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L’UNITE DE PRODUCTION INFORMELLE, UN CADRE POUR UNE

6. Organisation d’une journée de travail type dans une UPI

Une journée normale dans un UPI commence entre 9 et 10 heures. Les moins expérimentés sont les premiers à se présenter à l’atelier. La journée commence par le nettoyage des locaux et la mise en place. Le MA est souvent le dernier à venir sur les lieux, à moins qu’il ne soit contraint de s’y rendre plus tôt en raison d’un travail de la veille à finir en urgence. Les premiers clients arrivent dans cette fourchette d’heure (9-10 heures). Les premières sollicitations sont faites et les premiers engagements pris. La contractualisation avec le client se fait de manière tacite, orale. Plusieurs contractualisations peuvent se faire avec plusieurs clients dans une même journée. En Milieu d’Apprentissage Traditionnel (MAT), il est rare que le MA refuse de prendre une demande. Le travail se fait souvent d’une manière collégiale avec un meneur qui se trouve souvent être le MA ou un apprenti désigné par ce dernier. Les tâches sont réparties par groupes. Le MA s’occupe de cette organisation non sans avoir auparavant donné des orientations précises pour la prise en charge des problèmes des clients. Il s’occupe de cas sérieux, s’il juge qu’aucun des apprentis n’est en mesure de le faire. Il s’entoure lui aussi d’apprentis au moment d’intervenir. Les autres AP assistent à l’intervention et participent au

120 besoin en passant un outil ou en effectuant une opération sur la demande du MA ou de l’apprenti qui dirige les manœuvres. Généralement les interventions s’enchainent les unes à la suite des autres. La cadence se maintient ainsi jusqu’à la pause-déjeuner qui commence à la livraison du repas. Généralement, il appartient aux apprentis novices d’aller chercher le repas chez le domicile du MA. Il n’y a pas d’heure fixe pour cette pause. Le travail s’arrête le temps de la restauration et reprend aussitôt après. Le repas est à la charge du MA dont il gère aussi la préparation. Les activités se poursuivent jusqu’à 18 heures 30 et au-delà dans les journées de grande sollicitation.

6.1. Dans les UPI de mécanique automobile

C’est généralement au moment des échanges avec le client qui explique son problème que le premier diagnostic est posé. Les apprentis assistent à ces échanges et sont attentifs aux explications du demandeur. L’avis des plus expérimentés est parfois demandé pour valider les premières hypothèses surtout si le MA décide de déléguer l’intervention. Il s’assure que le bon diagnostic soit posé avant de confier un quelconque travail aux AP. Ces derniers se pressent à effectuer la tâche assignée et ne prennent jamais de décisions cruciales sans avoir précédemment pris l’avis du MA. Soit celui-ci est présent et observe le travail en train de se faire, soit il est occupé en parallèle à un autre travail.

6.2. Dans les UPI de Froid

C’est au moment des échanges avec le client que les premières hypothèses émergent. Les UPI de Froid reçoivent moins d’apprentis que celles de mécanique automobile et de menuiserie métallique. Là encore, les apprentis assistent aux échanges entre le MA et le client. En froid le travail se déplace souvent chez le demandeur. Dans ce cas, le MA accompagné d’apprentis se déplace chez le client pour l’intervention. Le nombre d’apprentis amenés chez le client dépend de la nature du travail. Ceux qui restent à l’atelier terminent leurs tâches respectives. S’il s’agit de réparation simple d’appareil frigorifique électroménager, le MA se déplace accompagné d’un AP à défaut de se déplacer seul. Le nombre d’apprentis augmente s’il s’agit d’intervention sur des climatiseurs (montage, dépannage).

6.3. Dans les UPI de menuiserie métallique.

Pour les UPI de menuiserie métallique où la fonction première est la conception et la fabrication, la contractualisation avec le client nécessite plus d’allers/ retours et les décisions

121 ne se prennent pas sur l’instant. En effet, les UPI de menuiserie métallique interviennent pour la plupart dans la confection de meubles métalliques, portes, fenêtres, escaliers, etc. Ce travail dans les normes se fait à partir de plans et dessins, or la plupart des MA ne savent pas lire ces plans. Donc, il n’est pas rare que les MA accompagnés d’apprentis se rendent chez le client pour effectuer des relevés métriques avant de procéder à l’exécution de la tâche une fois retournés à l’UPI. Au moment de l’exécution, le MA s’appuie sur les AP en fonction de leur degré de maîtrise.

Conclusion

Dans ce chapitre, nous avons tenté de décrire ce qui se laisse voir au premier regard en milieu d’apprentissage traditionnel. Cette description qui correspond au premier but de cette recherche vient en appoint au travail déjà effectué dans la description du contexte de l’apprentissage traditionnel (au chapitre 2). Nous avons voulu montrer ici les réalités du terrain de l’apprentissage traditionnel à travers les UPI sur le plan de l’organisation et des usagers.

Nous pouvons constater que l’apprentissage s’insère parfaitement dans la structure socioculturelle de la société sénégalaise. En effet, sur le plan formel et administratif, il ne jouit pas d’un statut d’institution, cependant il trouve sa légitimité institutionnelle dans l’imaginaire collectif des populations. Sa fonction sociale dépasse largement la formation des AP. En plus d’être un lieu de travail, l’UPI est un lieu de vie quotidienne. Une journée de travail dans une UPI est une journée de travail comme on peut en vivre dans de nombreuses autres organisations professionnelles. Sur fonds de solidarité et de relations presque fraternelles, les activités économiques banales réunissent autour d’un contrat tacite un chef d’entreprise le MA, ses apprentis (employés) et les clients.

En dehors de ces personnes, les UPI sont fréquentées aussi par des retraités, des vendeurs ambulants et parfois des chômeurs amis du patron. Cela en fait des endroits très animés où la causerie sur divers sujets accompagne le travail. Tout cela se fait dans le respect et la bonne humeur.

Il nous a été donné d’être le témoin plusieurs fois d’un rituel discret mais qui témoigne de la haute portée sociale et de la solidarité du milieu : à la fin de chaque journée de travail, les MA partagent le gain de la journée avec leurs apprentis, mais surtout avec les MA retraités présents sur les lieux. En effet, le caractère informel de leur activité fait, qu’il n’y a aucun

122 dispositif de prise en charge sociale ou prévoyance retraite chez cette frange de travailleurs. Cela participe d’un élan de solidarité implicite mis en place par les MA envers les collègues à la retraite. Il n’y a rien qui les oblige à partager leur gain du jour. Toutefois, personne ne tenterait de se soustraire à cette pratique de peur d’être mal jugé. Cet élan de solidarité ne s’arrête pas à ces participations occasionnelles ou à la prise en charge des dépenses quotidiennes des retraités qui se présentent à l’atelier. En cas de « situation sociale » (cérémonie sociale : baptême, deuil, etc.…) devant occasionner des dépenses, une collecte est organisée au bénéfice du retraité concerné.

Nous nous sommes employé, au-delà de la description du cadre des UPI, à comprendre en quelle mesure la formation des jeunes prenait place dans un contexte informel. Le chapitre suivant donne des pistes de compréhension sur le fondement de la relation pédagogique supposée en milieu d’apprentissage.

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LES MODALITES D’INTERVENTION

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