• Aucun résultat trouvé

5.2. Synthèse du système français d’assurance des catastrophes

5.2.3. Quelques perspectives avancées

L’état des lieux de la situation du régime Catnat n’a pas conduit la mission interministérielle à remettre en cause les principes d’obligation d’assurance (solidarité) et de mutualisation des primes, qu’elle a au contraire estimé devoir être préservés. Elle suggère en revanche de définir les risques couverts de manière plus objective et plus scientifique et d’adapter les mécanismes assuranciels du régime Catnat autour deux objectifs : d’une part, renforcer les réserves de la CCR pour garantir l’équilibre économique du système et, d’autre part, insérer des « mécanismes de rappel » permettant de garantir l’équilibre du régime sur le long terme.

 Suggestions pour renforcer les réserves de la CCR

Afin d’atteindre le premier objectif, voici quelques mesures soumises par la mission : - l’institution au profit de la CCR d’un prélèvement direct sur les surprimes Catnat ; - le relèvement du seuil et du coût des garanties « stop loss », en assortissant ce

relèvement d’une modulation adaptée au cas particulier de chacune des compagnies d’assurances cédante de manière à les inciter, en période de basse sinistralité, à augmenter leurs propres dotations annuelles à la provision d’égalisation et à reprendre sur cette provision en période de forte sinistralité ;

- l’introduction à titre transitoire d’une tranche complémentaire de réassurance entre l’État et la CCR ;

- le renoncement temporaire de l’Etat à tout ou partie des dividendes servis par la CCR.

Les simulations réalisées par la CCR à la demande de la mission montrent que ces diverses mesures devraient permettre à la CCR de porter le total de ses réserves à plus de 3,5 G€ en

42 Plus généralement, il s’agit de responsabiliser davantage l’ensemble des acteurs de la chaîne de transfert du

2015, soit un niveau a priori suffisant pour lui permettre de faire face sans intervention de l’Etat à un sinistre du type de l’inondation de la Seine en 1910.

 Suggestions pour renforcer la prévention

S’agissant du deuxième objectif, la mission s'est interrogée sur la cohérence des actions que mène l'État à travers, d’une part, le mécanisme d'indemnisation des catastrophes naturelles et, d’autre part, la politique de prévention. Cette dernière, outre sa composante de connaissance des phénomènes, s'appuie essentiellement sur des mesures de réduction de la vulnérabilité, résultant notamment d'une gestion adaptée de l'urbanisation et de la mise en oeuvre de méthodes adéquates de construction. Ses outils visent aussi bien la réduction des risques pour les personnes que celle des risques pour les biens. Mais, si une priorité est clairement affichée au bénéfice des premiers, les objectifs recherchés en ce qui concerne les seconds devraient être clarifiés. Or, c'est justement dans ce domaine que cette politique a des interactions avec le régime Catnat et qu’un effort d’exploitation de ces synergies doit être recherché. Parmi les recommandations formulées en conséquence par la mission figurent notamment :

-

assurer le respect de la disposition d'exclusion du régime Catnat pour les biens en infraction avec les mesures administratives de prévention grâce à une procédure fondée sur la déclaration des assurés ;

- moduler le taux de la prime additionnelle Catnat (entre un minimum de 9% et un maximum de 30%) en fonction du niveau d’exposition des biens assurés aux risques naturels et de la mise en œuvre ou non par les assurés des prescriptions figurant dans les PPR ;

- instituer, selon le même principe, une modulation des franchises qui se substituerait au mécanisme de modulation aujourd’hui prévu pour les communes non dotées de PPR ; - responsabiliser davantage les assureurs, en excluant de la réassurance par la CCR les

contrats conclus en méconnaissance des dispositions d’incitation à la prévention.

La mission a complété ses recommandations en matière de prévention par des propositions relatives à deux risques particuliers : le risque sismique et le risque de subsidence qui, suivant les grandes lignes énoncées auparavant, ne seront pas reprises spécifiquement dans ce paragraphe.

Au delà des aspects assuranciels, l’organisation institutionnelle du régime doit également être aménagée afin de rendre sa gestion plus rigoureuse et plus transparente. La mission recommande à cet égard la mise en place d’un Conseil ou comité supérieur, comprenant des experts et doté d’attributions consultatives sur la fixation du taux de la prime additionnelle Catnat, l’élaboration (ou la mise à jour) de critères scientifiques de définition des catastrophes naturelles, et enfin l’application de ces critères aux différents cas d’espèce. Les arrêtés interministériels devraient intervenir désormais sur avis conforme de ce Conseil ou comité supérieur. La zone constatée comme affectée par la catastrophe naturelle pourrait en outre être infra-communale ou supra-communale, tandis que la nature des dommages couverts par l'indemnisation devrait être mieux précisée.

S’agissant des dégâts de subsidence provoqués par la sécheresse, la mission recommande notamment que ne soit prise en charge que la réparation des désordres atteignant les structures mêmes des bâtiments, en excluant les dégâts superficiels et certaines malfaçons à l’origine de sinistres fréquents.

 La position des assureurs

Les sociétés d’assurance sont plutôt réticentes au projet de réforme du système Catnat. Nous livrons ci-dessous quelques extraits des déclarations qu’ont pu faire à ce sujet les représentants des familles professionnelles FFSA et GEMA.

« Pour nous, il n’y a pas urgence à réformer un système qui fonctionne. De plus, il est équilibré financièrement » indiquait en décembre 2006 Jean-Luc de Boissieu, secrétaire général du GEMA, après la publication du rapport interministériel. Cependant, il ajoute : « c’est vrai que le système actuel ne favorise pas la prévention ».

La FFSA s’est plus exprimée sur le sujet, notamment dans le cadre des Entretiens annuels de l’assurance, en décembre de chaque année. [Pénet S., 2006], alors directeur de l’unité dommages aux biens de la FFSA, a rappelé que les outils traditionnels de l’assurance pour inciter à la prévention (sélection du risque, exclusions, tarif et exigence en matière de prévention, franchises et plafonds de garanties) ne sont pas, par définition du système, appropriés.

Concernant les risques d’inondation, la principale marge de manœuvre consisterait à renforcer les conseils en prévention administrés aux clients. De plus, il précise que cette prévention est rentable sur les risques de fréquence et devient vite très coûteuse sur les risques plus catastrophiques : plus l’intensité du risque visé est forte, moins l’assuré est maître de sa prévention. Le schéma suivant résume cette idée :

.

Fig 72. Particularités de l’aléa inondation [Pénet S., 2006]

Enfin, il indique les actions des assureurs en matière de prévention : - les conseils en prévention :

o connaissance des aléas ;

o actions de sensibilisation ;

o plans de crise :

o formation des inspecteurs. - les actions sur les pouvoirs publics :

o discussions sur l’avenir du système ;

o évaluation des Plans de prévention des risques.

[Santini D., 2007], Président de la MRN, a précisé quelques mesures prioritaires pour agir là où les réformes seront les plus efficaces :

- imposer des contraintes sur l’existant pour les professionnels dans les PPRI ;

- interdire toute construction nouvelle derrière les digues de protection conformément aux préconisations du rapport [IGE, 2005] :

- développer les Plans d’actions pour la prévention des inondations financés par le MEEDDAT et portés, dans la plus part des cas par les groupements de collectivités dénommés Etablissements publics territoriaux de bassin (EPTB), ainsi que les zones d’expansion de crues43 ;

- accélérer une cartographie exhaustive homogène et publique du péril inondation Concernant la sécheresse, il suggère :

- l’élaboration d’un zonage délimitant les zones soumises à un aléa significatif de retrait-gonflement d’argile ;

- l’obligation de procéder systématiquement à un contrôle du terrain pour adapter les fondations ;

- la révision des DTU 13.12 afin d’établir une réglementation sur l’adaptation des fondations à la nature du sol ;

- l’obligation d’information des acquéreurs de terrains sur la nature du sol. Concernant les séismes, eu égard aux conclusions inquiétantes du rapport [IGE, 2004] :

- l’application des dispositions de contrôle et de sanctions prévues pour les règles de construction et de sécurité ;

- l’extension au risque sismique pour les constructions neuves des diagnostics actuellement prévus lors de la vente d’un bien immobilier (plomb, termite, amiante, etc.).

Les représentants de la FFSA s’accordent donc avec les pouvoirs publics sur la nécessaire progressivité dans l’évolution du régime Catnat mais souligne la nécessité d’agir en priorité là où les réformes seront le plus efficaces en matière de prévention, concomitamment à l’accélération les politiques publiques de prévention.

Outline

Documents relatifs