qu’il fallut « attendre la chute du second ministère Richelieu en 1821 pour voir

réellement s’affirmer la responsabilité politique, non sans difficulté » (Souligné dans le texte. Ibid., p. 201-202). À notre sens, l’affaire DECAZES, de 1820, constitue déjà un exemple de responsabilité politique.

399

Ces exemples sont également cités in P. BODINEAU et M.VERPEAUX, Histoire constitutionnelle de la France, PUF, coll. « Que sais-je ? », 2013, p. 50 et s.

Sur la fin du ministère VILLÈLE, on pourra lire avec un double intérêt littéraire et historique, les poèmes satyriques publiés par MÉRY et BARTHÉLÉMY sous le titre évocateur : Étrennes à M. de Villèle, ou Nos adieux

aux ministres, A. Dupont et Cie., 1828, 32 p. Voir aussi B. YVERT,La Restauration. Les idées et les hommes,

CNRS, 2013, p. 79-93.

400 Sur l’affaire DECAZES, voir N.H

AVAS, La Responsabilité ministérielle en France (…), op. cit., p. 296-297 ; Voir aussi le portrait proposé in B. YVERT (dir.), Dictionnaire des ministres (1789-1989), Librairie académique Perrin, 1990, entrée « Decaze », p. 122 et s. ; du même auteur, La Restauration. Les idées et les hommes, op. cit., en particulier p. 67-79. Voir aussi J.-J. CHEVALLIER, Histoire des institutions et des régimes politiques de la

France de 1789 à 1958, Dalloz, coll. « Classic », 2009, p. 185-186.

401J.-C.C

LAUSEL DE COUSSERGUES,Projet de la proposition d’Accusation contre M. le Duc Decazes, Pair de France, ancien président du Conseil des ministres, ancien ministre de l’intérieur et de la police générale du royaume, à soumettre à la Chambre de 1820, Dentu, 1820, 388 p. Le député avait présenté certains de ses

L’exigence du contreseing

l’encontre de DECAZES. Le treizième chef d’accusation portait sur la nomination de soixante pairs. En effet, le Gouvernement conduit par le duc ne jouissait de la majorité dans aucune des deux Chambres, lesquelles avaient exprimé au roi leur opposition. Ce dernier, sur les conseils du duc, décida, en représailles, la nomination de soixante nouveaux pairs puisque, comme l’indiquait la Charte, leur nombre était illimité402. Ces nominations permirent de « briser » la majorité qui, à la Pairie, était hostile au duc. Selon ses accusateurs, le duc se servit de ces nominations à « ses propres fins403 ». Afin d’étayer son argumentaire, et pour prouver qu’un tel agissement justifiait la mise en cause de la responsabilité de DECAZES, CLAUSEL DE COUSSERGUES s’appuie sur ce qu’il appelle le précédent anglais. Il écrit au sujet du procès du comte d’ORFORD, plus connu sous le nom de Robert WALPOLE404, et de ses ministres :

Une nomination de pairs, nombreuse et simultanée, fut un des griefs qui, la première année du règne de Georges 1er, firent condamner les ministres de la Reine Anne. La Reine, par cette nomination, n’avait fait qu’user de sa prérogative ; les ministres qui avaient contresigné cet acte de son Gouvernement paraissaient n’avoir blessé aucune loi. Mais voici où la Chambre des communes trouva leur culpabilité : elle prétendit que ce n’était pas pour l’utilité de l’État que les ministres avaient fait ces nominations, mais pour leur intérêt particulier405.

L’auteur établit un parallèle entre ces deux espèces et souligne que, par ses conseils et pour son propre intérêt politique, le duc DECAZES a « obtenu cette ordonnance du monarque406 ». Au final, son réquisitoire n’aboutit pas à la condamnation de DECAZES mais à sa démission. Cette affaire présente donc un triple intérêt. Primo, elle permet de constater que le caractère pénal de la procédure d’accusation peine à masquer le caractère politique du motif invoqué et de sa conséquence. Secundo, l’argumentaire de l’accusateur indique clairement que les actes contresignés n’étaient pas imputés au roi mais bien au ministre. Tertio, le cas DECAZES montre que le lien entre responsabilité et pouvoir de décision opérait déjà en matière de nomination : celles-ci ne bénéficiaient nullement de quelque régime dérogatoire.

arguments devant la Chambre ; le 20 février DECAZES et ses ministres démissionnèrent. Le réquisitoire du député intervient donc a posteriori mais constitue la synthèse de ses griefs.

402 Art. 27 de la Charte de 1814. 403 J.-C.C

LAUSEL DE COUSSERGUES,Projet de la proposition d’Accusation (…), op. cit., p. 79-80

404 CLAUSEL DE COUSSERGUES écrit « OXFORT ». D’après nos recherches, il étudie la mise en accusation

du comte d’ORFORD. Voir aussi le récit et l’analyse de cet événement in Baron DE VITROLLES, Du ministère

dans le gouvernement représentatif, op. cit., p. 50 et s.

405

J.-C.CLAUSEL DE COUSSERGUES,Projet de la proposition d’Accusation (…), op. cit., p. 75.

La compétence de nomination du Président de la Cinquième République

60. Si le contreseing n’était pas mentionné dans la Charte de 1814, il « fut pratiqué de façon

Outline

Documents relatifs