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Le cas d’un magasin de vêtements

2. LE PROFIL DU MAGASIN TENDANCES-MODE

2.3 L’ACTIVITÉ DES EMPLOYÉS DANS LE CADRE DES PRATIQUES DE FORMATION DU MAGASIN

2.3.2 Les expériences de formation des employés du Magasin Tendances-Mode

2.3.2.2 L’illustration d’une activité de formation ayant connu des difficultés ou un échec

Une formation sur le service à la clientèle est au nombre des diverses formations offertes au personnel du Magasin Tendances-Mode. Or, les données recueillies auprès des employés rencontrés indiquent que pour trois employés sur quatre cette formation, issue de la traduction d’un ouvrage américain, laissait à désirer (Tableau 9).17

TABLEAU 9 : Exemples d’activité de formation ayant connu des difficultés ou un échec – Magasin Tendances-Mode Employé 1 Employé 2 Employé 3 Employé 4

. Service à la clientèle . Aucune . Service à la clientèle . Aucune

. Service à la clientèle (appréciation moyenne)

Les principaux facteurs de difficulté ou d’échec de l’activité de formation sur le service à la clientèle tiennent à son inadéquation avec la réalité vécue par les employés avec la clientèle du Magasin Tendances-Mode.

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Pour cette partie de l’analyse, les variables 21, 22, 23 et 24 (Guide d’entretien, Section 5, L’accès des employés à la formation) sont analysées.

La formation sur le service à la clientèle issue de la traduction d’un ouvrage américain et son inadéquation avec la réalité vécue au Magasin Tendances-Mode

« J’ai eu des choses que j’ai regardées que j’ai même refusé de vouloir changer. Si on pourrait parler du service à la clientèle. (…) Parce que des fois, il y a des clients des fois, on n’a pas les mêmes affinités ensemble. Comme on dit, ça ne clique pas. Il faut faire attention à ça et à ce moment- là être capable. Moi, je dirais dans une situation comme ça, si je suis seul, essayer de répondre du mieux que je peux à ce client-là ou si je ne peux pas, je te laisserais à un autre de mes collègues ou quelque chose comme ça. Moi, ce serait mon point de vue. Suite à la formation, on a eu d’autres dépliants qu’on a eu ici dont madame Letendre, elle a apporté ici. Ils rentraient un peu en conflit avec ce que je pense de la vente. Moi personnellement, je l’ai lu et justement ça ne me convient pas ».

Extrait d’entretien, Employé – Magasin Tendances-Mode

Dans un cas de figure, l’expérience professionnelle de l’employé allait à contre-courant des suggestions et savoir-faire présentés dans l’ouvrage sur le service à la clientèle donné aux employés du magasin à titre d’outil de formation. Les données recueillies font émerger l’inadéquation de deux réalités (celle présentée dans l’ouvrage de vulgarisation sur le service à la clientèle et celle vécue réellement par les employés).

« Moi, première des choses, j’ai quand même pas mal d’expérience là- dessus, mais j’essaie de servir le client de la même façon que je veux être répondu si je vais à l’extérieur, si je suis un client. J’essaie de me mettre dans la peau du client à ce moment-là dans le questionnaire qu’on a eu. Je trouvais que ça l’incitait au vendeur de répondre aux clients. Dans le sens que si je vais à un endroit, que je cherche quelque chose en particulier ou que je veux regarder, ça dépend qu’est-ce que je veux faire, si on va faire du magasinage ou pas. Si on va là pour quelque chose de précis, je demande au commis « avez-vous telle ou telle chose? ». Est-ce que vous connaissez le produit? Moi, je vais réagir comme ça. Si j’ai un client qui rentre dans le magasin et il veut regarder, je lui dis bonjour, puis je vais lui parler quelques mots. Je vous laisse regarder si il y a quelque chose qui vous intéresse, je suis ici à côté. Moi, je vais fonctionner comme ça. Mais dans le livre qu’on avait, c’est que moi, je trouvais qu’il insistait trop. Il fallait poser des questions fermées et des questions non fermées. En voulant dire « Est-ce que je peux vous aider à trouver quelque chose pour vous aujourd’hui? Moi, je trouve que c’est des phrases qui ne me conviennent pas. J’aime mieux dire aux clients parce qu’on me reprochait si on peut dire. Moi, la façon, je vais demander aux clients. Est-ce que je peux vous aider? Ça c’est une question fermée qu’on ne doit pas poser en principe. C’est ça qu’il marquait dans leur formation. Moi, je ne suis pas d’accord avec ce principe-là. Quelqu’un vient au magasin, il veut regarder. Il veut regarder s’il veut acheter. Il veut une information. Je vais faire mon possible pour lui répondre. Si je ne connais pas toute la réponse, je vais lui dire aussi, je ne monte pas de bateau. Si ça fait bien, si ça ne fait pas bien, ça ne fait pas bien. Moi je travaille comme ça ».

Extrait d’entretien, Employé – Magasin Tendances-Mode

La difficulté avait sa source dans l’incompatibilité des façons de faire entre ce préconisait la traduction de l'ouvrage proposé par le commerce et le savoir-faire de l’employé reposant sur une longue expérience de travail et une expérience de formation antérieure.

« La seule chose que j’aimais pas, je n’étais pas prêt à embarquer dans ce système-là. En plus, comme je disais, j’avais déjà un peu révisé la façon de faire à la clientèle en ayant été à une autre formation et là, on arrivait avec d’autres choses. J’ai un peu mal réagi personnellement. C’est sûr que j’ai réagi un peu mal à cette situation-là parce que je trouvais un peu qu’elle l’imposait au début. Moi, je n’aimais pas cette approche-là au début. À un moment donné, j’ai rencontré madame Morissette et on a dit O.K., moi ça ne me convient pas de cette façon. Ça n’a pas été plus que ça. Moi, dans le fond, le but c’est pas mauvais de lire des choses en général. C’est toujours de lire des choses sur … pour avoir de l’information. Mais en ce qui concerne l’approche à la clientèle, je pense qu’on lit et on prend qu’est-ce qu’on pense qui est bon et comment on est bien dans sa peau par rapport à qu’est-ce qu’on peut répondre aux clients ».

Extrait d’entretien, Employé – Magasin Tendances-Mode

Dans un autre cas de figure, l’inadéquation de deux réalités ressort de nouveau, mais cette fois-ci c’est la traduction de l’ouvrage sur le service à la clientèle qui est directement concerné. Le fait que dans l’ouvrage, le mode de faire proposé concerne la réalité américaine (le service à une clientèle américaine) et non québécoise n’était pas sans conséquence..

« C’était moyen. (…) C’était traduit de l’anglais. C’est un Américain qui avait écrit ce genre de choses-là et l’approche est différente : l’approche américaine et l’approche québécoise. Dans le fond, quand tu vas vers la clientèle… Moi personnellement, et ils étaient plusieurs aussi, il faut garder un certain naturel. Si on commence à avoir des phrases toutes faites, on n’est pas à l’aise et en étant mal à l’aise, on rend le client mal à l’aise aussi. Alors, la chimie se fait moins bien. Eux autres, une phrase d’accueil était « Comment puis-je vous aider à trouver quelque chose aujourd’hui? Un, c’est trop long. Deux, ça ne fait pas naturel et ça fait compliqué. Le client te regarde en voulant dire « on l’a essayé, on l’a expérimenté ». Il te fait une drôle de face en voulant dire qu’est-ce qui se passe aujourd’hui. En anglais, ça se disait bien, mais en français, c’est sûr qu’il y a des choses là-dedans que c’était bon parce que … Qu’est-ce que je pourrais donner comme exemple? Bon, de déterminer exactement c’est quoi que le client cherche. Comme moi, dans le manteau, il veut avoir un manteau long ou court parce qu’il y a des clients des fois qui ne sont pas très expressifs. Ils veulent se faire aider. Alors, il faut poser beaucoup de questions et essayer de déterminer c’est quoi qu’ils recherchent. Dans le texte, c’est ça. Il y a des choses, ça n’a pas été négatif, mais ça n’a pas été exemplaire ».

Extrait d’entretien, Employé – Magasin Tendances-Mode

Tel que nous pouvons l’observer dans les extraits ci-dessus, la manière d’aborder le ou la client(e) dans cette traduction d’un ouvrage américain ne semblait pas appropriée aux façons de faire du Magasin Tendances-Mode. Adopter les gestes, les attitudes et les savoir-faire d’une autre culture n’allait pas de soi. Un sentiment d’étrangeté jaillissait au contact de la clientèle, ce qui explique le malaise des employés, selon les données recueillies.

Des techniques de vente inappropriées

« Pas une autre réalité, mais c’était apporté d’une façon différente. Comme par exemple (…) mettons tu mets un manteau. C’est sûr que la vente ne se finit pas là. Tu lui demandes « Est-ce que vous avez besoin de gants? Vous avez besoin de foulards? Vous avez besoin de? » C’est sûr qu’ils en parlaient dans le texte, mais j’ai quand même de l’expérience. Je suis habitué. Je le sais que la vente ne se finit pas là. Tu travailles dans la mode. Tu trouves une jupe à la cliente et elle a besoin d’une jupe, alors tu vas lui offrir d’autres choses. Là, j’ai un chandail, qui pourrait aller avec ça pour compléter, pour essayer de vendre plus ».

Extrait d’entretien, Employé – Magasin Tendances-Mode

Les différents extraits présentés ci-dessus sont donc très révélateurs des difficultés rencontrées par les employés en utilisant une approche qui semble s’éloigner des façons de faire habituelles. En considérant leur expérience de travail et leur savoir-faire, cela semble plus bénéfique pour un meilleur service à la clientèle. Ces données font ressortir certaines limites des formations, qui donnent parfois un résultat contraire à celui recherché à l’origine. Dans ce cas-ci, loin d’améliorer leur savoir-faire, la connaissance de nouvelles techniques de vente américaines semble au contraire inappropriée, car elle ne correspond pas à la réalité du travail vécue par les employés au Magasin Tendances- Mode. Ces techniques de vente ne contribuent pas à améliorer leurs connaissances des méthodes de travail plus appropriées à leur métier exercé, en l’occurrence celles concernant le service à la clientèle.

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