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A Zurich, Peter Stunzi, directeur du Services des Parcs et Promenades, s'est impliqué dans une gestion plus écologique dès la fin des années 70. Au cours des années 80, le service a élaboré plusieurs ouvrages importants qui permettaient à la ville d'assurer un bon entretien des superficies vertes fondées sur:43

-"le concept agronomique" avec le but d'assurer la survie d'au moins une ferme agricole par quartier qui assure des prestations d'entretien d'espaces verts à moindre coût que les opérations horticoles.

-"le concept d'un environnement proche de la nature" autour des écoles. L'environnement de l'école doit permettre des cours concrets, des jeux et des observations de la nature.

-"le concept de creusement des ruisseaux couverts de la ville de Zurich ": 40 km de ruisseaux couverts dans les années 60-70 sont réouverts et végétalisés.

Dans les années 80, la direction des parcs et des promenades s'organisa en deux sections principales de planification : "La protection de la nature" et les "Jardins et Monuments". L'art et l'écologie liés au paysage furent scindés, mais approfondis par des experts spécialisés dans ces disciplines. Un service agriculture fut crée dans l’administration de la ville à partir des année 90.

En même temps, les élus de l'environnement soutinrent ces efforts en activant les législateurs, au niveau fédéral, par exemple : 1983, loi fédérale de la protection de l'environnement et de l’ intégration du test écologique à la planification urbaine ; 1986, loi fédérale de l’interdiction des polluants, en particulier des herbicides dans les squares, chemins publics, toits jardinés ; 1991, loi fédérale de l’écoulement d'eaux

41

Ibid

42

W. Kerkhoven, " des modifications dans la gestion des espaces verts et des plantations d'agrément", in Vers la gestion

différenciée des espaces verts , Actes du colloque européen, Strasbourg 24, 25, 26 octobre 1994

43

Peter Stunzi, Présentation de la gestion écologique des espaces verts de Zurich, in Paysage Actualités n°166, Mars 1994, p 14-16, op. cit., p13.

vives en rivières ouvertes ; 1992, loi fédérale permettant la possibilité de conventions payées directement avec des agriculteurs, gestionnaires de l'environnement urbain.

Dans le même esprit qu'à Zurich, Roger Beer, ingénieur forestier, directeur des espaces verts et de l'environnement de la ville de Genève et député du Grand Conseil de la République et du Canton de Genève, confirma l'implication des politiques dans ce nouveau type de gestion :"Dans l'échelle des valeurs de la société, la nature a repris une importance considérable. Cette sensibilité du public envers la protection de l'environnement et de la nature se traduit aujourd'hui par l'envergure du mouvement politique écologique. Cette évolution correspond à une sorte de citoyen qui tient à retrouver en ville des images de son enfance, de la campagne ou d'un idéal disparu. Outre la difficulté de gestion, ce retour aux prés de fauche d'antan illustre parfaitement la contradiction d'un utilisateur polyvalent et gâté".44 Pourtant, il rappela l'absence de réduction financière entraînée par cette politique :"Il apparaît clairement que cette écologie ne correspond pas obligatoirement à un entretien plus simple par les responsables. Au contraire, pour répondre à une pression des citadins plus forte, ces espaces verts, s'ils doivent rester écologiques et naturels, exigeront un entretien plus pointu et plus différencié. Dans cette optique, les terrains municipaux représentent des terrains d'essais privilégiés et nécessaires. C'est en étant attentif à cette évolution vers l'écologie que les services municipaux chargés des espaces verts permettent à l'horticulture et au paysagisme de prendre le tournant de l'an 2000".45

A Lausanne, Marc Perrin, chef du service des Parcs et Promenades, écrivit : "La nouvelle réponse que le service des parcs et promenades ait pu apporter à la demande de protection de l'environnement se révèle être une vieille conception systématique de l'entretien des espaces verts, appelé E.E.E pour Entretien Ecologie Economique". Cette approche obéît à la philosophie :"Un entretien autant que nécessaire, mais aussi peu que nécessaire"46

Une approche différenciée de l'entretien proposait de maintenir les espaces verts selon leur vocation individuelle. En effet," chaque parc, chaque site possède son histoire, son caractère, sa fonction. Le but est de trouver un équilibre subtil entre la tradition horticole et le laisser-faire de la nature, tout en tenant compte de l'usage de nos parcs par la population.". Cette nouvelle philosophie de l'entretien vise à promouvoir cette diversité, à privilégier la végétation indigène, à augmenter les surfaces en prairies fleuries, à laisser pousser la végétation spontanée, autant que possible :"Pour le Service des Parcs et Promenades, la clé qui devrait permettre de faire de substantielles économies réside dans l'effort de planification globale de l'entretien et de limitation de celui-ci aux tâches réellement nécessaires, au moins à ce qu'on pourrait appeler "la valeur d'usage."47

Il s'agissait encore d'un modèle global d'entretien écologique porté conjointement par les élus, les directeurs des espaces publics et les usagers.

44

Roger Beer, "Le traitement écologique des parcs: les possibilités genevoises", in Actes du Colloque de la gestion écologique

des parcs et jardins publics et privés, op. cit.12,pp107-115. 45

Ibid

46

Marc Perrin, "Le service des Parcs et Promenades innove avec l'entretien différencié plus écologique et plus économique", in Paysage Actualités n°166, mars 94, op. cit. p.12

47

2.3.4. Le modèle canadien, la création de réserves naturelles pédagogiques

Pour la gestion des espaces verts en Amérique du Nord, nous retiendrons ici essentiellement l’exemple du Canada qui a été le plus vulgarisé en Europe (participation à des colloques, publications…), notamment pour ses pratiques écologiques et pédagogiques avancées dés les années 70 .

Le directeur des espaces verts de Montréal en témoigna en cherchant à préserver les lambeaux de forêts et de prairie représentatifs des écosystèmes d’Amérique : “ Le développement anarchique des quartiers et des villes de banlieues qui composent la mosaïque montréalaise a heureusement épargné de magnifiques reliquats de paysages naturels de l’île. Une forte pression populaire s’est manifestée à partir des années 75 en faveur de leur préservation et de leur affectation à des fins de parcs pédagogiques, de détente et de récréation. »48

En suivant l’exemple de la réserve naturelle américaine de Yellowstone, les autorités politiques désignèrent ces espaces comme parcs régionaux et les protégèrent contre toute spéculation foncière et comme vestiges des riches écosystèmes d’Amérique du Nord. Plus tard, il en sera de même pour les berges, les îles, les ruisseaux et les habitats faunistiques qui parsèment les îles de Montréal.

Cette gestion conservatrice des milieux naturels était relayée par un grand effort de pédagogie sur l’environnement qui s’appuyait sur la technique anglo-saxonne de “ site interpretation ” .

Dans la foulée, en 1992, la Ville de Montréal mit en projet sur l’ancien site des Jeux Olympiques de Montréal de 1992, un “ biodome ”, en tentant de recréer une biosphère de paysages incorporant la faune et la flore de tous les habitats américains. Parallèlement, on a pu noter des expériences de “ reconstitution de forêts naturelles ”, notamment celles réalisées dans le parc de Mont-Royal à Montréal ou les parcs de nature n’utilisant que des essences représentées dans la flore indigène de Québec. Plus récemment, la Ville de Montréal a structuré un programme de remise en valeur des terrains vagues le long de la rue Sainte- Catherine : “ Dans certains cas, la présence de barricades aidant, il s’est développé une végétation spontanée d’arbres, d’arbustes, de plantes herbacées. Des scénarios ont alors été proposés pour profiter de ces opportunités et mettre en valeur la végétation naturelle. ”49

48

P Bourque, “ Montréal, une île verte au coeur du Saint- Laurent ”, in Les parcs et jardins de demain, ibid.

49

M. Labrecque , “ De l’écologie de l’arbre à la composition urbaine, ” Actes du séminaire Pratiques écologiques dans le

2.3.5. Conclusion sur les expériences étrangères de gestion différenciée

Nous avons distingué ici les villes européennes et canadiennes, innovatrices dans leur mode de représentation de l’espace vert urbain comme continuité biologique de la nature rurale et naturelle, et comme illustration d’une gestion holistique et dynamique de l’environnement urbain dans les années 70. Ces parcs de villes naturalistes sont gérés comme les milieux naturels d’une réserve. Cependant, il est à noter que cette gestion écologique a participé à la séparation progressive entre écologistes et paysagistes. En effet, l'attitude de laissez- faire des premiers essais écologiques dans le début des années 70 a été souvent rejetée par les paysagistes. Par contre, de nouvelles compétences ont été intégrées dans les services de ville comme la phytosociologie, la gestion de la faune sauvage, l’agronomie, l’urbanisme écologique, la pédagogie sur la nature en ville.

Deux écoles de pensée semblent avoir émergé parallèlement dans cet esprit, l’une anglo-saxonne portée par des villes américaines, canadiennes ou australiennes, l’autre germanique, mise en avant par des villes de Suisse, Allemagne, Pays Bas, largement plus diffusée en Europe à travers les réseaux de directeurs d’espaces verts publics et les publications. Nous constatons que les leaders de cette nouvelle gestion de l’espace vert perçue comme contribution à la préservation des milieux vivants sont constitués plus souvent de scientifiques forestiers, écologues, agronomes que de paysagistes ou horticulteurs, ce qui confirme la prédominance du modèle scientifique de la nature chez ces promoteurs. Les programmes de gestion des espaces verts “ plus proches de la nature ” ont éclos de façon synchrone avec la montée des mouvements politiques Verts du Nord de l’Europe, la demande sociale de présenter des images plus naturelles dans les jardins publics et d’enrayer les nuisances contre l’environnement et l’objectif public de réduire les budgets consacrés aux espaces publics. On retrouvait à la fois les ferments du "code qualité" de la gestion différenciée des villes françaises des années 90 et une approche plus transversale et pluridisciplinaire qui annonçait l'esprit de la « ville durable ».

On notera la rareté dans les séminaires professionnels européens des interventions portant sur la gestion écologique ou des publications nationales et européennes émanant des directeurs de services espaces verts britanniques , pourtant imprégnés de l’art du “ wild garden ” depuis le XIXe siècle et pratiquant le “ nature-like management ” dans les espaces périurbains et ruraux.

La nature entre les rails : Freiburg

Zone de protection de la nature : Zurich Aire de jeux naturelle : Zurich

2 4. La diffusion des principes de gestion écologique appliquée au

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