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épistémologique et méthodologie adoptée

Section 3 : les méthodes d’analyse de nos données

3.2 L’approche processuelle comme méthode d’analyse qualitative

Notre recherche s’intéresse à la séquence d’événements décrivant comment le BM se développe et change à travers le temps, afin d’en saisir le processus d’évolution. Les recherches processuelles prennent des formes variées (Langley, 1999) mais elles peuvent être regroupées en deux grandes familles selon la manière dont le chercheur appréhende l’objet de recherche dans le temps (Thiétart, 2014 p.410). Selon les considérations ontologiques du chercheur, deux visions s’opposent : celle qui perçoit l’organisation comme une chose, une substance, un projet susceptible de prendre différentes formes et celle qui la considère comme un ensemble de processus, de flux qui se construisent et se reconstruisent à travers le temps (Langley et al., 2013). Dans le premier cas, le chercheur vise à comprendre les modifications d’un même objet dans le temps. Dans le second cas, le chercheur vise à comprendre l’émergence d’un phénomène dans le temps. La présente recherche a pour objectif de comprendre les modifications du BM des startups sociales dans le temps, donc elle s’inscrit dans le premier cas. Ainsi, nous fondons nos analyses sur le postulat que le BM peut prendre différentes modalités…. Le tableau 20 relate les deux visions du phénomène selon l’analyse de la variance ou de processus.

Notre étude est en phase avec l’approche processuelle (Approche B) qui se définit comme un processus relatant une séquence d’événements, d’étapes ou de cycles dans le développement du phénomène. Dans cette approche, le phénomène est considéré au travers d’une succession d’états dont il convient de comprendre l’enchainement et les mécanismes d’évolution (Thiétart, 2014). La question « comment » les choses évoluent au cours du temps est primordiale (Van de Ven et Huber, 1990). Ainsi, nous avons analysé l’évolution du BM des startups sociales relatée par des séquences d’événements mais également en étudiant comment l’évolution du BM découle d'expériences antérieures, d'interactions et d'anticipations. L’analyse s’est déroulée en plusieurs étapes :

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Tableau 20 : typologie des approches pour étudier les évolutions (ou la non- évolution) d’un phénomène

Le phénomène vu comme un état Le phénomène vu comme un flux

Analyse de la variance

Approche A : une analyse causale des variables indépendantes expliquant le changement d’un phénomène et cherchant à déterminer les causes de ce changement

Approche D : un processus analysé par des méthodes quantitatives

s’appuyant sur des séries

d’événements.

Analyse du

processus

Approche B : un processus relatant une séquence d’événements, d’étapes ou de cycles dans le développement du phénomène.

Approche C : Un processus

« d’organizing » relatant une

construction sociale du

phénomène (émergences des

actions et des activités).

Source : Thiétart (2014 p.390)

• La reconstruction temporelle et décomposition

« La première étape de toute analyse longitudinale processuelle est de réaliser une monographie du processus étudié. Elle consiste à écrire son histoire sous forme narrative en la décrivant de façon détaillée. Cette monographie permet de reconstruire l’enchaînement des événements et de comprendre où se trouvent les « trous noirs » dans la compréhension du déroulé de ces événements », (Thiétart, 2014 p.408). Pour ce faire, nous avons présenté chaque cas de façon détaillée dans le chapitre 6.

Nous avons adopté la même structure de rédaction pour les trois cas afin de faciliter les comparaisons inter-cas par la suite. Nous avons rédigé chaque cas autour des thèmes suivants : contexte d’émergence, le problème social/ environnemental et la solution proposée, le BMS, les différentes évolutions à travers les évènements marquants et les perspectives. Dans cette description historique, nous avons donné une place à la dynamique temporelle des évènements.

196 • La décomposition analytique des événements

« Le processus, reconstitué à partir de la monographie, est ensuite décomposé pour en identifier les caractéristiques : par exemple, les acteurs impliqués, les événements, les variables contextuelles, etc. Si le chercheur se fonde sur une grille de recueil et d’analyse des données préconçue, l’objectif est de suivre l’évolution des catégories conceptuelles au cours du temps » (Thiétart, 2014 p.409). Dans le cas présent, nous avons utilisé notre modèle de représentation du BMS, pour suivre l’évolution de ses quatre composantes. Pour ce faire, Miles et Huberman (2003) proposent d’utiliser une matrice chronologique où le chercheur dispose en colonne les périodes du processus (période 1 à n) et en ligne les catégories de l’analyse en cohérence avec le cadre théorique adopté.

• La reconstruction des phases

« Une des difficultés majeures est alors de déterminer comment décomposer le temps et donc comment construire les périodes en question. Soit le chercheur se fonde sur une ligne du temps préconçue (par exemple une colonne pour chaque mois, chaque semaine, etc.), soit il se fonde sur des moments de rupture dans le processus étudié. La première option peut d’ailleurs s’avérer nécessaire pour passer à la seconde. Dès lors, les phases ne correspondent pas nécessairement à une périodicité récurrente mais à des ensembles relativement homogènes où le phénomène à l’étude prend une forme particulière » (Thiétart, 2014 p.409). Dans cette recherche, nous avons analysé les cas depuis leur création à nos jours. Nous avons considéré des périodes variables dans notre découpage selon les cas et les séquences d’événements qui ont influencé leur BM.

• La mise en évidence de cycles

« La décomposition temporelle peut aussi mettre l’accent sur la récursivité de certains éléments. Le temps n’est alors plus conçu comme linéaire mais comme un cycle où les composantes s’influencent mutuellement dans le temps pour à chaque fois revenir à leur point de départ », (Thiétart, 2014 p.409). « Dans cette perspective, la recherche longitudinale vise à comprendre comment et pourquoi le phénomène étudié prend différentes formes au cours du temps. L’analyse doit ainsi permettre de relier les modalités du phénomène étudié avec des composantes du contexte dans lequel se déroule le phénomène. Le couplage d’un design longitudinal avec une approche comparative (Barley, 1990) permet d’appréhender dans quelles

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mesures certains éléments contextuels ont une influence sur le phénomène étudié », (Thiétart, 2014 p.411).