• Aucun résultat trouvé

Prargraphe2 Pour un nouveau fondement du contentieux administratif noyau constitutionnel de la répartition des compétences

A- Pour un nouveau fondement du contentieux administratif

En droit français Les théories de séparation des pouvoirs et séparation des autorités administratives et judiciaires sont constamment remises en cause par d‟éminents auteurs :

Le professeur Delvolvé parlera de paradoxes : « Le premier paradoxe est que le

principe de séparation des autorités administrative et judiciaire a été établi en quelque sorte sans qu’on l’ait voulu- en tout cas, sans qu’on ait voulu lui donner le sens qu’on lui attribué plus tard »2.

Alors que le professeur Chapus considèrera que « Le principe de séparation ne comporte pas, par lui-même des conséquences intéressant l‟existence des juridictions,

1L’avis du conseil constitutionnel n° 01/16 A.RC/CC/ du 28 janvier 2016 relatif au Projet de loi portant

révision de la Constitution. Considère que le Préambule pose les principes fondateurs de l‟Etat et de la société et marque le processus d‟évolution de l‟histoire de l‟Algérie ; qu‟il constitue, dès lors, un cadre juridique et une référence constitutionnelle pour les autres Titres de la Constitution ; qu‟il fait, par conséquent, partie des principes fondamentaux régissant la société algérienne. ; J.O, 2016, n°06, 03.

2Delvolvé Pierre, Paradoxes du (ou paradoxes sur le) principe de séparation des autorités administratives

en ce sens qu‟il imposerait soit l‟unité juridictionnelle, soit le pluralisme des ordres de juridictions»1.

Pour le professeur D. Rousseau : « une partie de la doctrine reconnait, en effet avec Michel Tropper, non seulement que Montesquieu est considéré à tort comme le père de la théorie de la séparation des pouvoir, mais encore que « pris dans toute sa rigueur, ce principe n‟a inspiré aucune de nos constitutions ».2

En d‟autres termes, pour le professeur Rousseau, sur le plan doctrinal, « les classifications constitutionnelles fondées sur les modalités différentes de séparation des pouvoirs sont sans valeurs logique, scientifique, ni même pédagogique »3.

Et donc pour l‟éminent professeur « la conception traditionnelle de la constitution-séparation des pouvoirs, comme moyens d‟assurer la démocratie et la liberté politique des citoyens s‟efface au profit d‟une autre conception de la constitution : la constitution-garantie des droits des gouvernés, c'est-à-dire fondé sur la première partie de l‟article 16 de la déclaration de 1789 ».4

Dans le même sens notre l‟éminent et estimé professeur Yadh Benachour considérera qu‟il « est à noter que l‟universalisante théorie de la séparation des pouvoirs est en grande partie responsable de « la » vision déformante de l‟État. Déformante parce qu‟elle brise l‟unité fondamentale de la fonction politique de l‟État par la rigide distinction du « pouvoir exécutif » et du « pouvoir législatif » alors que ces deux branches de l‟État concourent à une fonction unique ; déformante, parce qu‟elle fait occuper au « pouvoir judiciaire », une place qui n‟est pas la sienne, dans un monde qui n‟est pas le sien ; déformante surtout, parce qu‟elle occulte totalement le fait administratif, fait majeur de l‟État.

La théorie de la séparation représente à la fois une contre-vérité historique et théorique, d‟autant plus grave qu‟on la veut universelle »5

, certains auteurs parleront d‟un « futur passé » de la séparation des pouvoirs !6, alors que d‟autre parleront d‟u sanctuaire vide !7

L‟éminent et regretté professeur Jean Rivero avait dans le colloque de Tunis sir le décret Beylical précisé son idée sur le thème et à une occasion bien particulière où était réunis droit maghrébin et droit français, et avec sa maitrise habituelle des formules il

1Chapus René, Les fondements de l‟organisation de l‟Etat définis par la Déclaration de 1789 et leurs

prolongements dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel et du Conseil d‟Etat, In. L‟Administration et son Juge, P.U.F, Paris, 1999, p.415.

2Michel Tropper, La séparation des pouvoirs…, op.cit., p.205 ; cité par D. Rousseau, droit du

contentieux constitutionnel…, op.cit., p.490.

3Ibid., p.491, l‟auteur cite M. Tropper, les classifications en droit constitutionnel, in.RDP, 1989, p.945. 4Ibid., p.491.

5Ben Achour Yadh, Droit administratif, Organisation administrative, Fonctions administratives, 2e

édition, C.P.U., Tunis, 2000, p.11.

6Barberis Mauro, Le futur passé de la séparation des pouvoirs in Revue pouvoir 2012, n°143, pp : 5-15. 7Pimente Carlos-Miguel, Le sanctuaire vide : La séparation des pouvoirs comme superstition juridique ?

In. Pouvoir, 2002, n°102, pp : 119-131 : « Ainsi la relecture d‟Eisenmann permettait de fonder la légitimité d‟une analyse assouplie de la séparation des pouvoirs… », p.119 cf. Eisenmann (C.), « L'Esprit des lois et la séparation des pouvoirs » in Mélanges R. Carré de Malberg, Paris, Duchemin, 1933, pp. 165-192.

nous apprend qu‟a « l‟origine de la création de la juridiction administrative et la dualité de juridiction, il n‟y a pas une logique, il y a une histoire »1.

Et le professeur de reprendre mais lorsque « l‟esprit cartésien reprend ses droits et cette situation purement factuelle de l‟histoire reste dominée par une considération politique ; voici que l‟on va lui trouver une justification logique, l‟ombre de Montesquieu se profile à l‟horizon à travers la fameuse séparation des pouvoirs : il ne faut pas que le juge puisse interférer avec l‟exécutif et c‟est la fameuse formule « juger l‟administration c‟est encore administrer » qui justifiera le fait que le juge judiciaire ne juge pas l‟administration »2

.

La formule parait contestable pour le professeur Rivero, pour lui ce qui justifie à l‟heure actuelle la dualité des juridictions et des compétences c‟est une idée pragmatique, et toute simpliste : l‟idée de la division du travail.

Pour lui juger l‟administration c‟est lui appliquer un droit particulier : les mêmes hommes ne peuvent être compétent dans le domaine administratif et privé3

.

On comprend dès lors les études et les thèses avancées par d‟éminents auteurs, il existe en effet tout un courant qui milite pour refonder la justice administrative au vu des difficultés rencontrées notamment et surtout pour la répartition des compétences qui ne sont plus compatible avec l‟évolution des principes de protection du citoyens et des droits de l‟homme en général.

Ainsi le professeur F. Luchaire dans les années 1980, se fondant sur la jurisprudence du conseil constitutionnel en est arrivé à la conclusion que « Les conséquences constitutionnelles de la règle de séparation quant à la compétence des juridictions administratives sont faibles car le Conseil constitutionnel a lui-même constaté des limites à son application », il parlera ainsi de la nécessité et de l‟intérêt d‟une bonne administration de justice » qui permettrait « d‟unifier les règles de compétence juridictionnelle » (même décision) dans un domaine déterminé, invoquant deux conditions :

En premier lieu, il faut que dans ce domaine « l‟application des règles habituelles de compétence » soit susceptible « d‟engendrer des contestations contentieuses diverses ».

En second lieu, que cette unification se fasse au profit de « l‟ordre juridictionnel principalement intéressé ».4

Le professeur Jacques Robert précisera davantage la notion : « Dans un sens étroit, la bonne administration de la justice devrait être comprise comme un objectif à atteindre, comme une finalité que servirait l‟emploi de moyens techniques appropriés…La notion de bonne administration de la justice recouvre, on le voit, dans son sens étroit, celle de simple et seule justification de mesures exceptionnelles aptes à rendre plus aisé la mise en œuvre et le déroulement de l‟instance juridictionnelle5.

1Rivero Jean, Rapport de synthèse, in. Le centenaire du Décret Beylical du 27 novembre 1888, et le

contentieux administratif, colloque organisé par l‟association tunisienne des sciences administratives les 28-29-30 novembre 1988, Campus universitaire, Tunis, 1988, p.448.

2Ibid., p.449. 3Ibid., p.450. 4

Luchaire F., La protection constitutionnelle des droits et des libertés, Economica, paris, 1987, p.460.

Mais on peut donner à l‟expression un sens plus large. Elle engloberait alors l‟ensemble des critères et conditions que doit remplir toute justice pour être bien administrée. On passerait de la notion-justification à la notion- ambition1.

L‟éminent professeur approfondira sa pensée dans une autre étude où il considérera qu‟il « n‟est guère facile de parvenir à une certaine cohérence du droit-à fortiori à son unité dans les Etats où les ordres juridictionnels se veulent multiples, où les juges s‟affirment indépendants les uns des autres, où les règles de compétence se diversifient à l‟infini, où les missions sont concurrentes, où chaque juridiction est tentée, soit de mordre sur l‟autre, soit de se défausser sur elle ….

Et pourtant, sauf à se précipiter dans les impasses condamnables des vides juridiques ou des dénis de justice, il faut bien trouver des critères de répartition des rôles, ou des principes généraux reconnues et applicable par tous »2.

Se fondant également sur la jurisprudence du conseil constitutionnel le professeur Olivier Gabarda considérera que « L‟intérêt d‟une bonne administration de la justice est un standard juridique… ».3

Dans une étude récente sous l‟autorité du professeur Guillaume Drago, Ariane Meynaud développera le thème et considèrera que « l‟histoire de la bonne administration de la justice est celle d‟une rupture, qui marque le passage d‟un recours sporadique à un usage exponentiel de cette notion. Plus qu‟une rupture, l‟année 1987 apparaît comme la véritable date de naissance de cet instrument dans son acception contemporaine, qui se caractérise par la conscience d‟utiliser ces trois mots comme un tout doté d‟un sens propre. Deux évènements majeurs dans l‟histoire du droit administratif ont été l‟occasion d‟une entrée remarquée de la bonne administration de la justice dans l‟ordre juridique.4

Pour l‟auteur conséquemment à la jurisprudence du conseil constitutionnel de l‟année 1987 que nous avons déjà eu l‟occasion d‟évoquer supra5 « la bonne administration de la justice est passée du statut de concept à peine esquissé à celui de composante de dispositifs essentiels ».6

1Robert Jacques, La bonne administration de la justice...,op.cit., p.118.

2Robert Jacques, contrôle juridictionnel et règlement des litiges, in. Mélanges Roland Drago, l‟unité du

Droit, Economica, 1996, p.343.

3Gabarda Olivier, « L‟intérêt d‟une bonne administration de la justice », Etude de droit du contentieux

administratif, in R.D.P, 2006, n°1, p.154, « Le conseil constitutionnel français en fait le fondement juridique de la dérogation aux blocs de compétence entre les deux ordres de juridictions »,cf. Déc.n°86- 224DC du 23 janvier 1987, conseil de la concurrence, Rec.p.8 ; RFDA 1987, p.287, note B. Genevois, p.301, comm. L. Favoreu ; Décision n°96-378 DC du 23 juillet 1996, Loi de réglementation des télécommunications, Rec.p.99, RFDA 1996, p.909, note J. Chevallier ; A Chevallier ; AJDA 1997, p.16, note L. Favoreu.

4

Meynaud Ariane, La bonne administration de la justice et le juge administratif, Master de Droit public

approfondi, Dirigé par Monsieur le Professeur Guillaume Drago, 2012, banque des mémoires, Université Panthéon Assas, 78 p., p.02.

5Au sein de la jurisprudence Conseil de la Concurrence (Conseil constitutionnel, 23 janvier 1987, Loi

transférant à la juridiction judiciaire le contentieux des décisions du Conseil de la concurrence, n°86-224 DC.) et de la loi du 31 décembre 1987.

6

Ariane Meynaud synthétisera toute la substance de la notion de bonne administration de la justice en la croisant avec le rôle du juge en les termes suivants « La justice ne peut être pensée comme une œuvre de radicalité. Elle suppose, de la part de ceux qui la rendent, un sens de l‟équilibre entre revendications et principes contradictoires. Cette nécessité récurrente de concilier des principes antagoniques se manifeste à travers le rôle que le système juridique reconnaît au juge1.

Ainsi un débat séculaire s‟est installé en France sur le maintien ou la suppression de la justice administrative. 2

Deux des plus éminents spécialistes du droit administratif français synthétiserons la problématique en considérons que « Nous vivons presque sous l‟empire du principe de dualité des ordres de juridictions mais presque sous celui d‟un unique ordre de juridictions, répété deux fois, d‟un ordre dupliqué, redondant. Seul le contentieux de l‟annulation des actes réglementaires en réchappe3.

L‟unification juridictionnelle du système juridique français relève dés lors du réajustement plus que de la révolution. L‟examen des organisations dissipe les mirages et la démystification transperce les mystères. Il convient d‟autant plus d‟y procéder qu‟en raison de la source véritable de cet état des choses en France, à savoir une représentation doctrinale de l‟histoire et de la technique, le rend incompréhensible aux autres cultures, notamment à celle qui n‟ont jamais conféré à l‟administration un statut philosophiquement exorbitant par référence à une quasi-divinité de l‟Etat4

.

Lorsque l‟irréductibilité d‟une organisation tient non pas dans sa technique, sa nature ou son fondement, mais dans l‟originalité d‟un discours qui porte sur elle et la reconstitue, l‟incompréhension est vice sérieux »5.

Le professeur Didier Truchet un des éminents tenants du réformisme du contentieux administratif, proposera de mettre fin au dualisme en faisant disparaître les juridictions judiciaires et administratives en tant qu‟ordres séparés mais de conserver des juges spécialisés au sein d‟un ordre unifié ; spécialisation qui se justifie selon lui par la complexité croissante des rapports économiques et sociaux6.

1Meynaud Ariane, La bonne administration de la justice et le juge administratif…, op.cit., p.02.

2Jorat (M), « supprimer la justice administrative…deux siècles de débats », in. Droit administratif et

justice administrative. Permanence et renouveau, RFDA, 2008, 2008, p.456 ; Truchet Didier, Mauvaises

et bonnes raisons de mettre fin au dualisme juridictionnel, in. Revue Justices 1996, n°3, pp : 53-63 ; Bazex M., L‟implosion du dualisme de juridiction, in. Rev. Pouvoir, 1988, n°46, pp : 35-42 ; Caillosse J., « Les justifications du maintien actuel du dualisme juridictionnel », AJDA, 2005, p.1781-1786. Gaudemet Yves, « Le juge administratif, une solution d‟avenir ?», in Clés pour le siècle, éd. Panthéon

Assas Dalloz 2000, p.1213-1220.

3

Drago Roland-Frison-Roche Marie-Anne, Mystères et mirages des dualités des ordres de juridictions

et de la justice administrative, In. Archive philosophie du droit, 1997, n°41, p.144.

4 Drago Roland-Frison-Roche Marie-Anne, op.cit., p.146. 5Ibid., p.146.

6Truchet D., Mauvaises et bonnes raisons de mettre fin au dualisme juridictionnel, in. Revue Justices

1996, n°3, p.55 ; cf. aussi Fougère L., 1790- 1990- deux siècles de dualisme juridictionnel, A.J.D.A, 1990, p.579

Et pour l‟éminent professeur, c‟est précisément cette spécialisation qu‟il faut équilibrer par une unification des ordres, et qui se traduirait l‟instauration d‟une Cour suprême unique1.

Dans un ouvrage récent le professeur Dominique Rousseau proposera également de supprimer le conseil d‟Etat ! Car selon lui dans l‟esprit de la démocratie continue, une refondation constitutionnelle de la justice n‟aurait pas de sens si était maintenue la structure actuelle du paysage juridictionnel organisé autour de l‟ordre judiciaire avec à sa tête la cour de cassation et de l‟ordre administratif avec à sa tête le conseil d‟Etat. L‟existence d‟un juge propre à l‟administration n‟est pas la conséquence logique et nécessaire du principe de la séparation des pouvoirs, ce que l‟étude comparée des systèmes juridictionnels confirme ».2

Et le professeur plus tranchant : « le dualisme juridictionnel n‟a donc pas de fondements théoriques, il est le produit de circonstances historiques et politiques qui ont disparu aujourd‟hui et qui enlèvent donc à la juridiction administrative sa justification….d‟autant considère l‟éminent professeur que le conseil d‟Etat a développé une jurisprudence qui ne permet plus de le regarder totalement comme réservant à l‟administration un traitement privilégié3.

Dès lors, si l‟administration devient un justiciable ordinaire !….il convient de transférer le contentieux administratif à l‟ordre judiciaire et créer au sein de la cour de cassation, à côte des chambres civile, commerciale, sociale et criminelle, une chambre administrative !4

En droit français et droit comparé moderne, on parle désormais de qualité de la justice5 et du nouvel office du juge administratif6, ainsi que de la nécessité d‟une cour suprême unifiée.7

Or, en droit Algérien, il nous semble légitime de se poser la question : pourquoi s‟enfermer dans un schéma de dualisme juridictionnel non fondé, en ce sens qu‟il n‟existe aucun fondement logique ou technique constitutionnel ou législatif qui le justifie8.

1Truchet D., Mauvaises et bonnes raisons de mettre fin au dualisme…,op.cit., p.55.

2Rousseau Dominique, Radicaliser la démocratie, propositions pour une refondation, éd., du Seuil, Paris,

2015, p.185

3Ibid., pp.185-186. 4

Ibid., p.186.

5Berthier Laurent, La qualité de la justice, Thèse de doctorat en droit public, Université de Limoges,

France, 2011.

6Hadi Habchi, vers une approche nouvelle de l‟office du juge administratif…, in. Regards, 2015, n°47,

pp : 197-203.

7Truchet Didier, Mauvaises et bonnes raisons…, op.cit., p.55 ; cf. Mohammed Karim Noureddine,

Cours suprême unifiée et bonne gouvernance, in. Revue du laboratoire : Droit, Société et Pouvoir,

Université d‟Oran, n° spécial sous la direction du Professeur Boussoltane Mohamed, La Bonne Gouvernance, Contrôle et responsabilité, éd.2013, pp : 133-143.

8Cf. Drago Roland, qui considère que « L‟opposition entre monisme et dualisme semble devoir être dans

l‟avenir de plus en plus théorique car des réformes ou des pratiques remettent aujourd‟hui en cause une classification dont on a déjà souligné la relativité », in. Actualité du principe de séparation en France et dans les Etats de la CEE, in. A.J.D.A., 1990, n°9, pp : 581-583 nt. p.582.

En effet en revenant aux au document du ministère de la justice sur la réforme de la justice, et mis à part des points techniques aucune allusion n‟est faite au fondement de la justice administrative et dans les travaux préparatoires, en fait les travaux du conseil de la nation, et notamment ceux consacré au conseil d‟Etat1

, on remarque que l‟instauration du dualisme juridictionnel est justifié par le garde des sceaux de l‟époque par « le renforcement du pouvoir judiciaire protecteur des droits et libertés fondamentales de la société », (curieusement et non pas le citoyen), ; plus loin dans sa réponse au sénateur le ministre justifiera l‟instauration du dualisme juridictionnel par les circonstances qu‟a connu l‟Algérie depuis l‟indépendance jusqu‟au 28/11/1998 ! Il fallait selon lui revoir l‟organisation judiciaire et introduire le dualisme juridictionnel !2, et plus devant l‟insistance des sénateurs : pourquoi créer un conseil d‟Etat, le ministre répondra : « pour la spécialisation et l‟indépendance et la spécificité en vue d‟arriver à une meilleure qualité et un contrôle plus précis du travail de la puissance publique ».3

Le professeur Bouabdellah Mokhtar, nous éclairera davantage en recourant à ce qu‟il considère comme une source matérielle de l‟organisation juridictionnelle en matière administrative à savoir le mémorandum présidentiel de mai 1996.4

Ainsi les rédacteurs du mémorandum préconisant la réforme du « Pouvoir Judiciaire » par la création d‟une nouvelle juridiction ont étayé leurs intentions dans le point n° 30 du document et ce en les termes suivants, nous les reproduisant tel que cité par le professeur Bouabdellah : « Pour ce qui est du Pouvoir Judiciaire, la création d‟un nouvel organe qui coiffera la Juridiction Administrative sera souhaitable. Dénommé éventuellement “ Conseil d‟Etat”, il sera à même de consolider le pouvoir judiciaire, de protéger les services publics et les instances administratives, des dérives et déviations éventuelles, et de consacrer la nécessaire dualité de juridictions, dans un système démocratique pluraliste. Ce Conseil constituera, par ailleurs, un outil privilégié de contrôle de l‟exercice du pluralisme politique, notamment dans le domaine des élections»5.

Différents arguments « officiels » sont donc invoqués6, mais nul trace de fonder le dualisme sur une séparation des pouvoirs, encore moins des autorités administratives et judiciaires7

.

1Journal officiel des délibérations du conseil de la nation, séances publiques du 02 et 03 mars 1998, p.06. 2Ibid., p.20.

3

Ibid., p.24.

4 Bouabdellah M., l‟expérience Algérienne …, op.cit., p.11.

5Présidence de la République : Mémorandum ; doc. Ronéotypé, Alger, mai 1996. ŔDocument élaboré par

la Présidence de la République en mai 1996 dans lequel sont esquissées les grandes lignes de la réforme constitutionnelle de la même année. Point n° 30, p. 10 cité par Bouabdallah M., p.11.

6C‟est le cas notamment du rapport de la commission nationale de la réforme de la justice, instituée par le

décret n°99-234 du 19/10/1999, et dont les membres ont été désignés par le décret n°99-235 du 19/10/1999 qui ne mentionne nulle part une référence à un fondement à la dualité des juridictions, même si le rapport n‟a jamais été publié cf. Sekfali Z., Op.cit., p.106; idem pour la conférence nationale sur la réforme de la justice qui s„est tenue les 28 et 29 mars 2005, cf. l‟ouvrage « conférence nationale sur la réforme de la justice », édité par le ministère de la justice éd. O.N.T.E, 2005; Ni dans le Rapport

Documents relatifs