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Selon la tradition de l’Église, sanctionnée par le droit canon, le chemin menant le séminariste au sacerdoce était divisé en plusieurs étapes : la tonsure, quatre « ordres mineurs », trois « ordres majeurs » (le sous-diaconat, le diaconat et le sacerdoce)401. Wladyslaw Kornilowicz rentra en Pologne pour chacune de ces cérémonies. Il reçut la tonsure et les « ordres mineurs » lors d’une même célébration, le 2 avril 1907, un mardi de Pâques, à l’Église de la Sainte-Croix à Varsovie, des mains de l’évêque Kazimierz Ruszkiewicz. Puis il reçut le sous-diaconat et le diaconat les 1er et 2 avril 1911, de l’évêque Anatol Nowak, lors d’une célébration au séminaire de Cracovie. Attaché à la liturgie bénédictine, Kornilowicz désirait être ordonné prêtre à Beuron, ce qui était d’ailleurs prévu pour le mois de septembre 1911402, mais l’ordination fut finalement fixée, pour des raisons que l’on ignore, au temps de Pâques 1912, en Pologne. Pour se préparer à cette célébration, Kornilowicz passa une longue période, deux semaines, de recueillement au monastère bénédictin de Beuron, avant de regagner la Pologne403.

Présidée par Mgr Adam Sapieha404, évêque de Cracovie, l’ordination sacerdotale de Wladyslaw Kornilowicz eut lieu le Samedi Saint 6 avril 1912, selon les coutumes de

400 Sprawozdanie z dzialalnosci Katol. Stow. Polonia we Fryburgu – 1936/37 (Procès-verbal de l’activité de

l’Association Estudiantine Polonia (par Hipolit LEGOWICZ), AHP POFR.2/34A–36. Voir aussi : Lettre (de remerciement) de Kornilowicz, adressée à l’Association, Laski, 21 avril 1937, AHP POFR–12/7.

401 Sur les coutumes de l’Église catholique, cf. Joseph-André J

UNGMANN, La Liturgie de l’Église romaine, Salvator – Casterman, Mulhouse–Paris–Tournai 1957, p. 215.

402 Lettre d’Anna Metzger à Max Metzger du 12 mai 1911, AM/M 2.2. 403

Il en est question dans la correspondance de Wladyslaw Kornilowicz à Max Metzger écrite depuis Beuron : Carte postale du 20 mars 1912, et aussi Lettre du 1er avril 1912, AM/M 10.11.9.

404 Mgr Adam Stefan Sapieha (1867–1951), nommé évêque de Cracovie (1911), consacré évêque (3 mars 1912),

archevêque métropolite (1925), cardinal (1946), considéré comme « le grand héros de l’Église et de la Nation » : « Adam Stefan Sapieha (1867–1951) », Polscy Kardynalowie, Krzysztof Rafal PROKOP, Wyd. WAM (réd.), Krakow 2001, pp. 251–264 ; Ksiega Sapiezynska, t. 1–2, J. WOLNY (réd.), Krakow 1982–1986 ; « Sapieha Adam Stefan herbu Lis (1867–1951), metropolita krakowski, kardynal » (biogr. T. BIEDRON), Slownik biograficzny

katolicyzmu spolecznego w Polsce, t. 3, Lublin 1995, pp. 48–51 ; B. PRZYBYSZEWSKI, Zarys dziejow diecezji

krakowskiej (do roku 1994), Krakow 2000, pp. 193–204 ; « Sapieha Adam Stefan (1867–1951), arcybiskup

- Page 73 / 721 - l’époque, dans la chapelle du Séminaire de Cracovie405

. Le nouveau prêtre célébra sa première messe le lendemain, le dimanche de Pâques, à la Chapelle de l’Institut de Kuznice, de Jadwiga Zamoyska. La Chronique de l’Institut de Kuznice annonça sa joie d’accueillir ce jeune homme, dont les liens avec ce lieu étaient si forts406. Les parents de Kornilowicz étaient déjà morts, mais « la petite chapelle était remplie de montagnards qui étaient venus nombreux » pour entourer ce jeune dont la famille jouissait d’une grande estime à Zakopane407. Aux côtés de la famille, de nombreux amis et invités étaient venus entourer le jeune homme pour sa messe de prémices. Parmi eux, l’on comptait Jadwiga Zamoyska, la Comtesse Sapieha, la mère de l’évêque de Cracovie, et le Frère Albert Chmielowski408. C’est

l’abbé Gralewski, ancien préfet de l’école de Kornilowicz qui prêcha409

, souhaitant au nouveau prêtre, comme le releva la Chronique, « de l’amour, non pas celui qui brûle et écrase, non pas celui, héroïque, qui impressionne, mais un amour quotidien, qui permette à toute personne, grande ou petite de s’approcher de lui avec confiance »410

. À la fin de la messe, l’assemblée entonna le « Dieu sauve la Pologne » en « un moment majestueux », comme le releva la Chronique, ce qui marqua la fin de cette belle cérémonie. Dans un poème écrit pour son ami à cette occasion, Wladyslaw Tatarkiewicz écrivait, non sans l’emphase dû au moment, que Kornilowicz en tant que prêtre avait « atteint le point éminent de sa vocation » et relevait l’amitié de ceux qui « restent dans le monde » et leur espoir d’être soutenus par celui qui se mettait « au service de Dieu » 411.

Une fois les célébrations terminées, le jeune abbé retourna à Fribourg, pour achever ses études et il se lança dans les recherches liées à sa thèse de doctorat. Malheureusement il ne put achever sa thèse pour laquelle il effectua un travail assidu. Le contexte politique créé par la guerre de 1914 en fut la cause. Le début de la guerre surprit Kornilowicz pendant ses vacances d’été 1914 qu’il passait à Zakopane. En tant que sujet russe sur le territoire de l’Autriche-Hongrie, Kornilowicz ne put retourner en Suisse pour continuer ses études. Mais il ne put non plus se rendre dans sa ville d’origine, Varsovie. Dans ces circonstances, Kornilowicz décida d’entamer un ministère à Kuznice. Il y fut nommé aumônier de l’Institut de Kuznice de Jadwiga Zamoyska, ministère qu’il exerça entre 1914 et 1916412.

Sa vie d’aumônier fut fort active : offices, temps de présence au confessionnal, cours de catéchisme et retraites pour les jeunes filles de l’école, cours de chant grégorien qui « introduisent les élèves de l’Institut à l’amour de la liturgie413 », et aussi accompagnement du scoutisme, que Kornilowicz organisa à Kuznice. Cette première expérience pastorale très riche lui permit aussi de tisser des liens affectifs avec l’œuvre de Zamoyska. Et ses contacts avec elle furent durables. Lors de ses ministères successifs à Varsovie, à Lublin ou à Wloclawek, il revenait souvent à Kuznice, pour y assurer l’aumônerie ou prêcher durant des

405

Registre des ordinations de la Curie Métropolitaine de Cracovie, Testimonium Ordinationis (copie) du 30 août 1976, Kuria Metropolitalna w Krakowie, odpis du 10 février 1967 : Dokumenty osobiste, AWK/011.

406 « Z Kroniki Zakladu w Kuznicach » (Chronique de l’Institut à Kuznice), 7 avril 1912, extrait du journal

Pismo Kuzniczanek (publié en manuscrit), AWK/221, voir aussi : Pismo Kuzniczanek, R. IV, n° 1, février 1924,

AWK/221.

407 Abbé Tadeusz K

RUSZYNSKI, Réponse au questionnaire du 3 mars 1958, AWK/42/3. Voir, aussi : Jacek WORONIECKI o.p., Lettre du 29 septembre 1946, op. cit., AWK/42/7.

408

Julia ZALESKA, Souvenir du 13 octobre 1948, AWK/42/8. Souvenirs de Kazimiera PIASECKA liés à l’Institut de Kuznice, Kuznice 28 octobre 1977, AWK/42/5.

409 Souvenirs de Kazimiera P

IASECKA, op. cit.

410 « Z Kroniki Zakladu w Kuznicach » (Chronique de l’Institut à Kuznice), 7 avril 1912, op. cit. 411 Un poème de T

ATARKIEWICZ, Pozegnanie (Adieu), daté du 7 avril, Pâques 1912, Wladyslaw Tatarkiewicz, attaché au témoignage du 27 février 1966, AWK /42/7. À défaut de leur correspondance, qui a brûlé pendant l’Insurrection de Varsovie de 1944, c’est le seul manuscrit conservé de cette période.

412 Registre des aumôniers de l’Institut de Kuznice dans les années 1912–1915 ; 1917–19, 1921–39 : Documents

– Kuznice imprimés et manuscrits, AWK/221.

413 Kazimiera P

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retraites. À Varsovie, il entretint également des liens avec l’École économique, fondée dans le prolongement de l’Institut de Kuznice, rue Elektoralna 47, où il retrouva les anciennes « élèves de Kuznice » dans le cadre de retraites ou de la confession414. Et il apparait bien que l’expérience pastorale acquise à Kuznice et surtout la personnalité et l’œuvre de cette grande figure que fut Jadwiga Zamoyska resta l’une des sources d’inspiration du futur apostolat de Kornilowicz. Le message que le jeune prêtre allait en retirer pour son avenir pastoral explique certainement, au-delà de la rhétorique due aux circonstances, le texte de l’allocution qu’il prononça, bien des années plus tard, à l’assemblée de Kuzniczanek, en juin 1931 à Poznan, à l’occasion du centenaire de la naissance de Jadwiga Zamoyska :

Son but premier n’était pas de créer une organisation enfermée dans un programme ; elle ne fixait aucune frontière à son œuvre. Son désir était de faire renaître toute la Pologne par la renaissance des âmes polonaises, d’insuffler l’esprit chrétien dans toute la société. Elle avait compris que c’est beaucoup plus difficile que de fonder une organisation415

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