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Conclusion – La France au cœur du système de mobilité étudiante marocaine internationale

2. Pluralité des ressources soutenant le projet de mobilité à l’étranger

2.6. Le poids des institutions

Treize étudiants enquêtés (soit 16,8 % du total) ont basé leur projet d’études en France sur l’existence d’une coopération entre écoles ou sur l’obtention d’un financement ou d’une bourse de mobilité.

2.6.1. Importance des liens institutionnels

Les institutions peuvent opérer le rôle de médiateur dans la mobilité notamment par les programmes d’échanges et de coopération entre établissements dont les liens sont souvent historiques. Les universités marocaines sont restées attachées à leurs homologues français (Latrèche, 2000). Des liens historiques se sont tissés permettant l’institution d’échanges académiques permanents adoptant des formes variées comme le jumelage d’instituts, l’envoi

      

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d’enseignants marocains en France pour des stages ou des spécialisations, l’envoi d’enseignants français au Maroc, la codirection de thèses et la mise en place de programmes de recherche communs. Ainsi les liens et réseaux universitaires servent de « support » à la mobilité étudiante marocaine (Latrèche, 2000).

Dans l’enquête, les disciplines et niveaux d’études des étudiants concernés sont relativement ciblés. Il s’agit peut-être d’un biais dans la méthode d’enquête. Sept d’entre eux sont en agronomie, trois en biologie, deux en informatique et un en économie. De même, huit sont en doctorat, quatre en formation d’ingénieur et un en licence. Nous pouvons penser que les liens institutionnels sont plutôt développés dans certaines disciplines et à un certain niveau d’études. En effet, des critères de sélection sont définis pour l’accès à ce type de mobilité, il s’agit donc d’une mobilité sous condition d’accès puisque ce sont souvent les premiers classés des écoles partenaires qui peuvent être retenus répondant ainsi à des exigences de qualification et permettant l’accès à des formations ou des spécialisations dans des domaines de pointe.

Les conventions entre établissements observées dans l’enquête se trouvent majoritairement à Montpellier et surtout en agronomie (cela concerne sept étudiants sur treize). Il existe ainsi des liens entre l’IAV et l’IAMM, un programme de coopération entre l’université de Tétouan et l’INRA, une convention entre une école de Casablanca et Supagro ainsi que des conventions de co-tutelle de thèse. A Lille, un étudiant enquêté nous a renseignés sur une convention entre une école de Casablanca et des écoles d’ingénieurs en France.

« Au sein de l'école de Casablanca, il y avait un test pour les dix premiers de l'école et j’ai été accepté. L'école a des conventions avec des écoles d'ingénieurs en France comme l'ITC de Compiègne, Telecom Brest, Telecom Lille et quelques autres. L'ENIC (Telecom Lille) était très bien placée donc je suis venu à Lille. » A. étudiant à Lille (11)

Pour S., l’opportunité d’une convention entre établissements a été l’occasion de concrétiser un projet de mobilité internationale avec le soutien inconditionnel de ses parents.

« Il y avait un programme de recherche et une convention entre Meknès et l'INRA. Mon encadrant était celui qui gérait ce projet. Dans le cadre de ce projet, il y a des échanges entre les chercheurs et les étudiants. Donc je suis venue faire un stage de 6 mois. Il m'a demandée si ça me posait un problème d'être 6 mois loin de mes parents. Mais pour moi ce n'était pas un problème. Déjà ma mère voulait que je vienne en France pour faire les études de médecine. C'est toujours l'idée d'avoir un médecin dans la famille, c'est la réussite de toute la famille. Et c'est pareil pour ingénieur. Ma mère m'a dit que comme je n'ai pas pu le faire au Maroc, elle voulait que je vienne en France mais ça me semblait trop compliqué. Donc pour le mémoire, c'est sur qu'ils étaient d'accord pour que je vienne en France. Pour mon père, je peux partir n'importe où, en Chine, en Amérique, du moment que c'est pour enrichir mes connaissances. Il m'a toujours encouragée. C'est bien mais j'ai senti la pression à ce moment-là. » S. étudiante à Montpellier (56)

Pour S., le projet de mobilité a été stimulé par une convention existante entre l'école de Casablanca et Supagro à Montpellier.

« Chaque année, les deux ou trois premiers peuvent continuer leurs études ici (en France). Il y avait d'autres écoles intéressantes mais il fallait se déplacer juste pour le concours et c'est compliqué d'obtenir un visa d'une semaine alors avec Supagro c'était plus simple, on a fait un entretien en visioconférence. Il y avait aussi la question des frais pour l'accès à d'autres écoles. » S. étudiant à Montpellier (72)

2.6.2. Les bourses de mobilité et les financements : une mobilité à court terme

Douze étudiants enquêtés bénéficient d’une bourse ou d’un financement pour leurs études en France. Parmi eux, deux ont une bourse de l’IAMM (l’un de 680 euros par mois et l’autre de 300 euros par mois) ; cinq ont une bourse Averroès (une en licence et quatre en doctorat d’un montant de 1500 euros par mois, en général pour 18 mois correspondant ainsi à la moitié du temps de la thèse) ; quatre ont un financement de thèse autre (AUF, Egide ou allocation de recherche), et un étudiant a une bourse du mérite de l’Etat marocain (obtenue suite à l’intégration d’une prestigieuse école d’ingénieur faisant partie d’une liste d’écoles sélectionnées).

Prenons l’exemple de S., la volonté de partir à l'étranger était basée sur les aspects techniques et les connaissances, le séjour a pu se réaliser grâce à l’obtention d’une bourse.

« Si je suis venu en France, c'est d'abord grâce à Dieu, ensuite grâce à mes efforts et aussi parce que j'ai fait des contacts avec mon directeur ici en France et mon encadrant au Maroc qui ont appuyé mon dossier pour obtenir une bourse. J'ai une bourse dans le cadre du programme Averroès. Ce n'est pas évident d'être accepté pour ce type de bourse. » S. étudiant à Montpellier (70)

La mère de F. n’a pas voulu qu’elle vienne en France après le bac « parce que je n'avais que 16 ans, elle disait que c'était trop jeune. » Après un cursus d’ingénieur agronome au Maroc, elle a saisi l’opportunité d’une bourse pour terminer un cycle de master et a maintenant une thèse en perspective.

« Je ne serai pas venue en France si je n'avais pas eu de bourse, c'était trop demander aux parents. » F. étudiante à Montpellier (57)

De même, quelques étudiants ont concrétisé un projet de thèse grâce à l’obtention d’une bourse ou d’un financement.

« L'équivalent du CNRS au Maroc et le ministère marocain de l'enseignement supérieur ont sorti pour la première fois des bourses d'excellence pour ceux qui voulaient faire un doctorat au Maroc, alors j’ai postulé la deuxième année. Il y avait 200 bourses pour les étudiants pour tout le Maroc toutes disciplines confondues. Il y a des disciplines avec plus de doctorants que d'autres, par exemple il y en a moins en lettres ou économie mais plus en sciences dures parce que pour eux ils ont plus de chance d'avoir du travail au Maroc. La bourse était l'équivalent de 230 euros par mois, c'est comme un Smic. En dehors de ces bourses, il existe très peu de financement possible, il y a en général 2 bourses par département, c'est très peu. Mais au Maroc, le financement des thèses n'est pas obligatoire comme en France ou dans d'autres pays. J'ai postulé et j'ai obtenu une bourse. Et en même temps ça coïncidait avec un projet de coopération, c'était un programme entre notre université et l'INRA en France. Donc mon directeur de thèse m'a proposé de venir en France faire des analyses moléculaires. Donc j'étais inscrit à l'université de Tétouan et j'étais sur un projet avec l'INRA Montpellier pendant 3 ans. C'est des missions de 6 mois par an mais ce n'était pas défini comme une co-tutelle. » H. étudiant à Montpellier (55) « J'avais mon master, c'est-à-dire niveau ingénieur, j'étais sur de trouver un travail. Et avec la thèse, en fait tu as le même statut donc je pensais sérieusement à travailler. Après on m'a proposé de postuler sur un sujet de thèse en co-tutelle. J'ai longtemps hésité, je n'étais pas vraiment convaincu. J'ai envoyé mon dossier la veille à minuit. S’il n'y avait pas eu de financement, je n'aurais pas pu le faire. Le financement permet d'avoir les bonnes conditions, d'être bien encadré. Au Maroc ceux qui font des thèses sans financement c'est en général 7 ans, ça c'est la thèse à la marocaine. Alors un ami m'a convaincu d'envoyer le dossier, juste pour

essayer parce que ce sont des bonnes conditions pour la recherche et c'était dans le prolongement de mon master, sur l'olivier en méditerranée. » H. étudiant à Montpellier (58)

Ce type de mobilité implique une temporalité précise du projet d’études. Pour l’ensemble des étudiants concernés à l’exception d’une, l’opportunité de mobilité sert à renforcer la formation initiale du Maroc et, ainsi, à construire un projet de retour dans l’optique d’être qualifié dans un domaine pointu.

3. L’agencement des ressources de mobilité pour l’élaboration

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