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La coopération dans le champ urbanistique : localisation, évolution et thématique thématique

L’aide internationale au Vietnam et l’ancrage de la coopération urbaine à Hanoi

2.2 Le secteur du transport urbain ou l’émergence d’un domaine de prédilection de l’aide internationale dans la capitale vietnamienne

2.2.1 La coopération dans le champ urbanistique : localisation, évolution et thématique thématique

2.2.1.1 Localisation

Depuis le retour au Vietnam des opérateurs de l’aide publique au développement, en particulier ceux du « groupe des 6 banques », ces derniers ont pris part au financement de plus de 130 prêts concessionnels dans le champ du développement urbain. Concernant la répartition géographique de ces crédits, près d’un quart des flux d’aide dédiés à la construction des réseaux d’infrastructures urbaines que reçoit le Vietnam converge vers la capitale du pays. Pourtant, au regard des données que nous avons compilées, le pôle pour lequel le plus grand nombre d’accords de prêts a été signé depuis 1993 demeure Hô Chi Minh-Ville, alors que Hanoi figure en seconde position (figure 2.2). La concentration des crédits de l’aide publique au développement s’avère, au même titre que les

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Précisons que le MPI a engagé un recensement des projets APD et créé une base de données accéssible en ligne (http://nmt.mpi.gov.vn/Default.aspx). Mais celle-ci est renseignée de manière aléatoire et porte sur l’aide publique au développement dans son ensemble, en confondant tous les secteurs d’action. Depuis 2007, un autre projet de suivi et d’évaluation de l’APD a été engagé. Cette initiative vise à établir un cadre commun de renseignement concernant l’activité des bailleurs et des agences responsables de la mise en œuvre de l’aide afin de pouvoir en suivre l’évolution et les performances. En 2011, cette base de données recensait seulement 50% des actions en cours (MPI, 2011).

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La seule comptabilisation au Vietnam qui tiennent compte d’une répartition géographique des flux de l’APD s’apprécie au regard des « régions économiques » à savoir : la zone montagneuse du Nord, le delta du fleuve Rouge, le centre Nord et la région côtière, les hauts plateaux du centre, la région Sud-Est et le delta du Mékong (Quang Minh Ho, 2010).

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Ce groupe est composé de la Banque mondiale, de la Banque Asiatique de Développement, de la Japan International Cooperation Agency, de l’Agence Française de Développement, de la Kreditanstalt für Wiederaufbau et de la Korea Exim Bank. Créé en 2003, ce noyau apporte un soutien à la coordination de l’aide au Vietnam. En concertation avec le gouvernement, ce groupe émet des propositions en faveur de l’harmonisation et de l’amélioration des procédures vietnamiennes d’instruction, de gestion et de mise en œuvre des projets financés par l’aide internationale. Ce sont les principaux contributeurs de l’aide publique au développement identifiés grâce au tableau 2.2. Dans leurs sillages s’alignent les autres agences de coopération bilatérales, les agences onusiennes, les organisations non gouvernementales et les acteurs de la coopération décentralisée.

Investissements Directs Etrangers, davantage dirigés vers la métropole du sud du Vietnam. Toutefois, à la différence des IDE, qui sont numériquement plus importants dans la métropole du Sud que dans celle du Nord, un rééquilibrage, orchestré par l’Etat central, apparait dans la répartition des projets financés par l’aide internationale. Il résulte que les flux de l’aide publique au développement sont à peu près équivalents entre Hanoi et Hô Chi Minh-Ville.

Selon l’approche de quantification pour laquelle nous avons opté, à savoir la signature des prêts émis par le « groupe des 6 banques », le nombre de projets engagés dans les métropoles vietnamiennes peut paraître faible. Une raison permet d’expliquer cette vision quelque peu tronquée de la réalité.

Dans bien des cas, l’octroi d’un prêt entraine la réalisation d’une série de composantes qui font office de « sous projets ». Par exemple, le prêt lié au « Hanoi drainage project for environmental improvement (I) » signé en 1994 avec l’agence de coopération bilatérale japonaise JICA prévoyait en fait la réalisation de huit composantes, soit huit opérations réparties sur l’ensemble du territoire de la capitale. Il s’agissait en fait de huit « sous projets » tels que : l’assainissement de la rivière Tô Lịch ; la construction du centre de traitement des eaux de Kim Liên ; l’assainissement de la rivière Lừ et du lac Linh Đàm ; la construction du centre de traitement des eaux de Trúc Bạch ; l’amélioration du lac Thanh Nhan et de la rivière Kim Ngưu, ou encore le montage de la station de pompage de Yên Sở. Ces « sous-projets » ont été conduits simultanément, ou de manière alternative, selon l’avancée de chaque composante. Si dans le décompte financier de l’aide nous faisons état d’un seul prêt émis, sur le terrain, plusieurs actions sont engagées.

Figure 2.2 : Nombre de prêts APD signés (décaissés ou en cours de décaissement) entre 1993 et 2010 pour la réalisation de projets urbains financés par le « groupe des six banques »

Sources : Compilation élaborée sur la base des données accessibles sur les sites Internet de la Banque mondiale (http://web.worldbank.org ); de la BAD (http://www.adb.org); de JICA (http://www.jica.go.jp) ; de KOIKA (http://www.odakorea.go.kr); de l’AFD (http://www.afd.fr) ; de la KfW (

http://www.kfw-entwicklungsbank.de);

Indications : les informations en provenance des principaux bailleurs sont enrichies par des données établies par Fanny Quertamp en 2004 (PADDI, Hô Chi Minh-Ville), par un recensement des actions de coopération dans le champ du développement urbain entrepris par Walter Koditek (expert allemand détaché auprès du Ministère de la Construction du Vietnam) et par des données éparses collectée auprès du Département du Plan et de l’Investissement de Hanoi.

Ce mode opératoire, qui n’est pas propre à la coopération japonaise, et se retrouve employé tant à Hanoi qu’à Hô Chi Minh-Ville comme par d’autres bailleurs bilatéraux et multilatéraux, favorise en définitive la démultiplication des projets sur les territoires urbains. Si les chiffres relatifs à l’octroi du nombre de prêts en faveur du financement d’infrastructures techniques urbaines paraissent faibles, il recouvre en fait sur le terrain des opérations une réalité bien différente amplifiant ainsi le rôle de l’aide internationale dans le développement de projets locaux.

2.2.1.2 Evolution

Au sortir de la période d’économie planifiée, alors que le processus d’urbanisation était réamorcé, les villes vietnamiennes, et Hanoi en particulier, connaissaient des situations critiques. Elles pâtissaient d’un manque d’investissements dans la production de logements comme dans celle des réseaux urbains (routes et chemin de fer, canaux, réseaux techniques urbains). Avec la reprise de l’aide internationale, l’investissement est venu timidement, mais sûrement, se fixer dans les villes. Sur la période de 1993 à 2010, la figure 2.3 rend compte de l’évolution du nombre de prêts concédés pour la réalisation d’opérations urbaines au Vietnam, en particulier à Hanoi, Hô Chi Minh-Ville et Danang.

A l’instar de l’évolution des volumes d’aide perçus par le Vietnam, qui a été marquée par une stagnation des flux après la crise asiatique de 1997 (cf, figure 2.1), les prêts consignés au secteur du développement urbain, à l’échelle nationale, ont connu une stabilité de 1995 à 2003. Toutefois, à partir de la seconde moitié des années 2000, les financements dirigés vers le secteur du développement urbain ont nettement augmenté. Le décollage du nombre de prêts engagés pour des projets urbains peut s’expliquer de la manière suivante. Lors du retour au Vietnam des principaux opérateurs du développement au début des années 1990, ces derniers ont subventionné la réalisation de schémas d’aménagement et d’études techniques. Ces premiers travaux ont constitué des préalables à la signature d’accords de prêts. La coopération japonaise a par exemple procédé de cette manière.

Figure 2.3 : Evolution de l’octroi des prêts pour la réalisation de projets urbains financés le « groupe des six banques » entre 1993 et 2010

A Hanoi, la JICA a conduit entre 1993 et 1996 des études sur le réseau de transport de la région métropolitaine. Cet exercice s’est concrétisé en 1997 par la remise aux autorités vietnamiennes d’un schéma d’aménagement sectoriel. Par la suite, en 1998, le gouvernement japonais a accordé un prêt au gouvernement vietnamien pour la réalisation d’un premier programme d’équipement routier, le « Transport Infrastructure development project ». Entre 1997 et 1998, la coopération japonaise a financé une étude de faisabilité en vue de la construction d’un nouveau pont, le pont Thanh Tri, et de la réalisation d’une section de la ceinture périphérique n°3. Le prêt pour la construction du pont a été signé en 1999, alors que celui pour le projet routier a seulement été accordé en 2007. Cette logique d’action, clairement éprouvée par la coopération japonaise, est également utilisée par d’autres bailleurs. La coopération bilatérale française a subventionné la réalisation d’études techniques pour la construction d’une ligne de métro à Hanoi entre 2004 et 2005. Ces travaux se sont prolongés en 2006 par l’accord d’un prêt pour la mise en chantier de l’équipement.

En définitive, au regard de l’expérience japonaise et française, l’action dans le champ urbanistique de la coopération internationale s’avère relativement continue, mais fonctionne par séquences. Celles-ci sont rythmées par des phases de réflexion sur la planification des réseaux, d’études techniques et de construction. L’accord des prêts les plus volumineux survient en amont des phases de construction. Pour Hanoi, sur la période comprise entre 1993 et 2010, nous relevons plus d’une trentaine de prêts ayant mobilisé de gros capitaux124. En définitive, la plupart des prêts ont été accordés après le milieu des années 2000, à l’issue de la réalisation des schémas d’aménagement et des études techniques.

Si entre 2000 et 2003 le « groupe des 6 banques » n’a pas octroyé de prêts pour des projets de développement urbain dans la capitale vietnamienne, d’autres agences bilatérales, comme l’Agence Canadienne de Développement International (ACDI), ont engagé à cette période plusieurs actions. L’agence canadienne était impliquée sur un programme de traitement des eaux usées et de nettoyage des canaux de la ville. De même, du côté de la coopération d’origine française, les premiers projets élaborés dans le cadre de coopérations décentralisées125 ont été lancés au début des années 2000 avec le soutien d’un programme de cofinancement européen (Asia Urbs).

Entre 1997 et 1998, la Banque mondiale a élaboré, en partenariat avec le gouvernement vietnamien, le contenu de son premier document stratégique d’assistance (Country Assistance Strategy)126. Dans ce

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Dans les travaux du PRUD finalisé en 2004, l’équipe de Laurence Nguyen et al. (2004, p.37), dont les recherches ont porté sur l’évaluation des projets de coopération internationale dans le champ du développement urbain, avançait certaines données concernant les opérations conduites dans la capitale vietnamienne. Selon cette équipe, jusqu’au début de l’année 2002, 54 projets d’aide publique au développement avec un montant d’aide estimé à près de 624 millions USD avaient été relevés. Dans le décompte, l’équipe précise que 36 projets ont fait l’objet de subventions (environ 172 millions USD), 12 projets étaient financés avec des prêts (environ 452 millions USD) et 5 projets relevaient de l’assistance technique – ces derniers portaient sur l’élaboration de schémas généraux, comme celle du plan de circulation urbaine, du plan de distribution en eau, d’assainissement… Les résultats relatifs à l’examen des données utilisées dans les travaux de Nguyen et al. (2004) souligne au passage la cohérence du matériel mobilisé dans notre recherche, puisqu’au total nous relevions 31 projets engagés sur des crédits APD à Hanoi en 2010 depuis 1993.

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Les deux coopérations décentralisées françaises partenaires du Comité Populaire de Hanoi sont la ville de Toulouse et de la Région Île-de-France.

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Pour la Banque Mondiale, les objectifs de l’aide sont précisés pays par pays tous les quatre ou cinq ans dans des documents de stratégie appelés Country Assistance Strategy. Chaque donateur dispose de tels outils. Par

document une inflexion de la distribution de l’aide était envisagée : l’offre du bailleur, en concertation avec son client, était tenue de s’orienter davantage vers le secteur du développement urbain. D’après l’institution, le gouvernement vietnamien avait besoin d’une assistance spécifique, puisqu’il cherchait alors à établir des villes vivables, compétitives et « bankable » (World Bank, 1998, p.16). En d’autres termes, à peine cinq ans après le retour officiel des Institutions Financières Internationales au Vietnam, alors que le taux d’urbanisation ne dépassait pas les 30% sur le territoire national, les villes étaient reconnues par le gouvernement vietnamien pour leur rôle moteur dans les mécanismes d’accroissement du PIB. Le champ du développement urbain s’est donc imposé à l’agenda des bailleurs internationaux afin de répondre aux attentes des autorités vietnamiennes, mais également en raison de l’évolution des politiques internationales de développement qui se sont progressivement, à partir des années 1990, orientées vers la résolution des problèmes de pauvreté en ville.

2.2.1.3 Thématique

Depuis 1993, les besoins formulés par le gouvernement vietnamien et l’offre des bailleurs en matière d’« aide projet » ont convergé vers le terrain de l’infrastructure économique. Les données sectorielles que nous avons analysées précédemment (cf. tableau 2.4) montrent que depuis le début des années 2000, à l’échelle nationale, la moitié des flux d’aide publique au développement destinés au développement du Vietnam sont dirigés vers le secteur des infrastructures au sens large (industrie, transport, énergie, télécommunications, assainissement, eau potable).

exemple, l’Agence Française de Développement dispose d’un Document Cadre de Partenariat, mais également d’autres documents comme le cadre d’intervention pays (CIP – instrument par lequel l’AFD défini l’ensemble de ses interventions dans un pays déterminé), le cadre d’intervention sectorielle (CIS - instrument par lequel l’AFD définit l’ensemble de ses interventions dans un secteur déterminé), le cadre stratégique de lutte contre la pauvreté (CSLP – qui est élaboré en concertation avec les autres acteurs du développement et l’emprunteur).

Figure 2.4 : Répartition des secteurs de prédilection de l’APD en milieu urbain au Vietnam pour le « groupe des six banques » entre 1993 et 2010

Par conséquent, cette primauté de la concentration des prêts de l’aide internationale pour la construction d’infrastructure se décline à l’échelle urbaine. Pour la période 1993-2010, sur l’ensemble du pays, l’investissement via les crédits d’aide a été particulièrement dominant dans deux secteurs ; près des trois-quarts des crédits de l’aide internationale à l’échelle des centres urbains vietnamiens ont été dirigés vers le transport ou le secteur de l’eau (figure 2.4). Toutefois, dans notre décompte des crédits émis par le « groupe des six banques », nous avons pu identifier d’autres secteurs vers lesquels l’aide est dirigée, ils apparaissent sous les intitulés « amélioration du cadre urbain »127 et « planification et gouvernance ». Cette répartition des investissements de l’aide internationale dans le champ du développement urbain, dont nous avons pu rendre compte à l’échelle nationale, s’exprime de la même manière à l’échelle de la capitale vietnamienne, à quelque variation près.

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