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Les Fonds Régionaux d'Art Contemporain (FRAC)

Dans le document La géographie de l'art contemporain en France (Page 160-163)

Première partie : L’art contemporain en France depuis

Document 7: Lettre manuscrite de Niki de Saint-Phalle (1990)

II. L’art contemporain dans les politiques culturelles (1959-2004)

6. L’Etat, l’art et les artistes : les aides à la constitution d’un patrimoine d’art contemporain et à la création

6.3. Les Fonds Régionaux d'Art Contemporain (FRAC)

Les Fonds Régionaux d’Art Contemporain ont été créés en 1982233, à l’initiative de l’Etat. Le but était de constituer et de diffuser des collections d’art contemporain dans les régions. Il y a aujourd’hui 22 FRAC en France métropolitaine, et deux, outre- mer, en Martinique et à la Réunion. L’objectif relevait à la fois de l’action patrimoniale et pédagogique. Il fallait faire connaître l’art et les artistes contemporains, partout en France et ainsi, assurer une mission de service public. L’objectif de décentralisation culturelle est donc au cœur de ce projet. Celui-ci est intégré dans le vaste dispositif mis en place par le gouvernement, à la suite de l’adoption par le Parlement, des lois sur la décentralisation, en 1982. Raymonde Moulin explique que « les FRAC ont été conçus comme un des éléments d’une stratégie de contournement de la Direction des musées, suspectée de réticence à l’égard de l’art contemporain. »234

Cet objectif est également économique, il s’agissait de relancer, ou plutôt de lancer le marché de l’art contemporain, notamment pour les jeunes artistes. Depuis la création des Fonds Régionaux d’Art Contemporain, en 1982, jusqu’en 2003, environ 15 000 œuvres ont été acquises auprès de 3 000 artistes. Ils sont financés selon une parité Etat – région, ils sont donc à la fois symboliques de la volonté de l’Etat de diffuser l’art contemporain hors de Paris, mais aussi de se désengager, au moins partiellement sur le plan du financement. Les FRAC jouent un rôle très important, principalement pour les jeunes artistes travaillant en province, en leur permettant de vendre des œuvres et de se faire connaître. Pour certains d’entre eux le FRAC constitue le premier acheteur, mais aussi une référence, en vue d’une reconnaissance, à une autre

échelle géographique. Cette mission n’est pourtant pas la priorité affichée des Fonds Régionaux d’Art Contemporain qui, nous l’avons vu, n’ont pas vocation à devenir des Fonds d’Art Contemporain Régionaux. Les FRAC ont donc indéniablement relancé le marché de l’art à différentes échelles.

Les moyens attribués à ces nouvelles institutions ont fait des envieux. Certains conservateurs de musées de province auraient préféré voir leurs budgets augmenter afin de créer ou enrichir une collection d’art contemporain, plutôt que la création de nouvelles structures. Le partenariat Etat - régions a aussi permis au Ministère de diviser les dépenses par deux.

Si l’Etat participe au financement des FRAC, ceux-ci restent cependant des structures juridiquement autonomes. Ce sont ainsi, le plus souvent, des associations régies par la Loi 1901, qui possèdent et gèrent les collections… achetées avec l’argent public. La gestion des FRAC est assurée par des conseils d’administration composés d’élus des Conseils régionaux, de représentants de l’Etat, de personnalités régionales, et des comités techniques choisis par la région et le Ministère.

La structure juridique de base est le plus souvent de type associatif. Elle offre l’avantage d’être assez souple, mais en cas de dissolution de l’association, l’inaliénabilité des collections acquises par le FRAC n’est pas garantie. Certaines régions ont choisi d’intégrer leur FRAC dans une structure à vocation culturelle plus large, c’est notamment le cas en Alsace et en Corse, où les FRAC fonctionnent selon le mode de la régie régionale.

Les crédits proviennent, à la fois des Collectivités Territoriales et de l’Etat. Le tableau ci-dessous met en évidence le rôle important des régions dans le financement des FRAC :

Tableau 6 : Financement des FRAC en 2000

Etat (Ministère de la Culture et de la Communication) 27,95% Régions 45,98% Départements 0,59% Villes 17,97% Autres ressources 7,54% (Source : DAP 2001)

Alors que le principe de la parité Etat - Région était respecté dans les premières années, il apparaît ici clairement que la part de l’Etat a diminué, compensée par une

participation accrue des régions. Nous étudierons ultérieurement les disparités des FRAC, et de leur financement, à travers une approche cartographique.

L’importance des crédits mis à la disposition des FRAC : 93 millions de francs en 2000, leur permet d’assurer la gratuité des entrées pour tous les visiteurs. Cette mesure correspond à la volonté affichée de démocratiser l’accès à la création contemporaine. Seuls deux FRAC, Rhône-Alpes et Midi-Pyrénées, sont payants, car ils sont à la fois FRAC et centres d’art. En 2000, le coût, pour l’Etat, d’un visiteur non payant, a été estimé à 36 francs.

Un comité technique d’achat composé de « personnalités qualifiées » issues du Ministère et du secteur privé, mais aussi d’élus et de représentants de la région, est chargé de déterminer une politique d’achat et de choisir des œuvres pour la collection. Cette mixité dans la composition des commissions explique des luttes d’influence assez fréquentes. « La politique d’achat des FRAC a soulevé certaines polémiques, ce qui était inévitable s’agissant d’art contemporain. On a reproché à ces institutions de n’avoir pas su se dégager des critères parisiens de choix, d’avoir suivi la tendance dégagée ou imposée par quelques professionnels du marché de l’art, de n’avoir pas tiré suffisamment parti des ressources artistiques locales. »235 A l’inverse, les « personnalités qualifiées » sont souvent confrontées à la pression des élus qui aimeraient davantage intégrer dans les collections des œuvres d’artistes régionaux. Le critique d’art Pascal Pique affirme que « la nature et le profil de certaines collections reflètent trop souvent le jeu de pouvoirs et contre-pouvoirs locaux au détriment de corpus de qualité. »236 Nous étudierons, dans notre dernière partie, l’origine des pièces de la collection du FRAC Pays de la Loire afin de déterminer s’il s’agit d’un Fonds Régional d’Art Contemporain ou d’un Fonds d’Art Contemporain Régional.

Le FRAC est libre de définir son programme. Certains sont plus orientés vers l’accueil d’artistes et la commande, c’est notamment le cas du FRAC des Pays de la Loire. D’autres FRAC ne disposent pas de lieux fixes d’exposition et sont donc totalement nomades à l’intérieur de leur région. La création des FRAC n’a pas donné naissance à des constructions spécifiques, à ce jour la seule exception est le bâtiment construit à Carquefou, dans la banlieue nantaise en 2000. A Toulouse, le FRAC est regroupé avec un musée municipal d’art moderne, un centre d’art et l’annexe histoire

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de l’art de la bibliothèque municipale, au sein d’un centre d’art moderne et contemporain, situé dans les bâtiments des anciens abattoirs de la ville.

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