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C HAPITRE 1 U NE LECTURE THÉORIQUE À PLUSIEURS NIVEAU

2.5. Passage par quelques théories économiques

La justification de notre problématique implique, de notre part, un détour par quelques théories empruntées à l'économie271 dans un souci de compréhension du phénomène, mais également dans une volonté de manifester clairement ce que les NTIC autorisent en évolution dans ce corpus théorique.

Certaines théories servant de prime abord à comprendre les phénomènes économiques sont venues progressivement dans le champ de la gestion expliquer le fonctionnement et les caractéristiques des organisations.

Nous nous référons ici à la théorie de l'agence et à l'approche transactionnelle qui apportent des réponses quant aux choix de l'entreprise de se tourner vers l'extérieur, c'est-à-dire d'avoir recours au marché.

Certains des fondements de ces bases théoriques se trouvent modifiés par le recours massif aux nouvelles technologies.

2.5.1. La théorie de l'agence

La théorie de l'agence propose une vision économique du fonctionnement des organisations. Comme le rappelle de Montmorillon (1989), « il y a relation d'agence quand un agent, appelé principal ou mandant, délègue tout ou partie de son pouvoir de décision à un autre agent, dénommé mandataire ». D'une façon générale, la théorie de l'agence a été étendue à toutes les relations de coopération qui s'établissent entre deux partenaires. La base même de la théorie est le contrat. Cette dernière souligne les comportements opportunistes des contractants, et l'incertitude dans laquelle ils agissent : incertitude à la conclusion du contrat et incertitude vis- à-vis de sa réalisation. La théorie de l'agence va donc s'intéresser aux coûts du contrôle que chaque contractant doit mettre en œuvre pour s'assurer de la fiabilité de son partenaire.

271 Chevalier C., dans un Cahier de recherche du CREFIGE, a analysé deux théories économiques pour comprendre le partenariat. Nous nous inspirons ici de ses travaux.

Cette théorie cherche à :

- faire apparaître les principaux contrats qui structurent l'organisation ; - saisir les éléments qui composent le processus de décision ;

- identifier les structures de contrôle qui permettront de minimiser les coûts d'agence.

Il est possible de replacer une recherche sur le contrôle des relations partenariales dans le contexte d'une théorie contractuelle : la relation partenariale prend forme véritablement à travers un ou plusieurs contrats.

Nous pouvons nous demander si les coûts d'agence dus à la relation partenariale sont élevés. En effet, en demandant une implication à long terme au partenaire, ne fait-on pas l'hypothèse d'une plus grande fiabilité ou d'un moindre opportunisme de sa part ? La forme d'organisation partenariale pourrait apparaître comme une possibilité de structuration de l'organisation permettant une minimisation des coûts de surveillance mutuelle.

La théorie de l'agence implique une représentation de l'entreprise comme « réseau de contrats », ainsi que l'exprime Fama (1980, p.290) : « The firm is just a set of contracts covering the way inputs are joined to create outputs and the way receipts from outputs are shared among inputs. In this « nexus of contracts » perspective, ownership is an irrelevant concept ». Cette représentation est également celle de Williamson (1990 ; 1) qui modélise l'entreprise comme « a nexus of treaties », « a nexus of internal and external contracts » reprend Reve (1990, p.133).

La relation, qui est au cœur de ce corpus théorique, peut connaître des modifications profondes relativement à l'introduction des nouvelles technologies entre les parties en présence. Dans une optique similaire, certains éléments fondateurs d'autres théories économiques peuvent également s'en trouver affectés ; c'est par exemple le cas de la théorie des coûts de transactions.

2.5.2. L'approche transactionnelle

Williamson considère que la « transaction » est l'élément fondamental à étudier dans une approche des organisations. Reix (1979, p.111) va jusqu'à affirmer qu'il établit « un paradigme de la transaction ».

Nous ne développerons pas ici la théorie de Williamson. Nous retiendrons cependant qu'il met l'accent :

- sur les coûts qu'implique chaque transaction, ici sont distingués les coûts « a priori » apparaissant avant la signature ferme du contrat et les coûts « a posteriori » concernant l'exécution du contrat ;

- sur l'opportunisme des acteurs (d'où nécessité de contrôle) ;

- sur la rationalité limitée des mêmes acteurs. Williamson s'intéresse ici à la prise de décision et aux conditions dans lesquelles elle s'effectue ;

- sur ce qu'il appelle « la spécificité des actifs » ou « idiosyncrasie ». Le terme « actif » est utilisé dans un sens très large : de l'équipement dédié à une compétence humaine spécifique, en passant par tout autre actif incorporel.

La première approche « Markets and Hierarchies » tendait à opposer « firme » et « marché ». La firme se justifie dans certains cas par le fait qu'elle permet des économies de coûts de transaction, par intégration.

Opposer Marché et Organisation peut paraître limitatif, car où placer les relations partenariales dans ce cadre ?

Williamson (1986, p.117) a donc enrichi son approche en approfondissant son analyse des comportements des partenaires de l'entreprise et de leurs effets sur la performance de cette dernière. Il en tire une typologie des contrats, fonction de leur fréquence et du degré de spécificité des actifs.

Cette typologie suffit-elle pour appréhender les réseaux ? Comme le signale de Montmorillon (1989) :

« la problématique des coûts de transaction, qui renvoie directement à l'avantage du négociateur central, laisse dans l'ombre la complexité des relations de contrôle qui se nouent entre les différents pouvoirs impliqués dans les opérations contractuelles ».

De plus, d'un point de vue pratique, comment s'effectue l'évaluation des coûts de transaction ? Il nous faudra étudier si, en fait, le concept de réduction de coûts liée au développement d'une relation partenariale ne fait pas partie de « l'imaginaire » du manager. Cela tient du bon sens mais ce n'est pas forcément prouvé. C'est le même problème que pour la qualité, grâce à laquelle un produit doit atteindre un coût de revient moindre ou acquérir une valeur supplémentaire. L'écart de coût ou de valeur est rarement apprécié dans son ensemble.

Dans notre étude, la théorie des coûts de transaction nous intéresse dans le sens où, dans son approche sur la rationalité limitée et l’opportunisme, elle considère que l’information est stratégique et coûteuse, ce qui est fondamentalement remis en cause par l’introduction et le développement des NTIC qui diminuent fortement les coûts et favorisent la rapidité de diffusion et de transmission de l’information.

La question qui se pose alors est de savoir comment ces NTIC vont modifier certains fondements de la théorie des coûts de transaction. Un axe de réponse tient au fait que l’analyse transactionnelle s’appuie sur des aspects qui ne sont plus vérifiables avec le développement des NTIC. Et en termes d’externalisation de certaines activités, tel que nous souhaitons l’analyser dans cette recherche, un détour par l’approche transactionnelle n’est pas superflu, mais il n’en demeure pas moins qu’elle n’est pas exclusive dans l’explication des phénomènes contractuels des organisations. Signalons également que ces théories contractuelles n’expliquent pas tout en ce qui concerne les choix de partenariat (en interne et en externe) des organisations.

2.5.3. Les limites des théories contractuelles des organisations dans le cadre du partenariat Signalons que le problème de l'évaluation des coûts concerne autant les coûts d'agence que les coûts de transaction. Mais nous ne développerons pas ce sujet plus amplement dans cette partie.

Le fait de mettre l'accent sur le contrat implique que les relations qui sont étudiées sont plus des relations d'échanges de biens que de production. La notion même de coopération semble peu employée.