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Le cadre théorique choisi pour le développement de LOCREAM est fourni par le champ des environnements informatiques pour l’apprentissage humain (EIAH). Ce cadre est à l’origine de l’approche pluridisciplinaire que nous avons adoptée. Cela nous a permis de concevoir un dispositif numérique en situant le solfège par rapport à ses aspects didactiques, pédagogiques, techniques et historiques. En revanche, le fait que notre objectif principal était celui de mettre chaque domaine à contribution pour concevoir le dispositif, nous a forcés à limiter la portée de nos incursions. Par exemple, en didactique, nous nous sommes limités à un premier niveau de rapprochement entre le dispositif et la notion de milieu didactique. Les réflexions autour de la notion de milieu peuvent être approfondies avec des expérimentations où LOCREAM serait l’environnement dans lequel l’élève devrait réaliser un contour mélodique selon des contraintes exprimées par l’enseignant. Ces contraintes auraient pour but de transformer LOCREAM en un système antagoniste (Brousseau, 1988;

Margolinas, 1995) en demandant à l’élève la construction de structures à partir des éléments fournis dans LOCREAM, mais exigeant la prise en compte certaines caractéristiques non triviales de ces éléments. Par exemple, pour construire un contour, l’élève ne peut utiliser que des fragments finissant en ré, ce qui exigera de lui une attention toute particulière sur la dernière note de chaque fragment. Ainsi qu’une stratégie pour garder en mémoire le son de cette note.

Nous considérons également que les questions liées aux rapports élève/savoir et enseignant/savoir dans le dispositif peuvent orienter d’avantage l’évolution de ce dernier et la conception d’autres dispositifs numériques pour l’apprentissage. Encore dans le champ de la didactique, il y a un versant lié à la didactique des disciplines qui n’a pas été traité dans ce travail.

En outre, nous avons effleuré la question de « l’oreille musicale » (Hennion, 2007;

Jacques-Dalcroze, 1919). Cette notion tellement présente lorsqu’il s’agit d’éducation musicale, exigerait un découpage en termes des savoirs qui la composent pour soustraire de cette expression les facteurs en jeu lorsqu’on utilise cette expression.

a. Limitations concernant la conception et le développement du dispositif LOCREAM

Nous avons voulu placer ce travail dans un champ d’observation où il reçoit des intrants des 4 champs disciplinaires : l’évolution de la notation musicale (comme pratique de référence), la pédagogie, la didactique et les technologies. Si d’une part cette perspective pluridisciplinaire nous a aidés à identifier quelques facteurs importants dans l’état actuel de la discipline solfège, d’autre part une perspective aussi large nous a obligés à restreindre la portée des outils développés pour ce travail.

Notamment pour ce qui concerne le développement du dispositif et le cadre expérimental censé mesurer son influence dans l’acquisition des savoirs convoqués par le solfège. La première, et la plus facilement visible est que nous avons conçu un environnement qui devrait proposer à l’utilisateur l’option de réaliser des contours dans un des trois styles : classique, brésilien et baroque. L’idée étant de produire des réservoirs de fragments marqués par des figures rythmiques caractéristiques et de séquences de notes/intervalles récurrentes dans chacun de ces styles. Nous avons travaillé avec un seul style que nous avons appelé classique, et de surcroit en prenant en compte des repères généraux en termes rythmiques et d’intervalles sans une recherche de nuances plus fines (triolets, imitations et autres). Nous pensons élargir le choix de styles dans le but de favoriser davantage l’engagement auditif grâce à l’implication accrue par l’identification de l’élève avec le style choisi ou par sa curiosité à découvrir comment cela doit sonner.

Un autre aspect auquel nous pensons et qui mériterait d’être plus développé est celui de la méthode de segmentation. Par exemple, une extension possible de ce travail serait l’application des notions liées aux Unités Sémiotiques Temporelles (Delalande et al., 1996; Favory, 2007). Dans la production des fragments mélodiques, notre démarche de segmentation présentant déjà des affinités assez étroites avec les procédés utilisés pour obtenir les UST.

Pour terminer, nous n’avons pas pu traiter un aspect de LOCREAM dont la pédagogie de la fin du XXe siècle ne cesse d’y mettre l’accent, il s’agit de la création comme activité favorisant la construction des savoirs. En effet, l’activité de construction de mélodies à travers des unités porteuses d’un sens mélodique aurait pu être observée comme activité d’apprentissage. La création favoriserait la prise de conscience des contours mélodiques et nous avons envisagé cette possibilité. Cependant, devant un processus d’accommodation de notions qui s’annonçait incertain, nous avons décidé de limiter nos observations à la didactique ainsi qu’à d’autres aspects pédagogiques comme le principe du faire pour apprendre.

b. L’expérimentation du prototype de LOCREAM

Dans le cas présent, l’expérience d’introduction du dispositif LOCREAM dans les classes de solfège a été portée sur un nombre très restreint d’élèves, ce qui rend très difficile l’obtention de résultats significatifs. Cette limitation a été, d’une part, liée à la difficulté des enseignants contactés à dégager de leurs cours du temps à consacrer à l’expérience. D’autre part, quelques enseignants nous ont questionnés sur les apports d’une telle expérience aux processus d’acquisition des savoirs de leurs élèves de solfège. Néanmoins, les résultats de cette expérience ont servi à valider l’état actuel du prototype, et à indiquer la nécessité d’ajustements pour un protocole à venir. En effet, les résultats de l’ensemble du groupe en termes des dictées de notes ont montré que la moyenne de l’ensemble des participants avait baissé lors du post-test de manière significative. Deux expertises extérieures ont alors été commandées pour obtenir des pistes pour la compréhension de ces résultats et, selon les experts, eux-mêmes enseignants de solfège, deux raisons peuvent être avancées. La première est que la comparaison des deux tests montre une difficulté légèrement accrue du post-test par rapport au pré-post-test. Il est alors possible que cette difficulté supplémentaire du post-test ait entraîné une baisse de la moyenne importante pour certains élèves. La deuxième raison avancée par les experts est que dans un espace de temps d’à peine deux semaines, les performances en dictées peuvent être disparates même si on leur présente les mêmes niveaux de difficulté. Cela peut-être dû à des raisons multiples et souvent très subjectives (manque d’attention, mauvais jour, etc.) et qu’un acquis doit être consolidé depuis un certain temps pour que l’influence des facteurs subjectifs sur la performance soit réduite. En effet, selon nos experts, l’observation des performances doit se faire idéalement par intervalles de temps assez important pour

qu’on puisse détecter des éventuels résultats significatifs des capacités sollicitées par le solfège.