ET L’EMPRISE IRRÉGULIÈRE
B- Définition de la voie de fait
2- La définition jurisprudentielle de la voie de fait
C’est la jurisprudence française (a) et son homologue libanaise (b) qui ont défini et déterminé les contours de la notion de voie de fait.
a- La définition jurisprudentielle française
Le Conseil d’Etat français et la Cour de Cassation ainsi que le Tribunal des Conflits qui ont défini la voie de fait tout au long du siècle dernier, et au début de ce siècle (§), mais une nouvelle définition de la notion de voie de fait fut adoptée par le Tribunal des Conflits en 2013 (§).
§- La définition jurisprudentielle classique de la voie de fait
Bien que certains fassent remonter la consécration de la voie de fait à l’affaire du CURÉ DE REALMONT79, c’est surtout l’arrêt Action Française qui doit être considéré comme ayant expressément consacré la théorie de la voie de fait80. Le 7 février 1934, le préfet de police avait saisi le journal « l’Action Française » chez tous les dépositaires du journal à Paris et dans les autres villes. Le Tribunal des Conflits a vu dans une décision aussi générale et non justifiée, une mesure constituant une voie de fait qui conduisait à la compétence judiciaire en déclarant que la saisie des journaux est réglée par la loi du 29 juillet 1881 ; que s’il appartient aux maires et à Paris au préfet de police de prendre les
mesures nécessaires pour assurer le maintien du bon ordre et la sûreté publique, ces attributions ne comportent pas le pouvoir de pratiquer par voies de mesures préventives,
la saisie d’un journal sans qu’il soit justifié que cette saisie ordonnée d’une façon aussi
générale que celle qui résulte du dossier partout où le journal sera mis en vente tant à
Paris qu’en banlieue, ait été indispensable pour assurer le maintien ou le rétablissement
79
TCF, 4 juillet 1934, CURÉ DE REALMONT, rec. p 1247, dans cette espèce, le maire avait donné l’ordre d’enlever
la grille qui entourait une église sans utiliser la procédure de la désaffectation pour nuire au curé. Le Tribunal des
Conflits s’est prononcé en faveur de la compétence du juge judiciaire ; certains commentateurs ont observé que la
solution du Tribunal reposait plutôt sur des textes que sur la théorie de la voie de fait).
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de l’ordre public, que la mesure incriminée n’a ainsi constitué dans l’espèce qu’une voie
de fait entraînant… la compétence de l’autorité judiciaire… ».
Mais l’apport de ces deux arrêts se limite à consacrer la notion de voie de fait sans y
donner une définition.
C’est en 194081 que le Tribunal des Conflits formula de façon nette le principe de la voie de fait en déclarant qu’il y a voie de fait lorsque l’opération entreprise par l’administration est manifestement insusceptible de se rattacher à l’application d’un texte législatif ou
règlementaire.
Le Conseil d’Etat rendit cette formulation tout à la fois plus extensive et plus claire par son arrêt célèbre « CARLIER » prononcé le 18 novembre 194982 où il a refusé la
définition trop étroite de l’arrêt « SCHNEIDER ».
Dans cette affaire le requérant était architecte et désirait visiter et photographier la
cathédrale de CHARTRES. Le maire lui en avait interdit l’accès, et, comme il n’avait pas
respecté cette interdiction, les forces de police avaient saisi les clichés. Le Conseil d’Etat
a distingué catégoriquement les deux actes : la décision de refus d’accès et la décision de saisie des clichés. Le refus d’accès a été considéré comme un acte d’administration qui devait relever, même en cas d’irrégularité, du juge administratif, étant donné que ledit
accès n’est protégé par aucune liberté publique. Au contraire, la décision de saisie les
clichés a été considéré comme constitutive d’une voie de fait parce qu’aucun principe ne permet à l’administration de confisquer des objets appartenant à un particulier. Une telle
saisie ne pourrait être considérée comme un acte d’administration. Elle revêtait le caractère d’irrégularité manifeste en fonction du caractère exceptionnel.
L’apport primordial de l’arrêt « CARLIER » est qu’il a défini clairement la notion de voie de
fait, et ces termes ont depuis été adopté par le Tribunal des Conflits et par la Cour de Cassation, où la voie de fait est « un acte manifestement insusceptible d’être rattaché à un pouvoir appartenant à l’administration ».
81
TCF, 4 juin 1940, Société SCHNEIDER, rec., p.248 et 11 février 1947, PERRIN D, 1947.J.134
82
69
La définition jurisprudentielle a permis d’illustrer deux variétés de la voie de fait. D’après
les arrêts rendus tout au long du siècle dernier et au début de ce siècle, il y a voie de fait
d’une part lorsqu’une décision administrative portant atteinte à la liberté ou à la propriété privée est en elle-même, et indépendamment des conditions dans lesquelles elle est
exécutée, manifestement insusceptible d’être rattachée à l’exécution d’un texte législatif ou règlementaire ou à un pouvoir appartenant à l’administration83 et d’autre part lorsque l’administration a procédé dans des conditions irrégulières à l’exécution d’une décision
même régulière portant atteinte au droit de propriété ou à une liberté fondamentale. Le Tribunal des Conflits dans son arrêt « BOUSSADAR84 » rendu le 23 octobre 2000 a envisagé clairement les deux variétés de la voie de fait et définit les cas possibles de
cette dernière en décidant qu’il n’y a voie de fait justifiant, par exception au principe de
séparation des autorités administratives et judiciaires, la compétence des juridictions de
l’ordre judiciaire, que dans la mesure où l’administration, soit a procédé à l’exécution forcée, dans les conditions irrégulières, d’une décision même régulière portant une
atteinte grave au droit de propriété ou à une liberté fondamentale, soit a pris une décision
ayant l’un ou l’autre de ces effets à la condition toutefois que cette dernière décision soit
elle-même manifestement insusceptible d’être rattachée à un pouvoir appartenant à
l’autorité administrative ».
Le Tribunal des Conflits adopte cette définition dans d’autres arrêts. C’est ainsi que dans sa décision du 23 mai 200585 il refuse la définition de l’arrêt « BOUSSADAR » pour assurer la continuité du fonctionnement des institutions polynésiennes, et décide « qu’il n’y a voie de fait justifiant par exception au principe de séparation des autorités administratives et judiciaires, la compétence de l’ordre judiciaire, que dans la mesure où l’administration soit a procédé à l’exécution forcée, dans des conditions irrégulières, d’une
décision même régulière, portant une atteinte grave au droit de propriété ou à une liberté
fondamentale , soit a pris une décision ayant l’un ou l’autre de ces effets à la condition
83
TCF, 4 juillet 1991, GAUDINCE, rec. p.469, LPA 199.11 note ROUAULT
84
TCF, 23 octobre 2000, BOUSSADAR, rec. p.775
85
TCF, 23 mai 2005, Haut commissaire de la République en Polynésie française, Président de l’assemblée de la
70
que cette dernière décision soit elle-même manifestement insusceptible d’être rattachée à un pouvoir appartenant à l’autorité administrative ».
Cette définition a évolué avec l’arrêt du 17 juin 2013, comme on le verra plus tard.
A son tour la Cour de Cassation, dans son arrêt du 8 juillet 1954 donne une définition longue mais complète de la voie de fait, en déclarant que « toute atteinte illégale à la
propriété en vertu d’un acte administratif dépourvu des conditions requises pour sa régularité, de même que l’exécution d’office dudit acte par voie de contrainte sur la personne ou sur les biens par un représentant de l’autorité administrative sans recours
préalable à la juridiction compétente pour statuer sur cette exécution et ordonner à cette fin toute mesure appropriée, constituent des voies de fait inconciliables avec le respect de la liberté individuelle et de la propriété privée dont la protection reste essentiellement
dans les attributions de l’autorité judiciaire86 ».
Outre cette définition extrêmement détaillée et moins pragmatique, la Cour de Cassation redonne en 1992 une définition proche de celle adaptée par le Conseil d’Etat et le
Tribunal des Conflits. Elle considère en effet que la voie de fait est «une mesure manifestement insusceptible de se rattacher à l’exercice d’un pouvoir conféré par la loi à
l’administration pour l’exécution d’un acte déterminé87 ».
Dans son arrêt rendu le 21 février 2007, la Cour de Cassation fournit une définition encore plus étroite de la voie de fait et précise sa qualification en cas de violation d’une
propriété privée lors de travaux publics; elle décide qu’ « aucune décision émanant du
préfet ne l’avait autorisée à faire passer des canalisations au travers de terrains privés, la
Cour d’Appel qui a retenu à bon droit … que le passage des canalisations sur le terrain des époux, portait une atteinte grave au droit de propriété de ceux-ci et était insusceptible
de se rattacher à un pouvoir donné à la commune, en a exactement déduit que l’acte
commis par celle-ci constituait une voie de fait88 ».
86
Cass.civ, 8 juillet 1954, JCP 1955, II, 8674, obs. VEDEL
87
Cass.civ, 25 février 1992, Directeur général des douanes/LST, G. Pal, 24-25 juillet 1992, p.14
88
71
Dans un arrêt plus récent rendu le 14 novembre 2012, la première chambre civile de la Cour de Cassation a repris la même formule employée par l’arrêt « BOUSSADAR » précité, en précisant qu’ « … il n’y a voie de fait justifiant la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire que dans la mesure où l’administration, soit a procédé à l’exécution
forcée dans des conditions irrégulières; d’une décision, même régulière, portant une
atteinte grave au droit de propriété ou à une liberté fondamentale, soit a pris une décision
ayant l’un ou l’autre de ces effets à la condition toutefois que cette dernière décision soit
elle-même manifestement insusceptible d’être rattachée à un pouvoir à l’autorité administrative… ».
Ces différentes définitions à la fois du Tribunal des Conflits, du Conseil d’Etat ainsi que
de la Cour de Cassation, vont évoluer avec l’avènement de l’arrêt du 17 juin 2013 rendu
par le Tribunal des Conflits.
§- La nouvelle conception de la voie de fait
Dans une ordonnance rendue le 23 janvier 2013 « Commune de CHIRONGUI89 » dans laquelle le Conseil d’Etat décide que le juge administratif qui statue sur un référé-liberté est compétent pour faire cesser une atteinte grave et manifestement illégale au droit de
propriété, en cas d’urgence; « et ceci bien même que cette atteinte aurait le caractère
d’une voie de fait ». Quelques mois après, par son arrêt M.B. société ERDF Annecy, le Tribunal des Conflits, revenait sur la jurisprudence BOUSSADAR90 en proposant une nouvelle définition de la voie de fait.
Il faut signaler de prime abord que l’apport de ces deux arrêts dépasse celui de définir la
voie de fait, et met en cause le régime du contentieux de la voie de fait. On reviendra sur ces deux arrêts lorsqu’on étudiera l’éclipse de la théorie de la voie de fait et on se
bornera ici à voir surtout la nouvelle définition du Tribunal des Conflits dans l’arrêt M.B.
précité et la comparer avec les définitions classiques.
89
CEF, 23 janvier 2013, Commune de CHIRONGUI, AJDA 2013 p.788, Chron. BRETONNEAU A. et DOMINOS.X, JCPA 2013, 2047 note PAULIAT H. et 2048 note LEBOT O, RFDA 2013 p.299 note DÉLVOVÉ P.
90
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Dans cette décision, le Tribunal des Conflits redéfinit étroitement la notion de voie de fait en affirmant « qu’il n’y a voie de fait de la part de l’administration, justifiant, par exception
au principe de séparation des autorités administratives et judiciaire, la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire pour en ordonner la cessation ou la réparation, que dans
la mesure où l’administration soit a procédé à l’exécution forcée, dans des conditions irrégulières, d’une décision même régulière, portant atteinte à la liberté individuelle ou
d’extinction d’un droit de propriété et qui est manifestement insusceptible d’être rattachée à un pouvoir appartenant à l’autorité administrative ».
Comme le note M. Jeanne de GLINASTY91, cet arrêt conserve des éléments de la définition classique de la voie de fait, mais réduit « aussi considérablement le champ
d’application ».
En effet, la voie de fait administrative est constituée traditionnellement et suivant les
définitions classiques qu’on vient de citer, dans deux situations : l’exécution forcée irrégulière d’une décision, même régulière et la décision elle-même manifestement
susceptible de se rattacher à un pouvoir appartenant à l’administration. A ce stade, le
Tribunal des Conflits reste fidèle à sa définition de l’arrêt BOUSSADAR et des arrêts qui
l’ont suivi, mais l’innovation réside dans la réduction du champ d’application de la notion, à la liberté individuelle et à l’extinction du droit de propriété.
Ce ne sont plus « les libertés publiques » qui rentrent dans la protection du juge judiciaire, mais strictement les libertés individuelles qui excluent ipso facto « les libertés collectives » et « les droits primordiaux de l’individu ».
D’autre part, le Tribunal des Conflits se diverge des définitions classiques, en limitant
l’atteinte au droit de propriété au seul cas de l’extinction de ce droit. L’atteinte à la propriété privée qui ne comporte qu’une simple gêne et non une dépossession, ne constitue pas une voie de fait. Désormais, c’est seulement l’atteinte qui porte une extinction du droit de propriété, comme le cas d’une démolition ou une expropriation qui est seule constitutive de voie de fait.
91
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Les conséquences de cet arrêt sur l’existence de la notion de voie de fait seront étudiées plus tard, mais on peut dire à ce stade que l’arrêt du Tribunal des Conflits rendu le 17 juin 2013 a changé la définition classique de la voie de fait en restreignant considérablement
son champ d’application qui, accompagné de l’ordonnance rendue par le Conseil d’Etat
du « commune de CHIRONGUI » ont « bouleversé » le régime juridique tout entier de la voie de fait mettant en cause son existence.
Après avoir défini la voie de fait dans la jurisprudence française, l’étude de la
jurisprudence libanaise s’avère restrictive. b- La définition jurisprudentielle libanaise
Comme son homologue française, la jurisprudence libanaise a défini la voie de fait à plusieurs reprises et en amant avec la jurisprudence française. Ainsi le Conseil d’Etat
libanais dans un arrêt ancien rendu le 16 novembre 195992 définit la voie de fait par négation. Il considère que « l’acte matériel créateur de la voie de fait n’a pas pour but l’application d’un texte légal ou réglementaire ou contractuel ou un pouvoir reconnu à l’administration ».
On peut déduire a contrario de cet arrêt, que le Conseil d’Etat juge qu’un acte matériel ne se rattachant pas à un texte législatif ou réglementaire, contractuel, ou encore qui ne
rentre pas dans un pouvoir de l’administration est constitutif de voie de fait.
Certainement cette définition n’est pas suffisante ni complète ; certes cet acte même ne
se rattachant à aucun pouvoir de l’administration et à aucun texte n’est constitutif de voie de fait que s’il porte atteinte au seul droit de propriété ou à la liberté individuelle. Dans le même sens, un autre arrêt ancien du Conseil d’Etat rendu le 31 mai 196093 précise que la
voie de fait n’est pas un acte administratif dont on demande l’annulation ou un dommage
relevant d’un acte à caractère administratif, mais (c’est un acte) qui constitue une activité
arbitraire et le dommage qui naît de cette activité n’est pas un dommage naissant d’un acte administratif… puisque cet acte a perdu son caractère administratif puisqu’il manque
92
CEL, 16 novembre 1959, rec. adm, 4, p.10
93
74
aux procédures administratives requises. Ce qui le fait rentrer dans la catégorie des actes abusifs ».
A cette définition, la même critique peut être adressée qu’à l’arrêt précédent à savoir l’absence de la détermination du domaine de la voie de fait, l’atteinte à la propriété privée
et aux libertés individuelles.
Rentre dans la même catégorie des arrêts, un arrêt relativement récent rendu le 4 janvier 199494 et qui se borne à définir la voie de fait en visant l’acte matériel, fait générateur de cette dernière, sans déterminer son domaine d’application. Ainsi il décide que « considérant que les actes de voie de fait sont en principe des actes matériels
dépourvus de base légale, niant à l’acte de la personne morale administrative sa qualité
administrative, ce qui par conséquent le fait sortir du champ de compétence de la juridiction administrative et rentre dans la compétence judiciaire ».
Ce n’est que dans les arrêts plus récents que le Conseil d’Etat donne une définition
complète de la voie de fait. Ainsi dans son arrêt rendu le 12 juillet 200695le Conseil d’Etat
juge qu’il y a voie de fait lorsque l’administration fait un acte matériel constituant une
atteinte grave à la liberté individuelle et à la propriété individuelle par main mise sur cette dernière, et sans aucun lien législatif ou réglementaire.
Cette définition se diffère des deux autres précitées. Elle est en fait plus large et plus complète et elle détermine le domaine de la voie de fait, ce qui faisait défaut dans les deux décisions précédentes.
Dans un autre arrêt beaucoup plus récent rendu le 3 décembre 201296, le Conseil d’Etat
libanais donne une définition à la fois complète, précise et surtout suffisante de la notion
de la voie de fait. Il s’agissait d’un recours en révision contre un arrêt rendu par le Conseil d’Etat le 11 octobre 2007 ; le demandeur en révision soulève entre autres un moyen basé
sur l’incompétence du Conseil d’Etat pour statuer à l’origine au motif qu’il existait une
atteinte au droit de la propriété intellectuelle et artistique qui rentre dans la compétence
94
CEL, 4 janvier 1994, MANSOUR, RJA, 1995, I, p.203
95
CEL, 12 juillet 2006, EID E, RJA, 2012, II, p.1092
96
75
du juge judiciaire. Le Conseil d’Etat, en admettant que le moyen de l’incompétence
constitue en cas de son existence « une cause suffisante pour déclarer acceptable la demande en révision » donne une définition de la voie de fait et détermine ses conditions
d’existence. Il déclare qu’il ne retient pas l’argument de la compétence du juge judiciaire
et par conséquent le principe jurisprudentiel du juge judiciaire gardien de la liberté
individuelle et de la propriété individuelle que dans le cas où l’acte administratif est accompagné d’exécution matérielle, comme quand l’administration fait un acte matériel comportant un vice grave naissant d’une irrégularité dangereuse au regard du texte de la loi ou des règlements et portant atteinte aux droits individuels relatifs à leur propriété mobilière et immobilière et leurs libertés fondamentales constituant ainsi voie de fait. La Cour de Cassation libanaise97 retient à son tour la voie de fait lorsque l’administration
accomplit un acte matériel arbitraire sans base légale et qui contient une irrégularité grave à la loi et aux règlements dont il résulte une atteinte grave à la propriété individuelle. L’arrêt ajoute que « cette conception de la voie de fait est le fruit des opinions
des juristes et de la jurisprudence, et elle n’est pas consacrée (la conception) dans un texte ou un principe général du droit ». Encore, faut-il ajouter que cette définition de la
Cour de Cassation, même précise, n’est pas complète puisqu’elle limite la voie de fait à l’atteinte à la propriété individuelle et ne parle pas de l’atteinte à la liberté individuelle. Après avoir déterminé l’origine et les définitions doctrinale et jurisprudentielle de la notion
de voie de fait, une analyse de ce qui vient d’être exposé s’impose. 3- Analyse et synthèse
Partant de l’origine et de la définition de la voie de fait, on peut déduire que le fondement de cette dernière repose à la fois sur un principe et sur trois éléments, à savoir, le principe du juge judiciaire gardien de la propriété privée et des libertés individuelles et la réunion cumulative de trois éléments98 : un acte matériel de l’administration, une atteinte