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Dynamiques socio-environnementales dans les Basses Terres mayas à travers les âges

1.3. Contexte historique régional

1.1.3. Les formations végétales dans les Basses Terres

Cet exposé des différents types forestiers et de la flore des Basses Terres se veut synthétique, la très grande biodiversité qui caractérise les forêts tropicales centre-américaines ne permettant pas d’en faire ici une présentation détaillée. On présente une liste plus complète, bien que non exhaustive, des espèces ligneuses dans les Basses Terres centrales en annexe A. Dans cet inventaire, compilé dans le cadre de ce travail doctoral à partir de différentes sources (voir Chapitre 3.1.1), les taxons sont listés par famille et par genre, les noms vernaculaires en espagnol et en maya étant indiqués dans la mesure du possible.

Formations végétales principales

Forêts hautes pérennes

Dans le Nord du Chiapas, le Tabasco et le Sud-ouest du Petén, les forêts sont hautes, pérennes et très humides (Figure 1.4). Elles se développent sur des sols plus ou moins profonds de type rendzines et vertisols, bien drainés, riches en argiles et en matière organique. La canopée peut atteindre 60 m de hauteur (Pennington et Sarukhán, 2005, p. 20) et se compose de grands arbres comme Swietenia

macrophylla (acajou), Guatteria anomala, Terminalia amazonia (canxan), Dialium guianense,

Calophyllum brasiliense (santamaria), Pouteria campechiana (kaniste) ou Licania platypus (tzocotz). Bien qu’il soit difficile d’associer des familles à un type de forêt en raison de la très grande diversité floristique et de la distribution large de la plupart des espèces, il semble que d’une manière générale, des familles telles que les Annonacées, les Combrétacées, les Lauracées, les Cannabacées et les Fabacées-Papilionoidées connaissent un développement particulier dans les forêts très humides. Ce type de forêt se caractérise aussi par la grande diversité des formes végétatives : lianes et plantes épiphytes telles que les Broméliacées, Aracées et Orchidacées dans les strates supérieures et intermédiaires, plantes herbacées ombrophiles et diverses espèces d’Arecacées (palmiers) dans la strate inférieure (Pennington et Sarukhán, 2005, p. 22).

Forêts hautes et moyennes sub-pérennes

À mesure que l’on avance vers le nord, les forêts diminuent en hauteur et changent progressivement de composition floristique et de comportement phénologique. Elles oscillent entre 20 et 40 m de hauteur dans les zones centrales du Nord du Petén et du Sud du Campeche (Martínez et Galindo Leal, 2002; Schulze et Whitacre, 1999) et entre 10 et 15 m de hauteur dans la réserve El Eden située dans le Nord du Quintana Roo (Schultz, 2003, p. 95). Dans ces régions où la saison sèche est marquée, bien que relativement courte, et les sols bien drainés en raison du sous-sol karstique, 25 à 50 % des espèces arborées perdent leur feuillage pendant la saison défavorable : on parle de forêts hautes et moyennes sub-pérennes ou semi-sempervirentes (Figure 1.5). Il s’agit du type de forêt qui connaît la plus grande extension dans les Basses Terres car il couvre la majeure partie du Petén, le Belize, le Quintana Roo et la moitié sud du Campeche. Les lithosols et les rendzines minces, la roche affleurant et le relief pentu empêchent le développement des très grands arbres qui nécessitent un enracinement profond. La strate arborée supérieure ne dépasse généralement pas les 30 à 40 m de hauteur, la strate arborée intermédiaire est comprise entre 10 et 22 m et la strate arbustive inférieure se situe entre 4 et 12 m. Par rapport à la forêt haute pérenne, les forêts hautes et moyennes sub-pérennes présentent plus de

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palmiers dans la strate inférieure, moins de lianes et d’épiphytes dans les strates arborées. D’après Pennington et Sarukhán (2005, p. 29), c’est probablement la faible capacité des sols à retenir l’eau en surface qui est responsable du fait que la végétation soit semi-sempervirente, malgré le climat de forêt pérenne. Les espèces décidues des strates arborées supérieures et intermédiaires sont par exemple

Spondias purpurea (jocote), Bursera simarouba (chakah), Zuelania Guidonia (tamay), Tabebuia rosea (maculíz), Aspidosperma megalocarpon et A. cruentum (malerio blanco et malerio colorado), Swartzia

cubensis (sangre de toro), Thouinia paucidentata (canchunup), Vitex Gaumeri (yaxnic) et Alseis

yucatanensis (son).

Forêts basses sub-pérennes

Associées aux forêts hautes et moyennes, les forêts basses sub-pérennes (Figure 1.6) se développent sur des vertisols et gleysols profonds en périphérie des marais et aux abords des savanes. Elles se retrouvent donc dans l’ensemble des Basses Terres centrales, sans distribution propre. Dans ces zones basses, le drainage est souvent déficient en raison des sols composés d’argiles extrêmement compactes, provoquant des inondations qui peuvent durer entre deux et six mois par an lors de la saison des pluies. Au fil de la saison sèche, ces zones s’assèchent progressivement, les sols se fissurent en profondeur et la végétation subit alors une sécheresse édaphique extrême. C’est la raison pour laquelle les forêts des zones basses sont si particulières. Elles se composent d’arbustes épineux et de petits arbres de 5 à 11 m de hauteur qui forment des bosquets denses présentant de nombreuses espèces de graminées (Poacées). Leur densité diminue et leur hauteur augmente du centre inondé presque en permanence (appelé cival) vers la périphérie inondée temporairement. Parmi les espèces arborées les plus représentatives de ces forêts basses, Haematoxylum campechianum (tinto), Cameraria

lateriflora (chechen blanco), Byrsonima bucidifolia (nance agrio), Bucida buceras (pukté), Croton

reflexifolius (cascarillo) et Lonchocarpus guatemalensis (palo gusano) leur sont presque complètement inféodées.

Forêts moyennes et basses sub-caducifoliées et caducifoliées

Bien que les forêts sub-pérennes soient les plus largement répandues dans les Basses Terres centrales et jusque dans le Nord du Quintana Roo, la composition floristique des boisements, leur structure et leur phénologie, dépendent, en fait, des types de sols et des précipitations annuelles. Dans toute la partie nord-occidentale du plateau de Zoh-Laguna, soit en bordure des Basses Terres centrales, la saison sèche plus marquée et les sols généralement pauvres ‒ lithosols et rendzines, très sommaires et acides, ou bien profonds, sableux et très rocailleux ‒ sont responsables du développement, dans certains secteurs, de formations dites « forêts moyennes et basses sub-caducifoliées » (Miranda, 1958; Martínez et Galindo Leal, 2002) (Figure 1.7). Ce type de forêt caractérise le Nord de la péninsule. La hauteur des arbres varie entre 5 et 15-20 m, la majorité des espèces (50 à 75%) perdant leur feuillage durant la saison sèche qui peut durer 7 à 8 mois par an. Dépendamment des précipitations annuelles qui peuvent atteindre des minima à l’extrême Nord-ouest de la péninsule dans le Yucatán, certaines zones forestières peuvent perdre plus de 75 % de leur feuillage et sont qualifiées de « forêts basses caducifoliées ».

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Figure 1.4 Forêt haute pérenne. Site de Palenque, Chiapas, Mexique.

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Figure 1.6 Forêt basse sub-pérenne en zone inondable durant la saison sèche. Route de Río Azul, Nord du Petén, Guatemala.

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Dans ces forêts sèches, les légumineuses (Fabacées) sont les essences les plus représentées :

Caesalpinia gaumeri (jabali), Haematoxylum campechianum et H. brasiletto (tinto de montaña), Lysiloma

latisiliquum (tsalam), Piscidia piscipula (habín), Chloroleucon mangense (guayacán), Lonchocarpus

yucatanensis (yaxul), Diphysa carthagenensis (guachipilin) et Acacia gaumeri (katsin). Les autres espèces parmi les plus répandues sont Bursera simarouba, Thouinia paucidentata, Bunchosia swartziana (cucaracha), Spondias mombin, Gymnopodium floribundum (dzidzilche), Semialarium mexicanum (guaracho), Exostema caribaeum (carey de costa) et Eugenia axillaris (guayabillo) (White et Darwin, 1995, pp. 10–11). Pennington et Sarukhán (2005, p. 40) mentionnent également une association identifiée par Miranda (1958), dominée par Vitex Gaumeri (yaxnic), Brosimum alicastrum (ramón),

Piscidia piscipula, Enterolobium cyclocarpum (guanacaste), Ceiba pentandra (yaxche), Sideroxylon

foetidissimum (zapote), Caesalpinia gaumeri et Cedrela odorata (cedro).

À ces types principaux sont associés des types de végétation mineurs tels que les palmeraies, les savanes et les mangroves, dont le développement dépend avant tout de facteurs édaphiques.

Palmeraie

Les palmeraies sont généralement associées aux forêts hautes et moyennes (Figure 1.8). D’après Pennington et Sarukhán (2005, p. 59), ce type de végétation se développe principalement en réponse à des perturbations anthropiques telles que la taille sélective ou les feux de forêts naturels ou anthropiques, qui favorisent certaines espèces de palmier comme

Acrocomia aculeata (cocoyol) et Sabal mexicana (guano). Mais le facteur déterminant est avant tout édaphique. Les palmeraies se rencontrent dans des zones très humides mais relativement bien drainées, telles que les plaines alluviales ou les dépressions aux sols argileux et organiques qui retiennent l’humidité, sans pour autant atteindre les extrêmes édaphiques que connaissent les sols des marais (Schulze et Whitacre, 1999, p. 194). La végétation des palmeraies est très proche de celle des forêts hautes et moyennes pérennes et sub-pérennes, la principale différence étant l’abondance des palmiers dans la strate arborée supérieure.

Figure 1.8 Palmeraie au nord du Parc National de Tikal, Nord du Petén, Guatemala.

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30 Savane

Considérées comme un groupe phytogéographique unique parmi les savanes néotropicales (Lenthall et al., 1999), les savanes des Basses Terres (Figure 1.9) sont largement répandues dans le Centre-sud du Petén, au Belize et dans la zone frontière entre le Campeche et le Tabasco. Ces vastes étendues herbeuses se caractérisent par la faible densité des espèces arbustives et arborées, parmi lesquelles

Pinus caribaea (pin caribéen), Quercus oleoides (chêne), Byrsonima crassifolia (nance), Curatella

americana (vacabuey), Crescentia alata (calebassier) et le palmier Acoelorraphe wrightii sont les plus fréquentes. Diverses espèces de graminées et de cypéracées recouvrent le sol, notamment Paspalum

spp. et Scleria bracteata (navajuela). Martínez et Galindo Leal (2002, p. 18) distinguent encore les savanes humides, ou carrizales. Celles-ci sont dominées par des carrizos, espèces de bambous herbacés comme Rhipidocladum bartlettii etChusquea sp. ou de roseaux telles que Phragmites australis.

Stuart et al. (2006) ont étudié plusieurs formations de savane dans le Nord du Belize. Ils expliquent que la spécificité des savanes centraméricaines se manifeste à travers leur hyper- saisonnalité (alternance entre inondation et sécheresse) et leur flore particulière, qui résultent des conditions édaphiques, topographiques et géologiques. Les savanes se forment sur les sols argilo- sableux des plaines alluviales inondables, identiques à ceux des marais saisonniers. Leur altitude intermédiaire entre les zones humides les plus basses et les zones hautes où se développent les forêts hautes, réduit la durée des inondations saisonnières, ce qui permet le développement d’une flore spécifique (Stuart et al., 2006). Les variations floristiques entre les différents types de savanes sont en fait fonction de leur position topographique et des variations du microrelief qui conditionnent la rapidité du drainage et la durée des inondations saisonnières (Figure 1.10). Dans les zones les plus basses, les carrizales peuvent être inondées six à huit mois par an. À l’opposé, les savanes de pins et de chênes se développent sur les zones les plus hautes où le drainage est le plus important, en marge des forêts hautes qui se développent sur les sols minces calcaires.

Toutefois, Pennington et Sarukhán (2005, p. 63) soutiennent que les facteurs édaphiques dont dépend l’extension des savanes ont été principalement induits par les activités agricoles. Les sols acidifiés déficients en azote auraient empêché la recolonisation par les forêts de zones anciennement défrichées, et aurait contribué, à l’inverse, au développement d’espèces végétales carnivores telles que

Drosera sp.

Mangrove

Bien que ce type de végétation ne se trouve pas dans l’intérieur des terres, mentionnons tout de même l’existence des mangroves, qui se développent dans les zones immergées en permanence des lagunes et marais salins côtiers. La strate arborée peut atteindre 25 à 30 m de hauteur et est presque exclusivement composée de Rhizophora mangle, Laguncularia racemosa, Avicennia germinans ou

Conocarpus erectus (palétuviers), alors que la strate herbacée est quasiment inexistante. Les caractéristiques les plus remarquables de ce type de végétation sont la présence d’un important système racinaire adventif permettant l’oxygénation de ces espèces arborées, ainsi que leur mode de germination vivipare, tout à fait exceptionnel dans le monde végétal.

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Figure 1.9 Savane inondable sur la route de Melchor de Menchos, Est du Petén, Guatemala.

Figure 1.10 Représentation schématique de la position des savanes et pinèdes de basse terre en fonction de la topographie et du substrat géologique. D’après Stuart et al. 2006.

Associations végétales et variations écologiques dans les Basses Terres centrales

Dans les forêts sub-pérennes des Basses Terres centrales, plusieurs associations végétales ont été décrites, initialement par Lundell (1937) dans le Nord du Petén, puis de façon systématique par Schulze et Whitacre (1999) dans le Parc National de Tikal, par Miranda (1958) et par Martínez et Galindo Leal (2002) dans la Réserve de Biosphère de Calakmul (Figure 1.3). Le tableau 1.1 inventorie ces associations végétales, les équivalences de nomenclature entre les différents auteurs ainsi que les

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espèces dominantes de chacune d’entre elles. Les tableaux 1.2 et 1.3 présentent les compositions spécifiques dominantes des principales associations identifiées dans les forêts de Tikal et de Calakmul. L’intérêt de la comparaison de ces deux zones d’études, séparées de quelque 60 km, est avant tout géographique, dans la mesure où le site de Naachtun se situe précisément à leur interface. Or, en l’absence d’étude écologique récente et systématique dans la région même de Naachtun, il est nécessaire de prendre en compte toute la variabilité régionale possible dans la composition floristique des forêts. D’une part, le gradient sud-nord des précipitations implique certaines variations dans le couvert forestier de ces deux zones ; d’autre part, leur histoire divergente est responsable d’un développement forestier différentiel. Alors que la région de Tikal a été relativement bien protégée depuis les années 1950, permettant le développement des forêts jusqu’à leur stade climax, ou au moins pré-climax2

Microtopographie et édaphologie

, le Sud du Campeche a subi des perturbations intensives et continues au cours du XXe siècle, ce qui a maintenu la majorité des espaces forestiers à des stades successionnels secondaires. Ces deux facteurs réunis – gradient climatique et perturbations différentielles − ont donc contribué à produire des associations végétales parfois très différentes et en constante évolution. Par ailleurs, ces deux études sont réellement complémentaires : dans la région de Tikal, Schulze et Whitacre (1999) se sont attachés à décrire précisément, en fonction de la microtopographie, les associations de forêt haute, les palmeraies et les associations des marais inondables ; dans la région de Calakmul, Martínez et Galindo Leal (2002) ont également décrit les savanes et les associations d’origine secondaire. Mises en regard, ces études permettent donc d’obtenir une image complète et précise des potentialités de cette zone intermédiaire qu’est la région de Naachtun en termes de variabilité floristique et de cycles de régénération.

La figure 1.11 est une représentation schématique des profils de végétation dans les régions de Tikal et de Calakmul, reconstitués d’après les données des auteurs précédemment cités. Les principales associations végétales, représentées par leurs espèces dominantes, sont localisées en fonction de la microtopographie et des grands types de sol (sols minces essentiellement calcaires sur les zones hautes / sols profonds argileux et inondables dans les zones basses).

Les associations ramonal et zapotal, respectivement dominées par Brosimum alicastrum (ramón) et par les Sapotacées, ont été distinguées par Lundell (1937) comme étant les associations végétales dominantes des forêts du Nord du Petén. La dominance de ces deux principales associations semble généralisée au moins aux Basses Terres centrales (Alcorn, 1994 cité par Dugelby 1998, p.158; Miranda, 1958; Pennington et Sarukhán, 2005). Les ramonales, ou forêts sèches de zone haute dans la classification de Schulze et Whitacre (1999), sont des associations calcicoles relativement sèches qui se développent sur les rendzines et lithosols excessivement drainés des versants rocheux et aux alentours des sites archéologiques. Cette distribution spécifique du ramón a fait l’objet d’une controverse entre ceux qui y ont vu les vestiges d’anciennes pratiques sylvicoles mayas (e.g. Folan et al., 1979; Lundell, 1938; Puleston, 1982, 1968) et les partisans d’une explication purement écologique

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L’état climax est le stade ultime de développement d’un écosystème dans des conditions édaphiques et climatiques données. Il s’agit d’un stade théorique et plusieurs auteurs ont fait remarquer le fait que, même dans les zones protégées, les perturbations naturelles successives et les variations climatiques maintiennent les forêts dans un état « pré-climax ».

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à ce phénomène (e.g. Lambert et Arnason, 1982; Peters, 1983; White et Darwin, 1995; Wiseman, 1983). Ce point sera développé au Chapitre 2 (voir 2.2.6), mais mentionnons d’ores et déjà que le ramón est généralement associé à Melicoccus oliviformis (syn. Talisia oliviformis, guayo) et que cette association ramón-guayo se retrouve dans les zones rocheuses des zones hautes et pas uniquement autour des ruines (Schulze et Whitacre, 1999, p. 192). Une autre caractéristique de cette association est la dominance de Piper psilorrachis dans le sous-bois, qui s’y substitue à Cryosophila stauracantha (palmier escoba), généralement dominant dans le sous-bois des forêts des Basses Terres. Les zapotales se développent quant à eux sur des sols légèrement plus profonds que les ramonales, où le drainage est rapide sans être excessif. Ils correspondent à la forêt de chicle décrite par Martínez et Galindo Leal (2002). Dans la région de Tikal, plus humide, Schulze et Whitacre (1999) ont décomposé en trois associations – commune de zone haute, mésique de zone haute, forêt de piémont – cette association presque générique pour les zones hautes des Basses Terres centrales. Cette différenciation est essentiellement topographique, la composition floristique générale ne variant que légèrement d’une micro-zone à l’autre. Dans les trois associations, les espèces dominantes sont Pouteria reticulata dans la strate arborée et Cryosophila stauracantha dans le sous-bois. Les variations sont en fait plus perceptibles dans les espèces mineures (Tableau 1.3).

En dehors de ces associations végétales à large distribution, Martínez et Galindo Leal (2002) distinguent plusieurs associations végétales mineures comme l’association d’Aspidosperma cruentum et A. megalocarpon (bayo) ou l’association de Lonchocarpus castilloi (machiche), de distribution restreinte. L’association de Bucida buceras (pukté) se rencontre le long des cours d’eau temporaires ainsi que dans les plaines inondables. Associée à ces forêts de zone haute, Schulze et Whitacre (1999) mentionnent une association très restreinte dominée par Attalea cohune (palmier corozo ou cohune) et pouvant atteindre 30 à 35 m de hauteur à la canopée, qui se développe sur des rendzines relativement profondes et au drainage déficient dans des zones localisées. D’après Martínez et Galindo Leal (2002, p. 18), ces corozales ont été intensivement perturbés dans le Campeche et ne se trouvent plus actuellement que dans la zone sud-orientale de l’État.

À mesure que l’altitude diminue, les sols s’épaississent, s’enrichissent en argile issue de l’érosion des zones plus élevées et retiennent plus l’humidité, sans que le drainage y soit pour autant déficient. D’après Schulze et Whitacre (1999), la végétation de ces zones intermédiaires est plus basse que celle des zones hautes, souvent plus riche en palmiers (notamment dans les forêts de sabal ou association de guano Sabal mauritiiformis) et composée d’un mélange d’espèces de zone haute (par exemple

Pouteria reticulata, P. durlandii, Trophis racemosa) et d’espèces de marais (Coccoloba acapulcensis,

Croton billbergianus, Metopium brownei), d’où l’appellation de « forêts transitionnelles ».

Aux abords des zones humides, et notamment dans les marais inondables, deux associations végétales ont été décrites. L’association mixte, ou tintal, est une forêt basse dominée par

Haematoxylum campechianum (tinto) qui se rencontre dans les marais xériques des zones élevées à l’intérieur du plateau de Zoh-Laguna. L’association de pukté, dominée par Bucida buceras, correspond à la végétation de bajo mésique et ripisylve décrite par Schulze et Whitacre (1999). Elle se rencontre dans les plaines plus basses du Centre-est de la péninsule, à proximité des plans d’eau quasi- permanents (aguadas) ou dans les zones associées aux systèmes de drainage.

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Tableau 1.1 Principales associations végétales mentionnées et décrites par Lundell (1937, Nord du Petén), Schulze et Whitacre (1999, Parc National de Tikal) et Martínez et Galindo Leal (2002, Réserve de Biosphère de Calakmul) dans

le Nord du Petén et le Sud du Campeche, équivalences de nomenclature et espèces dominantes. Modifié d’après Martínez et Galindo Leal, 2002, p. 8.

Formations secondaires

Les forêts du Campeche ont été très largement perturbées pour l’industrie forestière au cours du XXe siècle et certaines associations végétales d’origine secondaire se sont particulièrement étendues. C’est le cas des associations sub-caducifoliées de Piscidia piscipula (habín), dont l’expansion est vraisemblablement due à l’extraction massive de l’acajou (Swietenia macrophylla) et du cèdre espagnol (Cedrela odorata) dans certains secteurs (Martínez et Galindo Leal, 2002, p. 14). Les associations de

Bursera simarouba (chakah) et de Lysiloma latisiliquum (tsalam) apparaissent, quant à elles, dans des

Nord Petén Calakmul Tikal

1a Ramonal Forêt de ramón Forêt de zone haute sèche Brosimum alicastrum 1b Zapotal Forêt de chicle Forêt de zone haute commune Manilkara zapota

Pouteria reticulata

1c Forêt de zone haute mésique 1d Forêt de piémont

1e Forêt de pukté Bucida buceras

1f Forêt de bayo (restreinte) Aspidosperma cruentum,

A. megalocarpon

1g Forêt de machiche (restreinte) Lonchocarpus castilloi 2a Corozal Corozal Palmeraie de cohune de zone

haute

Attalea cohune

2b Botanal Palmeraie de sabal Sabal mauritiiformis

2c Escobal Forêt transitionnelle Cryosophila stauracantha 3a Tintal Bajo mixte Forêt de marais haute et basse Haematoxylon campechianum