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Circuler à Hanoi : une mobilité conditionnée

4.3 Le réseau viaire métropolitain et l’empreinte de la coopération internationale

4.3.2 Les modèles partenariaux des bailleurs et l’adaptation locale du partenariat public-privé public-privé

4.3.2.1 Le Partenariat Public-Privé comme modèle…

Dans le premier document stratégique d’assistance (Country Assistance Strategy) établi par la Banque mondiale avec le Vietnam en 1998, la Banque énonce comme principe la nécessité d’appeler le secteur privé à prendre part à la production des infrastructures (Private Provision of Infrastructure)203. Pour la Banque mondiale, puisque le Comité Populaire de Hanoi et l’Etat central éprouvent des difficultés à financer les infrastructures de transport, cette dernière les encourage à recourir à des partenariats public-privé, tant pour la construction d’équipements que pour l’exploitation du service de transport public. Le modèle prôné implique en général une délégation de la maîtrise d’ouvrage vers un partenaire privé afin qu’il finance tout ou partie de la construction et puisse se rembourser grâce à l’exploitation de l’infrastructure (ou du service dans le cas de l’exploitation de transport en commun). En outre, la délégation au secteur privé de la construction d’une infrastructure ou de l’exploitation d’un équipement ou d’un service, constitue un moyen de transférer les risques d’investissements du public vers le privé, d’associer le savoir-faire de spécialistes et ainsi d’optimiser la performance des services urbains. Mais au préalable, en vue d’installer de tels partenariats, la Banque mondiale incite l’Etat vietnamien à produire un cadre juridique facilitant le montage de partenariat public-privé, sous la forme de Built Operate Transfert (BOT) ou de Built Transfer (BT), comme les règles à même d’assurer la transparence du montage et du portage des opération et la libre concurrence, avec l’ouverture des marchés à des investisseurs privés locaux et étrangers.

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D’une manière très large, le partenariat public-privé « couvre toutes les formes d’association du secteur public et du secteur privé destinées à mettre en œuvre tout ou partie d’un service public » (Marty et al. 2006). Pour les villes « ce sont des contrats administratifs de long terme ayant pour objectif de confier au secteur privé la réalisation d’un bien d’intérêt général ou la mise en œuvre d’une mission de service public, avec pour avantage de pouvoir utiliser le droit privé, le savoir-faire, les capitaux privés, etc » (Predali, 2007). Mais la formule du partenariat public-privé soutenue par certaines organisations internationales, comme la Banque mondiale, est empreinte de la pensée économique néo-libérale et se caractérise par la mise en œuvre de réformes des services publics passant par la dérèglementation (Annez, 2006).

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En fait, depuis la fin des années 2000, ces incitations se répètent, elles proviennent de l’ensemble des bailleurs impliqués dans le financement des infrastructures au Vietnam et apparaissent sous différentes formes. Les séminaires sur le sujet se multiplient204 afin d’exposer aux autorités vietnamiennes les mérites des contrats de partenariat qui ont vocation à faciliter les apports de fonds au service d’un projet au même titre qu’un emprunt. Les bailleurs communiquent davantage sur les solutions et les expériences permettant de diversifier les sources de financement des infrastructures de transport urbain (route et transport en commun) et produisent une littérature abondante à ce propos205. Egalement, dans les discussions qui ont lieu lors des rencontres annuelles entre le Vietnam et ses donateurs, les partenariats entre le secteur public et le secteur privé sont régulièrement évoqués et les stratégies suggérées s’affinent. Les bailleurs encouragent désormais le gouvernement à combiner l’utilisation des crédits d’aide au développement à des investissements privés pour la réalisation de méga-infrastructures206. Leurs propositions trouvent un prolongement dans les actions subventionnées par le fonds du Public-Private Infrastructure Advisory Facility (PPFIA)207. Ce dernier finance des études relatives à la création des standards à établir pour favoriser l’émergence de nouvelles formes de partenariats dans le cadre de projets autoroutiers et de transport urbain208.

La pression des opérateurs du développement sur le gouvernement vietnamien pour établir une législation encadrant les partenariats public-privé, adaptée aux exigences d’une économie de marché, s’est traduite par certaines avancées. En fin d’année 2010, le Premier Ministre a promulgué une décision sur ce sujet (décision n°71/2010/QD-TTg), affichant ainsi la volonté du gouvernement à

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Parmi les récents séminaires organisés citons : Strengthening Public-Private Partnership (PPP) for

Infrastructure Investment in Viet Nam, organisé par la BAD en novembre 2008; Public Private Patrnership – a British perspective on opportorunities for Vietnam, organisé par l’ambassade du Royaume Uni en octobre 2010 ; Collectivités locales et Partenariats Public Privé, organisé par l’AFD en novembre 2010 ; Workshop on Public-Private Partnerships in Roads and Highways in Vietnam, organisé par la Banque mondiale en février 2011; PPP Infrastructure Development in Vietnam and on Support for Financing Mechanisms, atelier co-organisé par la

JICA et l’USAID en juillet 2011, etc. 205

Citons par exemple le « Financing Sustainable Urban Transport » du programme Sustainable Urban Transport Project de la coopération technique allemande GTZ (2010), le « Changing Course - A New Paradigm for Sustainable Urban Transport » de la Banque Asiatique de Développement (2009). L’Agence Française de Développement (2009) à quant à elle produit un guide, « Qui paye quoi en matière de transport urbain », dans lequel sont clairement synthétisés les enjeux liés au financement du transport urbain. Ce guide présente plusieurs options de financement des équipements : par le public (avec le financement public des investissements et du fonctionnement des systèmes de transport), par les usagers (des transports collectifs comme individuels), par le péage de voirie et du stationnement, par la contribution des employeurs et des activités commerciales, par la valorisation foncière des sites desservis par les transports, par le partenariat public-privé, etc.

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Source : Aid Effectiveness Forum (2011). 207

Créé en 1999, ce fonds « multi-bailleurs » a pour principe d’agir comme un catalyseur pour augmenter la participation du secteur privé sur les marchés émergents. Il fournit une assistance technique aux gouvernements pour créer un environnement propice à la fourniture de services d’infrastructures par le secteur privé. Avec le PPFIA il est question d’appui à la construction d’un environnement d’affaires stable fondé sur des institutions fortes, d’un système juridique dans lequel la règle de droit prime afin de favoriser la transparence, la concurrence et la protection des investissements. Le PPFIA constitue une aide pour assurer le renforcement des capacités des autorités à concevoir des projets de délégation à des prestataires privés (voir http://www.ppiaf.org/) 208

Dans le transport urbain, le PPIAF a financé une étude sur l’association du secteur privé dans l’exploitation des lignes de bus à Hanoi en 2004 ; en 2009, le fonds a été sollicité pour financer une étude à Hô Chi Minh-Ville sur les modalités d’association d’opérateurs privés dans l’exploitation du réseau du futur réseau de métro ; depuis 2011, le PPIAF est impliqué dans l’établissement d’un partenariat public-privé pour la construction et l’exploitation de deux tronçons d’autoroutes (Ninh Bình/Thanh Hoá et Nghi Sơn/Bãi Vọt).

normaliser les procédures d’investissement afin de rassurer les investisseurs privés, en particulier les investisseurs étrangers. Selon, le vice-ministre du Plan et de l’Investissement, « le cadre juridique pour ce modèle [de partenariat public-privé] au Vietnam est édifié en se basant sur les pratiques internationales, répondant à des critères de transparence, d’efficacité économique et de concurrence loyale entre les investisseurs privés locaux et étrangers » (Courrier du Vietnam, 06/05/2011).

L’application de cette nouvelle législation pourrait avoir des conséquences notables quant à l’origine des acteurs (investisseurs, concepteurs, entreprises de construction, etc.) qui se trouveront à l’avenir impliqués dans la production des infrastructures de transport. En effet, avec les premières vagues de réformes du début des années 1990, l’Etat vietnamien avait déjà légiféré sur le sujet des partenariats public-privé en introduisant des contrats de concession de nature Build Operate Transfer (BOT) et

Build Transfer (BT) (Pham Phi Long, 2007). Mais, pour le secteur des transports, dans presque tous

les projets BOT et BT achevés ou en cours à la fin des années 2000, les concessionnaires, à de rares exceptions près, étaient des sociétés d’Etat de travaux publics, des entreprises actionnarisées ou des sociétés privées vietnamiennes (ibid., 2007). Les investisseurs étrangers paraissaient peu motivés à s’engager dans de tels partenariats. En fait, ils estimaient manquer de garanties au regard des nombreux obstacles propres au contexte vietnamien (manque d’outils institutionnels et financiers, spéculation foncière, corruption, etc.) (Margonstern, 2009). Par conséquent, les opérateurs du développement pressaient le gouvernement à prendre des mesures améliorant la transparence et la mise en concurrence dans le cadre de ces contrats de délégation. Désormais, des investisseurs étrangers pourront se positionner sur ces nouveaux marchés ; en 2011, le Ministère du Plan et de l’Investissement avait émis une liste de 24 projets d’importance nationale destinés à être financés sous la forme de partenariats public-privé, 10 d’entre eux concernaient des équipements routiers.

Malgré ces changements qui incitent à penser que le modèle de partenariat public-privé prôné par les bailleurs commence à s’imposer au Vietnam en raison de la venue des premiers investisseurs étrangers dans le secteur du transport, depuis le début des années 1990, le gouvernement et la municipalité de Hanoi ont engagé des partenariats originaux. Ces partenariats dérivent nettement des modèles suggérés par les bailleurs, puisqu’ils s’opèrent par un contrôle resserré des autorités et surtout leurs termes contractuels relèvent d’arrangements opaques.

4.3.2.2 …l’échange « terre contre infrastructure » comme pratique

Pour pallier l’insuffisance des ressources publiques et construire les infrastructures de transport prescrit par les schémas d’aménagement, les pouvoirs publics sollicitent des emprunts auprès des bailleurs de fonds. Toutefois, afin de diversifier les sources de financement, l’Etat encourage les ministères comme la municipalité de Hanoi à établir de nouveaux partenariats avec le secteur privé – ou plus précisément avec des entreprises du secteur des travaux publics étatiques, actionarisées ou privées – pour construire les équipements nécessaires à sa croissance économique.

L’un des mécanismes de financement originaux dont font usage les autorités vietnamiennes est connu sous le nom de « terre contre infrastructure » [đổi đất lấy hạ tầng]. Dans ce type de partenariat, en

l’échange de la construction d’infrastructures réclamé par les autorités, les délégataires obtiennent le droit d’aménager et de commercialiser des concessions foncières, qui se matérialise dans la plupart des cas par des activités de promotion immobilière. En dépit de l’écart entre le modèle diffusé par les opérateurs du développement et son adaptation locale, cet arrangement permet ainsi à la municipalité de récupérer des équipements urbains nécessaires à son développement territorial et de soutenir sa croissance tout en limitant sa contribution en capital (Labbé et Musil, 2011).

Ce modèle de financement des infrastructures s’apparente aux partenariats public-privé de nature

Build Operate Transfer (BOT) utilisés dans de nombreux pays (Wilde Sapte, 2006). Ce qui distingue

toutefois la pratique vietnamienne des partenariats public-privé élaborés dans d’autres contextes (politiques et économiques), c’est le fait que les promoteurs ne recouvrent pas leurs investissements sur une longue période d’exploitation de l’infrastructure. Au contraire, dès l’achèvement de la construction, les promoteurs rétrocèdent l’ouvrage aux pouvoirs publics et se remboursent par leurs activités connexes de promotion immobilière. Dans certains cas, en particulier pour les sections routières à péage, les partenaires privés assurent la maintenance des infrastructures.

Ce mécanisme de financement trouve ses racines dans une expérience conduite à Vũng Tàu au sud du Vietnam à la fin des années 1990209. En l’échange de la construction d’une route, un investisseur local avait pu bénéficier de terrains à valoriser. En 1998, le gouvernement a publié un amendement de la loi foncière de 1993 et introduit les bases légales de ce type d’arrangement (World Bank, 2011b, p.59). Dans le Vietnam contemporain, cette pratique ne revêt pas un caractère exceptionnel. En effet, la période d’ouverture, au milieu des années 1980 avait déjà connu un précédent ; l’Etat avait sollicité la participation du peuple dans la production des logements en raison, à l’époque, d’une pénurie profonde dans ce domaine (Pandolfi, 2001). Face au défi de développement et aux besoins actuels en matière d’infrastructures urbaines, une translation s’est opérée. Après le peuple, l’Etat exhorte désormais les entreprises (étatiques, actionarisées ou privées) à collaborer dans la construction d’infrastructures dont les villes et les citadins ont besoin.

L’échange « terre contre infrastructure » par l’exemple

Ce mécanisme de financement est utilisé pour apporter des capitaux dans la construction de toutes sortes d’équipements publics. Dans le cas de la construction de nouvelles zones urbaines, les investisseurs s’engagent par exemple à construire des infrastructures publiques et sociales (parcs, écoles, cliniques médicales) à destination des habitants. Mais le financement des routes constitue l’illustration la plus éclairante de ce type d’arrangement. Sur le territoire métropolitain de Hanoi, les échanges de type « terre contre infrastructure » destinés à la construction d’équipements routiers se multiplient, nous présentons brièvement deux cas particulièrement représentatifs.

La construction de la route Nord/Sud (périphérique n°5), qui reliera la province de Vĩnh Phúc au nord de Hanoi à la province de Hà Nam au sud, permettra de contourner le cœur historique de la capitale et

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D’après Nguyễn Quốc Thông, propos recueillis lors d’un entretien le 9/10/2009. En outre, le cadre légal des contrats locaux de type Build Operate Transfer s’est formalisé en 1997 avec la publication du décret 77-CP.

ainsi d’alléger le trafic sur les principaux axes métropolitains. Validé par décision de l’ancien Comité Populaire de la province de Hà Tây, avant l’absorption de la province de Hà Tây par celle de Hanoi en 2008, ce projet d’un linéaire de 64 km requiert l’utilisation de 2 800 ha de terre agricole. En contrepartie de la construction de cet axe, l’investisseur Nam Cuong, dont le choix a été approuvé en haut lieu par le Premier Ministre, le Ministère de la Construction et le Ministère des Transports, a obtenu près de 3250 ha de terrains à valoriser le long de cette future « 6 voies » (VietnamNet, 6/07/2008). Ce montage, qui prend la forme d’un partenariat de type Build Trasfer (BT) (illustration 4.4) a été consenti par les autorités pour limiter le nombre d’investisseurs210 et tenir les délais de réalisation de l’infrastructure. La cession de terrains contigus à cet axe constitue un arrangement entre les autorités et l’investisseur. En l’échange d’un investissement estimé à plus de 360 millions d’USD pour la réalisation de la route, l’investisseur assure son retour sur investissement par des activités de promotion immobilière et la réalisation de quatre nouvelles zones urbaines (celle de Thạch Phúc (500 ha), de Quốc Oai (1100 ha), de Thạch Thất (900 ha) et celle de Chương Mỹ (750 ha)).

Illustration 4.4 : Panneau d’affichage du projet du périphérique n°5

Source : de l’auteur, août 2012.

Indications : Sur l’illustration, nous avons pointé l’information concernant le type de montage auquel correspond cette opération : « Xây dựng - Chuyển giao / Build Transfer (BT) ». Si les pouvoirs publics font preuve de transparence d’une part en disposant un panneau d’information relatif au projet sur la voie publique et d’autre part en précisant la nature du montage de l’opération, aucune information claire n’apparait concernant les arrangements qui permettent au projet de se réaliser. En clair l’échange qui porte sur des terrains n’a pas à être rendu public.

Un second montage, celui-ci plus complexe, renvoie à la construction de l’autoroute doublant la route nationale n°5 – qui avait été améliorée grâce aux crédits de l’aide japonaise durant les années 1990 – en direction de Haiphong. Le Premier Ministre Nguyễn Tấn Dũng a récemment encouragé l’établissement d’un conglomérat nommé Vietnam Infrastructure and Finance Investment Joint-Stock

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Le périphérique routier n°4 de Hanoi est en cours de réalisation. Le montage de l’opération découpé en lots verra l’intervention de plusieurs investisseurs et donc de plusieurs maîtres d’œuvre. La coordination de ces différents acteurs pose des problèmes à la maitrise d’ouvrage et ralentit la progression de l’opération.

Company (VIDIFI)211 afin de construire la section autoroutière de 105 km. Dans le cadre de ce montage, VIDIFI s’est vu attribuer des emprises foncières pour au moins cinq sites différents situés le long de la nouvelle autoroute. Le conglomérat a ainsi pour mission d’assurer l’aménagement et la commercialisation de ces terrains (Saigon Times, 13/08/2008).

Les dérives et l’opacité du modèle

Dans ce dispositif partenarial, la relation contractuelle entre le délégataire et les autorités se fonde sur des transactions foncières âprement négociées qui se soldent, dans les cas abordés, par le lancement et la commercialisation de programmes immobiliers.

Dans son ouvrage Learning to be capitalists, Annette Kim (2008) met également en relief ces pratiques. Cet auteur qualifie ces arrangements de « fiscal socialism ». Selon elle, dans ce système, ce sont les entreprises de promotion immobilière, et par extension les futurs acquéreurs des parcelles ou des appartements, qui endossent les risques commerciaux de développement des nouveaux quartiers urbains et des infrastructures réclamées par la puissance publique. Dans ce mécanisme, le rôle des autorités locales est cantonné à celui de facilitateur dans la mise en œuvre de l’opération grâce à un assouplissement du transfert des droits d’utilisation des sols. Dans l’approche de Kim (2008) qui, comme dans la vision que nous suggérons, s’apparente à l’établissement de partenariat public-privé, le partenaire privé accepte d’endosser un risque financier qui est compensé par un accès facilité à la ressource foncière. Toutefois, pour ce qui est des collectivités locales, les gains qu’elles pourraient percevoir avec ce type de partenariats ne sont pas encore mesurés sur le long terme.

Si la solution « terre contre infrastructure » semble arranger les autorités comme la sphère entrepreneuriale locale, le système repose sur un contrat léonin dans lequel la puissance publique est désavantagée. Cette dernière cède des droits d’utilisation des sols, des droits à construire et, en l’absence d’une fiscalité foncière adaptée, ne peut pas tirer profit des plus-values générées sur le long terme par la construction de ces infrastructures. Les gains pour le public restent encore incertains et ces pratiques s’opèrent sans transparence, ou du moins elles répondent à des mécanismes que nos méthodes de recherche ne sont pas en mesure de décoder. De manière provocatrice, on peut dire que cette approche tend à privatiser les gains des opérations et à socialiser les pertes qui seront endossées par les collectivités locales.

Par ailleurs, s’intéresser à ce type de partenariat permet de rendre compte de l’émergence de nouveaux acteurs comme VIDIFI. Ce dernier prend au final la forme d’un conglomérat, agissant tel un acteur privé, alors qu’il est composé de sociétés et de banques liées à l’Etat. Or, comme le font remarquer Bellocq et Silve (2008), le système bancaire vietnamien reste marqué par une opacité tenace. Ainsi, les caractéristiques présentées par ce type de montage n’étonnent guère, elles expliquent en partie le flou qui règne autour de ces opérations facilitant la construction des infrastructures de transport.

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Créé en 2008, VIDIFI regroupe plusieurs compagnies d’Etat : des établissements bancaires comme: Vietnam Development Bank (VDB), Sai Gon Invest Group (SGI), Joint Stock Commercial Bank for Foreign Trade of Vietnam (VCB), et l’entreprise de construction Vietnam Construction and Import-Export Corporation (VINACONEX).

Depuis 2010, malgré la promulgation de la décision n°71 relative à la clarification des partenariats public-privé au Vietnam, ce cadre légal reste imprécis et suscite (pour le moment) peu d’intérêts de la part des investisseurs étrangers. Dans cette imprécision, seuls les investisseurs locaux sont en mesure de tirer profit de la situation en s’arrangeant avec les autorités. Ainsi, jusqu’ici ces pratiques, qui certes permettent au projet de se réaliser, sont auréolées d’opacité et n’ont pas pu être quantifiées. Nous avons tenté de dresser une liste des routes réalisées sur ce modèle à Hanoi, en vain, les données manquent.

Que ce soit d’un côté avec les modèles de partenariat public-privé diffusés par les bailleurs de fonds – qui commencent à être expérimentés pour le secteur routier, mais qui n’ont pas encore été testés dans le secteur du transport public – ou de l’autre avec les arrangements locaux utilisés pour la construction des infrastructures, il est ici finalement question, comme le suggère Thierry Paulais (2010), d’« inventer un financement durable des villes ». Dans un contexte de crise économique globale, au caractère cyclique, les villes en développement sont dans une passe difficile : leurs budgets ne parviennent pas à couvrir des dépenses qui augmentent et les capitaux étrangers peuvent se montrer volatiles en cas de crise. Il est alors nécessaire de trouver pour une métropole comme Hanoi des

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