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Les allusions dites « autobiographiques »

2.3 Campantar dans le T¯ ev¯ aram

2.3.1 Les allusions dites « autobiographiques »

Les quelques références suivantes sont relevées dans l’œuvre attribuée à Cam-pantar et sont présentées dans l’ordre chronologique de la biographie de CamCam-pantar établie par le Periyapur¯an. am, sur laquelle nous reviendrons dans le chapitre 6. Ces références évoqueraient, pour certains auteurs, des éléments autobiographiques71.

La deuxième strophe de l’hymne III 24, dédié à Kal

¯umalam ferait allusion au miracle du don de lait72 :

p¯otai ¯ar pon

¯ kin. n. attu at.icil poll¯atu en¯at t¯ataiy¯ar mun

¯ivu ur¯a, t¯an¯ en¯ai ¯an. t.avan¯; k¯atai ¯ar kul

¯aiyin¯an¯; kal¯umala val.a nakar, p¯etaiy¯al. aval.ot.um peruntakai iruntat¯e ! (III 24.2)

Quand le père en colère dit que La nourriture de la coupe d’or Telle une fleur, est mauvaise, Il me guida,

Celui à la boucle sur l’oreille,

Le grand qui demeure avec la jeune femme

71. Signalons que Rangaswamy (*1990 [1958] : 977-984), Soundra (1979 : 31-45) et Soma-sundaram (1986 : 28-45) présentent ces allusions. Cependant, ils expliquent souvent les passages en accord avec le Periyapur¯an. am sans examiner seuls les hymnes du T¯ev¯aram. Soundra reprend, un à un, tous les hymnes attachés aux miracles de Campantar et donnés dans l’hagiographie, à l’exception de ceux liés aux évènements de Maturai, puis les analyse. Compte tenu du fait que cet auteur, dès le début de son étude et sans analyse, est convaincu de l’authenticité des allusions biographiques dans tous les passages que nous citons, nous l’ignorons dans notre présentation. Somasundaram fait un travail semblable. Nous écartons aussi ses interprétations qui, acceptant systématiquement toutes ces strophes dites « autobiographiques » comme des allusions biogra-phiques, pour la seule raison qu’elles sont citées dans le Periyapur¯an. am, cherchent des indices à tout prix.

72. Nous mettons en gras les passages des poèmes du T¯ev¯aram qui ont été utilisés pour justifier la biographie de Campantar.

Dans la ville prospère de Kal

¯umalam. (III 24.2)

Campantar, s’exprimant à la première personne (à l’accusatif, en

¯ai ), mentionne simplement que son père critique une forme de nourriture et que Śiva fut alors son guide. Cette stance a souvent été mise en correspondance avec l’épisode narré dans le Periyapur¯an. am où le père de Campantar, ne sachant pas qui lui a donné du lait, lève la main pour le réprimander. Cependant, dans cette légende, selon le Periyapur¯an. am, le père ne dit pas que la nourriture, à savoir le lait, est mauvaise ; il demande seulement, craignant une éventuelle pollution, qui le lui a donné73.

Dans le tirukkat.aikk¯appu de l’hymne II 84, à la gloire de Nan

¯ipal.l.i, le poète se présente comme le sage de la connaissance, ñ¯an

¯amun¯i, qui a composé la décade en étant assis sur les épaules de son père :

kat.al varai ¯otam malku kal

¯i k¯an¯al p¯an¯al kamal¯al¯i en¯¯ru karuta, pat.u porul. ¯ar

¯um n¯alum ul.atu ¯aka vaitta pati ¯an

¯a ñ¯an¯amun¯ivan¯, it.u par

¯ai on¯¯ra attar piyalm¯el iruntu in¯ icaiy¯al uraitta pan¯uval, nat.u irul. ¯at.um entai nan

¯ipal.l.i ul.ka, vin

¯ai ket.utal ¯an.ai namat¯e. (II 84.11)

Les actes périront à la pensée du chant prononcé, En plaisante musique, sur Nan

¯ipal.l.i

À propos de notre seigneur qui, au son des tambours, danse en pleine nuit,

Par le sage de la connaissance, assis sur la nuque du père, Qui a pour ville K¯al

¯i que parfument les nélombos odorants Des lagunes où abondent les montagnes de vagues maritimes,

Et où demeurent les six [A ˙nga] et les quatre [Veda] de la libération ; Ceci est notre ordre. (II 84.11)

Cette description fait écho à l’image parfaitement figée dans la dévotion populaire de l’enfant qui se promène assis sur les épaules de son père. Des représentations modernes figurent Śiva portant l’enfant Skanda sur ses épaules (fig. 2.1)74. D’après

73. Il en est de même dans la version attribuée à Pat.t.in

¯attuppil.l.ai (voir 5.1.1).

74. L’Hernault (1978 : 51) mentionne rapidement cette représentation qui lui rappelle un vers de la Viśvagun. ¯adarśacamp¯u évoquant Śiva portant Skanda sur son giron, puis ce chercheur décrit que sur cette image en bois Śiva porte Skanda « assis au creux de son bras ». L’enfant Skanda est souvent représenté assis sur le giron de sa mère dans la manifestation du Som¯askanda. Nous

le Periyapur¯an. am, l’enfant Campantar se déplace sur les épaules de son père dans ses premiers pèlerinages (fig. 2.2).

Figure 2.1 – Skanda assis sur les épaules de son père Śiva, panneau de bois du char du temple de Skanda à Mailam dans le taluk de Tin. t.ivan

¯am, Ten

¯n¯¯ar¯at.u dt. (cliché IFP/EFEO 6889-7 dans L’Hernault 1978 : Ph. 4).

Figure 2.2 – Campantar assis sur les épaules de son père lors des premiers pèlerinages, peinture du mur sud de la petite chapelle de Campantar dans le temple principal de Śiva (A14), C¯ık¯al

¯i (cliché U. Veluppillai, 2003).

Notons que ce détail formulé dans l’envoi est fort inhabituel car Campantar ne mentionne jamais ses parents pour se présenter. Nommer sa parenté est une carac-téristique des envois attribués à Cuntarar qui se présente comme le fils de Cat.aiyan ¯ et d’Icaiñ¯an

¯i, et comme le père de Ci ˙nkat.i et de Van

¯appakai (VII 7, 12, 16, 29, 30, 33, 34, 37, 38, 39, 42, 47, 57, 58, 70, 87 et 98). D’autre part cet envoi est particulier parce qu’il contient l’expression « ceci est notre ordre » (¯an. ai namatu), dont il y a peu d’occurrences dans le T¯ev¯aram (II 85, III 78 et 118) mais qui est reprise dans les textes postérieurs attribués à Nampi (APT 45) et à C¯ekkil

¯¯ar (Periyapur¯an. am st. 2013) et dans une inscription (SII 8 442 l. 24).

Puis, l’hymne I 92 construit selon le procédé du « distique r

˚gvédique », célé-brant V¯ıl

¯imil¯alai, ferait allusion à la demande de pièces d’or pour combattre la famine dans la légende de Campantar. Rappelons que cette requête du poète n’est qu’une parmi d’autres et qu’elle s’apparente beaucoup à celle des bardes de la littérature du Ca ˙nkam (voir 2.1.2). De plus, les passages mentionnant les pièces

supposons que sur cette image de Mailam le sculpteur n’a pas voulu représenter Skanda assis sur le giron ou au creux du bras de Śiva mais plutôt sur ses épaules et qu’il a dû probablement surmonter la difficulté de positionner Skanda sur les deux épaules gauches d’un Śiva à quatre bras.

ne sont pas clairs. Le premier vers, v¯aci t¯ırav¯e, k¯acu nalkuv¯ır, que nous pouvons traduire ainsi : « donnez des pièces pour détruire v¯aci », nous est incompréhen-sible. La définition du terme v¯aci est problématique. Celle proposée par le Tamil Lexicon (i.e. « discount, in changing money »), sur la base des commentaires qui l’expliquent uniquement en accord avec l’épisode narré dans le Periyapur¯an. am, est contestable. Signalons toutefois que ce terme apparaît dans les textes épigra-phiques suivi du participe négatif pat.¯a signifiant ainsi « sans manque, sans défaut » (voir par exemple SII 12 190 l.9 donnée par Subbarayalu (2003 : 547) et SII 5 1409 l.49) et qu’il est associé à l’argent. Contrairement à Rangaswamy, nous n’y percevons en tout cas aucune allusion biographique.

Campantar, employant la première personne dans la strophe inaugurale du poème II 37, dédié à Mar

¯aikk¯at.u, demande à Siva de lui rendre grâce (arul. ceyka en

¯akku) par le fait de fermer ses portes (un¯ katavam tirukk¯appuk kol.l.um karutt¯al¯e). Cependant, la structure et le thème changent dans les quatrains suivants où Śiva est interrogé sur ses différents exploits75, et ce, selon une phraséologie identique. Parce que la première strophe se distingue du reste de la décade par sa forme et son fond, contra Rangaswamy qui voit là un élément biographique ancien, nous suspectons une interpolation.

Plusieurs hymnes, dont cinq dédiés à ¯Alav¯ay76, feraient référence aux péripéties de Maturai décrites dans le Periyapur¯an. am (III 120.1 et 2, III 51, II 66.11, III 115.6, III 39.1, III 87.11, III 54.11 et III 113.12). Rangaswamy trouve partout des allusions biographiques.

Dans l’hymne III 120, en l’honneur d’ ¯Alav¯ay, Campantar chante un ministre in-carnant « la protection de la lignée » (kulaccir

¯ai ) et une grande reine p¯an. d. ya (p¯an. t.im¯at¯evi ) qu’il qualifie de ma ˙nkaiyarkku araci, « reine des femmes », et de

75. Le poète questionne le dieu sur le fait de porter la Ga ˙ng¯a dans ses cheveux (st. 2), de réunir le serpent et la lune dans son chignon (st. 3), de boire le poison (st. 4), de prendre la forme du chasseur (st. 5), de mendier dans un crâne (st. 6), de consumer K¯ama (st. 7), d’écraser puis de gracier R¯avan.a (st. 8), de ne pas être vu par Vis.n.u et Brahm¯a (st. 9) et sur les raisons pour lesquelles les jaïns et boudhistes le diffament (st. 10).

mat.am¯an

¯i, « joyau des femmes »

77. Si nous trouvons l’appelation de Kulaccir ¯ai dès le Tirutton. t.attokai de Cuntarar (VII 39.4), celle de Ma ˙nkaiyarkkaraci n’appa-raît ailleurs que dans le Periyapur¯an. am. Cette reine p¯an. d. ya n’est désignée dans le Tirutton. t.attokai et les textes attribués à NampiAn.t.¯ar Nampi que par le terme¯ m¯an

¯i, en composition ici avec mat.a. L’emploi du nom Ma ˙nkaiyarkkaraci dans ce poème du T¯ev¯aram ne pourrait-il pas refléter un certain anachronisme ? L’uti-lisation du terme kor

¯¯ravan¯, littéralement le « victorieux », pour désigner le roi (p¯an. d. ya) est en effet également surprenant dans cette strophe du T¯ev¯aram78. Parmi les huit occurrences de ce terme relevées dans le corpus, six (I 117.11, V 63.10, VI 69.8, VI 76.9, VII 19.1 et VII 61.11) renvoient très clairement à Śiva victo-rieux sur les trois citadelles, sur Daks.a, etc. Les deux restantes (III 87.11 et 120.2) se trouvent dans des strophes contenant des allusions dites autobiographiques de Campantar associées à l’épisode de Maturai à cause du Periyapur¯an. am. Dans III 87.11, les strophes inscrites sur ôles sont jetées dans les flammes devant kor

¯¯ravan¯. Compte tenu du refrain des quatrains précédents — « les noms du [Śiva] de Nal.l.¯ar

¯u . . ., même placés dans le feu, sont sans défaut et vrais » (nal.l.¯ar

¯artam n¯amam¯e . . . eriyin

¯il it.il, ivai pal

¯utu ilai ; meymmaiy¯e ! ) — ce kor¯¯ravan¯ peut aussi très bien être

77. III 120.1ab : ma ˙nkaiyarkku araci — val.avark¯on

¯ avai, vari val.aik kaim mat.am¯an ¯i, / pa ˙nkayaccelvi, p¯an. t.im¯at¯evi — pan. i ceytu n¯al.tor

¯um parava ; « alors que la reine des femmes — la fille du roi val.avar (c¯ol

¯a), belle dame aux mains pourvues de bracelets rayés, fortunée du lotus, grande reine p¯an. d. ya — répandait [sa gloire] quotidiennement en effectuant des services ». III 120.2ab : ver

¯¯rav¯e at.iy¯ar at.imicai v¯ıl

¯um viruppin¯an¯, vel.l.ain¯ır

¯u an. iyum — / kor¯¯ravan¯tan¯akku mantiri ¯aya — kulaccir

¯ai kul¯avi nin¯¯ru ¯ettum ; « [Śiva] que loue réjoui et debout celui qui, pour briser l’ignorance, aime tomber aux pieds des dévots, ministre du roi (p¯an. d. ya) qui porte la cendre blanche, gardien de la lignée ».

78. Dans l’état actuel de nos connaissances, le terme kor

¯¯ravan¯ semble devenir une désignation du roi p¯an. d. ya uniquement dans les textes contemporains ou postérieurs au Periyapur¯an. am. En effet, un survol des occurrences de ce nom dans les textes du pur

¯am, des meykk¯ırtti et du Cilappatik¯aram nous conduit à supposer que kor

¯¯ravan¯ désigne un roi mais pas spécifiquement un roi p¯an. d. ya. Ensuite, dans le T¯ev¯aram ce terme est appliqué, presque exclusivement, à Śiva victorieux dans ses exploits. Puis, dans les textes attribués à Nampi ¯An.t.¯ar Nampi il désigne Campantar en tant que souverain de la ville de C¯ık¯al

¯i. Et enfin, dans le Periyapur¯an. am il est synonyme de roi, renvoie aussi à Śiva et ne signifie le roi p¯an. d. ya que dans l’épisode de Maturai du Tiruñ¯an

Śiva. Dans III 120.2, celui qui est le « gardien de la lignée » occupe le poste de ministre du kor

¯¯ravan¯ qui est, sans ambiguïté, le roi p¯an. d. ya puisqu’il y est aussi question de la reine de la même dynastie. Ainsi, considérant notre développement sur le nom de Ma ˙nkaiyarkkaraci et notre analyse du terme kor

¯¯ravan¯, encore à l’état d’ébauche, nous posons l’hypothèse, sous toutes réserves, que la strophe III 120.2 contenant le terme kor

¯¯ravan¯ signifiant le roi p¯an. d. ya, en dissonance avec le reste du T¯ev¯aram, est un ajout tardif influencé par le Periyapur¯an. am.

La première strophe de l’hymne III 39, célébrant ce même lieu, présente une adresse présentée à la reine par le poète :

m¯an

¯in¯ er vil¯i m¯atar¯ay ! val¯utikku m¯a perunt¯evi ! k¯el. : “p¯al nal v¯ay oru p¯alan

¯¯ı˙nku ivan¯” en¯¯ru n¯ı parivu eytit.¯el ! ¯

an

¯aim¯amalai ¯ati ¯aya it.a ˙nkal.il pala allal c¯er ¯ın

¯arkat.ku el.iy¯en

¯ al¯en¯ — tiru ¯alav¯ay aran¯ nir¯kav¯e. (III 39.1)

O femme aux yeux de biches ! Très grande reine du Val

¯uti

79! Ecoute, Ne prends pas pitié en disant

“Il est un jeune à la belle bouche de lait”,

En présence du Hara d’ ¯Alav¯ay, je ne suis pas faible Pour les infâmes dotés de plusieurs maux (qui vivent) Dans les endroits à commencer par la grande montagne ¯An

¯ai ! (III 39.1) et la dernière précise que cette « décade fut dite . . . par ѯan

¯acampantan¯ . . . en face de celui du Sud à la couronne éclatante » (tul.a ˙nkum mut.it ten

¯¯nan¯ mun¯, ivai . . . ñ¯an

¯acampantan¯ . . . uraiceyta pattum). L’image de l’enfant donnée en st. 1 ne concorde pas avec celle du poète signant l’envoi, « ѯan

¯acampantan¯, roi de Pukali et seigneur tamoul » (III 39.11 : c¯ırp pukalikku man

¯ — tamil¯ atan¯, ñ¯an¯acampantan¯). Notons aussi que l’intégralité du poème est voué à une ardente critique des jaïns80.

79. Terme désignant le royaume p¯an. d. ya.

80. À chaque strophe, les jaïns sont attaqués : sur leur sanskrit et prakrit, leur manière de manger debout (st. 2), leur enseignement, leur nudité (st. 3), leurs noms, leur habitude d’errer comme des singes femelles, et leur ignorance du tamoul pur (st. 4). Ce sont des voleurs, sans pitié, qui ont introduit le mètre du perroquet et de la souris (st. 5). Leurs noms (st. 6), leur pouvoir mystérieux (st. 7), leurs attributs comme la cruche, la plume de paon, la natte, et leur fausse pénitence (st. 8) sont vivement critiqués. Ils s’arrachent les cheveux, se recouvrent d’une

Dans un autre poème, à la gloire de ce site, III 51, Campantar implore, à chaque strophe, la grâce de Śiva (arul.cey en.ai, « fais moi grâce ») et envoie « un feu allumé par les jaïns » (aman. ar kol.uvum cut.ar ou aman. kaiyar it.um cut.ar, st. 7) sur « celui du Sud » (ten

¯¯nan¯), le roi p¯an. d. ya. Ces refrains rappellent l’épisode du Periyapur¯an. am (st. 2601) où les jaïns, avec l’accord du roi, mettent le feu au monastère de Campantar. Ce dernier en chantant parvient à transférer le feu dans le corps du roi p¯an. d. ya.

L’envoi de l’hymne des cendres, tirun¯ır

¯¯ruppatikam, II 66, dédié au même site, fait allusion à la guérison du roi p¯an. d. ya dévoré par un feu interne. Campantar prétend que les « dix strophes sont offertes pour détruire la fièvre ressentie par le corps de celui du Sud » (ten

¯¯nan¯ ut.al ur

¯¯ra t¯ıppin. i ¯ayin¯a t¯ırac c¯ar¯¯riya p¯at.alkal.pattum). Dans le Periyapur¯an. am (st. 2662) Campantar chante cet hymne pour guérir la fièvre du roi p¯an. d. ya. Mis à part l’envoi qui nous renvoie à ce miracle, le reste du poème est une célébration des bienfaits des cendres.

Dans un autre poème construit selon le jeu littéraire iyamakam, toujours en l’hon-neur d’ ¯Alav¯ay, nous lisons que Śiva est « l’ornement des serviteurs qui a donné délicatement l’ornement à l’illustre reine de celui du Sud » (III 115, 6c : mikka ten

¯¯navan¯evikku an. iyaiy¯e mella nalkiya ton. t.arkku an. iyaiy¯e). Ce serait une allu-sion au fait que Śiva a rendu le bijou marital à la reine p¯an. d. ya, i.e. qu’il n’a pas tué son époux.

Ajoutons que parmi les dix hymnes célébrant le site d’ ¯Alav¯ay dans les trois premiers Tirumur

¯ai cinq font référence à la biographie de Campantar (voir supra) et cinq sont composés selon des procédés stylistiques (I 7 et 94 ; III 52, 108 et 115). Par ailleurs, quatre d’entre eux se distinguent du lot par leur singularité. En effet, un poème est entièrement voué à la glorification des cendres (II 66) et trois autres sont exclusivement consacrés à la vitupération contre les jaïns (III 39, 47 et 108). Autant de particularités dans une poignée d’hymnes dédiés à un seul site nous recommandent de les lire avec la plus grande prudence.

L’épreuve du feu, consistant à faire sortir du feu les ôles indemnes, serait mention-née dans un hymne célébrant Nal.l.¯ar

¯u, III 87. Le refrain, en fin de strophe, répète

que « les noms du [Śiva] de Nal.l.¯ar

¯u . . ., même placés dans le feu, sont sans défaut et vrais » (nal.l.¯ar

¯artam n¯amam¯e . . . eriyin¯il it.il, ivai pal

¯utu ilai ; meymmaiy¯e ! ). Ces répétitions soulignent, simplement, le caractère permanent et impérissable de Śiva et de ses attributs. Seul l’envoi vient préciser que ces strophes ont été « jetées dans les flammes devant kor

¯¯ravan¯ »

81 (kor

¯¯ravan¯ etir it.ai eriyin

¯il it.a) et replace, ce faisant, l’hymne dans une narration hagiographique. Par ailleurs l’hymne qui aurait été jeté dans le feu devant les jaïns et le roi p¯an. d. ya commence par p¯okam ¯

artta pon

¯ mulaiy¯al. d’après le Periyapur¯an.am (st. 2680). Il s’agit du poème I 49 dans le corpus actuel du T¯ev¯aram qui a acquis par la suite le surnom de paccai patikam (voir chapitre 6).

Quant à l’épreuve de l’eau, deux strophes appartenant à des poèmes particuliers relatent ce miracle qui consiste à faire remonter les ôles à contre-courant. III 54 n’est pas associé à un site spécifique, il est dit général, potu. Titré tirupp¯acuram, « chant sacré », il comporte douze quatrains dont le onzième décrit le prodige à Maturai :

ar

¯¯ru an¯¯ri am tan. maturait tokai ¯akkin¯¯an¯um, ter

¯¯ru en¯¯ra teyvam tel.iy¯ar karaikku ¯olai ten.n¯ırp par

¯¯ru in¯¯rip p¯a ˙nku etirvin¯ ¯uravum, pan. pu n¯okkil, per

¯¯ron¯¯ru uyartta perum¯an¯ perum¯an¯um an¯¯r¯e ! (III 54.11)

Mais encore, il créa l’assemblée de la belle et fraîche Maturai, Ceux qui ne clarifient pas qu’il est le dieu dense,

Considérant le fait que les ôles sans attache flottaient À contre-courant dans l’eau limpide jusqu’à la rive, N’est-il pas un grand dieu

Le seigneur monté sur un taureau ? (III 54.11)

Le tirukkat.aikk¯appu de l’hymne III 113, en l’honneur des douze noms de C¯ık¯al ¯i et construit selon l’iyamakam, narre aussi ce miracle :

paru matil maturai man

¯ avai etir¯e patikam atu el¯utu ilai avai etir¯e varu nati it.ai micai varu karan

¯¯e ! vacaiyot.um alar ket.a aruku aran

¯¯e ! (III 113.12ab)

En face d’eux et du roi de Maturai aux grandes fortifications, Ô celui à l’acte de faire venir à contre[-courant]

Les feuilles écrites de décades, dans le fleuve qui coule !

Ô celui qui détruit les jains pour anéantir blâme et bassesse ! (III 113.12ab)

La nature de ces deux hymnes, la position des strophes qui nous occupent (l’avant-dernière strophe consacrée habituellement à la vitupération des hérétiques pour III 54 et l’envoi pour III 113), ainsi que la référence à Maturai, nommée en général

¯

Alav¯ay dans les hymnes attribués à Campantar, nous conduisent à douter de leur authenticité.

Dans l’envoi de III 32, à la gloire du site d’ ¯Et.akam, le poète stipule que les ôles, naviguant dans le fleuve Vaikai, se sont arrêtés en ce site : vaikain¯ır ¯et.u cen

¯¯ru an. aitarum ¯et.akattu oruvan

¯ai, « l’unique d’¯Et.akam que viennent embrasser les ôles des flots de Vaikai ». Or, le terme ¯et.u peut aussi signifier pétale ou fleur, comme dans I 1.1, et renvoyer à un des éléments que le fleuve charrie naturellement.

L’hymne III 6, construit selon le procédé métrique ¯ırat.im¯elvaippu, célèbre le site de Kol.l.amp¯ut¯ur. La sixième strophe ferait allusion à la barque qui a conduit Campantar sur la rive opposée : ¯ot.am vantu an.aiyum kol.l.amp¯ut¯ur ; « Kol.l.amp¯ut¯ur