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DEUXIEME PARTIE

N. B : (7) correspond aux sept jours de la semaine grégorienne J (1) date de la tenue du marché dans le cycle

II.2 Les produits manufacturés

Le commerce de produits manufacturés sur les espaces marchands frontaliers, comme nous l’avons dit, est qualifié de « commerce de fourmis » (Harrera, 1997). Cette activité repose sur des quantités et des variétés d’articles issus non seulement du marché mondial mais également des factoreries des Etats en relation. Les acteurs de ce commerce ont généralement pour source d’approvisionnement les marchés frontaliers qui agissent très souvent de manière

133 individuelle et vendent leurs marchandises dans les villes secondaires à proximité de grands marchés frontaliers et urbains.

Ces petits commerçants utilisent les transports en commun pour acheminer leurs marchandises, ce qui les rend vulnérables face aux contrôles intempestifs des forces de sécurité et de la douane. Ils doivent s’acquitter de faux-frais de route inopinés et répétés tout le long du trajet entre le marché d’approvisionnent et le centre de revente. Cependant, le système de convoyage qu’ils utilisent leur permet de partager entre eux tous ces faux-frais.

Pour analyser les prix de quelques articles sur les différentes aires marchandes, nous avons retenu trois produits sur neuf qui nous paraissent intéressants pour leur représentativité en matière de recettes douanières et leurs volumes très importants dans les échanges.

Les prix sont souvent plus élevés dans leur pays de fabrication que dans les autres. Sur les marchés de Sikasso et de Sampa, le savon de lessive coûte 150 francs CFA, alors qu’il est de 250 francs CFA sur les autres marchés ivoiriens. Ce différentiel peut s’expliquer par un ensemble de mesures prises par les entreprises implantées en Côte d’Ivoire pour pénétrer les marchés des pays de la sous région ouest-africaine, qui consiste à exonérer de droits de douane certains produits mis à la consommation sur l’ensemble des pays importateurs. On note également la non-application de la taxe à la valeur ajoutée (TVA) sur ces produits du pays d’origine aux pays demandeurs. Ainsi, la non-application de la réglementation douanière et tarifaire sur l’ensemble des produits de leur pays de fabrication fait baisser les coûts dans les Etats importateurs. Les prix qui sont alors pratiqués sur les deux marchés retenus ne sont que la conséquence de cette politique de dumping appliquée par les entreprises ivoiriennes.

Cette politique de la conquête du marché des pays de la sous-région n’est pas sans conséquence sur les territoires frontaliers. Les populations frontalières vont alors se ravitailler vers les marchés frontaliers où les produits achetés hors taxes reviennent pour être vendus à des prix défiant toute concurrence, comme au marché de Sokoro où les prix sont relativement bas par rapport à l’ensemble des marchés (Graphique 6, p.134). Ce marché accueille également des produits provenant des usines guinéennes dont les prix sont encore très bas par rapport à ceux pratiqués sur le marché malien de Sikasso, surtout à cause de la différence de politique monétaire entre les états.

134

Graphique 6 :Prix des produits manufacturés de consommation courante sur les types de marchés

0 5000 10000 15000

Tingréla Sikasso Korhogo

Soko Sampa Bondoukou Odienné Sokoro Marchés prix en f ranc C F A Bazin produits de beauté Emaillés Perruques

Source : Directions régionales du commerce Korhogo et Bondoukou

La parité monétaire de la période où les relevés ont été effectués est la cause des prix bas des produits sur ce marché. Elle fluctue au bon gré des changeurs ou monnayeurs qui pallient les défaillances des banques centrales des Etats. Ainsi, on peut échanger 500 francs Cfa contre 2000 francs guinéens, à l’ouverture du marché à 10 heures, et vers 12 heures cette valeur peut passer de 2000 francs guinéens à 1000 francs voire 850 francs guinéens.

Cette fluctuation se répercute immédiatement sur les prix des produits. L’exemple du savon corrobore ce constat. Le jour de « grand marché », le savon coûte 150 francs CFA l’unité ; à 13 heures le prix passe à 125 francs Cfa, à la fermeture à 16 heures il est encore revu à la baisse, 100 francs CFA. Ainsi, en 6 heures, pour cause de la dépréciation de la monnaie, on enregistre une variation du prix de l’ordre de 15%. Cette situation prévaut également sur le marché de Sampa en territoire ghanéen à quelques nuances près. Cependant, les prix diffèrent de ceux pratiqués à Bondoukou et à Soko en Côte d’Ivoire car ces localités sont très peu éloignées les unes des autres. Bondoukou est à 12 km de Sampa, alors que Soko se trouve respectivement à 7 et 5 km de Bondoukou et de Sampa. Ici, les prix atteignent les autres marchés à intervalle de 20 à 30 minutes malgré l’existence des barrages routiers de contrôle et l’état de la voie qui relie les localités.

Parfois, les prix subissent une hausse à cause des difficultés d’approvisionnement liées à l’état de dégradation des voies de communications due à l’érosion en période des pluies. Des pénuries de produits peuvent alors être constatées chez les grossistes. Cette situation favorise un autre type de commerce non formalisé.

135 Les prix des produits manufacturés sur les marchés de la zone sont fonction de la distance, de la réglementation douanière et tarifaire et des politiques monétaires. L’intégration des marchés de la zone par le différentiel prix est fonction de la nature du produit, de sa provenance, de son mode de mise en consommation et de sa qualité.

La variable prix peut permettre de mesurer le phénomène intégrateur des marchés si les produits sont de même nature et ont été transportés sur les marchés suivant la même réglementation douanière et le même circuit d’approvisionnement. C’est pourquoi nous parlons d’une intégration des marchés de la zone par type de produit à travers la variable prix.