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Chapitre 6 : Etat des lieux des pratiques des sociétés d’assurance en matière de

6.2. Synthèse des pratiques en France

6.2.3. L’offre des réassureurs

Nous avons indiqué dans la section 5.2. que la CCR est le principal réassureur du marché français des risques naturels en raison de la garantie illimitée que lui accorde l’Etat. Ce monopole de fait attire la convoitise de certains réassureurs souhaitant attirés plus de capitaux que les quelques contrats sous-jacents qu’ils proposent aujourd’hui en complément à la couverture proposée par la CCR, et dans la perspective de réforme évoquée.

Dans cette direction, [Messner M., 2007] de Swiss Ré que les risques naturels sont aujourd’hui assurables et réassurables en raison de l’amélioration depuis 1982 de la modélisation et des critères d’objectivation des risques naturels, et de l’importante capacité que peuvent offrir les réassureurs en raison du faible risque de cumul avec d’autres marchés. Swiss Ré voit donc dans la réforme du système Catnat une opportunité d’introduire la réassurance privée afin d’améliorer l’équilibre général du système et la prévention des risques naturels. Il exposait dès 2002 le principe d’un zonage tarifaire :

Fig 104. Principe d’un zonage tarifaire inondation [Swiss Ré, 2002]

A cet effet, cette société propose sur son site Internet un outil de zonage des aléas par pays dénommé Catnet, illustré sur la figure ci-dessous :

Nous y retrouvons les zonages réalisés sur plusieurs pays d’Europe de l’Est (République Tchèque, Hongrie et Slovaquie), en Allemagne ou aux Etats-Unis. Par contre, la France n’est pas encore renseignée.

Swiss Ré a également investi le champ de la modélisation de l’exposition d’un portefeuille au risque d’inondation dans le cadre du contrat CIFRE de [Domenichini J., 2008]. La figure ci- dessous illustre le modèle réalisé :

Fig 106. Modélisation de l’exposition d’un portefeuille par Swiss Ré [Domenichini J., 2007]

Il s’agit de la crue cinq-centennale de la Loire à Orléans. Ce modèle connaît les mêmes limites que les travaux de Benfield par exemple : seuls la Loire, la Seine voire le Rhône sont couverts, les zones d’aléa des autres cours d’eau étant modélisées par une approche géométrique (zones tampons ou buffer).

Munich Ré, l’autre grand réassureur international, est plus discret sur ses velléités à s’installer sur la marché français. Il dispose également d’un outil de zonage sur Internet appelé NATHAN et illustré ci-dessous :

Comme nous pouvons le constaté, seul les risques sismiques sont renseignés. De plus, Munich Ré ne semble pas investir dans la modélisation en France67.

Finalement, la CCR est aujourd’hui la société de réassurance la mieux équipée en matière de technologies de l’information géographique à destination des cédantes. Elle dispose [Bidan P., 2007]:

- d’une base de données nommée ATHENA rassemblant l’ensemble des données de sinistres indemnisés au titre des catastrophes naturelles depuis 1995 ;

- d’un outil cartographique appelé E-carte, accessible depuis Internet, visant à présenter par commune et par péril le montant cumulé des sinistres indemnisés au titre des catastrophes naturelles depuis 1995. Celui-ci a été remplacé courant 2008 par une version améliorée appelée CERES permettant de se positionner à partir d’une adresse et représentant approximativement la situation géographique des sinistres indemnisés proportionnellement à leur montant à l’aide de zones concentriques ;

- d’un modèle d’évaluation à posteriori du coût d’un événement inondation, appelé ARTEMIS. L’objectif est :

o d’estimer quelques jours après la survenance d’une crue son coût afin de déterminer le provisionnement nécessaire :

o de modéliser de manière déterministe l’exposition de l’Etat, de la CCR et des cédantes à des crues historiques.

Fig 108. Illustration d’un résultat du modèle ARTEMIS de la CCR pour l’analyse de l’événement du Rhône en 2003 [Bidan P., 2007]

En résumé, il ressort de cet état des lieux que :

- les sociétés d’assurance ne disposent pas de compétences en matière de technologies de l’information géographique ;

- les applications de type « site par site » développés sur les marchés étrangers prennent la forme de solutions de webmapping aux caractéristiques propres au système d’assurance des risques naturels en place ;

- les offres de produits et services proposés par leurs partenaires traditionnels pour les applications de type « cumul » font plus office de vitrine technologique à des fins marketing que réelles solutions technologiques. Ces derniers manifestent toutefois de sérieuses prétentions ;

67 Un stage de fin de parcours en géographie a toutefois permis de réaliser quelques tests à partir du retour

- il n’existe pas de modèles catastrophes pour le marché français. Les modèles existants dans d’autres pays ou sur des aléas hors système Catnat sont très contestés ;

- les sociétés pourraient s’orienter vers la réalisation de modèles internes.

En conclusion de cette section, l’article paru dans l’édition du 19 septembre 2006 dans le journal Le Monde, pourtant intitulé « Géographes et assureurs travaillent main dans la main », a rappelé que le nombre de postes proposés aux géographes ou géomaticiens par les entreprises d’assurance ne progresse guère. Nous espérons avoir aider le lecteur à en comprendre les principales raisons, mais surtout pourquoi cette tendance semble partie pour s’inverser.

S’il est aujourd’hui rare de trouver une société ne consommant pas d’information géographique, il est avéré que ce n’est bien souvent qu’à des fins de géomarketing ([Coley D., 1996] ; [Latour P. et le Floc’h J., 2001]). Certes les sociétés d’assurance font partie des plus gros investisseurs en terme de système d’information68 et la diffusion de l’information géographique soutenant les politiques publiques de prévention des risques naturels s’inscrit logiquement dans la vision hiérarchique classique de la connaissance (donnée, information, connaissance) permettant sa mise en système. Mais, les outils statistiques manipulés au sein des sociétés, par exemple le logiciel SAS, ne permettent pas (encore69) de véritablement traiter l’information géographique.

Cet état des lieux, combiné aux conclusions du chapitre précédent et aux expériences issues de la gestion des technologies de l’information géographique dans les organisations publiques présentées dans la première partie de ce document nous incitent donc à considérer l’intérêt d’une infrastructure dédiée aux sociétés du marché pour amorcer le développement des solutions répondant à leurs besoins.

6.3. L’intérêt du développement d’une infrastructure professionnelle

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