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Chapitre 1 : Recension des écrits

1.3 L’intervention éducative auprès d’enfants manifestant un TSA

Le mouvement d’éducation inclusive a fait son entrée dans de nombreux pays en réponse à la préoccupation que soulevait la scolarisation des élèves à besoins spécifiques en classe spécialisée, notamment en faisant état du préjudice porté à leurs droits à des pratiques éducatives égalitaires (Dessemontet, Bless et Morin, 2012; Lindsay, 2007). Au Canada, depuis les deux dernières décennies, les provinces et les territoires tendent à adopter des pratiques inclusives pour scolariser ces élèves. Bien que la mise en place de ces pratiques s’effectue à des rythmes différents d’une juridiction à l’autre (Rousseau, Dionne, Vézina et Drouin, 2009), les politiques qui les sous-tendent prennent sans exception assise sur l’une ou l’autre des Chartes des droits et libertés (Charte canadienne des droits et libertés, 1982; Charte québécoise des droits et libertés de la personne, 1978) lesquelles défendent des droits égalitaires pour chaque individu sans égard à leurs caractéristiques individuelles. Sur le territoire québécois, c’est la Politique de l’adaptation scolaire (Ministère de l’Éducation, 1999) qui sous-tend le mouvement en faveur de la scolarisation intégrative en classe ordinaire des élèves handicapés ou en difficulté d’adaptation ou d’apprentissage (EHDAA). L’adoption de cette politique préconise désormais l’éducation de tous les élèves dans l’école de quartier en plus d’insister sur l’intervention préventive des élèves à besoins spécifiques. Si l’ensemble des provinces et des territoires canadiens sont actuellement orientés dans une perspective inclusive des élèves à besoins spécifiques, le Québec vise plutôt leur intégration scolaire. Malgré la similitude que représentent ces notions, elles n’en comportent pas moins des nuances. À la différence, l’intégration ouvre sur la possibilité de n’être que partiellement présent dans la classe ordinaire, car les services dont nécessite l’élève à besoins spécifiques peuvent être reçus à l’extérieur du cadre de la classe.

Bien que certains résultats soient mitigés, les études sont nombreuses sur l’efficacité de l’intégration scolaire de l’élève à besoins spécifiques en termes d’appui à son développement (Boutot et Bryant, 2005; Lindsay, 2007; Poirier, Paquet, Giroux et Forget, 2005). D’autres chercheurs ont également souligné les effets de l’intégration au regard des bienfaits soulevés chez les autres enfants de la classe (Kalambouka, Farrell, Dyson et Kaplan, 2005; Ruijs et Peetsma, 2009). Ainsi, plusieurs études font état des résultats

(Boutot et Bryant, 2005; Poirier, Paquet, Giroux et Forget, 2005). Dans leur étude, Boutot et Bryant (2005) ont mis en évidence que le développement favorable des compétences sociales de jeunes manifestant un TSA intégrés en classe ordinaire pouvait être attribuable au fait qu’ils bénéficiaient d’une modélisation constante de leurs pairs neurotypiques. À cet effet, ils ont associé une intégration sociale réussie à la rencontre de trois critères : l’élève est « (…) visible aux yeux des autres (impact social), est quelqu’un avec qui les autres enfants souhaitent passer du temps (préférence sociale) et est membre d’un groupe d’amis qui passent du temps ensemble (affiliation à un réseau social) » (p.14). Dans le même ordre d’idées, Wiener et Tardif (2004) ont étudié les différences sociales entre deux groupes composés d’élèves présentant des difficultés d’apprentissage légères; l’un scolarisé en classe ordinaire, l’autre, en classe spécialisée. S’intéressant au degré d’acceptation sociale de chacun des élèves, les auteurs ont récolté différentes mesures : leur nombre d’amis, la qualité de leur relation avec leur meilleur ami, leur degré de solitude et de dépression, leur niveau d’habiletés sociales et leurs problèmes de comportement. De manière générale, les élèves intégrés en classe ordinaire ont montré des résultats significativement supérieurs à ceux scolarisés en classe spécialisée, et ce, relativement à chacune des mesures. En effet, ceux étant scolarisés en classe ségrégative se retrouvaient à être moins acceptés par leurs pairs au développement typique en plus d’avoir une plus faible perception de leurs compétences scolaires.

S’il est montré que l’intégration de l’élève à besoins spécifiques en classe ordinaire favorise le développement de ses habiletés sociales, de nombreuses données empiriques traduisent également les bienfaits de l’intégration sur le plan des apprentissages scolaires (Bouck, 2007; Lindsay, 2007; Myklebust, 2007). Entre autres, la revue de la littérature proposée par Ruijs et Peetsma (2009) traduit l’efficacité de l’intégration scolaire en s’appuyant sur deux principaux résultats. D’une part, l’élève est susceptible d’obtenir de meilleurs résultats académiques puisqu’il peut bénéficier de la modélisation de ses pairs pour lesquels les apprentissages sont plus accessibles. D’autre part, l’intégration peut favoriser la motivation de l’élève, car la scolarisation en classe ordinaire est plus encline à promouvoir la réussite académique que celle octroyée en classe spécialisée (Ruijs et Peetsma, 2009). En revanche, les auteurs nuancent ce dernier résultat en soulignant qu’un effet de comparaison est sujet à apparaître entre le sentiment de compétence de l’élève

même et celui de ses pairs au développement régulier. Dans leur étude réalisée auprès d’élèves ayant une déficience intellectuelle, Dessemontet, Bless et Morin (2012) se sont eux aussi intéressés aux effets de l’inclusion sur la réussite scolaire des jeunes à besoins spécifiques. Ils ont quant à eux conclu que les progrès des élèves réalisés sur le plan académique étaient indépendants du type de placement dans lequel ils étaient situés. Dans la même lignée, l'étude de Peetsma, Vergeer, Roeleveld et Karsten (2001) a mis en évidence que quatre années étaient nécessaires pour que la cohorte d’élèves à besoins spécifiques scolarisés en classe ordinaire présente des progrès académiques significativement supérieurs en français et en mathématiques que ceux de leurs pairs du même âge scolarisés au sein d’un établissement spécialisé.

1.3.2 La classe inclusive : différents modèles de service

La scolarisation de l’élève à besoins spécifiques en classe inclusive requiert nécessairement des ressources supplémentaires de sorte à contribuer à soutenir sa réussite scolaire (Tremblay, 2012). Ainsi, la pratique de l’inclusion sollicite, entre autres, un apport à la fois quantitatif et qualitatif de ressources humaines, financières et matérielles auxquelles est conjuguée la mobilisation accrue de professionnels gravitant autour de l’élève. Par exemple, il peut s’agir d’orthopédagogues, d’orthophonistes, d’enseignants, de techniciens en éducation spécialisée, etc. Dans la mesure où ces différents professionnels sont amenés à s’organiser et à travailler en collaboration afin d’offrir un soutien adapté à la situation de l’élève, différents modèles de service peuvent être privilégiés tels que la consultation collaborative, la co-intervention et le co-enseignement (Tremblay, 2012). La prochaine section jettera ainsi un éclairage sur l’une de ces configurations : la co-intervention.

1.3.2.1 La co-intervention

La co-intervention est un modèle de service utilisé en classe inclusive se caractérisant par la collaboration étroite entre un enseignant et un autre professionnel (orthopédagogue, orthophoniste, technicien en éducation spécialisée, etc.) et par le soutien direct qu’il permet d’apporter à l’élève (Tremblay, 2012). Cette configuration peut s’exercer sous deux angles : la co-intervention externe et la co-intervention interne. Si les deux professionnels travaillent simultanément auprès d’un groupe d’élève, mais dans des espaces distincts et sans partager les mêmes interventions ou les mêmes objectifs, il s’agit d’une co-

élèves dans un local séparé pendant les heures de classe habituelles et où il utilise une multitude de pratiques pédagogiques est un service de soutien très répandu dans les établissements scolaires (Gaudreau, 2010). La recherche traduit d’ailleurs son efficacité dans la mesure où la plupart des tâches proposées à l’élève sont nouvelles (Tremblay, 2012). Or, si la co-intervention externe implique que l’élève soit retiré physiquement de la classe, celui-ci manque inévitablement les contenus scolaires enseignés durant cette même période. Cette configuration est ainsi susceptible d’amener l’enseignant à devoir s’adapter en conséquence, que ce soit en planifiant des périodes de rattrapage ou encore à réduire les exigences de la tâche pour l’élève en question (Saint-Laurent, Dionne, Giasson, Royer, Simard et Piérard, 1998, cité dans Tremblay, 2012).

Quant à la co-intervention interne, elle fait référence aux interventions réalisées auprès d’un élève à besoins spécifiques par un personnel spécialisé, souvent désigné comme l’accompagnateur de l’enfant (SRSEAS, 2007), et ce, dans le cadre même de la classe. Selon Tremblay (2012), ce modèle de service de soutien à l’élève s’appuie sur l’individualisation de l’enseignement général donné à l’ensemble de la classe en tenant compte des besoins particuliers de l’apprenant. Ainsi, bien qu’il y ait présence d’une adaptation individuelle des conditions d’enseignement, le contenu ne fait toutefois pas l’objet de modifications marquées. Dans le cadre de cette configuration, l’enseignant assume entièrement la responsabilité de la planification contrairement à l’accompagnateur dont le rôle majeur est d’assurer un soutien direct à l’élève, bien qu’il puisse également intervenir auprès de l’ensemble du groupe-classe.

1.3.3 Les interventions individualisées

Au Québec, l’individualisation des services offerts aux élèves à besoins spécifiques est une orientation majeure de la Politique de l’adaptation scolaire (1999). Gaudreau (2010) caractérise cette individualisation comme faisant référence à « (…) un parcours scolaire différencié, à une pédagogie elle aussi différenciée selon les capacités et les besoins individuels et à la réussite différenciée selon le potentiel de chacun des élèves » (p.12). Sous l’angle de cette politique inclusive et de sorte à répondre aux besoins particuliers des élèves EHDAA dont s’inscrivent ceux ayant un trouble du spectre autistique, des

interventions individualisées, orientées vers l’adoption de programmes et de stratégies dont l’efficacité scientifique est reconnue, sont susceptibles d’être préconisées.

D’une part, les travaux de Ryan et ses collaborateurs (2011) ont identifié les programmes d’intervention systématique qui, à l’heure actuelle, étaient les plus prometteurs lorsqu’élaborés correctement auprès d’individu manifestant un TSA. Il s’agit de l’analyse appliquée du comportement (A.B.A.), le « Developmental Individual-Difference, Relationship-Based model (DIR/Floortime) », les scénarios sociaux, le « Picture Exchange Communication System (PECS) », ainsi que le modèle « Treatment and Education of Autistic and Communication Handicapped Children (TEACCH) ». D’autre part, l’enseignant titulaire et l’accompagnateur sont invités à faire appel à un large éventail de stratégies d’intervention susceptibles de favoriser la réussite inclusive des élèves manifestant un TSA en classe ordinaire (Ministère de l’Éducation de l’Alberta, 2005) : les horaires visuels, l’autogestion, les séquences, les réseaux de concepts, l’entraînement aux habiletés sociales, l’information donnée aux pairs et l’adaptation du matériel de même que du milieu physique. Soulignons que ces stratégies ne constituent pas une liste exhaustive; le choix de leur présentation s’est basé essentiellement sur la facilité de leur implantation en classe. Ces programmes et ces stratégies d’intervention font l’objet d’une présentation plus détaillée à l’annexe 1.

1.4 L’accompagnateur en milieu scolaire