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La protection du militaire dans le divorce

Section I. Le divorce

Paragraphe 2. Le divorce contentieux

B. La procédure de divorce contentieux et les autres dispositions spéciales en

1. La protection du militaire dans le divorce

292. En ce qui concerne les textes spéciaux du divorce en Chine, les privilèges des

militaires ne sont pas négligeables. Il convient avant tout d’interpréter le champ d’application de ces dispositions prioritaires.

Le mariage militaire prévu par le droit du mariage vise un « mariage dont l’une des parties est militaire en service actif. Pourtant, les miliaires qui travaillent dans le bureau, ou les employeurs qui travaillent dans une troupe n’ayant pas de certificat de militaire, ou encore les réservistes, les vétérans, les militaires démobilisés ne sont pas concernés»255.

293. Les raisons pour lesquelles la loi privilégie les militaires est qu’ils ne peuvent pas

avoir une vie de famille comme les autres. Au quotidien, ils vivent en équipe pour s’entraîner et protéger l’intégrité du territoire. De plus, la discipline de l’armée les maintient dans une vie communautaire. Pour eux, le plus important, c’est de protéger la grande famille. Ainsi, sa propre famille est, en quelque sorte, sacrifiée. Par conséquent, le mariage du miliaire peut devenir fragile sans protection spéciale. D’après WU Xueping et GUO Feng, « la protection de leur mariage présente aussi l’équilibre entre le droit et le devoir » 256.

255 XUE Jinxia, Réflexion sur le système de la protection du mariage militaire en Chine, L’histoire de la Partie

communiste, nov. 2010, p.39.

256 WU Xueping, GUO Feng, Analyse du système particulier de la protection du mariage du militaire en Chine,

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294. L’histoire de la protection du mariage des militaires date de l’année 1931.

Pendant la Deuxième guerre nationale, afin de stabiliser le moral des troupes miliaires et d'améliorer l'efficacité du combat, une décision de privilégier l’armée rouge a été adoptée; l’article 18 prévoyait en effet que « le divorce demandé par l’époux non militaire doit avoir l’accord de son conjoint militaire. À défaut, un tel divorce ne sera pas accepté ».

295. Après le succès de la révolution, les privilèges des militaires ont été conservés et

figuraient au premier droit du mariage chinois. Dans cette loi, la protection était radicale. L’article 19 énonçait : « le divorce demandé par l’époux du militaire doit avoir l’accord de son conjoint à condition que le militaire reste en contact avec la famille. Si pendant deux ans, une partie perd le contact avec son mari ou sa femme militaire, le divorce peut être prononcé.»

En 1980, la réforme du droit du mariage en Chine a supprimé le cas de la disparition du conjoint militaire. L’article 26 exigeait que « le consentement préalable d’un militaire en service actif [devait] être obtenu pour que son conjoint puisse introduire une action en divorce ». Ainsi, l’accord de la partie militaire est devenu indispensable dans tous les cas de divorce, sur la demande unilatérale du conjoint non militaire. Cette abrogation a conduit la demande de divorce à devenir impossible lors de la disparition de la partie militaire où le requérant ne pouvait acquérir son accord en perdant le contact avec lui.

L’amendement du droit du mariage en 2001 a atténué la protection absolue du militaire en matière de divorce. L’époux du militaire est désormais autorisé à former une demande sans accord de son conjoint, lorsque ce dernier a commis une faute imputable. Avant ce complément, le consentement de la partie militaire était indispensable pour rendre une requête recevable.

296. La question qui se pose par la suite est la suivante: quelles sont les fautes graves

qui peuvent être invoquées par la partie non militaire pour demander unilatéralement le divorce?

Selon l’article 23 de la 1ère « Interprétation » sur le droit du mariage, les faits graves peuvent se référer aux trois premiers cas indiqués par l’article 32 du droit du mariage ou suivre le principe de la rupture du lien affectif, de sorte que la bigamie, le

-147- concubinage avec un tiers, la violence familiale, la maltraitance ou l’abandon d’un membre de la famille, les mauvaises habitudes comme l’addiction à la drogue, aux jeux d’argent sont considérés comme des fautes graves.

D’une certaine façon, les actes qualifiés de faute grave rajoutée ouvrent une fenêtre au divorce sans accord du militaire. Néanmoins, en dépit de cette énumération par la Cour Suprême Populaire, le juge du fond dispose aujourd’hui du pouvoir d’apprécier chaque demande, afin de vérifier si le fait invoqué par la partie non militaire peut être qualifié de faute grave. Même si ce fait ne rentre pas dans le cadre des trois premiers cas de l’article 32 du droit du mariage, le divorce peut également être prononcé, étant fondé sur le principe de la rupture du lien affectif.

297. Hormis la protection du mariage du militaire assurée par le droit du mariage, le

droit pénal consolide aussi cette protection : « un tiers sera emprisonné pendant trois ans au maximum ou arrêté, lorsqu’il est complice de l’adultère du conjoint non militaire»257.

298. Compte tenu d’une série de dispositions spéciales visant à protéger les intérêts

des militaires, nous sommes conscients que la liberté du divorce de la partie non militaire, c’est-à-dire dans la plupart des cas, les femmes, est lésée. En même temps, la disposition montre également une inégalité juridique entre les hommes et les femmes. La partie militaire peut demander unilatéralement le divorce en invoquant le principe de la rupture du lien affectif, alors qu’un tel principe est écarté pour son conjoint sauf si la partie militaire a commis une faute grave. De plus, l’inégalité est aussi manifestée dans la sanction de l’adulte du conjoint du miliaire, car en aucun cas, un tiers adultère ne peut être engagée dans la responsabilité pénale, voire civile, dans le cadre d’un divorce. Seul l’auteur au sein du couple risque de verser des dommages-intérêts.

D’autre part, la protection spéciale de la partie militaire est incompatible avec l’article 48 de la Constitution : « les femmes de la RPC doivent avoir le même droit que les hommes dans tous les domaines, notamment dans la politique, l’économie, la culture, la vie sociale et familiale ». Pourtant, le système de la protection des militaires empêche les femmes, dans la majorité des cas, de bénéficier de cette égalité vis-à-vis de la dissolution du mariage.

-148- Par ailleurs, il est difficile d’écarter le fait que cette rigueur fait également obstacle au mariage militaire lui-même. En raison des conditions exigeantes du divorce, les filles hésitent à se marier avec un militaire, car le titre d’épouse du militaire devient, en quelque sorte, un joug qui prive les femmes de la liberté de divorce. En outre, une telle rigueur dénature le mariage, parce qu’en effet, celui-ci se fonde sur l’intention conjugale des deux personnes. En l’absence de cette intention conjointe, l’alliance n’a pas de support et, peu à peu, s’effondre. Nous voyons mal pourquoi il faudrait maintenir à tout prix un tel mariage.

Si les protections apparaissent utiles en période de guerre pour assurer qu’aucun élément ne puisse déranger la volonté des combats, nous n’en voyons pas l’intérêt impératif, aujourd’hui. C’est la raison pour laquelle le droit français ne mentionne aucune disposition en vue de rendre un divorce de militaire plus difficile en cas d’une demande formée par son conjoint. De ce fait, nous considérons que la protection spécifique n’est plus nécessaire dans une époque pacifique ; il serait préférable de la supprimer en laissant une liberté totale aux couples.

2. La protection des femmes enceintes et des femmes en période d’allaitement