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De la primauté des accords internationaux sur les conventions de coopération décentralisée

SECTION I : DE LA PLACE DES CONVENTIONS DE COOPÉRATION DÉCENTRALISÉE DANS L ’ORDRE JURIDIQUE INTERNE

Paragraphe 1 De la primauté des accords internationaux sur les conventions de coopération décentralisée

Les engagements internationaux étant des actes pris par les sujets du droit international doivent primer sur les actes signés par les acteurs infra-étatiques. Ce qui nous amène à démontrer le respect des engagements internationaux par les acteurs infra-étatiques(A) et ensuite nous évoquerons ses rapports avec les entités non reconnues par l’acteur étatique (B).

649“u e poi t, . l’a ti le de la loi ui dispose ue : aucune convention, de quelque nature que ne ce soit, ne peut être passée entre une collectivité territoriale et un groupement et un Etat étranger ». Note de Landbeck(Dominique), « La esu e de l’i t t lo al O l’au e de l’e t ate ito ialit », Revue générale des collectivités territoriales, 2002, p.16-24.

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A- Coopération décentralisée et respect des prérogatives de l'État

En matière de coopération décentralisée, les collectivités territoriales exercent leurs compétences dans le respect des règles et principes de valeur constitutionnelle. Elles doivent prendre garde notamment de ne pas porter atteinte aux prorogatives(1) et se conformer aux engagements internationaux(2).

1. Des prérogatives de l’Etat

Les prérogatives de l’Etat sont les fondements essentiels de l’existence de l’Etat sur le plan interne et international.

En premier lieu, nous avons le principe d’indivisibilité de la République et de souveraineté nationale650.Ce principe a été affirmé par l’article 1 du code général des collectivités territoriales maliennes qui dispose que « les communes, les cercles, les régions et le District de Bamako sont dotées de la personnalité morale et de l’autonomie financière dans le respect de l’unité nationale et de l’intégrité du territoire651.. ». En résumé, le principe d’indivisibilité de la République est exclu à la reconnaissance de tout pouvoir normatif autonome aux collectivités territoriales. A ce sujet, Jean Paul Pastorel estime que les compétences dévolues aux collectivités territoriales sont limitées par le caractère indivisible de la souveraineté et des droits de puissance propres à assurer l’intérêt général supérieur652. En second lieu, les intérêts nationaux et la cohérence de la politique étrangère dont la responsabilité incombe au Président de la République et au Gouvernement.

Enfin le principe de spécialité qui signifie que chaque collectivité doit prendre garde de ne pas s’interférer sur les compétences des autres collectivités territoriales. Par exemple en France le Conseil d’Etat a précisé que «la collaboration entre collectivités territoriales françaises et collectivités territoriales étrangères ne doit pas porter «atteinte à l’ordre des pouvoirs au sein de la République»653. Cette condition est d’autant plus impérative que les compétences des collectivités étrangères peuvent être plus étendues que celles de leurs

650 Le conseil constitutionnel en a affirmé le nécessaire respect dans la décision 76-71 DC du 30 octobre 1976

651 Article 1 du code général des collectivités territoriales, loi numéro 93-008 du 11 février modifiée le 23 janvier 2012 portant la libre administration des collectivités territoriales

652PASTOREL(Jean –Paul), « Collectivité territoriale et clause générale de compétence », issu de Revue de droit public, 2007,n°1, p .51.

168 homologues français. En plus, nous avons le principe d’égalité des citoyens devant les charges publiques et l’égalité des usagers devant le service public et les principes relatifs à la liberté du commerce et de l’industrie. Les acteurs infra-étatiques ont l’obligation de respecter aussi les engagements internationaux.

2. De la question de conformité aux engagements internationaux

L’article 27 de la loi 93-08, modifiée par la loi 2017-052 dispose que « les collectivités maliennes peuvent conclure des actions de coopération avec leurs homologues étrangères dans le respect de leur compétence654 ».Ce principe est confirmé par l’article L.1115-1 du code général des collectivités territoriales françaises ,qui stipule que « dans le respect des engagements internationaux de la France » les collectivités et leurs groupements « peuvent mettre en œuvre ou soutenir toute action internationale annuelle ou pluriannuelle de coopération, d’aide au développement ou à caractère international »655.La coopération doit s’appuyer sur des conventions qui ne peuvent être conclues qu’avec des collectivités territoriales étrangères656 et leurs groupements, ce qui exclut par conséquent les Etats au non-respect de la souveraineté657.

Dans son avis en date du 25 octobre 1994, le Conseil d’Etat français a rappelé qu’il appartenait au préfet658, conformément à l’article 72 alinéa 5 de la constitution et des pouvoirs

659que lui conféraient les lois du 05 juillet et 02 mars 1982 de veiller au respect du contrôle de légalité des conventions signées entre collectivités territoriales françaises et étrangères. Ces conventions qui ne constituent pas des engagements internationaux au sens du titre XIV de la Constitution, ne sauraient déroger aux règles de la légalité interne. En outre, il incombe aux représentants de l’Etat de vérifier que les collectivités et leurs groupements n’excèdent pas leurs compétences, et respectent les engagements internationaux660. Dans un autre arrêt de la cour administrative d’appel de Lyon du 13 décembre 2007661, la délibération d’un

654 Article 27 de la loi 93 modifiée par la loi 96-056 du 16-10-1996(déterminant la libre administration des collectivités territoriales)

655 Circulaire relative à la coopération décentralisée des collectivités françaises avec leurs homologues étrangères, Paris 02 juillet 2015

656Autorités locales étrangères, depuis la loi n°2007-147(France), note de Nicolas Kada, op ,cit , p.4.

657 Cons .const., 26 janvier.1995,n°94-358 DC :Rec.Const.1995, p.183. note de Nicolas Kada, op ,cit , p.4.

658EDCE n° 46, avis du C.E, section intérieure n°356 381 du 25 octobre 1994, p.379

659 Art 72 de la constitution française, op , cité

660 REMOND (S) et BLANC (J) , « les collectivités locales », Dalloz, 1992, p.32

661 CAA Lyon, 13 déc.2007, n°06LY00380. Note de Delphine Burriez, « L’a tio i ternationale des collectivités territoriales françaises », RDP, 2018, n°5, p.1271.

169 conseil municipal déclarant le territoire communal « Zone non AGSC » a été annulée au motif qu’il n’appartient pas à un conseil municipal de limiter la portée d’un traité international. Pour le juge administratif, ces « prérogatives »ne relèvent, en application des articles 52, 53 et 55 combinés de la constitution(France), que de la compétence des autorités de l’Etat ». La notion d’ « engagements internationaux » doit ici être interprétée comme visant les traités et accords visés par l’article 55 de la Constitution662. Cette interprétation, conforme à la lettre du texte constitutionnel663, laisse à l’écart les positions diplomatiques (refus de reconnaissance, rupture des relations diplomatiques) qui font partie intégrante de la politique étrangère de l’Etat. L’obligation pour les entités infra-étatiques de respecter les engagements internationaux de l’Etat trouve une justification toute particulière en droit international, par le fait que la violation d’un engagement de l’Etat par une entité infra-étatique est imputée à ce dernier et constitue un fait international illicite de l’Etat664.

A cet égard, il est notamment rappelé qu’aux termes de l’article 116 de la constitution malienne «les traités ou accords internationaux régulièrement ratifiés ou approuvés ont une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par la loi »665. La loi aussi est supérieure aux règlements (décret, arrêtés, délibérations etc.). Par conséquent, il appartient aux acteurs infra-étatiques de se conformer à ces normes en matière d’exercice de cette compétence internationale sous peine de nullité de ces accords.

En tout état de cause, il convient de dire que les collectivités territoriales maliennes désireuses d’engager une action de coopération avec des collectivités territoriales étrangères ou leurs groupements s’assurent en tant que besoin qu’elles ne risquent pas de contrevenir à ces engagements internationaux. Pour compléter cet élément, nous analyserons l’impossibilité des acteurs infra-étatiques de signer un accord de coopération décentralisée avec une entité non reconnue par l’Etat malien.

B- Coopération décentralisée et entité non reconnue par l’acteur étatique

662Cir .20 avril.2001 en France ,prec, p.8. note Delphine Burriez, precitée

663De la e a i e l’a ti le de la Co stitutio f a çaise est i te p t o e isa t u i ue e t les traités et accords internationaux. Cité par BURRIEZ(Delphine), « L’a tio i te atio ale des olle ti it s territoriales françaises », RDP , 2018, n°5, p.1271

664 Cette situatio a o duit le l gislateu à i t odui e u e a tio u soi e à l’e o t e des collectivités te ito iales e as de iolatio pa es de i es du d oit de l’u io eu op e e L. ° -991, 7 aout 2015, dite « loi NOTRe », art 112). Note de BURRIEZ(Delphine), « L’a tio i te atio ale des olle ti it s te ito iales françaises », RDP , 2018, n°5, p.1271

170 C’est précisément dans l’objet de préserver les pouvoirs constitutionnels du Président de la République et du Gouvernement du Mali, en matière de politique étrangère que le législateur n’autorise la signature des conventions de coopération décentralisée qu’ « avec des autorités locales étrangères »666 .C’est dans cette optique, il est interdit aux collectivités

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