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Avant de poser le problème de recherche, une synthèse des propos tenus jusqu’à maintenant s’impose. De notre problématique, il se dégage qu’au XXe siècle,

la promotion de la paix est opérée en deux phases. Dans la première, deux organisations internationales pour la paix, la SDN et l’ONU, ont été créées en réponse aux deux guerres mondiales. Dans la deuxième phase, en l’absence de guerres mondiales proprement dites, mais avec la présence des conflits intra-étatiques et de violences de toutes natures, on assiste à un grand développement de la notion de droits, de traités et de discours en faveur de la paix, ainsi que de recherches pour conceptualiser la paix et l’éducation à la paix.

La notion de paix au XXe siècle, comme l’écrit De Senaclens (1988), a été liée

à la sécurité interétatique collective avec la SDN, tandis que le concept de sécurité humaine a été avancé avec l’ONU. David (2006) soutient aussi qu’au début des années 1900, la notion de sécurité collective prévalait et qu’après les années 1950, celle de sécurité individuelle a émergé. De même, un changement a été opéré dans la stratégie pour atteindre à la paix. Dans la première moitié du XXe siècle, on utilise

des moyens belliqueux pour contrer la guerre. Puis, à partir de 1945, avec la déclaration de l’UNESCO, la notion de guerre passe au second plan et l’établissement de la paix est envisagé en priorité. Encore aujourd’hui, les institutions se réfèrent à la Déclaration des droits de l’homme de 1948 pour actualiser l’enseignement de la paix.

Par ailleurs, il est à noter que, dans le passé, seul le processus de paix négative était envisagé, ce qui se traduisait essentiellement par un traité négocié et signé entre États pour maintenir la paix. Les résultats bien souvent n’ont été qu’à court terme. De nos jours, c’est plutôt le processus de paix positive qui prime. Il suppose des changements d’attitudes et de comportements chez l’humain dans le but d’atteindre à une paix à long terme, qui soit durable. Cette notion de paix durable constitue une nouvelle orientation, au sens où les actions individuelles sont plus ciblées que les actions des États. Dès 1962, le fondateur de l’association mondiale École instrument de paix (ÉIP), Jacques Mühlethaler confirme d’ailleurs cette évolution en disant: « La paix doit obtenir l’approbation et le soutien de tous les hommes de bonne volonté, indépendamment de leur confession, de leurs doctrines, de la couleur de leurs cheveux ou de leur peau. » (1962, p. 12)

Cependant, il faut attendre la fin du XXe siècle pour que l’UNESCO fasse la

promotion de la culture de la paix, à la demande d’une vingtaine de lauréats du prix Nobel de la paix. Là encore, nous pouvons rappeler que la SDN et l’ONU ont été créées par des États représentés par des chefs de gouvernements, alors que l’année 2000 « Année de la culture de la paix » et que la période 2001 à 2010 déclarée

« Décennie internationale de la promotion d’une culture de la Non-violence et de la Paix au profit des enfants du monde » (ONU, 1998, A/RES/53/25) proviennent d’initiatives portées par des individus, en l’occurrence des lauréats du prix Nobel de la paix. On remarque ainsi que les innovations et les décisions en faveur de la paix passent d’un discours de l’État à celui des individus. À la fin du XXe siècle, certains

auteurs, comme Bayada et Boubault (2004), Harris (1999), Paquereau (2006) et Reardon (2003), considèrent qu’avec la notion de culture de la paix, une nouvelle page de l’histoire de l’humanité commence à s’écrire. Selon Grossi (2000), on est arrivé à: « un temps somme toute, où l’enfant devenu homme se réconcilie avec soi- même et avec son environnement en luttant contre les racines de la violence et de l’agressivité qu’il porte en lui. » (p. 25) La culture de paix suppose une éducation à la paix de tous les êtres humains.

Au regard de cette analyse, l’éducation à la paix devient une composante de l’éducation fondamentale de chaque être humain car, en ce début du XXIe siècle, la paix est représentée comme portée et vécue par chacun dans une culture de paix. Puisque la paix repose sur les individus, l’éducation à la paix doit interpeller chaque individu afin qu’il découvre en lui-même le potentiel de participer avec tout un chacun à faire advenir un monde de paix. Cette conception contemporaine de l’éducation à la paix vise le développement d’un idéal de paix partagé. Elle engage chacun en tant que citoyen à participer et à s’intégrer à une culture de paix pour construire un monde pacifique dont il est responsable. Que chaque personne devienne porteuse de paix, à long terme cela devrait avoir des répercussions sur la culture et la société. C’est pourquoi, nous considérons qu’éduquer à la paix, c’est amener les personnes à s’élever au rang d’artisans de paix, peu importe l’âge, la classe sociale, la culture ou la société.

À cette étape de notre étude, le problème de recherche se pose sous forme d’un questionnement. Premièrement: Quelles sont les différentes stratégies d’éducation à la paix formelles, informelles et non formelles mises en place à travers

le monde? Et deuxièmement: À partir de cet inventaire des stratégies d’éducation à la paix, quelles sont celles qui participent le plus à l’objectif de construire un artisan de paix en chaque individu, peu importe son âge, sa classe sociale, sa culture et sa société?

Dans le chapitre qui suit, nous répondons à ce questionnement de recherche, ce qui nous permet ensuite, de poser le problème spécifique et la question générale de recherche.

LA RECENSION DES ÉCRITS

Pour pouvoir répondre au problème de recherche, une recension des écrits a été réalisée. Ainsi, le deuxième chapitre de notre thèse qui porte sur la recension des écrits a été organisé en trois sections. La première section porte sur les orientations de l’éducation à la paix. D’une part, nous rapportons quelques programmes d’études en milieu scolaire et extrascolaire ainsi que des approches d’éducation à la paix promues par les ONG. D’autre part, nous relatons les stratégies d’éducation à la paix, le bilan à mi-parcours et les orientations de l’UNESCO en lien avec la Décennie de la paix (2001-2010). La deuxième section examine des études évaluatives sur l’éducation à la paix, en l’occurrence l’évaluation de programmes axés sur la promotion des conduites pacifiques et de résolution de conflits en milieu scolaire et parascolaire. Cette recension des écrits nous permet d’énoncer le problème spécifique et la question générale de recherche dans la troisième section.