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C ONCLUSION DU C HAPITRE

CHAPITRE 2. R ECHERCHE D ’ UNE COHÉRENCE ENTRE FRH ET ORGANISATION

2.1. Les aspects constitutifs du changement en GRH

Reprenant les travaux de Louart (1995)86, il apparaît qu'en GRH, il y a toujours des changements à opérer et que pour les effectuer, il faut comprendre les facteurs constitutifs de la GRH. Au premier rang de ces facteurs, il y a les hommes et leurs représentations.

Pour ce qui est des hommes, il existe deux niveaux de réalité : celui des événements et celui des représentations que les personnes construisent à partir de ceux-ci.

Les sociologues ont fait ressortir le pouvoir des hommes et de leur stratégie (buts sous- jacents) dans l'organisation ; mais ce pouvoir se heurte à trois limites87 :

- les individus sont habituellement rationnels ; mais leur rationalité s'inscrit dans des contextes d'action assez complexes qui peuvent être interprétés (donc appliqués) de différentes façons ;

- d'un individu ou d'un groupe à l'autre, les marges de manœuvre réelles sont très variables ; - les rationalités observables dépendent aussi des cadres de références des acteurs, c'est-à-

dire de leurs structures psychologiques internes.

86 Louart P. (1995), Succès de l'Intervention en Gestion des Ressources Humaines, Rueil-Malmaison (France), Editions Liaisons. 87 Louart (1995), Pp. 38-39 GRH comme ensembles d’activités propres Management systémique des ressources humaines Management stratégique des ressources humaines Management politique des ressources humaines

Rationalités technico-économiques et sociopolitiques

Deux pôles de rationalités sont mis en évidence : les rationalités sont à la fois technico- économiques et sociopolitiques et pour lui, toute organisation est un mélange de ces deux rationalités.

Les rationalités technico-économiques (RTE) représentent l'ensemble des objectifs économiques, des méthodologies et des pratiques opératoires d'une organisation. Les objectifs étant supposés communs et partagés, ces rationalités impliquent une recherche de cohérence et d'efficacité collective ; elles utilisent les technologies et les méthodes comme des moyens pour atteindre leurs fins. Les conflits sont externalisés sur l'environnement et sont dépersonnalisés (la concurrence, les marchés, les contraintes, etc.).

Parallèlement, les rationalités sociopolitiques (RSP) correspondent aux représentations et intérêts des différents acteurs ou groupes d'acteurs faisant partie de l'organisation. C'est la base subjective et en partie tensionnelle des objectifs officiels ou des règles collectives.

Mentionnant quelques principes normatifs rencontrés dans la littérature de gestion, Louart (1995, p.66) rappelle que :

« un changement doit pouvoir être piloté dans ses aspects politiques (pouvoir et moyens matériels d'agir), technologiques (capacités requises) et psychosociaux (accord et implication des personnes concernées) ».

En GRH les innovations trouvent un accueil d'autant plus rapide que ceux qui les mettent en œuvre ont un statut reconnu, la compétence requise et les moyens d'agir, mais l'environnement doit s'y prêter ou être aménagé en conséquence.

Ceux qui construisent une GRH réaliste ne décident rien sans un minimum de débat en faisant participer les acteurs et les membres concernés de l'organisation. L'essentiel est de rester ouvert le plus possible, avec le minimum de cohérence qui préserve une sensibilité à l'environnement. C'est le sens du constructivisme.

On peut rappeler ici que :

« Un diagnostic traduit la subjectivité de ceux qui l'établissent et qui mettent leur parti pris dans l'analyse des faits ou des orientations utiles »88.

Aussi, pour qu'un changement se fasse de façon efficace est-il bon d'intégrer dans la démarche de changement, les problèmes et les enjeux du plus grand nombre possible d'acteurs. Pour lui, l'évolution passe aussi par les conflits et les coopérations entre acteurs. Elle résulte de leurs transformations cognitives et sociopolitiques. A ce sujet, la sociologie des organisations a montré l'importance de faire participer l'ensemble des personnes concernées par une intervention de changement, en particulier quand elle touche aux structures et aux fonctionnements de la GRH. Il privilégie donc « l'acceptabilité construite, dans ce qu'elle

88 Louart (1995), p.162

peut engendrer d'accords, de coopérations ou du moins de neutralité par rapport aux interventions en GRH »89.

Un vrai changement est la prise en compte d'éléments de signification véritablement nouveaux par un individu ou par un groupe. C'est un sens radicalement neuf qui, non seulement émerge dans l'expérience du sujet, mais qui est également pris en compte par lui, transformant ses perspectives, ses façons d'être et de penser, ses relations ou sa structure. Pour sa part, Louart propose la schématisation suivante du changement :

Figure 15. Schématisation du changement

Louart souligne qu' « il est prudent d'encadrer les processus par des repères (règles, procédures, passages obligés) ou des incitations (rappels d'objectifs, stimulations, soutiens qui en canalisent le déroulement ».

Pour lui, le modèle de Nadler90 sur le management des transitions est un bon modèle pour la gestion de l'Interprésent. Nous avons repris, sous forme de tableau, le résumé que fait Louart, des trois démarches simultanées que propose Nadler pour accompagner le changement.

89 Louart (1995), p.247

90 Nadler D.A. (1987)., « Managing transitions to uncertain future states », Organisational Dynamics, été, et « The effective management of organizational change », in J-W. Lorsch éd., Handbook of organizational

behavior, Prentice -Hall inc.

T1

Diagnostic du présent

T2

Images du futur (tendances et anticipations, scénarii

d'avenir, objectifs et projets)

T3

Management des transitions

Méthodologies formelles (objectivation) Constructions informelles (intersubjectivité) T4 Production de futur

67

Tableau 15. Trois démarches d'accompagnement du changement

Façonner une dynamique d'action Pousser à un comportement constructif

Aider à faire passer les étapes transitoires

s'assurer d'une masse critique de personnes qui soient favorables à l'intervention

donner envie de faire évoluer le

présent présenter une image claire et attractive de ce que doit devenir le futur (une fois les changements intégrés)

faire que l'encadrement milite pour le changement (parce qu'il en a intégré les enjeux et s'en est approprié les objectifs)

offrir des possibilités de

participation chaque fois que c'est possible se servir des circonstances comme d'un support ou levier pour l'intervention

créer des communications symboliques adaptées (messages, visions à partager)

récompenser ceux qui contribuent aux objectifs souhaités

fournir les moyens nécessaires aux actions en cours

garantir un minimum de stabilité dans l'équipe de pilotage (pour maintenir la continuité au-delà de ce qui change)

laisser du temps et des opportunités pour que les personnes impliquées puissent se dégager en partie des affaires courantes

diffuser des informations

périodiques sur l'état d'avancement du projet

Louart rappelle donc sa préférence :

« pour une GRH constructiviste, qui trouve sa cohérence dans un arbitrage actif entre ses aspects constitutifs (mêlés à l'histoire organisationnelle), instrumentaux (liés aux objectifs stratégiques) et dialectiques (tenant compte d'enjeux humains parfois en conflit avec les orientations technico- économiques ou sociopolitiques de l'organisation) » (p.289)

Cette invitation à être sensible aux perceptions et représentations des acteurs nous amène à jeter un regard sur des concepts issus de la psychologie ou de la sociologie. Puisque tout changement nécessite la prise en considération des aspects sociologiques sous-jacents à toute modification de l’organisation.

Et pour conclure sur les rationalités tant technico-économiques que socio-politiques, il est possible de résumer la capacité d’articuler les référentiels des agents de changement avec ceux de l’organisation, en utilisant le schéma présenté par Louart (1995, p.68).

Celui-ci fait apparaître que le but, relativement aux RTE, est d’adapter ou de développer les pratiques de GRH pour qu’elles soient appropriées au contexte et aux objectifs organisationnels, et que par rapport aux RSP, l’enjeu est d’équilibrer et de rassembler les forces en présence, mais également d’élaborer des compromis viables dans les zones de conflit :