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Dans la pratique, à quoi ressemblent une session individuelle et une intervention en équipe ?

Dans le document Frank Bournois Thierry Chavel (Page 102-106)

Une session individuelle

Pendant un séminaire d’affaires organisé par EM Lyon à l’intention d’un groupe d’employés d’Alcatel, j’ai fait une session de coaching avec un manager australien. C’était un moment critique pour Alcatel, car la fusion avec Lucent avait été annoncée, mais pas finalisée. Les deux cultures étaient ressenties comme très différentes, sinon opposées, et la plupart des personnes présentes avaient des incertitudes sur l’avenir de leur poste. J’ai rapidement décrit à Bob les deux approches disponibles ; l’une qui se passerait « à l’intérieur » et qui serait majoritairement verbale, et l’autre qui se passerait « à l’extérieur » et qui utiliserait l’espace : il a accepté la seconde proposition. Je lui ai proposé de mettre sur papier son objectif, qui était d’examiner deux possibilités de car-rière, et de le placer au bon endroit quelque part dans le paysage. Il l’a collé à un arbre et il s’est placé juste à côté. Je lui ai demandé ce qu’il ressentait dans cette position et il s’est dit « plein d’anxiété ». J’ai suggéré qu’il trouve un autre espace à une distance différente pour voir ce qui se passerait. Il a essayé plu-sieurs espaces, pour se fixer sur un espace beaucoup plus loin et excentré. Il m’a alors annoncé qu’il était moins anxieux et qu’il pouvait y voir plus clair.

« Que sais-tu sur ton objectif à partir de là ? », l’ai-je questionné. Il a donné ses premières impressions du dilemme qu’il vivait, basées sur deux propositions très différentes. Je lui ai suggéré de trouver un espace à partir duquel il pourrait voir les deux propositions, différenciées par leurs deux espaces propres. Il s’est tourné vers une large perspective qui donnait sur un espace de gazon – un champ avec un lac –, et des collines avec des bosquets derrière. Il a localisé les deux propositions : la première était juste de l’autre côté d’un petit pont, et la seconde à mi-hauteur sur la colline qui montait derrière. La distance a eu beau-coup d’effet sur la fluidité de ses perceptions, car de toute évidence il avait l’air plus détendu, et il commença à projeter ses idées sur la différence entre les deux. La première s’est montrée plus proche des gens et des choses connues : à un moment il s’est tenu debout, tranquille, en se demandant même ce que les cygnes venaient faire dans son scénario. Nous avons attendu et soudain, il avait la réponse : ils représentaient deux mentors qui l’avaient aidé dans le passé et

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dont l’opinion lui était précieuse. La proposition alternative sur la colline s’est révélée être « le choix du pionnier » – là, il pourrait se lancer seul et creuser un nouveau sillon sans l’aide de personnes connues.

La session s’est poursuivie à un rythme qui correspondait à la réflexion en cours. Certaines révélations sont arrivées très rapidement, et d’autres plus len-tement. Une fois la bonne distance trouvée, il était dans un processus d’auto-modélisation. « C’est pareil ou c’est différent ? » lui ai-je demandé à plusieurs reprises. Et, bien sûr, je lui ai posé la question de base (sur les « attributs » en clean language) : « À quel genre de cygne avons-nous affaire ? » La question :

« Et est-ce qu’il y a autre chose à propos de… ? » était aussi très « clean ». Les questions « Temps » ont permis à Bob de développer des séquences (« Qu’est-ce qui se passait juste avant ? »), et de vérifier des conséquenQu’est-ces : « Et puis, qu’est-ce qui se passe ? »

La session tout entière a pris un peu plus d’une heure et à la fin Bob avait une idée claire de ce qu’il projetait sur les deux propositions. Il était étonné par la quantité d’informations sur lesquelles il avait pu mettre de la lumière, à propos de ses ressentis, de ses stratégies, de sa pensée. Il n’était que trop conscient que s’il était resté dans sa position initiale, le nez dans le problème, seule son anxiété aurait grandi.

Au moment de commencer, il avait été convaincu qu’il devait décider vite. En fait, c’est son anxiété qui l’avait poussé, et ceci l’avait empêché de créer de véri-tables alternatives. Le processus lui a révélé la véritable distance qu’il était nécessaire de parcourir pour démêler son problème. Il a pu laisser derrière lui la pression qui provenait de son cerveau reptilien, qui lui disait que pour survivre il faut décider vite. Ceci a permis à son néocortex de participer créativement à la fabrication de scénarios – qui précèdent obligatoirement toute prise de déci-sion. Il m’a raconté plus tard qu’il avait, en fait, pris « le chemin le moins battu », et que ce chemin-là s’était confirmé comme étant vraiment le sien.

À retenir

L’espace contient des informations qui sont disponibles, dès lors qu’on les contacte.

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Sophie de Bryas1 témoigne d’une intervention en équipe

J’utilise la modélisation symbolique pour aider et accompagner les organisations dans leur évolution. Il s’agit généralement de petites structures (2 à 6 personnes) qui sont à un moment de leur vie où des décisions très concrètes doivent être prises afin de franchir un cap ou une étape nouvelle. Ces étapes sont souvent des

« crises de croissance », c’est-à-dire que l’esprit présent à la création de la struc-ture (de l’entreprise ou de l’organisation) diminue d’intensité, et l’énergie parti-culière des débuts commence à s’essouffler. Les créateurs font appel à moi car ils ont l’impression de ne plus savoir vers où aller et peuvent, par exemple, avoir du mal à identifier qui sont leurs clients. Leur discours commercial devient plus banal et leurs points forts/faibles sont mal identifiés. En un mot, ils ont perdu les sensations internes qui les dirigeaient naturellement, et les choses ne vont plus de soi. Au niveau de l’organisation, il peut y avoir des tensions et une lassi-tude avec parfois le désir sous-jacent « d’abandonner le bateau ». J’organise alors des espaces de travail que j’intitule « Nouvelles Perspectives » ou « Redé-ploiement ». Il s’agit de journées de travail qui se déroulent autour de trois axes distincts :

1. État des lieux et mise à plat des objectifs.

2. Modélisation dans l’espace.

3. Plan d’actions opérationnelles.

Chaque participant est invité à formuler son objectif personnel, et à le placer sous forme d’une phrase et d’un symbole dans l’espace délimité (espace « C »).

Il se place à distance de son objectif (état présent) et nomme cet espace « A ».

Chaque participant, à son tour, place donc deux cartons sur lesquels une/un phrase/mot/dessin symbolise l’objectif et l’état présent. Grâce aux uniques questions du clean language, et sans aucune autre remarque ni analyse, les parti-cipants sont amenés à faire une carte symbolique de la situation de l’entreprise, une fois les objectifs personnels placés.

Petit à petit, je pose des questions sur l’existence probable de liens entre les espaces (y a-t-il quelque chose entre l’espace X et l’espace Y ?), afin de faciliter l’apparition d’espaces qui ne sont pas apparents dans un premier temps. Il s’agit souvent d’endroits que les participants préfèrent éviter (espace risque/

conflit/danger) à partir desquels de nouvelles informations sont verbalisées.

1. Sophie de Bryas est consultante en entreprise.

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Les participants connaissent parfaitement la situation actuelle et ont souvent une bonne idée de ce qu’ils devraient faire. Leur problème, c’est qu’ils ne peu-vent pas le faire car, soupeu-vent, une attente secrète ou une peur cachée agit malgré eux. J’ai, par exemple, rencontré le cas d’un créateur d’entreprise qui grâce à ce processus a pu prendre conscience que son objectif était en réalité un « grand rêve caché » qui l’empêchait de prendre des décisions concrètes. Ce rêve caché, une fois apparu dans le processus et exploré, s’est avéré finalement une sorte de

« ballon de baudruche », vite dégonflé. Conscient alors que ce rêve n’était pas si attractif, ni finalement si motivant, il a pu se mobiliser à nouveau et, de façon plus pragmatique, envisager un redéploiement plus modeste, mais finalement plus engageant, de son entreprise.

À retenir

Votre client possède en lui et autour de lui toutes les ressources dont il a besoin. Aidez-le à les contacter et étonnez-vous avec lui !

Un autre exemple qui me semble digne d’intérêt est celui de ce créateur d’entreprise, qui au bout de dix ans souhaitait commencer à moins travailler au quotidien (devait-il vendre son affaire ?), et cependant était très attaché à son entreprise. Il a finalement décidé de diminuer sa charge de travail et de se séparer des clients avec lesquels il avait peu de liens, afin de se recentrer vers une activité plus « sélective ». En se positionnant volontairement comme étant celui qui choisissait ses clients, et en ayant des rapports de qualité avec eux, il a résolu son dilemme « grossir ou vendre » et a ainsi pu conserver des méthodes de travail plus artisanales qui font son succès actuel.

Les répercussions au plan opérationnel sont parfois très étonnantes : déména-gement, nouvelle identité graphique, changement de nom, de partenaires, démission. Tous ces événements peuvent être la conséquence de ces séances de travail. Je suis toujours étonnée de constater que les explorations du monde symbolique des personnes dans les structures et les organisations ont des influences directes et très concrètes. Les clients se sentent respectés et s’enga-gent avec beaucoup de plaisir et de créativité dans cette démarche ; ils en apprécient l’efficacité opérationnelle.

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Pour aller plus loin

Les trois méthodes présentées ci-dessus sont désormais utilisées dans le domaine du coaching en Grande-Bretagne, aux États-Unis, aux Pays-Bas, en Italie et en France. Pour plus de détails, nous vous invitons à consulter les sites Internet suivants :

www.innovativepathways.net www.cleanlanguage.co.uk

Dans le document Frank Bournois Thierry Chavel (Page 102-106)