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Synthèse de chapitre

Chapitre 3 : Terminologie et langue de spécialité

3.3 Langue de spécialité

3.3.1 Définition et nature

La langue de spécialité est souvent définie par opposition à la langue commune. Cet état de fait est la résultante de nombreux facteurs. Parmi ces facteurs on peut citer la densité plus où moins forte de termes, le caractère sélectif du public ciblé qui a une certaine connaissance et des attentes par rapport à la production qui lui est proposée, de plus c’est un type de discours qui ne peut être pleinement compris qu’en contexte, d’où une connaissance du cadre d’énonciation préalable qui se révèle nécessaire pour le lecteur (Omrod, 2001).

Tout comme pour terme et mot, la langue de spécialité est définie en fonction de la langue commune. La notion de langue commune réfère à l’usage courant fait de la langue. Elle représente donc la pratique langagière de tous les jours, alors que la langue de spécialité renvoie à une pratique en situation, laquelle pratique reste tout de même cloisonnée parce qu’elle n’est accessible ou ne suscite l’intérêt que d’un nombre restreint d’utilisateurs.

Il n’existe toutefois pas de frontière étanche entre langue commune et langue de spécialité. La raison en est que toutes les deux appartiennent en fin de compte au système linguistique. Mareschal dira à cet effet :

Les langues de spécialité font couramment appel à la langue courante pour dénommer certaines réalités qui leur sont propres, et le passage d’un mot de la langue courante au statut de terme dans la langue de spécialité est chose fréquente. (Mareschal, 1989 : 378)

Ce sont des variantes de pratiques langagières. La langue de spécialité reprend des éléments de la langue commune dans un but bien ciblé. La distinction entre les deux se fait toutefois de manière plus claire lorsqu’on se penche sur les caractéristiques de la langue de spécialité, ce qui en ferait une sous-langue.

On relève là, différents termes pour un même concept. En effet, la notion de « langue » de spécialité ou spécialisée, a gêné certains linguistes, du fait que la langue est appréhendée comme un système. Dès lors, faire référence à une « langue » de spécialité ou spécialisée supposerait, l’existence d’un système dans un système. C’est un problème terminologique que l’on ne retrouve tout de même pas en anglais grâce à l’appellation LSP, (Language for Specific Purpose). La problématique de la notion de « langue » se pose en ces termes :

Peut-on transcender [les] spécialités pour conclure à une homogénéité de tous les vocabulaires techniques et scientifiques, aboutissant ainsi à une langue particulière dans l’ensemble de la langue ? (Guilbert et Peytard, 1973)

À cette question, Mounin (1979) ou encore Quemada (1978) préfèrent rejeter l’appellation « langue de… » pour s’en tenir aux particularités syntaxiques et lexicales du discours spécialisé. Dans les années quatre-vingt, Hoffman dresse quelques particularités de la langue de spécialité en onze points :

Exactitude ou précisionObjectivité  Caractère abstrait  Caractère généralisableDensité information  Brièveté ou laconisme  Neutralité émotionnelle  Absence d’ambiguïté  Impersonnalité  Constance et logique

Utilisation de termes symboles et figures. (Hoffman, 1984)

Ce sont là les quelques caractéristiques les plus saillantes de la langue de spécialité même si certaines d’entre elles peuvent prêter à discussion. C’est le cas par exemple de l’absence d’ambigüité qui demeure un idéal, de même que l’exactitude ou la précision. La brièveté ainsi que la densité informationnelle dépendent souvent de domaines bien spécifiques (notice, livres de cuisine). Il est assez fréquent de retrouver dans certains textes de spécialité l’utilisation de

symboles (chimie, mathématique), alors que le style impersonnel semble prévaloir

sur la subjectivité dans le discours spécialisé, ce qui est le fait de l’objectivité ou de la démarche factuelle, sans cesse recherché en science.

L’une des particularités des langues de spécialité est qu’elles constituent un pont qui relie science et linguistique. En effet, les premières études en LSP ont mis l’accent sur la langue comme véhicule de science, mais aussi la langue sous l’influence de la science et qui subit des changements à divers niveaux.

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La langue de spécialité peut avoir une syntaxe particulière, en plus d’un lexique de spécialité marqué par une certaine densité. Gotti évoque entre autres particularités syntaxiques :

 la structure compacte due à l’omission d’éléments phrastique  la concision expressive (structure compacte, mais précise)  la pré modification (très fréquente en anglais)

 la nominalisation (densité nominale élevée)  la complexité syntaxique

 la longueur des phrases

 le temps des verbes (souvent au présent)

 l’usage du passif dans la recherche de style impersonnel. Gotti (2003) La syntaxe utilisée pour le discours spécialisé est complexe par le contenu qui demeure informatif. L’usage d’incises ainsi que de subordonnées participiales produit souvent des phrases expansives dans lesquelles les syntagmes nominaux sont très présents.

Sur le plan lexical, nous notons que le terme est l’unité lexicale de spécialité que l’on retrouve dans les textes de spécialité.

Au niveau morphologique, selon le domaine de spécialité et la langue d’origine des progrès scientifiques, il est possible de retrouver des influences de base de la « langue créatrice » sur les autres langues. Un exemple peut être pris du vocabulaire informatique, le calque est le procédé adopté avec la plupart des termes traduits vers d’autres langues. L’emprunt à la morphologie savante des formants grecs et latins est perceptible dans les sciences médicales.

3.3.2 Langue de spécialité : exemple de la langue

médicale

Elle est une langue de spécialité dans le sens où elle véhicule une

connaissance scientifique qui présente des particularités lexicales

(unités terminologiques), syntaxiques (pré modification, concision, précision

expressive, etc.). Elle reflète donc un certain discours emprunté par les professionnels de la santé en général et les acteurs médicaux plus particulièrement.

La terminologie est la particularité première de toute langue de spécialité. Le lexique de spécialité médical est largement influencé par le grec et le latin. Même s’il n’est pas nécessaire d’apprendre ces langues pour connaître la terminologie médicale du français ou des autres langues latines, une connaissance des racines de

ces termes permet de bien les décomposer lorsqu’on les rencontre dans d’autres

unités terminologiques.

Le travail sur corpus qui sera mené, comporte un ensemble d’écrits

scientifiques. Les conclusions de ces études sous formes de tableaux peuvent ne pas

toujours être compréhensibles pour le profane. L’usage de formes syntaxiques, parfois laconiques, est également à relever.

Swales (1990) mène une étude centrée sur l’anglais en tant que langue de communication scientifique. Il propose une approche didactique et de recherche en anglais, non sans souligner la valeur de l’analyse de genre qui permet l’étude de

discours en vue d’une application spécifique. En reprenant la définition de

Herzeberg (1986), à propos de ce qu’est un discourse community et en soulignant la

réticence des linguistes à parler de genre, il évoque quelques propriétés.

Use of the term 'discourse community' testifies to the increasingly common assumption that discourse operates within conventions defined by communities, be they academic disciplines or social groups. The pedagogies associated with writing across the curriculum and academic English now use the notion of 'dis~ course communities' to signify a cluster of ideas: that language use in a group is a form of social behavior, that discourse is a means of maintaining and extending the group's knowledge and of initiating new members into the group, and that discourse is epistemic or constitutive of the group's knowledge. (Herzberg, 1986 : 1)

Selon Swales, la réticence des linguistes à parler de genre proviendrait du caractère du terme longtemps associé aux études littéraires. De plus, la linguistique étudie la langue en-dessous du niveau textuel. Sans vraiment donner de définition de ce qu’est le genre, il note que ‘exemplars of a genre exhibit various pattern of similarity in terms of structure, style, content and intended audience’. Par ailleurs, le genre comporte un ensemble d’évènements de communication qui peuvent être reconnus par les membres d’une autre communauté discursive. De plus les différentes communautés partagent dans une certaine mesure les mêmes objectifs de communication. Ces derniers constituent la logique qui façonnent la structure discursive et influent sur les choix de contenu et de style. (Swales, 1990).

Swales souligne que les termes discours médical, juridique peuvent induire en erreur puisqu’on peut s’attendre à une homogénéité discursive qui n’existe pas en

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réalité. En effet, tout dépend des rapports qui existent entre celui qui émet un message et celui qui le reçoit. De plus dans les messages émis, on note des variations selon les différentes parties qui le composent. Par exemple, l’introduction des textes scientifiques a une structure rhétorique particulière qui cherche à planter le décor d’un espace de recherche.

Des auteurs comme Hamburger (1982), Chevallier (2015) ont analysé la langue médicale. Ce dernier a insisté sur la nécessité de situer la terminologie

médicale dans son contexte, c’est-à-dire le domaine médical qu’il convient de

distinguer du domaine de la santé bien plus large.

Le domaine médical au sens large du terme, se confond avec le domaine de la santé qui couvre tout ce qui concerne l’être humain, en lui-même et dans ses rapports avec l’environnement physique et social. (Chevallier, 2015 : 2)

Il est donc nécessaire d’opérer une classification qui peut se faire sur une base topographique ou thématique. Il convient de signaler que les deux approches se révèlent complémentaires.

3.4 Discours scientifique spécialisé et discours de