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8.3 L’espace public jonché d’obstacles

8.4.1 Le travail comme enjeu des rapports sociaux

Le travail est un enjeu des rapports sociaux de sexe reconnu et documenté. C’est entre autres dans le travail que les groupes sociaux de sexe, homme et femme sont séparés, hiérarchisés. Les auteures reconnaissent ainsi les effets des rapports sociaux de sexe dans l’organisation du travail, au-delà de la séparation

et de la hiérarchisation, elles démontrent aussi des formes d’oppression voire d’exploitation (Delphy, 2003, 2004, 2013; Dorlin, 2005b; Kergoat, 2000; Scrinzi, 2008).

Durant les observations, l’activité professionnelle a rapidement été identifiée comme une sphère importante de la vie quotidienne des personnes en situation de handicap. D’une part, le travail occupe les participantꞏeꞏs, mais il est aussi l’une des composantes de leur identité, elles et ils s’identifient à leur travail et sont aussi identifiéꞏeꞏs par ce dernier. Le travail permet à la personne en situation de handicap d’assoir sa position dans la hiérarchie sociale, elle fait partie du monde du travail, un monde qui peut certes être considéré comme parallèle au marché de l’emploi « normal ». Le travail lui permet d’être considéréꞏe par l’autre,

"handicapéꞏe" ou "valide", comme autoriséꞏe à occuper un emploi (Brizais, 2013, p. 120). Pour les personnes ayant une déficience intellectuelle, l’activité professionnelle leur permet d’accéder à un statut social de travailleur ou de travailleuse les rapprochant ainsi d’un statut social connu et reconnu du monde des "valides". Toutefois, ce milieu professionnel particulier, qui est dit adapté ou intégrant diffère du milieu professionnel dit « normal », et des travailleurs et travailleuses valides, le groupe dominant. Il peut être perçu comme un monde professionnel parallèle, régi tantôt par des normes proches du marché de travail normal (horaires, hiérarchies, etc.) tantôt très éloigné (rémunération, valorisation du travail, possibilité d’emploi, etc.).

Dans cette section, l’analyse est centrée sur les effets des rapports sociaux de sexe et de capacité autour du travail. Je ne peux pas affirmer que les inégalités sociales dans le domaine du travail pour les personnes en situation de handicap sont dues uniquement aux discriminations découlant de ces deux types de rapports sociaux. D’une part, les rapports sociaux de classe et d’origine sont aussi présents, d'autre part d’autres critères sont aussi source d’inégalités, par exemple la situation géographique. Effectivement, des différences cantonales ont été observées entre les trois régions observées, Valais, Vaud et Genève qui n’ont pas toutes les mêmes politiques d’insertion professionnelle.

La division sexuelle du travail

Les recherches portant sur les rapports sociaux de sexe ont démontré à de nombreuses occasions que dans le travail, entre autres, deux groupes sociaux sont engagés dans un rapport social (Kergoat, 2000, p. 36). Scrinzi (2008, p. 4) affirme que la division sexuelle du travail est « le pivot autour duquel s’organise l’articulation des différents rapports sociaux. ». Bien que ce rapport varie dans le temps et l’espace, lorsqu’il s’agit du travail, les groupes sociaux sont séparés et hiérarchisés. Le travail de l’un des groupes, celui des hommes, vaut plus que celui des femmes. Une prise de conscience a eu lieu, notamment sous l’impulsion des mouvements féministes dans les années 1970 (Kergoat, 2000, p. 36) : « il devient alors collectivement « évident » qu’une énorme masse de travail est effectuée gratuitement par les femmes, que ce travail est invisible, qu’il est réalisé non pas pour soi, mais pour d’autres et toujours au nom de la nature, de l’amour ou du devoir maternel. » (Kergoat, 2000, p. 36). Le travail est ainsi divisé entre les groupes sociaux, les hommes sont assignés à la sphère productive alors que les femmes à la sphère reproductive (Dorlin, 2005b, p. 119; Kergoat, 2000, p. 36;

Scrinzi, 2008). De plus, les fonctions des hommes sont « à forte valeur ajoutée »

(Kergoat, 2000, p. 36). Par contraste, les femmes ont été, historiquement, considérées comme naturellement moins intelligentes que les hommes et étaient destinées aux rôles d’épouse et de mère (Scrinzi, 2008).

Certains métiers sont qualifiés de masculins et d’autres de féminins (Gianettoni, Simon-Vermot, & Gauthier, 2010), entraînant une hiérarchie, les métiers masculins valent plus, ils sont souvent mieux payés et jouissent d’un statut professionnel plus élevé (Kriesi, 2016). De plus, les hommes occupent généralement les postes de représentations (Bourdieu, 1998). Cette ségrégation est une construction sociale et varie dans le temps et l’espace. En Suisse, la ségrégation professionnelle entre hommes et femmes est très marquée (Kriesi, 2016).

Les observations dans le quotidien professionnel des personnes ayant une trisomie 21 ont permis de voir une palette des secteurs professionnels adaptés et proposés pour des personnes ayant une déficience intellectuelle. De manière générale, les branches proposées étaient toutes considérées comme un travail plutôt manuel. Ce constat rappelle ce que Dunezat et Galerand (2014a, p. 39) nomment « la séparation hiérarchique entre travail intellectuel, qualifié, c’est-à-dire exigeant des compétences politiques reconnues comme telles, notamment un savoir-faire scolaire, et travail manuel, déqualifié, c’est-à-dire exigeant des compétences acquises, mais déniées comme telles, naturalisées et dépolitisées. ». Ces auteurꞏeꞏs insistent sur le fait que ce ne sont pas uniquement les tâches qui sont catégorisées, classées, mais aussi les travailleuses qui les accomplissent.

De plus, les secteurs adaptés, que ce soit dans un atelier ou dans une entreprise, sont des métiers considérés aujourd’hui, en Suisse comme plutôt féminins : blanchisserie, intendance, restauration, service, professions artistiques.

Effectivement, sur le marché du travail ordinaire, les femmes sont majoritaires dans l’exercice de ces fonctions comme le démontrent les statistiques de l’OFS20 datant de 2016 (Duc-Quang, 2018).

Tableau 4 Part des femmes dans les métiers (OFS)

Métiers Part de femmes

Employéꞏe de commerce de détail 66%

Intendance (concierge, nettoyeuse de locaux et de bâtiments)

72%

Personnels de service 75 %

Professions artistiques (décoratrices) 67.7 %

La séparation des métiers par sexe est aussi présente dans le milieu du handicap, d’une part, car ce sont justement les métiers féminins qui sont les plus représentés dans les propositions d’activités professionnelles pour les personnes ayant une déficience intellectuelle et d’autre part, car ces métiers sont aussi genrés à l’interne de ce milieu professionnel particulier. Les femmes sont plus

20 https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/travail-remuneration/activite-professionnelle-temps-travail/actifs-occupes/profession-situation-profession.assetdetail.4362786.html (consulté le 24.09.2020)

représentées dans les métiers particulièrement féminins, comme la blanchisserie.

Il semble toutefois peu stigmatisant pour un homme ayant une déficience intellectuelle de travailler dans un secteur féminin, effectivement les possibilités d’exercer une activité professionnelle plutôt masculine sont peu courantes, de ce fait, dans les institutions, les hommes pratiquent couramment des métiers considérés comme féminins. Dans le cas du travail, non seulement le handicap ne permet pas d’effacer la division sexuelle du travail, une autre dimension est ajoutée, celle du handicap. Certains métiers semblent en effet plus facilement adaptables et adaptés aux personnes ayant une déficience intellectuelle, réduisant ainsi les possibilités professionnelles qui leur sont offertes. Tout comme les femmes valides, les personnes ayant une déficience intellectuelle n’ont pas accès à certaines tâches et fonctions (Kergoat, 2014, p. 113).

Des secteurs féminins plus enclins à être adaptés

Les observations démontrent que les secteurs féminins sont plus facilement adaptés pour les personnes ayant une déficience intellectuelle, et ce dans des ateliers, mais aussi dans des entreprises. Ce constat amène à se questionner sur les représentations de ces métiers féminins de manière générale d’une part, mais aussi sur les conséquences de cette adaptation notamment sur le marché du travail des "valides".

Ces métiers, impliquant des tâches manuelles à connotation domestiques peuvent être disqualifiés (Dunezat & Galerand, 2014a) perçus comme moins difficiles, requérant moins de compétences que d’autres métiers. Ils sont aussi considérés comme adaptés et/ou adaptables à toutes et tous. Le travail domestique, rappelons-le, est une thématique importante des rapports sociaux de sexe, il est notamment un exemple fort du rapport de pouvoir entre les deux groupes sociaux. Effectivement, que le travail domestique soit externalisé ou non, ce sont les femmes qui y sont assignées, alors que les hommes, pour leur part, en sont dispensés (Kergoat, 2014, p. 114). Ce travail n’est que peu reconnu et n’est souvent pas, voire peu dans le cas d’une externalisation, rémunéré. Les personnes en situation de handicap, celles avec une déficience intellectuelle dans notre cas, sont affectées à ces types de métiers, souvent dévalorisés, considérés comme ayant besoin de peu de compétences. D’autres champs professionnels leur sont peu, voire pas, accessibles, car ils ne sont soi-disant « pas adaptables ».

La situation de Lucien illustre ce constat. Il souhaitait travailler dans un bureau, car il était à l’aise et appréciait travailler avec un ordinateur. N’ayant pas trouvé d’emploi dans ce domaine, il était engagé dans un atelier de conditionnement, assis toute la journée, à répéter des gestes à la chaîne.

Ces secteurs, comme celui de l’intendance en particulier, peuvent être considérés comme des branches professionnelles précaires, notamment par rapport aux salaires. Les employées sont des femmes en général et des femmes étrangères en particulier, elles sont la principale main-d’œuvre de ce secteur précaire. En adaptant ces emplois pour des personnes en situation de handicap, est-ce qu’il n’est pas question de précariser encore plus ce secteur d’activité ?

Le travail, et sa division sexuelle notamment, sont des enjeux forts des rapports sociaux de sexe, tout comme de ceux de capacité. La séparation et la hiérarchisation entre les groupes sociaux "valides" et "handicapéꞏeꞏs" existent

aussi. Les observations ont démontré qu’il y a deux mondes professionnels distincts entre les groupes sociaux de capacité. Les modes d’emploi observés : ateliers adaptés, ateliers intégrés, entreprise intégrante et intégration dans une structure démontrent un continuum allant du moins proche du monde professionnel normal (les ateliers adaptés) au plus proche (intégration dans une structure). Dans tous les cas, il y a une séparation et une hiérarchisation entre les mondes professionnels des "valides" et des "handicapéꞏeꞏs". L’intégration dans une structure, ce qui était le mode d’emploi de Marc, illustre bien cette séparation.

Il travaillait effectivement dans une structure d’accueil de l’enfance qui faisait partie du milieu de travail des "valides", pourtant il y avait séparation, il occupait un poste qui avait été créé pour son intégration, il était sous la supervision d’une personne valide, il n’avait pas les mêmes horaires, etc.

Cette séparation dans le marché de l’emploi est forte et a des répercussions sur les désirs professionnels des personnes observées. Tout comme Lucien, qui se voyait cantonné à un emploi à la chaîne, Lina travaillait en blanchisserie, car le secteur d’activité auquel elle aspirait n’était pas proposé dans la palette des formations et des emplois possibles.

La compétence et la productivité, modèle de travail des "valides"

Si le terme de productivité n’a que très rarement été prononcé durant les observations, il est toutefois central à l’analyse du milieu professionnel des personnes ayant une déficience intellectuelle. Effectivement, la productivité est bien l’une des caractéristiques qui, en théorie, distinguent les personnes en situation de handicap des personnes valides. Gardou (2011, p. 21) soulève cette différence « Notre culture continue par ailleurs à désigner ces personnes comme

« déficientes », mais surtout comme celles qui ne peuvent se plier aux exigences de réussite individuelle et de productivité ». Et c’est notamment avec l’industrialisation que ces personnes ayant une déficience intellectuelle se sont vues exclues de la production économique (Boucher, 2003). La personne en situation de handicap est effectivement différente de la personne valide de par ses capacités cognitives (Masson, 2013), elle n’entre pas dans les normes de productivité économique, ce qui dans un continuum des variations humaines la place plutôt dans la case « anormal » en ce qui concerne le « corps et des fonctionnalités corporelles, entre les capacités et les incapacités. » (Masson, 2013, p. 114). Masson (2013, p. 114) en citant (Garland-Thomson, 2002), explique que c’est à travers ce marquage des corps « différents » et dans ce cas

« non-productifs » que se constitue la différence, les groupes sociaux sont ainsi différenciés et hiérarchisés, elle évoque alors l’ability/disability system. Que la personne soit caractérisée comme productive ou non semble participer aux processus oppressifs des rapports sociaux, elle est ainsi stigmatisée, discriminée, voire dominée par le groupe social des personnes valides.

Bien que n’étant pas reconnues pour leur productivité et leurs compétences professionnelles, les personnes ayant une déficience intellectuelle sont engagées dans des emplois et participent, à leur manière, au monde du travail. Toutefois, les différences existent et ce milieu professionnel n’est pas tout à fait régi par les mêmes normes. La productivité étant moindre, le rendement est lui aussi affecté, pour des blanchisseries adaptées, il n’est pas possible de produire la même quantité de travail qu’une blanchisserie classique. Les personnes en situation de

handicap, dû à des capacités cognitives différentes, voire dans certains cas des handicaps physiques associés, prennent plus de temps. Les structures sont différentes, dans la plupart du temps, elles sont associées à des associations ou institutions sociales. L’accompagnement est professionnel et adapté pour des personnes en situation de handicap. Finalement, le système financier diffère, et ce notamment entre autres à cause du rattachement à une institution ou association sociale. Dans les ateliers adaptés en particulier, il n’y a que très peu d’exigence de productivité, il n’est pas problématique que par exemple durant une journée la production soit arrêtée, ce qui donne plus de liberté aux professionnelꞏleꞏs pour l’accompagnement des personnes en situation de handicap. Toujours à propos du système financier, certaines personnes ayant une déficience intellectuelle ne sont pas du tout, d’autres très peu rémunérées, elles vivent financièrement grâce à des rentes de l’AI. Je reviens sur ce thème dans le point sur les enjeux financiers.

Les personnes ayant une déficience intellectuelle peuvent avoir des difficultés à se projeter dans un avenir professionnel, d’établir un projet réaliste (Blouet, 2013) ce qui peut compliquer le moment de faire un choix professionnel. Ce choix est d’ailleurs dépendant de plusieurs facteurs énoncés plus haut : la volonté d’exercer une profession spécifique, les opportunités professionnelles selon les régions, l’implication des parents, le genre et les compétences. Ce dernier critère, les compétences, démontre bien l’importance du modèle de travail des "valides". La personne en situation de handicap doit être compétente pour exercer certaines fonctions. Et plus la personne participe à un type d’activité professionnelle se rapprochant de la norme des "valides" (p.ex. intégration dans une structure), plus il lui est demandé d’être compétente.

Les observations ont permis d’entendre que certains types d’activité professionnelle valent plus (l’intégration en structure) et d’autres valent moins (ateliers adaptés). Cette valorisation est surtout faite par l’entourage personnel ou professionnel des personnes en situation de handicap, très peu entre elles. Le cas de Lucie est pertinent dans cette analyse, car elle était une personne considérée comme très compétente : elle savait lire, écrire, calculer, elle était de loin la plus productive de son atelier adapté. La maîtresse socioprofessionnelle qui l’accompagnait la qualifiait de très compétente. Elle expliquait d’ailleurs qu’elle avait fait un stage à son arrivée, et que quand elle était revenue 3 ans plus tard, elle n’avait pas eu besoin de lui réexpliquer les tâches. Pourtant, elle travaillait dans un atelier adapté, le type d’activité professionnelle, qui dans ces observations, s’éloignait le plus de la norme valide. Quand ce choix était évoqué, il était toujours justifié. Effectivement, les parents affirmaient préférer que leur fille se concentre sur son autonomie dans sa vie privée (elle vivait seule en appartement) et qu’elle puisse être à l’aise dans une activité professionnelle qu’elle maîtrise. Cette justification prouve bien que ce choix ne correspond pas à la norme, qu’il ne semble pas normal de choisir un type d’activité professionnelle loin du milieu professionnel des "valides" alors que Lucie en avait les capacités.

Les projets professionnels permettant de travailler les compétences des personnes en situation de handicap ont été mis en lumière lors des observations.

Acquérir et améliorer des compétences semblent un enjeu fort du secteur professionnel (Bouchand, 2013). Pour les personnes elles-mêmes, apprendre, acquérir de nouvelles connaissances et compétences est perçu comme important

(Petitpierre et al., 2014). Chaque travailleur ou travailleuse en situation de handicap a un projet professionnel qui lui permet d’acquérir des compétences à travers des objectifs. En théorie, ces projets prennent une place centrale dans l’intervention sociale et permettent à la personne en situation de handicap de travailler ses aptitudes : « Souvent, la démarche d’intervention débute par l’identification d’un « déficit » individuel et la mise en œuvre d’un programme d’accompagnement. » (Guillaume, 2009, p. 27). Toujours en théorie, à la suite de l’identification du déficit, les professionnelꞏleꞏs en collaboration avec les personnes en situation de handicap définissent des objectifs et des ressources pour les atteindre. Le projet professionnel permet, entre autres, de créer un environnement « capacitant » au sens de (Vidal-Gomel, Rachedi, Bonnemain, &

Gébaï, 2012, p. 125) : « non délétère pour la santé, mais aussi facteur de liberté et de progrès ». En pratique, dans les observations, les projets existaient, étaient définis souvent plutôt par les professionnelꞏleꞏs que par les personnes en situation de handicap et ils n’occupaient pas cette place dite centrale. Les contraintes structurelles faisaient que les professionnelꞏleꞏs géraient la partie administrative (écriture du projet, rapport, etc.) et prenaient le temps, quand elles et ils en avaient, pour travailler sur les objectifs. La maîtresse socioprofessionnelle de Telma le constatait :

La maîtresse socioprofessionnelle dit qu’il y a beaucoup d’administratifs, beaucoup de projets à gérer pour une seule professionnelle. (Extrait du journal de terrain avec Telma)

Au moment de l’évaluation du projet, il ne s’agissait que de constat, il n’avait pas de répercussions sur la travailleuse ou le travailleur, il n’y avait pas de perte de salaire ou de licenciement par exemple. Au-delà de la mise en œuvre, le concept même de projet indique l’importance du handicap dans ce milieu. La personne ayant une déficience intellectuelle doit démontrer qu’elle devient plus compétente, plus performante. Le prochain point de cette discussion revient notamment sur la relation entretenue avec les professionnelꞏleꞏs.

La relation aux professionnelꞏleꞏs

Dans toutes les structures observées, des professionnelꞏleꞏs forméꞏeꞏs au niveau social accompagnaient les personnes ayant une déficience intellectuelle. Elles ou ils étaient généralement des maîtreꞏsseꞏs socioprofessionnelꞏleꞏs ou des éducateurs ou éducatrices sociales. Les rapports sociaux se réalisant dans les interactions, dans les relations, les observations dans le quotidien professionnel se sont aussi centrées sur cette relation entre travailleur ou travailleuse en situation de handicap et la ou le professionnelꞏleꞏs en charge de l’atelier et donc de son accompagnement. Ces professionnelꞏleꞏs géraient des groupes de plus ou moins grandes tailles. Dans certaines modalités, comme une intégration dans une structure ou l’entreprise intégrante, la ou le professionnelꞏle accompagnait une ou deux personnes avec déficience intellectuelle, toutefois, elle ou il devait lui aussi produire. Dans le cas de Manuel, sa maîtresse socioprofessionnelle était au service de certaines tables du restaurant en plus d’accompagner Manuel et sa collègue. Dans d’autres modalités, les professionnelꞏleꞏs avaient de plus grands groupes et participaient parfois à l’activité professionnelle, mais plutôt dans un objectif d’accompagnement que de production. La maîtresse socioprofessionnelle

de Sofia participait parfois au pliage du linge, ce qui lui permettait d’avoir du temps pour discuter avec Sofia ou d’autres travailleurs ou travailleuses. Dans tous les cas, les professionnelꞏleꞏs ont profité de ma présence de chercheuse pour se confier sur la complexité de leur activité. En charge de plusieurs personnes avec déficience intellectuelle, ayant des capacités, des difficultés, des besoins très divers, elles et ils devaient aussi jongler avec une quantité de travail administratif

de Sofia participait parfois au pliage du linge, ce qui lui permettait d’avoir du temps pour discuter avec Sofia ou d’autres travailleurs ou travailleuses. Dans tous les cas, les professionnelꞏleꞏs ont profité de ma présence de chercheuse pour se confier sur la complexité de leur activité. En charge de plusieurs personnes avec déficience intellectuelle, ayant des capacités, des difficultés, des besoins très divers, elles et ils devaient aussi jongler avec une quantité de travail administratif