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Synthèse du chapitre

Section 3 : Construction théorique du business model social

3.1.3 La dimension sociale dans le BM

Des travaux proposent aujourd’hui des BM intégrateurs pour inclure la dimension sociale (Dardour, 2012 ; Lee, 2016). Dardour (2012) propose un modèle économique intégrateur où le business model est construit autour de trois composantes explicites : la proposition de valeur, l’architecture de valeur et l’expérimentation sociale ainsi qu’une composante implicite qui renvoie à la recherche de la transformation sociale. L’auteur identifie une quatrième composante implicite qui est la contribution de l’entreprise sociale au processus de transformation sociale. Il s’agit de la dimension politique qui se manifeste par la capacité de l’entreprise sociale à proposer à ses membres des espaces publics d’expression mais aussi de rompre avec des pratiques jugées non satisfaisantes (exclusion économique et sociale, destruction de l’environnement naturel, etc.).

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Par ailleurs, Lee (2016) dans son modèle à six composantes étudient l’entreprise sociale PVC en essayant de montrer sa particularité pour chacune des six composantes. Mais l’auteur ne propose pas une composante à part entière pour caractériser la dimension sociale. De son côté, Boncler et al. (2012) mobilisent le modèle GRP (génération, rémunération, partage de la valeur), pour interpréter les spécificités et la diversité de deux projets associatifs mais soulignent néanmoins quelques difficultés d’interprétation. Les auteurs analysent l’ensemble des aspects valorisés par les acteurs tout en les réinterprétant en termes d’entrepreneuriat social pour comprendre la manière dont ces organisations relient et articulent leurs projets sociaux, leurs montages financiers et les parties prenantes impliquées. Mais, on constate que les auteurs arrivent à disséminer les éléments se rapportant à la dimension sociale dans la composante G (génération), la composante R comme la dimension économique et la composante P comme une dimension politique. Ces auteurs concluent que « le BM offre simplement un cadre permettant de mieux penser et de mieux communiquer l’articulation des dimensions sociales, économiques et politiques du développement des associations » (Boncler et al., 2012 p.83).

De même, Maucuer (2013) propose une conception élargie du « modèle RCOV » en incorporant la dimension « équation de profits » qui devient à l’occasion le « modèle RCOV-EPs » pour étudier le cas de la multinationale Suez-environnement. L’« équation de profits » agrège les éléments inférieurs du modèle RCOV (volume structure de couts/revenus et marge) qui se rapportent à la performance économique. Mais l’auteur intègre une dimension sociale dans son analyse de cette composante en évoquant « un phénomène de redistribution du profit, aux sens

économique et social du terme, potentiellement générateur de nouvelles ressources immatérielles » (Maucuer, 2013 p.71). Quant à Yunus et al. (2010), ils vont plus loin en

proposant le concept de « social business model » avec une composante spécifique aux entreprises sociales, l’équation de profit social. Ces auteurs proposent un modèle à quatre composantes : (1) la proposition de valeur (client et produit/service) ; (2) la constellation de valeur (chaîne de valeur interne et chaîne de valeur externe) ; (3) l’équation de profit économique (revenu ; structure de couts ; capital employé) ; (4) l’équation de profit social (profit social ; profit environnemental, etc.) qui fait référence à la dimension sociale. A la suite de Yunus et al. (2010), Michelini et Fiorentino (2012) soulignant les lacunes du cadre théorique des BM traditionnels pour l’analyse des entreprises sociales, ont proposé un nouveau modèle de BM social et inclusive inspiré du cadre théorique d'Osterwalder et al. (2005) et de Yunus et

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al. (2010). Les auteurs proposent un modèle de BM avec sept composantes comprenant 13 éléments :

• L’offre, qui se caractérise par la proposition de valeur qui est l'avantage offert par l'entreprise par le biais de produits et de services ;

• Le marché, qui comprend le segment de marché, les segments de clients visés ; la relation client qui décrit la stratégie de communication et le type de connexion que l’entreprise établit avec ses clients; et la distribution, qui décrit les différents canaux utilisés par une entreprise pour atteindre ses clients;

• La gouvernance, qui concerne le modèle de gouvernance de l'entreprise et comprend l'ensemble des processus ou des lois qui gèrent la relation entre les parties prenantes ainsi que les objectifs pour lesquels l’entreprise est gouvernée ;

• L'écosystème, qui comprend la chaîne de valeur, qui se réfère à la chaîne d'activités pour une entreprise opérant dans une industrie spécifique et les compétences qui décrivent la gamme spécifique de compétence (compétences, connaissances ou capacité) d'une entreprise et le réseau de partenaires, qui se réfère au réseau d'accords de coopération avec d'autres organisations nécessaires à l'offre et à la distribution efficaces de la valeur ; • Le surplus, qui décrit comment l'entreprise gère l'excédent des revenus. (Y a-t-il des

dividendes pour les actionnaires ?) ;

• L'équation du profit économique, qui comprend la structure des coûts et le modèle des revenus, etc. ;

• L'équation de la valeur sociale, qui décrit la façon dont une entreprise génère un avantage social (en termes de risques et d'avantages).

La figure suivante représente le business model social et inclusive proposé par ces auteurs.

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Source : Michelini et Fiorentino (2012)

En résumé, on constate la diversité des travaux portant le BM des organisations sociales. Certains font état de la diversité des modèles économiques résultant des différentes articulations entre les activités sociales et les activités économiques, entre la création de valeur sociale et celle de la valeur économique (Elkington et Hartigan, 2008 ; Alter, 2006 ; Dees et Anderson, 2006). D’autres se contentent d’adapter des modèles (Maucuer, 2013 ; Boncler et al., 2012) ou de proposer un BM intégrateur (Dardour, 2012). A notre connaissance, seuls, Yunus et al. (2010) et Michelini et Fiorentino (2012) font apparaître une composante spécifique aux entreprises sociales, équation de profit social qui renvoie aux profits sociaux et environnementaux générés. Cette marge sociale/environnementale n’est rien d’autre que la valeur sociale créée. Cette valeur sociale est identifiée dans l’équation de profits proposée RCOV-EPs. Toutefois, la création de valeur sociale est considérée comme une caractéristique de toutes les formes d’entrepreneuriat pratiquement (Dohrmann et al., 2015). Par exemple, les entreprises commerciales bénéficient à la société sous la forme de l'utilisation efficace des ressources et de modèles d'affaires durables y compris l'emploi à long terme, (Austin et al., 2006). C’est pourquoi, nous considérons que la mission qui caractérise la raison d’être de l’entreprise doit être une composante centrale du BM notamment dans le cadre des entreprises sociales.

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