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PREMIERE PARTIE

I. L’EMPREINTE DU CADRE PHYSIQUE

La frontière terrestre s’appuie sur des supports remarquables de l’espace qui permettent de mettre le territoire en carte. En nous basant sur cette considération, à travers l’étude de l’empreinte du cadre physique, nous essayons de montrer le type de relief sur lequel s’appuie le tracé des frontières de notre espace d’étude que les populations transgressent ou franchissent légalement pour commercer. Pour ce faire nous tenterons de montrer les liens qui existent entre les tracés des frontières et le relief, entre frontières et hydrographie.

40 I.1 Frontières et relief, limites « naturelles » ?

Dans son ensemble, le relief de l'espace transfrontalier (Figure 3, p.41) est peu contrasté et surtout caractérisé par la monotonie. En réalité, à travers cette uniformité relative, on distingue deux types de reliefs : des plateaux et des plaines. L'écart entre les altitudes extrêmes est inférieur à 600 mètres. L'altitude moyenne ne dépasse pas 400 mètres et près de la moitié de cet espace se situe entre 250 et 350 mètres.

Les plateaux prolongent les plaines vers le nord et le nord-ouest de ce territoire. Les altitudes varient de 200 à 500 mètres et les principaux accidents de terrain proviennent des reliefs qui surmontent par endroit ces plates-formes. Ainsi, nous avons les collines en forme de buttes aux versants abrupts et concaves, terminées parfois par une corniche au sommet tabulaire, comme l’extrémité d’une région orientale de montagne appelée dorsale guinéenne. Plusieurs régions peuvent être ainsi distinguées : les chaînes de Tiemé et de Madinanie, le plateau du Manding à la frontière malienne, le bowe de Bondoukou, le Mont Korhogo et la colline de Lataha. Les crêtes de certaines chaînes comme celles de Tiemé et de Madinanie, du plateau du Mandingue sont les éléments physiques sur lesquels s’est appuyé le tracé de la frontière ivoiro-malienne par endroit. Mais l’élément le plus remarquable sur lequel l’éventail des frontières ivoiriennes s’est greffé reste les lits des cours d’eau.

I.2 Frontières et hydrographie

La grande majorité des frontières ivoiriennes suit le tracé des lits, des thalwegs, ou rives des cours d’eau. Leurs lits forment des « limites naturelles » par endroit entre des Etats. C’est le cas entre le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire, le Mali et la Côte d’Ivoire, le Ghana et la Côte d’Ivoire, la Guinée et la Côte d’ivoire. Il faut ajouter la limite avec le Libéria lorsque nous regardons l’ensemble des frontières ivoiriennes. Il s’agit respectivement de la Léraba occidentale et de la Comoé entre le Burkina Faso et la Côte d’Ivoire, du Baoulé, du Dégou, du Kankélaba, entre le Mali et la Côte d’Ivoire, de la Volta noire entre le Ghana et la Côte d’Ivoire et du Gbanhala entre la Guinée et la Côte d’Ivoire. En dernier ressort nous avons le Cavally entre la Côte d’Ivoire et le Libéria (Figure 3, p.41)

41 Si les fleuves les plus importants prennent leur source dans cet espace, il en existe certains qui sont les affluents des fleuves (le Niger et la Volta-Noire), comme le Sassandra qui prend sa source en Guinée dans la région de Beyla, sous le nom de Féroudougou et traverse la région d’Odienné. A l’extrême nord, la Comoé prend sa source dans les plateaux gréseux du

42 Burkina Faso, dans la région de Banfora qui constitue une sorte de « frontière naturelle » avec le Burkina Faso au nord. Il faut ajouter à ces deux fleuves, leurs principaux affluents :

- Le Baoulé, qui prend sa source vers Lingo, au nord d’Odienné; sa longueur est de 330 km environ sur le territoire ivoirien, depuis sa source jusqu’à la frontière ivoiro-malienne. - Le Bagoé, dont la source est située à Kokoum, dans la région de Madinani, a un cours

d’environ 230 km sur le territoire ivoirien, depuis sa source jusqu’à la frontière ivoiro- malienne.

- Les affluents de la Volta Noire sont nombreux. L’un d’entre eux, le Koulda, a un écoulement permanent. Leur direction est généralement Ouest-Est. A côté de ce fleuve, on peut citer le Kolodio, le Binéda, le Guimébé et le Niaguéla.

La frontière, entendue comme une délimitation linéaire et définitive de portions d’espace politiquement appropriées, était une notion inconnue avant l’arrivée des Européens, tout était mouvement. Les plages de hautes densités de population étaient séparées les unes des autres par des marches inhabitées ou sous-peuplées, le plus souvent forestières. Aujourd’hui c’est cette même nature qui sert de base pour l’élaboration du puzzle de l’Afrique de l’Ouest. Ainsi la nature par ses cours d’eaux et par les crêtes des montagnes va constituer des éléments fondamentaux pour la mise en carte de l’espace africain en donnant naissance à des territoires à part entière, dans lesquels les populations vont continuer à se mouvoir, en profitant des opportunités qu’offrent ces nouveaux territoires.

Ainsi les ruisseaux, rivières et fleuves, les sommets et lignes de partage des eaux sont regardés comme des frontières « naturelles ». Ces lignes et ces axes n’assument pas uniquement vis-à-vis des systèmes spatiaux une fonction de concentration, d’attraction, d’intégration (Pinchemel, 2002). Ils servent également à marquer, jalonner de façon visible, indiscutable, les limites des territoires construits par les hommes, depuis celles des plus petites unités administratives, communes, jusqu’aux limites des Etats.