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Les premières explorations belges

Dans le document Haut-Uele. Trésor touristique (pdf - 6,8 MB) (Page 139-143)

CHAPITRE V L’HISTOIRE DE L’ORGANISATION SOCIO-ADMINISTRATIVE DU HAUT-UELE

1.2. L’ÉTAT INDÉPENDANT DU CONGO (1885-1908)

1.2.1. Les premières explorations belges

Après la fondation de l’État indépendant du Congo en 1885, les explorations vers le Haut-Uele vont s’organiser à partir de la côte Atlantique. Cette fois-ci, dans le grand souci d’occuper cette région, Léopold II n’expédiera que des militaires belges. Les noms de trois officiers belges sont étroitement liés aux expéditions qui ont conduit à une meilleure connaissance et à une intégration de la région de l’Uele dans l’État indépendant du Congo.

Alphonse Vangele (1848-1939)

Le problème du cours de la rivière Uele demeurera encore énigmatique pendant plus de cinq années.

Finalement, le lieutenant Alphonse Vangele va le résoudre :

« le 30 juin 1886, il s’embarquait à nouveau, investi du titre de commandant des territoires entre Itimbiri et Falls, mais, en fait, chargé d’une importante mission sur l’objet de laquelle on faisait mystère. Décidé à élucider le problème géographique qui préoccupait alors le monde savant  :

“l’Ubangi est-il le cours inférieur de l’Uele ?” Léopold II avait chargé Vangele de la direction d’une expédition qui devait explorer l’Ubangi aussi loin que possible pour vérifier l’hypothèse émise  ; le souci géographique se doublait de considérations politiques ; il importait d’être documenté.

Le 11 octobre 1886, Vangele, accompagné du lieutenant Liénart, quittait l’Équateur à bord de l’Henry Reed  ; le lendemain il pénétrait dans l’Ubangi et, après avoir dépassé le poste français de Kundja, qu’il saluait du pavillon, il ancrait à l’amont dans une petite île près de Bisongo, où en avril 1884 Hanssens avait signé un traité avec le chef indigène [...]

247 Laude, N., « Casati Gaetano », in Biographie coloniale belge, I, op. cit., col. 219-220.

En juillet 1890, Vangele se décide à reprendre ses tentatives d’exploration de l’Uele ; accompagné de Le Marinel et de De Rechter, il atteint l’île de Banifa, que les vapeurs, arrêtés par un banc rocheux, ne peuvent dépasser. Vangele les fait ancrer, en confie la garde à De Rechter et poursuit sa route vers l’amont, en pirogue avec Le Marinel. Il franchit à grand-peine des rapides et arrive à Mokoangu. Il fait le point : il est à 23°4’27 de longitude E, ce qui, à son estime, le situe à 15 km d’Abdallah, point relevé. Pourquoi ne poursuit-il pas sa route ? Les indigènes l’ont bien reçu et néanmoins poursuit-il rebrousse chemin et rejoint De Rechter à l’île Banifa.

Les vapeurs ramenés à Yakoma, Vangele et Le Marinel tentent de pénétrer en pirogue dans le Bomu, où ils relèvent bientôt sur la rive gauche l’embouchure d’une rivière de quelque importance  : c’est la M’Bili. Mais la navigation y est tôt interdite par une chute. On revient à Yakoma pour remonter à bord de l’AIA et de l’En Avant et tenter d’atteindre dans le Bomu un point proche de la résidence de Bangasso. Les deux vapeurs doivent stopper devant le banc rocheux de Coni, que Vangele baptisera du nom de Hanssens. Ces dernières tentatives d’exploration étaient terminées avant le 1er septembre.

Rentré à Yakoma, Vangele y reçoit Bangasso, qui l’invite à le mener lui-même par terre jusqu’à son village au Bali. On s’embarque en pirogue, on remonte le Bomu jusqu’au pied des chutes Hanssens, que l’on contourne par un sentier, et l’on rembarque en amont jusqu’au village de Bangasso. Fin septembre, Vangele était rentré à Yakoma.

Il prenait ses dispositions pour rentrer en Europe quand il apprend par des rumeurs indigènes qu’un Blanc est installé à Djabir, sur l’Uele. Ayant éprouvé que cette rivière était impraticable, il retourne chez Bangasso où il arrive le 26 novembre et obtient du chef de se faire guider dans l’entre Bomu-Uele jusqu’à Djabir. Avec ses guides, dix Zanzibarites et dix porteurs, Vangele quitte Bangasso, traverse le Bomu, la Bili et atteint l’Uele, à hauteur de l’île Mutemu, après un total de marche de vingt-quatre heures. Il longe la rivière, arrive au village de Ngwasa, où il obtient pirogues et pagayeurs, remonte l’Uele et arrive le 2 décembre à Gormandia. Le lendemain il rencontre Milz, qui venait au-devant de lui. Le jour même il est à Djabir : la jonction s’était opérée en 19 jours. Le problème Ubangi-Uele était définitivement résolu248. »

248 Engels, A., «  Vangele Alphonse  », in Biographie coloniale belge, II, Bruxelles, Institut royal colonial belge, 1951, col. 934-935.

SOUS LA DOMINIATION BELGE

Guillaume Van Kerckhoven (1853-1892)

À la fin de 1890, le roi Léopold II décida d’envoyer une puissante expédition qui, en remontant la vallée de l’Uele, finirait par atteindre le Nil, barrant la route vers le Nord aux trafiquants arabes et assurant la souveraineté de l’État indépendant du Congo dans une vaste région qui, depuis les explorations de Junker, était demeurée à peu près inaccessible. Le capitaine-commandant Guillaume Van Kerckhoven, nommé inspecteur d’État, est mis à la tête de cette expédition. Quatorze officiers et sous-officiers blancs sont placés sous ses ordres et l’expédition intègre également deux médecins, deux commis, trois interprètes et un imposant contingent d’environ 500 auxiliaires indigènes bien armés. Ses troupes sont naturellement aussi pourvues d’artillerie249.

Guillaume Van Kerckhoven arrive le 2 décembre 1890 à Boma. Quelques mois plus tard, il est à Bumba qui est le point de concentration choisi pour le gros de ses troupes.

L’Itimbiri est la voie de pénétration vers l’Uele. Il se rend encore aux Falls où il tentera d’endormir la méfiance de quelques chefs arabes.

« C’est le 12 décembre 1891 seulement, qu’après avoir ainsi protégé ses arrières, Van Kerckhoven put quitter la station qu’il venait de fonder sous le nom de Bomokandi et prendre, avec le gros de son expédition, la voie de l’Est. Il traversa une contrée marécageuse, couverte de collines herbeuses marquant très sensiblement la ligne de faîte qui sépare les bassins de l’Uele et du Bomokandi …

Plus loin, et au fur et à mesure de sa progression, Van Kerckhoven fonda des postes à Amadi, Surongo et Yangara.

Ce dernier, situé sur un affluent de gauche de l’Uele, la Gadda, devait plus tard, sous le nom de Niangara, devenir le chef-lieu du district de l’Uele.

Tous ces postes nouveaux, commandés par des Européens et marques visibles de la souveraineté de l’État, n’étaient pas établis sans négociations préalables avec les chefs indigènes, qu’il fallait d’abord rallier aux intérêts de notre politique.

En procédant de la sorte, Van Kerckhoven obéissait aux instructions qu’il avait reçues du Roi-Souverain et qui lui prescrivaient d’occuper solidement le pays après en avoir expulsé les envahisseurs arabes. Pour réaliser ce programme, il utilisa les services de ses adjoints, principalement de Milz 249 Cambier, R., «  Van Kerckhoven Guillaume  », in

Biographie coloniale belge, I, op. cit., col. 566-573.

et de Van de Vliet, et s’imposa à lui-même de nombreuses marches et contre-marches […]

Le 1er avril 1892, Van Kerckhoven se prépare enfin à quitter Niangara pour gagner le Kibali, la Nzoro et le bassin du Nil.

Mais, le 8, il est atteint de fièvre hématurique et doit s’aliter. Il ne peut se mettre en route que le 18, après avoir envoyé en avant Gustin, qu’accompagnent quatre Européens, 250 soldats et notre allié Semio avec ses hommes. Le 23, il atteint le confluent Kibali (Haut-Uele)–Dungu et le 28 la zériba Mbittima, située par 29°

de longitude E sur la rive sud du Kibali. Il y reçut la soumission de Wando, vieux chef vongara dont le pouvoir s’étendait au sud et à l’ouest jusqu’au pays mangbetu. Accompagné de Miltz, il repart ensuite, passe à Surur, confluent du Kibali et de la Nzoro, le 10 juin, et décide de remonter cette dernière rivière.

Le pays devient montagneux. La rivière, quoique large de 50 à 75 mètres, ne possède plus que de petits biefs navigables, étant barrée souvent sur plusieurs kilomètres par une succession de chutes et de rapides. La rive nord de la Nzoro est habitée par les Logos, avec lesquels on a quelques escarmouches, et la rive sud par les Mangbetu. Outre la question du ravitaillement se posait celle du portage. L’avant-garde, conduite par Gustin et Semio, restait sans liaison, au-delà des rapides dénommés depuis chutes Miltz, avec l’arrière-garde, ou, plus exactement, la deuxième colonne de l’expédition, composée de 300 hommes, avec Van Kerckhoven, Milz, Montangie et Van de Vliet. On apprit bientôt qu’elle avait dû livrer de nombreux combats et que les indigènes, surpris par l’arrivée de l’expédition et ignorant son but, faisaient le vide et détruisaient leurs plantations. Il fallut, pour pouvoir pousser en avant, renvoyer une partie des bagages à Mbittima et se frayer un passage par la force des armes qui, peut-être, eût pu être évitée si Van Kerckhoven, faute d’interprète et de nouveau atteint d’hématurie, avait pu faire connaître ses intentions pacifiques.

Après quinze jours de pénible marche, on arriva enfin, le 25 juillet, à Tagomolanghi, sur la Nzoro supérieure. Le 2 août, les vivres faisant défaut, on repartit en direction de la Kibbi, que l’on disait proche de Wadelai, c’est-à-dire dans le voisinage immédiat du Nil. Une vingtaine de kilomètres furent franchis.

On se trouvait alors, sans le savoir, à la hauteur des sources du Kibbi, le dernier affluent appartenant au bassin de l’Uele.

Poursuivant toujours sa marche vers l’Est, cette fois mieux ravitaillé, Van Kerckhoven parvint, le 9, à 15 kilomètres environ au sud du mont Béka, appartenant à la ligne de faîte Congo-Nil, lui-même à dix kilomètres environ du sud du mont Wati. Le 10, au point du jour, la colonne était attaquée par les indigènes.

Van  Kerckhoven et Miltz courent à leur rencontre. En les

suivant précipitamment, le boy porte-fusil de Van Kerckhoven veut recharger son arme. Il presse par mégarde sur la détente ou bien celle-ci heurta-t-elle une branche voisine, toujours est-il que le coup part et atteint Van Kerckhoven dans le dos à la hauteur du cœur. Le malheureux tombe et expire250 ».

Dans la littérature coloniale belge, Guillaume Van Kerckhoven est présenté comme un héros. Toutefois, la vérité oblige à dire que sa brutalité était légendaire.

La mission envoyée vers le Maniema par le Syndicat commercial du Katanga et dirigée par Arthur Hodister se fit massacrer en 1892 par des Arabisés excédés par la violence de Van Kerckhoven qui menait l’expédition dans l’Uele et qui razziait tout simplement tout l’ivoire disponible sur son passage.

Louis Chaltin (1857-1933)

En mai 1895, Louis Chaltin s’embarque vers l’EIC pour un second terme. Il doit se rendre le plus vite possible dans l’Uele. Il doit reprendre à Le Marinel le commandement de l’expédition Uele-Nil, d’une part, et à Francqui la direction du district. Il va donc s’installer à Niangara, le chef-lieu de l’Uele. De là, il entreprend tout d’abord des expéditions contre quelques chefs azande insurgés contre l’EIC. Le chef Ndoruma est battu le 5 avril 1896251.

Le 31 octobre de la même année, il reçoit l’ordre de marcher vers le Nil. Il rassemble ses forces militaires à la station de Dungu qu’il quitte le 14 décembre. Il remonte le Kibali jusqu’à Surrur et de là il pousse au nord-est vers Faradje d’abord et vers Aba ensuite. Après une marche qui avait duré plus de six semaines, Chaltin arrive au bord du Nil avec ses troupes, en face de l’ancienne station égyptienne de Bedden. C’est là qu’il va infliger aux mahdistes une défaite sanglante, à la bataille dite « de Bedden ». Le même jour, il poursuit son chemin vers le pied du mont Redjaf où il livre un nouveau combat qui sera décisif, parce qu’il vaincra définitivement les mahdistes.

Louis Chaltin repart pour un troisième terme au Congo en mars 1899 en qualité d’inspecteur d’État. Pendant cette période il se met à l’organisation administrative et militaire de l’Uele et de l’enclave de Lado. Il quitte définitivement 250 Cambier, R., «  Van Kerckhoven Guillaume  », in

Biographie coloniale belge, I, op. cit., col. 566-573.

251 Lotar, L. et Coosemans, M., «  Chaltin Louis  », in Biographie coloniale belge, I, op. cit., col. 229-232.

le service de l’État indépendant du Congo en 1902. Mais sur sa proposition, le gouvernement de l’EIC adopte, en 1903, une nouvelle subdivision  : les zones nouvelles sont l’Uéré-Bili et la Gurba-Dungu au nord de l’Uele ; le Rubi et le Bomokandi au sud. Elles tirent leurs noms des rivières principales qui les arrosent. Une cinquième zone comprend les territoires de l’enclave de Lado.

La bataille de Bedden

« Les troupes appelées à faire partie de l’expédition vers le Nil, furent réunies à Dungu, dans les premiers jours du mois de décembre 1896. Le 14, elles se mirent en marche et arrivèrent, le 23, à Surrur, au confluent du Kibali et du N’Zoro, où je décidai la construction d’une grande station, qui devint le chef-lieu de la zone des Makrakras et qui, à ma demande, porte le nom de Van Kerckhovenville, en souvenir du premier chef de l’Uele.

Les forces dont je disposais, soit 700 soldats, étaient réparties en sept pelotons, commandés par MM. Kops, Gehot et Laplume, officiers ; De Backer, Goebel, Dupont et Cajot sous-officiers. M. Cajot était spécialement chargé du service du canon (un Krupp de 7°5) ; les artilleurs noirs faisaient partie de son peloton. Il y avait en plus dix-neuf clairons-musiciens armés et une section de 35 hommes, commandée par le lieutenant Saroléa sous les ordres et la direction duquel étaient placés les 250 porteurs et les 500 lanciers Azandes de Renzi et de Bafuka. Le médecin de l’expédition était le Dr Rossignon […]

Monument en pierre du pays dédié au colonel Chaltin. (HP.1956.15.4055, collection MRAC Tervuren ; photo H. Goldstein, 1949, Sofam ©.)

SOUS LA DOMINIATION BELGE

Comme il n’existe que des sentiers de caravanes, enserrés très souvent entre des herbes hautes de trois et quatre mètres formant des sortes de murailles, les hommes ne peuvent marcher qu’à la file indienne. Toutefois, afin de pouvoir faire face à une attaque brusque et inopinée, de quelque côté qu’elle vînt, et de permettre un déploiement rapide de mes forces, je disposais mes pelotons en les accolant par deux dans le sens de la profondeur. Les pelotons marchant à la file, il n’y avait donc que deux hommes de front. Si cette disposition, par suite de l’exiguïté du sentier, ralentissait ma marche, elle augmentait, par contre, ma sécurité […]

Le 1er janvier 1897, à 3  ½ heures de l’après-dîner, l’expédition quitta Surrur, se dirigeant vers le Nil. Il serait fastidieux de vous raconter par le menu les détails de cette marche qui dura 47 jours […] Trente-sept de nos soldats succombèrent en cours de route […] Enfin, le 15 février, nous arrivâmes à Bedden sur le Nil, où, autrefois, avait existé une station égyptienne. Nous étions à 25 kilomètres de Redjaf ; le jour même de notre arrivée, des soldats partis en chasse, car la faim commençait à talonner l’expédition, échangèrent des coups de feu avec des derviches.

La nuit et la plus grande partie de la journée du lendemain se passèrent sans incident, mais tout à coup, vers 5 ½ heures du soir, alors que la nuit allait tomber, nos sentinelles avancées se replièrent sur le camp en toute hâte en faisant de grands gestes. Le cri “aux armes”

retentit et vola d’un bout à l’autre du camp. Les hommes se précipitent aux faisceaux et, en moins de cinq minutes, tout le monde est à son rang de bataille, la place de chaque unité étant toujours marquée d’avance, afin de parer rapidement aux trop soudaines attaques et de pouvoir prendre la position de combat sans hésitation, même dans l’obscurité.

Sur les hauteurs qui se trouvent à 1.500 mètres de nous, on distingue des groupes nombreux de derviches et des drapeaux. J’ordonne à M. Cajot de tirer quelques obus et l’ennemi disparaît. La nuit se passe sans alerte, mais non sans souci !

Le 17, à 6 heures du matin, a lieu le départ vers Redjaf ; la marche est lente et prudente, nous nous attendons à une attaque. À 7 heures, le commandant de l’avant-garde, M.

Géhot, me signale la présence de derviches, bien dissimulés sur des hauteurs qui nous barrent la vue à 400 mètres vers le Nord. Leur position, appuyée au Nil d’un côté, et de l’autre à un profond ravin, à une étendue de près de trois kilomètres.

Au centre, entre les hauteurs, au point de passage de la route, se trouve un défilé qui est bien défendu.

Je fais prendre la formation de combat  : cinq pelotons sont déployés en tirailleurs  ; trois sont tenus en réserve et les lanciers de Renzi et de Bafuka, prêts à charger au premier signe, se massent derrière notre aile gauche. Les derviches ouvrent le feu ; dès le début de l’action, ils tirent à outrance, tandis que nos soldats, stoïques sous les balles, observent l’ordre donné de ne pas brûler une cartouche. Le canon seul, placé au centre du front, répond par une dizaine d’obus à la fusillade assourdissante de l’ennemi.

À un moment donné, un mouvement tournant se dessine sur notre gauche ; j’envoie, au pas de course, deux pelotons de la réserve pour y parer et je fais ouvrir le feu. Les derviches, abandonnant leur position défensive, descendent dans la plaine et s’avancent vers nous ; notre feu redouble ; les voyant hésiter, je porte ma ligne à 100 mètres en avant et ordonne le feu rapide. Nous tirons les uns sur les autres à une distance de moins de 200 mètres.

Les derviches commencent à lâcher pied ; ils se retirent d’abord dans le plus grand ordre, battant en retraite au pas ordinaire et se tournant vers nous pour tirer. Mais notre feu leur fait un mal terrible ; aussi la déroute ne tarde-t-elle guère à se mettre dans leurs rangs et leur retraite se change en fuite désordonnée vers Redjaf. C’est à ce moment que je fais sonner la charge. Les 700 soldats et les 500 lanciers azandes, ceux-ci faisant un mouvement tournant sur la droite derviche, s’élancent en avant comme des démons vomis par l’enfer, poussant des cris de fauves en furie, tirant, s’interpellant, s’excitant, emportés par leur fougue de sauvages et se ruant sur l’ennemi en fuite.

Malheureusement, au cours de cette poursuite, en chargeant à l’aile droite, à la tête de son peloton, notre cher camarade Saroléa, le plus brillant de mes officiers, auquel je tiens à rendre ici un pieux hommage, tomba, frappé d’une balle en plein cœur. Une dizaine de soldats furent tués, comme lui, et une vingtaine blessés. Il me fallut près d’une heure pour rassembler soldats et lanciers, tant ils avaient mis d’acharnement dans la poursuite. Le combat de Bedden était une victoire …

Après un repos de deux heures, nous nous remettons en marche, et, d’une seule traite, sous un ciel de feu, nous parcourons les 22 kilomètres qui nous séparent de Redjaf.

Vers 2 ½ heures de l’après-midi, la pointe d’avant-garde arrive en vue du mont Redjaf et constate que les derviches

ont pris position sur une crête, allant de ce mont vers le Nil, et d’où ils nous accueillent par un feu violent.

Malheureusement, notre colonne n’est pas unie  ; à cause des difficultés et de la longueur de la marche, elle s’est allongée et, de la tête à la queue, il y a une distance considérable. Les premiers arrivés se déploient et sont successivement renforcés. L’artillerie madhiste tire à obus, mais elle ne nous fait pas grand mal, ses projectiles, mal

Malheureusement, notre colonne n’est pas unie  ; à cause des difficultés et de la longueur de la marche, elle s’est allongée et, de la tête à la queue, il y a une distance considérable. Les premiers arrivés se déploient et sont successivement renforcés. L’artillerie madhiste tire à obus, mais elle ne nous fait pas grand mal, ses projectiles, mal

Dans le document Haut-Uele. Trésor touristique (pdf - 6,8 MB) (Page 139-143)