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Apports et limites des différentes approches dans l’étude des usages des bois et des arbres par les anciens Mayas

Figure 2.5 Gauche : détail des peintures murales de San Bartolo (Petén, Guatemala) montrant, au centre, l’oiseau

2.2.6. Génétique des cultivars

Dans le domaine de la biologie moléculaire, la génétique végétale, utilisée par des archéologues dans une perspective anthropologique, constitue un champ disciplinaire très prometteur dans l’étude de l’exploitation des arbres et des plantes par les Mayas préhispaniques. La génétique des cultivars se fonde sur le fait que les pratiques agraires et sylvicoles impliquent de façon inhérente des processus de sélection des cultivars en fonction de traits phénotypiques jugés utiles. Ce processus de domestication des espèces se traduit généralement par une réduction de la diversité génétique entre les populations cultivées, d’une part et, d’autre part, par une plus forte différenciation entre populations cultivées et non cultivées ne correspondant pas à une distance géographique. En caractérisant la variabilité génétique d’une espèce entre plusieurs populations (cultivée/non cultivée ou entre différentes zones géographiques), il est donc possible de reconstituer la généalogie des différentes variétés et de déterminer si la diversité génétique observée est le résultat de manipulations anthropiques anciennes ou récentes ou bien de facteurs environnementaux.

Cette approche a largement été employée en archéologie dans les problématiques liées à la domestication ancienne des plantes. En Mésoamérique et en Amérique du Sud, ces études se sont principalement concentrées sur la domestication du maïs (e.g Bonavia, 2013; Piperno et Pearsall, 1993; Pohl et al., 2007), mais ont aussi porté sur d’autres espèces comme le manioc (Manihot

esculenta) (Rogers, 1965) ou le cacao (Theorboma cacao) (Motamayor et al., 2002). Plusieurs études en biologie végétale ont également été menées sur la domestication des arbres fruitiers comme l’avocatier (Persea americana) (Ashworth et Clegg, 2003; Galindo-Tovar et al., 2007), le papayer (Carica papaya) (Fuentes et Santamaría, 2014) et le nance (Byrsonima crassifolia) (Croft, 2012).

On peut citer deux applications probantes de ce champ de recherche en lien direct avec les problématiques de l’archéologie environnementale dans l’aire maya. L’une a consisté à analyser la

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variabilité génétique du chicozapote dans les Basses Terres centrales, afin de tester l’hypothèse, controversée, d’une sylviculture de l’espèce par les Mayas préhispaniques (Thompson, 2013; Thompson et al., 2015a). L’autre étude a porté sur la pinède du bajo de Santa Fe, située à 18 km au nord-est de Tikal dans le bassin versant du fleuve Holmul (Figure 2.8). Cette population localisée de pins caribéens, connue sous le nom d’El Pinal, fut découverte en 1960 lors d’une expédition de la compagnie pétrolière Esso (Dvorak et al., 2005). Environ 5400 individus adultes sont dispersés d’est en ouest sur une zone de 1,8 km², en plein cœur d’une forêt basse dense de marais saisonnier. Sa proximité avec la cité de Tikal ainsi que son caractère assez inattendu dans le paysage ont conduit certains chercheurs à avancer l’hypothèse que cette population descendrait d’une plantation préhispanique de pins par les Mayas de Tikal (Fialko, 2001). Les pins d’El Pinal sont en effet visiblement associés à des micro-élévations qui ont été interprétées comme les vestiges d’anciens champs surélevés. Cette hypothèse fut réfutée par l’étude de Dvorak et al. (2005) qui a combiné l’approche génétique à un modèle climatique prédictif. La forte variabilité génétique qui existe entre les individus traduit leur origine naturelle, et leur similarité avec les populations de Poptún indiquent que les pins d’El Pinal sont probablement un reliquat d’une ancienne population continue dans les Basses Terres. D’après les auteurs, l’extension du pin caribéen a fluctué par le passé en fonction des variations climatiques. Les périodes plus sèches sont propices à son expansion au profit des forêts humides, alors qu’un retour à des conditions plus humides, tel que ce fut le cas au cours du siècle dernier, entraîne son déclin en raison de périodes d’immersion plus longues dans les zones inondables. Ce serait une combinaison de facteurs climatiques, géographiques, topographiques et écologiques qui aurait permis la germination, vraisemblablement récente, et le maintien des pins dans ce secteur précis du bassin versant du fleuve Holmul. D’ailleurs, une autre population de pins caribéens en tout point semblable existe à Ejido Caobas, dans l’extrême Sud du Quintana Roo. Rien n’indique, dans cette étude, qu’El Pinal existait au moment de l’occupation de Tikal. Mais elle n’en démontre pas moins le fait que le pin caribéen a pu se développer à proximité des cités mayas centrales, à des périodes où les conditions climatiques étaient favorables.

La génétique des cultivars est sans conteste une approche actualiste puisqu’elle a pour objet d’étude des organismes actuels. Mais elle n’en procure pas moins des évidences directes de l’usage et de la culture des arbres par les populations anciennes, dans la mesure où le génome conserve en mémoire toutes les mutations subies par l’espèce au cours des siècles, et que ces mutations peuvent être les conséquences directes de la sélection humaine.

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Figure 2.9 Vue depuis le nord des pins dans le bajo de Santa Fe, Nord du Petén, Guatemala.

Affirmer que les bois et charbons de bois archéologiques sont les seules évidences directes et irréfutables de l’usage des bois et de l’évolution des espaces boisés ne signifie pas que leur étude soit suffisante pour comprendre dans leur globalité les dynamiques socio-écologiques dans les sociétés anciennes. Il est évident que ces données archéologiques directes doivent être confrontées à celles des différentes approches paléoenvironnementales, archéologiques et actualistes exposées précédemment, afin d’enrichir le discours interprétatif et d’élaborer des modèles scientifiquement solides. En revanche, les modèles relatifs aux interactions entre les Mayas préhispaniques et les forêts fondés uniquement sur des approches indirectes (le plus souvent actualistes) ne sont que pure spéculation s’ils ne reposent sur aucune évidence archéologique ou archéo-environnementale.

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2.3 Synthèse des connaissances actuelles sur les usages anciens des ressources

ligneuses dans les Basses Terres mayas

On sait que les ressources ligneuses étaient fondamentales dans les sociétés Mayas préhispaniques. Le bois, et peut-être aussi le bambou (Houston et al., 2017), servaient pour la construction des structures en matériaux périssables ainsi que pour la confection de certains éléments architecturaux dans les édifices monumentaux, tels que les linteaux et les poutres des charpentes (Hellmuth, 1989; Lentz et Hockaday, 2009; Robinson et McKillop, 2013). Il est également certain que les ressources ligneuses furent utilisées pour les échafaudages indispensables à l’édification des monuments. Le bois d’œuvre servait aussi à la confection d’outils, d’armes, de canoës et d’objets ornementaux comme les figurines (Coggins et Ladd, 1992a; McKillop, 2005; Pendergast, 1974; Prufer et al., 2003; Prufer et Dunham, 2009).

Parmi les essences qui nous sont parvenus, Manilkara sp. est la plus fréquemment identifiée dans les bois d’œuvre comme dans les bois de construction des édifices monumentaux (Hellmuth, 1989; Lentz et Hockaday, 2009; McKillop, 2005; Pendergast, 1974). Cela est probablement dû, au moins en partie, à la durabilité exceptionnelle de ce matériau. D’après Hellmuth (1989, pp. 3–5), des éléments architecturaux en bois de Haematoxylum sp. ont été identifiés dans les édifices monumentaux à Tikal, dans le Petén et le Campeche. Du bois de Platimiscium yucatanum (subinche) aurait été identifié dans le Temple des Sept Poupées à Dzibilchaltún (Yucatán), et des bois de Caesalpinia sp., Cordia

dodecandra (siricote) et Gliricidia sepium (madre cacao) ont été mentionnés dans les sites postclassiques du Nord de la péninsule, mais Hellmuth (1989) doute de la validité de ces dernières identifications. Les autres bois d’œuvre préhispaniques connus à l’heure actuelle sont Dalbergia sp. (Prufer et Dunham, 2009), Pinus sp. (Coggins et Ladd, 1992a) et une possible Meliacées utilisée pour la confection de la figurine de Xmuqlebal Xheton Cave (Prufer et al., 2003). Dans les sites côtiers de Paynes Creek dans le Sud du Belize, Robinson et McKillop (2013) ont documenté l’usage du bois de mangrove Avicenna germinans (palétuvier noir) pour les constructions rurales, ainsi que des bois provenant des forêts hautes locales tels que Symplocos martinicensis, Eugenia sp., Ficus sp.,

Hieronymasp. et Casearia sp.

Les études paléolimnologiques de McNeil (2010) à Copán et Rushton et al. (2012) à Lamanai suggèrent que le bois de pin issu des pinèdes locales fut abondamment exploité comme matériau de construction. D’après les estimations fondées sur des observations ethnographiques, les besoins en bois d’œuvre devaient représenter une part minime des besoins généraux en bois ‒ 120 t/an à Tikal au Classique Récent (Lentz et al., 2015, p. 167). Pourtant, les deux seules études concernant les bois de construction dans les Basses Terres, à Tikal et dans les sites de Paynes Creek, ont montré des changements dans la sélection des bois de construction au cours du temps, que les auteurs interprètent comme la conséquence d’une surexploitation des bois préférentiels.

On suppose que les toits des structures en matériaux périssables étaient fait principalement de feuilles de palmiers (Attalea spp. et Sabal spp.), comme c’est encore le cas de nos jours dans les Basses Terres. Des restes carbonisés de tiges de palmiers sont fréquemment retrouvés sur les sites (e.g. Lentz, 1999; Thompson et al., 2015b), ce qui atteste de leur usage au moins comme combustibles et permet

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de supposer leur usage comme matériau de construction également. Les estimations des besoins en feuilles de palmier pour les constructions, faites par Wiseman à partir de données ethnographiques, suggèrent un usage intensif de ces plantes arborescentes à la période classique, dépassant probablement les ressources disponibles (Wiseman, 1983, pp. 152–153). Wiseman en déduit que des plantations de palmiers ont dû exister pour couvrir les besoins de la population en matériaux de construction. On sait néanmoins que d’autres végétaux, notamment des graminées annuelles (Poacées), pouvaient être employés pour la confection des toitures. Cela a été démontré à Cerén (Lentz et al., 1996b), rejoignant ainsi les données ethnographiques relatives aux constructions traditionnelles mayas dans les Hautes Terres et dans le Yucatán (Wauchope, 1938, p. 108).

Le bois représentait le combustible pour la cuisson des aliments, la cuisson des céramiques et la production de la chaux nécessaire à la fabrication des mortiers pour l’architecture. D’après les données anthracologiques disponibles, on sait qu’un grand nombre d’essences étaient utilisées comme combustibles, traduisant la collecte opportuniste d’essences locales. On suppose toutefois que certains bois de feu ont pu faire l’objet d’une sélection, comme c’est le cas dans les communautés mayas contemporaines (Atran et al., 2004; Metzger et Williams, 1966; Sanabria, 1986). En effet, malgré une richesse taxonomique importante, les assemblages anthracologiques sont souvent relativement peu diversifiés, avec une différence très marquée entre taxons dominants et taxons mineurs qui ne correspond pas toujours à leurs proportions dans l’environnement actuel. Par exemple, sur les 21 taxons identifiés dans le spectre anthracologique de Chan B’i, le taxon Chrysobalanaceae domine l’assemblage à hauteur de 44% des charbons identifiés (Robinson et McKillop, 2014). De même, sur les 77 taxons identifiés à Tikal, quatre taxons (Manilkara, Haematoxylon, Licaria et Pinus) constituent 42% du spectre (Thompson et al., 2015b).

On sait que l’usage du bois de pin comme combustible était répandu dans les Basses Terres, au moins depuis le Préclassique, puisque des charbons de pin ont été identifiés sur la plupart des sites ayant fait l’objet d’une étude anthracologique (Dussol et al., 2016; Lentz et al., 2005, 2012, 2014b, 2015, 2016; Miksicek, 1991; Morehart, 2011; Thompson et al., 2015b; Trabanino, 2014). On suppose, compte tenu de l’aire de répartition actuelle du pin caribéen (Pinus caribaea) dans les Basses Terres, que le bois de pin a dû faire l’objet d’échanges à plus ou moins longue distance (Miksicek, 1991, 1983). Des chercheurs ont également envisagé que la distribution de cette ressource et peut-être aussi sa production, via la sylviculture ou l’entretien de populations d’arbres préexistantes, ont pu avoir été contrôlées au niveau politique (Lentz et al., 2015, 2005). Par ailleurs, en croisant des données archéobotaniques, ethnographiques et ethnohistoriques, Morehart a avancé l’hypothèse que le bois de pin avait dû être une composante essentielle des cérémonies religieuses menées dans les cavernes de la haute vallée du fleuve Belize, dans lesquelles il a dû avoir un rôle symbolique (Morehart, 2011, 2002; Morehart et al., 2005). Cette hypothèse a été confortée par la suite par plusieurs études sur des sites des Basses Terres centrales, où les charbons de pin sont abondants dans des contextes rituels et cérémoniels (Dussol et al., 2016; Lentz et al., 2016, 2012; Prufer et Dunham, 2009). En revanche, l’étude des dépôts de cendres des sépultures de Río Bec a permis de supposer que les feux effectués à l’occasion de ces rites funéraires particuliers faisaient l’objet d’une composition intentionnelle intégrant un maximum d’essences (Dussol et al., 2016).

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Élément essentiel des religions mésoaméricaines, le rôle fondamental du feu dans les systèmes de croyance et les pratiques rituelles des anciens mayas n’est plus à démontrer (Stuart, 1998). Grâce à l’analyse de la sémantique des textes et des polysémies suggérées dans les motifs récurrents de l’imagerie classique, des chercheurs ont proposé qu’il existait un lien symbolique entre les encensoirs, le foyer à trois pierre et l’axis mundi représenté par l’arbre ceiba (Taube, 1998). Les évidences archéologiques de l’usage rituel du feu ne manquent pas dans les sites mayas. Qu’il s’agisse de simples traces de combustion sur les sols ou les objets, ou bien des restes brûlés eux-mêmes, leur association avec certains types de structures et de contextes considérés comme des lieux privilégiés pour entrer en communication avec les entités surnaturelles (temples, autels, encensoirs, caches, niches, sépultures, cavernes, etc.) indique que l’acte de brûler, des encens ou d’autres objets, devait être une étape clé dans le déroulement des rites anciens. Par rapprochement avec les cérémonies religieuses des sociétés mayas des époques coloniale et contemporaine, relatées dans les sources ethnographiques et ethnohistoriques, on attribue au feu un rôle purificateur et transformateur. Le fait de brûler les offrandes et de les transformer en fumée est interprété comme le moyen par lequel on nourrit symboliquement les dieux, les esprits et les ancêtres, en échange de leurs bienfaits (Morehart et Butler, 2010; Morehart et al., 2005). Le feu est aussi destructeur et aurait servi à libérer l’énergie accumulée dans les édifices lors des rituels de terminaison effectués avant leur abandon.

S’agissant des chaînes opératoires d’acquisition et d’usages des bois, on ne dispose que de très peu d’éléments. L’absence d’outils en métal dans les sociétés mayas préhispaniques, qui implique que le bois était nécessairement coupé avec des outils lithiques, encourage à penser que le bois de feu quotidien devait être majoritairement collecté sous forme de bois mort dans l’environnement local, pour des raisons évidentes d’accessibilité et d’économie d’énergie. Toutefois, la découpe de bois, malgré le fait qu’elle devait représenter un travail considérable (cf. Lewenstein, 1987), était inévitable, ne serait-ce que pour la préparation des éléments architecturaux tels que les linteaux, également pour la confection des objets. De plus, le fait que le bois du chicozapote soit plus facile à travailler lorsqu’il est encore vert, a permis de supposer que les linteaux et les poutres utilisés notamment dans les édifices de Tikal avaient dû être taillés à partir d’arbres fraîchement abattus (Coe et al., 1961). On sait également que des lames d’obsidiennes, malgré leur fragilité, servaient à tailler du bois, comme cela a été démontré à Los Naranjos au Honduras (Morell-Hart et al., 2014).

Tous les modèles quantitatifs relatifs à la consommation du bois chez les Mayas préhispaniques (Abrams et Rue, 1988; Lentz et al., 2015, 2014a; Wiseman, 1978) s’accordent sur le fait que le bois de feu domestique représentait la plus grande part de consommation du bois ‒ 37 000 t/an à Tikal au Classique récent selon Lentz et al. (2015, p. 167). En revanche, les estimations pour la production de la chaux contredisent l’hypothèse de Hansen (1995). À Tikal au Classique récent, Lentz estime, en se fondant sur des données ethnographiques, à 1 590 t/an les besoins en bois pour la production de la chaux et à 3 310 t/an pour la cuisson des céramiques (Lentz et al., 2015, p. 167). Néanmoins, on sait que les anciens Mayas ont employé des techniques de production de la chaux différentes de celles observées dans les sociétés traditionnelles (i.e. fours semi-enterrés) et moins consommatrices en combustibles, tel que cela a été démontré par l'archéologie expérimentale (Seligson et al., 2017). Compte tenu des besoins considérables en bois de feu, Wiseman (1978) puis Lentz et al. (2015, p. 170) ont avancé l’hypothèse que l’aménagement et la gestion d’espaces forestiers spécialement dédiés à la production de combustibles ont dû être indispensables pour subvenir aux besoins des cités

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mayas. L’hypothèse d’une sylviculture pour le bois a également été proposée par Lentz et Hockaday (2009) à Tikal, cette fois dans le cadre de l’approvisionnement en bois de chicozapote (Manilkara

zapota) pour la construction des édifices monumentaux. L’étude génétique faite par Thompson sur le chicozapote dans les Basses Terres centrales tend à conforter cette hypothèse puisqu’elle démontre que le niveau de variation génétique entre différentes populations au Guatemala et au Belize est plus proche des espèces exploitées pour le bois, telles que Swietenia humilis (une espèce proche de l’acajou), que de celles cultivées pour leurs fruits (Thompson et al., 2015a, p. 8).

L’arboriculture fut vraisemblablement un élément central de l’économie dans les sociétés mayas préhispaniques, au moins pour les ressources alimentaires. Les données archéobotaniques montrent, en effet, que l’économie de subsistance incluait plusieurs espèces d’arbres fruitiers telles que les sapotes, les anones, les palmiers, l’avocatier, le goyavier, le siricote, le nance, le jocote (Spondias sp.), le cacaoyer, et possiblement l’anacardier (Lentz, 1999; McKillop, 1994). Certains de ces arbres ont dû être favorisés ou cultivés dans les jardins à proximité immédiate des habitats, comme cela a été démontré sur le site de Cerén (Lentz et al., 2015, pp. 173–174). On sait également que des arbres étaient utilisés pour d’autres ressources qu’alimentaires, comme le copal (Protium copal) et le hule (Castilla elastica), exploités pour leur résine (Coggins et Ladd, 1992b). Par ailleurs, on suppose, sur la base d’observations ethnographiques et de données ethnohistoriques, que d’autres arbres comme le ramón ont dû avoir un rôle important dans l’économie de subsistance des sociétés mayas à la période classique (Atran et al., 1993; Lundell, 1938; Puleston, 1982, 1968).

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Si tous les chercheurs reconnaissent l’importance cruciale de la gestion des ressources ligneuses dans l’économie des sociétés mayas préhispaniques, l’impact que cette économie a pu avoir sur l’environnement et rétroactivement sur le développement et le déclin des cités, fait encore l’objet de débats (Fedick, 2010; McNeil, 2012). Les études paléolimnologiques indiquent que le couvert forestier dans les Basses Terres centrales a connu de nombreuses fluctuations depuis l’apparition des premiers établissements humains au milieu de l’Holocène, jusqu’à l’abandon plus ou moins généralisé de la région centrale par les Mayas vers la fin du premier millénaire de notre ère, et même au-delà (Brenner et al., 2002). L’importance des facteurs anthropiques dans ces changements environnementaux successifs par rapport au facteur climatique, n’est pas encore bien comprise. En outre, les conclusions d’études paléo- et archéo-environnementales menées sur différents sites des Basses Terres sont parfois divergentes, révélant la variabilité qui a dû exister dans les stratégies d’adaptation et la capacité de résilience des cités mayas face aux perturbations environnementales. Il est donc primordial de s’attacher à comprendre l’impact qu’ont pu avoir ces systèmes économiques au niveau local, avant d’envisager des modèles à échelle régionale.

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METHODES ET

CORPUS

PARTIE II

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METHODOLOGIQUES

Application de la méthode anthracologique à une cité maya