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La présence de rideau

CONSACRÉS AUX DIEU

B. La présence de rideau

Les rideaux sont des pièces de tissu mobiles qui peuvent être tendues et retirées. La façon dont ces pièces de tissus étaient déployées dans les temples modifiait la vision des Grecs et leur perception de l’édifice. L’usage de rideaux permettait de jouer sur ce que les pèlerins voyaient ou non en cachant temporairement pour mieux rendre visible par la suite, un objet, un espace. Quelques tentures sont mentionnées dans les sources, mais cet élément est bien souvent peu analysé. Les pièces de tissu ainsi utilisées dans les sanctuaires pouvaient, selon leurs dimensions, être de véritables rideaux dans les sanctuaires permettant de montrer ou de cacher de façon temporaire, ou de clore un espace.

1

Euripide, Ion, 515-516. On perçoit également un rôle de la porte à l’Asclépieion de Cos dans Hérondas, Mimes, IV, 55-56.

2

137 Les tentures se définissent comme des objets mobiles utilisés dans les temples ; elles sont parfois mentionnées dans des dédicaces. Des desservants ou des adorants les offraient à une divinité. Ainsi, à Didymes, une inscription présente l’hydrophore d’Artémis, ]-is, fille de Bacchios, dédiant un παραπέτασμα, une tenture à Artémis1. À Lagina, des rideaux ont été dédiés à Hécate au IIe siècle p. C. par le prêtre Aelianos et sa femme Arria2. Cette offrande

n’est pas anodine, Diehl et Cousin expliquent que les prêtres d’Hécate étaient recrutés annuellement et se distinguaient par le coût important des dépenses liées au culte de la déesse, mais aussi par des largesses importantes. Il semble que des prêtres particulièrement zélés dans leur sacerdoce, étaient récompensés en étant autorisés à graver sur les murs du temple leur nom et leurs dons3. Sans être dans le cadre des largesses connues par d’autres inscriptions formalisées4, l’offrande de tentures représentait une offrande importante, coûteuse, et vraisemblablement utilisée dans le culte. L. Robert la qualifie d’« actes de générosité exceptionnelle en rapport avec la charge remplie »5.

L’inscription de Lagina apporte une précision, malheureusement fragmentaire, sur le lieu de la dédicace. J. Robert propose la restitution : τὰ ἐν [τῷ ναῷ]6. La définition de l’emplacement τὰ ἐν suivi d’un lieu montre une utilisation cultuelle précise, et non une simple offrande stockée dans l’opisthodome7 ou la réserve des temples, pour laquelle la précision serait inutile. De même, dans l’inscription de Didymes mentionnée, ]-is, fille de Bacchios, indique qu’elle a offert τὸ παραπέτασμα, « le rideau »8. Pour L. Robert qui souligne la présence de l’article τὸ devant le mot παραπέτασμα, l’usage du rideau ne semble pas douteux : il s’agit d’une grande tenture tendue dans la cella devant l’image divine d’Artémis9. Il en est de même en Lydie où

Γλύκων Ἑρ- μογένου τὰ ἐνπ[ε]τάσ- ματα [ἀνέ]θη- κεν ἐκ τοῦ ἰ- δίου.

« Glukôn, fils d’Hermogénès, a dédié les tentures sur ses fonds propres »10.

1Didyma

II 360, l. 8-10 ; CIG 2886 ; ROBERT 1960b, p. 470 (440-489) ; BE 1961, 668.

2

Lagina 96, l. 3-4 ; IStr 700 ; LAUMONIER 1938, p. 280 ; DIEHL et COUSIN 1887, p. 154, no 58a ; ROBERT 1960b, p. 470. La restitution παραπέ[τασμα] proposée par LE BAS et WADDINGTON 1847-1877, no 589, l. 2, n’est pas vraisemblable pour LAUMONIER 1938, p. 279, n. 4, car le mot ne serait pas à sa place.

3

DIEHL et COUSIN 1887, p. 38-39.

4

Comme par exemple Ibid., no 48.

5 ROBERT 1960b, p. 471. 6 Ibid., p. 471. 7 HOLLINSHEAD 1999, p. 189, 210-213. 8

I. Didyma 360, l. 9-10 ; Didyma 457 ; CIG 2886 ; ROBERT 1960b, p. 470-471.

9

ROBERT 1960b, p. 470-471.

10TAM

138 La présence de l’article met en avant une qualification particulière, et non une simple offrande gardée dans les réserves1.

Les tentures les plus connues sont celle du temple de Jérusalem, et celle du temple de Zeus à Olympie offerte par Antiochos le Grand2. Pausanias mentionne ces étoffes :

ἐν δὲ ᾿Ολυμπίᾳ παραπέτασμα ἑρεοῦν κεκοσμηνένον ὑφάσμασιν ᾿Ασσυρίοις καὶ βαφῇ πορφύρας τῆς Φοινίκων ἀνέθηκεν ᾿Αντίοχος, οὗ δὴ καὶ ὑπὲρ τοῦ θεάτρου τοῦ ᾿Αθήνῃσιν ἡ αἰγὶς ἡ χρυσῆ καὶ ἐπ’ αὐτῆς ἡ Γοργώ ἐστιν ἀναθήματα. Τοῦτο οὐκ ἐς τὸ ἄνω τὸ παραπέτασμα πρὸς τὸν ὄροφον ὥσπερ γε ἐν ᾿Αρτέμιδος τῆς ᾿Εφεσίας ἀνέλκουσι, καλῳδίοις δὲ ἐπιχαλῦντες καθιασιν ἐς τὸ ἔδαφος.

« Antiochos a consacré à Olympie un rideau de laine orné de broderies assyriennes et teint de pourpre de Phénicie et c’est de lui qu’au-dessus du théâtre d’Athènes sont les consécrations, l’égide d’or avec la Gorgone dessus. On ne tire pas ce rideau vers le haut comme au temple d’Artémis à Ephèse, mais en le faisant glisser sur des cordelettes on le fait descendre au sol »3.

La description précise de Pausanias permet de comprendre comment ces rideaux étaient actionnés dans les sanctuaires. Les mécanismes étaient de deux types : soit le rideau était levé en dévoilant par le bas, soit il était baissé jusqu’à terre en découvrant par le haut4. Dans les deux cas, l’étoffe permettait de modifier la vue de l’intérieur du temple, en cachant temporairement une partie de l’édifice, ainsi que son contenu, pour ensuite les dévoiler5.

Le mot παραπέτασμα est issu du verbe παραπετάννυμι, qui a le sens de tendre, étaler, ouvrir en parlant de bras, de tissus, de portes…. Avec le préverbe παρα- il signifie « étendre autour ». Le πέτασμα est un rideau, une tenture, un tapis, une couverture, ce que l’on étend6. La Souda et Hésychius définissent parapetasma comme παρακάλυμμα, soit une couverture, un voile, ce qui sert à cacher. Hérodote mentionne des parapetasma dans le mobilier que le régent Pausanias découvrit après la fuite de Xerxès de Grèce7. Le commentaire de Legrand suggère des rideaux plutôt que des couvertures, voire la tente de Xerxès8. Des rideaux étaient

1

Il en va de même à Pergame, où une offrande de la fin de l’époque hellénistique dédie à Dionysos et au peuple τὸν πυλῶνα καὶ τὸ ἐν αὐτῶι ἐμπέτασμα, la grande porte et la tenture qui va dedans (I. von Pergamon I, 236, l.6).

2

ROBERT 1960b, p. 470-471.

3

Pausanias, V, 12, 4. Sur l’identification du roi : pour certains, il s’agit d’Antiochos IV qui s’est signalé par son évergétisme envers les sanctuaires grecs (reconstruction de l’Olympéion d’Athènes). Comme il a enlevé le voile du temple de Jérusalem qu’il transforme en temple de Zeus Olympien, on a pensé qu’il est offert à Olympie (CLERMONT-GANNEAU), mais pour PELLETIER 1955, c’est une mauvaise interprétation, il s’agit plutôt d’Antiochos III, hypothèse admise par HABICHT 1989, en particulier p. 11-12.

4

Mécanisme des rideaux de scène des théâtres antiques (cf. maquette du musée de la civilisation romaine de Lyon).

5

C’est la position de PELLETIER 1955, p. 290 à propos d’Olympie.

6

DELG, s. v. πετάννυμι.

7

Hésychius, Souda, s. v. ; Hérodote, IX, 82.

8

139 également offerts aux théâtres, lieux de culte de Dionysos comme l’indique une inscription de la fin de l’époque hellénistique à Pergame1.

Le rideau pouvait être utilisé dans un sens de clôture. Ainsi, Porphyre affirme d’ailleurs que des rideaux étaient tirés dans les temples grecs en milieu de journée2 comme clôture temporaire, comme le confirme le quatrième mime d’Hérondas, rapportant la visite de Cynno et Coccalé à l’Asclépieion de Cos3. Les deux femmes se promenaient dans le sanctuaire en attendant l’ouverture du temple, Cynno décrit ce moment : ἡ θύρη γὰρ ὤικται κἀνεῖθ’ ὁ παστός, « la porte est ouverte, le tissu brodé est déployé »4, puis Coccalé s’extasie devant tous les beaux ouvrages qui s’y trouvent.

Le mot παστός est tiré du verbe πάσσω, signifiant saupoudrer, tisser une décoration dans un tissu5. Il prend le sens de voile dès Hérodote, IV, 56 ; c’est un dais déployé au-dessus de la mariée, une étoffe décorée ou brodée liée à la cérémonie de mariage à l’époque hellénistique6. L’étymologie populaire lie le mot παστός à παστάς, qui est un portique, une colonnade, en relation avec la cérémonie du mariage à partir de l’époque hellénistique, notamment en Egypte (AP VII, 188) : cette construction légère à laquelle était suspendu un παστός s’est progressivement confondu avec le rideau. Ces voiles constituaient une décoration particulière et éphémère devant ou autour du lit nuptial ou dans des cérémonies religieuses. Le pastos était un revêtement ; il symbolisait l’entrée dans un autre moment ou lieu7 et mettait en scène ce passage.

Chez Hérondas, aucune indication n’est donnée pour la distance par rapport à la porte8. Soit la tenture était proche de la porte et devait en quelque sorte la doubler9, comme élément de fermeture, pour mieux solenniser l’ouverture du temple en deux étapes et créer une attente par une ouverture progressive. Soit le rideau était dressé plus loin, il partageait alors l’intérieur du temple10 et isolait le groupe cultuel. Cela créait une attente auprès des pèlerins venus assister aux rites et prier devant les dieux. Cl. Vatin propose d’y voir une sorte de tapisserie spécifiquement utilisée pour les jours de cérémonie11. Cela pouvait être

1

I. von Pergamon, I, 236. Voir MATHYS 2012, p. 205.

2

Porphyre, L’antre des nymphes, 26. PRITCHETT et PIPPIN 1956, p. 248.

3

Débattu, mention de L. LALOY, dans la notice de la traduction des Belles Lettres, Paris, 1928, p. 65. Sur la question de savoir si la scène a lieu à Cos, voir CUNNINGHAM 1966, p. 115-117, et la mise au point de SINEUX

2004, p. 36-39.

4

Hérondas, Mimes, IV, 55-56 [trad. GD].

5

WACE 1948, p. 51-55 ; DELG, s. v. πάσσω, p. 860.

6

Pollux, Onomasticon 3.37 ; VATIN 1970, p. 214sq. ; DELG, s. v. πάσσω.

7

VATIN 1970, p. 211-228 ; DELG, s. v. παστάς.

8

Hérondas, Mines, IV, 56. PELLETIER 1955, p. 290, 305.

9 ZANKER 2009, p. 116. 10 HOLLINSHEAD 1999, p. 207. 11 VATIN 1970, p. 216.

140 également un rideau ou une tapisserie masquant soit une porte1, soit un espace particulier qui pouvait contenir des objets spécifiques2.

Le Parthénon d’Athènes possédait également des rideaux. C’est une anecdote sur l’impiété de Démétrios qui nous permet de le savoir. En effet, Clément d’Alexandrie rapporte comment Démétrios fut proclamé dieu. Les Athéniens lui préparèrent alors un mariage avec Athéna lors de son second retour en 304-301. Selon Clément d’Alexandrie, Démétrios, plein de dédain pour la déesse, et ne pouvant épouser une statue, monte vers l’Acropole avec la courtisane Lamia, à laquelle il s’unit τῷ τῆς ᾿Αθηνᾶς ἐνεφυρᾶτο παστῷ, « derrière le voile masquant la statue de la déesse »3, exposant aux regards de la déesse les postures impudiques de la courtisane. En dehors du regard critique d’un père de l’Église contre la débauche et le culte des faux dieux – un Athénien ne dirait pas que la déesse n’est qu’une statue –, l’anecdote est intéressante pour la mention de ce pastos et par sa fonction : il cache la déesse aux regards, probablement lors de la fermeture du temple, peut-être pour la protéger.

Un autre tissu est connu sur l’Acropole d’Athènes. En effet, tous les ans, les arrhéphores tissaient un péplos pour Athéna Polias4, qui était remis solennellement à la déesse en une procession le jour de la fête des Panathénées. Ce péplos était tendu au mât d’un bateau sur roue5. La grande dimension du tissu et la petite taille du xoanon d’Athéna Polias font dire à M. Christopoulos que l’étoffe était une sorte de παραπέτασμα, dont la fonction était de séparer la statue du reste du temple. Si le péplos servait à couvrir le xoanon, ce ne pouvait être qu’à la fin des Plyntéries, lors de la parure de la statue6.

Un rideau peut apparaître comme un élément essentiel du mobilier d’un temple, destiné à en occulter temporairement certains éléments. Ainsi, une fondation religieuse (τά κατασκευασθέντα, l. 5-6) d’Apollonios, fils de Métrodoros, dont la stèle a été trouvée à Smyrne, décrit divers éléments matériels pour la mise en place d’un culte au début de l’époque impériale. Dans la description du naos, qui mentionne des portes (τεθυρωμένος, 1 MASSON 1974, p. 88 ; SINEUX 2004, p. 38. 2 HOLLINSHEAD 1999, p. 207. 3

Clément d’Alexandrie, Protreptique, IV, 54, 6 [Trad. Cl. MONDÉSERT, Sources chrétiennes, 1976]. Aucun rideau n’est cité dans les inventaires du Parthénon du IVe siècle qui ne listent que les objets en or, en argent, en bronze, en ivoire ou en céramique. Voir HARRIS 1995 ; PALAGIA 2000, p. 54. Une des stèles des polètes sur la vente des biens des Hermocopides, reconstituées par W. PRITCHETT, mentionne des rideaux à trois reprises dans les fragments f et h de la quatrième colonne, PRITCHETT restitue : [παραπέτ]ασμα aux lignes 174-175, suivant MERITT, qui s’appuie sur Pollux, X, 32 et 42, mais ne donne pas de mots à la ligne 205. Ce sont cependant des biens personnels vendus au profit de la cité en sanction : IG, I3, 421, l. 173-174, 205 ; PRITCHETT 1953, p. 225- 250. Frg. f (Agora inv. I 236a) : MERITT 1934, p. 47-49 ; 1948, p. 34-35 ; frg. h : IG, I², 330 ; MERITT 1934, p. 48 ; Syll3 102 ; SEG 13, 12 ; SEG 19, 23 ; PRITCHETT 1961, p. 23-29.

4

Pausanias, I, 27, 3. PARKE 1977, p. 38-41 ; MANSFIELD 1985, p. 6-18, 260-301.

5

Philostrate, Vie des Sophistes, 2, 550. PARKE 1977, p. 38-41 ; MANSFIELD 1985, p. 68-78 ; TOBIN 1993, p. 87.

6

141 l. 19), des serrures (κεκλειδωμένος, l. 19), des statues (ἀγάλματα, l. 20), est cité παστῆον ξύλινον ναοειδές καὶ παστὸν λινοῦν, « un portique (pastas) en bois en forme de naiskos et un rideau en lin »1. Ce rideau semblait utile dans le cadre de ce nouveau culte, peut-être pour l’ornementation du sanctuaire, sans doute pour rendre invisible temporairement les statues.

Des rideaux étaient également attestés dans certains inventaires de temple. À Délos, au milieu du IIe siècle, un inventaire indique la présence d’une πα[ρ]απέτασμα λινοῦν, « tenture

de lin »2 dans le temple de Zeus et d’Athéna sur le Cynthe3. R. Vallois qui a trouvé un rideau destiné à un pinax représentant un portrait d’Arsinoé, cité dans un inventaire de 189, explique la présence de la tenture par le besoin de protéger de la lumière les peintures à la détrempe4. Un inventaire antérieur citait un παραπέτασμα dans le temple d’Ilithye5. De même, à Samos, un inventaire du temple d’Héra de 346/345 mentionne παραπετάσματα δύο βαρβαρικὰ ποικίλα, « deux rideaux barbares bariolés », αὐλαῖαι δύο, « deux tentures »6, au milieu d’autres vêtements offerts comme parure à la déesse (l. 12 : κόσμος τῆς θεοῦ). Le fait de trouver des rideaux au milieu de chitons, d’himations, de voiles peut paraître étrange dans la mesure où ils se prêtaient à une utilisation différente. Selon I. Romano, ce rideau était suspendu devant la statue de culte, et servait à cacher la statue de la déesse en dehors des cérémonies officielles de culte7.

Les tentures pouvaient également être des cloisons mobiles dans les sanctuaires à mystères, rendant invisibles les actes qui se déroulaient derrière. Une des premières interprétations de l’Anaktoron d’Éleusis était de voir un espace séparé du reste de l’édifice par des rideaux installés du sol au plafond. Quand les hiéra devaient être montrés par le hiérophante, les rideaux devaient été tirés et l’intérieur de l’Anaktoron rempli de lumière devait être révélé aux initiés8. Cette interprétation a été remise en cause par la découverte d’inscriptions qui mentionnaient des « murs de l’Anaktoron » (toichon). Ce n’était donc pas des rideaux qui formaient les parois de l’Anaktoron9. Mais, la formulation de cette hypothèse

1

Smyrna 91, l. 23 ; Syll3, 996 ; I. Smyrna 753 + II2 p. 375, 378. VATIN 1970, p. 215

2

ID, 1442, A, l. 82-83. ROBERT 1960b, p. 471.

3

Sur ce sanctuaire, voir PLASSART 1928, p. 123 ; VALLOIS 1929, p. 207, 232 ; DEONNA 1938, p. 263, n. 11 ;

Guide de Délos4, no 105, p. 285-287.

4

DÜRRBACH 1911, p. 243, no 48, l. 8 : ῥά]ψαντι τὸ παραπέτασμα τῶι πίνακι οὗ ἡ γραφὴ ἡ ᾿Αρ[σινόης] ; VALLOIS

1913, p. 293.

5

IG, XI, 2, 203, l. 99. Daté de 269.

6Samos

133, l. 26. Sur le mot αὐλαία, voir Hypéride, frg. 139 (rideau de scène) ; Hésychius, s. v. (rideau dans une salle de réception et rideau de scène) ; Souda, s. v. (rideau de scène) ; Photis, s. v.

7

OHLY 1953 ; ROMANO 1980, p. 256. Cette idée de dissimulation est comprise dans le texte de Pollux,

Bibliothèque, 271.500 et s. v. παραπέτασμα (rideau dissimulant ceux qui entrent chez des prostituées).

8

NOACK 1927, fig. 111 ; MYLONAS 1961, p. 119.

9

142 se fondait sur l’idée de dissimuler temporairement, ce qu’aurait permis l’installation de rideaux.

Par contre, à Samothrace, le Hiéron possèderait, lui, une tenture qui séparait l’abside dans laquelle le hiérophante effectuait des actes pour l’initiation majeure du reste du bâtiment où se trouvaient les époptes. La reconstitution de K. Lehmann (fig. 24)1 correspondant à un état probable de l’édifice à la fin du IVe siècle donne une idée de la position de cet élément

dans l’espace du bâtiment. Cette séparation à l’intérieur de l’édifice se trouverait confirmée par des inscriptions plus tardives, datant du IIe siècle p. C. qui indiquaient que l’accès était réservé aux prêtres et aux membres de la communauté2. Le recours à un rideau mobile et non une cloison fixe met en valeur le caractère temporaire de cette dissimulation, qui pouvait alterner avec des moments où les hiéra pouvaient être dévoilés aux regards.

D’ailleurs, le fait de recourir à un rideau n’est pas sans parallèle dans d’autres sanctuaires dans lesquels se déroulaient des cultes à mystères3. Le rideau cache soit une partie du rituel, soit des objets qui y sont liés. La présence de pierres supportant des rideaux dans l’angle nord du hall d’initiation des hommes à Antioche de Pisidie, est, pour Ramsay, le rappel d’une chambre nuptiale et pourrait correspondre à l’étape finale de l’initiation4.

Les tentures permettaient de cacher ou de clore temporairement un espace tout en laissant la possibilité aux instances du sanctuaire de montrer des éléments, modifiant ainsi la vision des visiteurs, de façon plus souple que des cloisons fixes. Cependant, la volonté de dérober à la vue des pèlerins des objets, une partie du rituel, pouvait être réalisée par une organisation particulière de la circulation à l’intérieur des bâtiments.

III. Des itinéraires rendant difficile la vision

En effet, l’agencement interne des édifices consacrés aux dieux pouvaient faire ressortir une volonté de dissimuler par la présence de corridors cachés ou par la présence d’une pièce reculée, difficilement visible pour les visiteurs.