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L’étendue de la loi sur les « grandes lustrations du 4 octobre 1991

Section I. La lustration tchécoslovaque à l’origine du phénomène

A. Les premières lois de lustration : gestion législative du passé lié au fonctionnement des services de sécurité de l’Etat

1. L’étendue de la loi sur les « grandes lustrations du 4 octobre 1991

90. Le contexte politique d’adoption de la loi relative aux grandes lustrations a influencé son contenu. Comme l’a souligné Carmen Gonzalez Enriquez, elle a été adoptée par le Parlement « peu de temps après le coup d’Etat manqué d’août 1991 en URSS et pour cette

raison son texte fut durci en réaction à cet événement. Il faut se rappeler que les communistes tchécoslovaques étaient beaucoup plus proches des Russes que les communistes polonais ou hongrois et que, jusqu’au dernier moment, ils espérèrent que Gorbatchev serait chassé du sommet du PCUS et remplacé par une figure plus orthodoxe25 ».

91. Le premier projet de la loi de lustration a été élaboré par Pavel Rychetsky (membre du Forum civique). Ce projet était moins sévère que la loi finale puisqu’il interdisait l’accès à certains postes dans l’administration étatique uniquement aux personnes ayant commis des violations des droits de l’Homme au cours de la période communiste. Ce projet a fait l’objet de critiques virulentes des « radicaux du Forum civique qui ont rejoint les rangs de l’O.D.S.

20

HUBENY-BELSKY Annabelle, Le changement de régime politique en République Tchèque (1989-2000) : la place du droit constitutionnel, L.G.D.J., 2003, p. 173.

21 Milosz Zeman a exercé la fonction du Premier Ministre de 1998 à 2002.

22 HADJIISKY Magdalena, op. cit., p. 103.

23

Lors des élections à la Chambre des députés qui ont eu lieu en 2010, le KSČM a obtenu 26 sièges, son score le plus élevé date des élections de 2002 (42 sièges). Les résultats des élections en République tchèque sont disponibles sur le site : http://www.europe-politique.eu/elections-republique-tcheque.htm (31/09/2010).

24 En 2005, soixante des cent quatre vingt députés présents au sein de la Chambre des députés (en tchèque : la Poslanecká sněmovna), qui comprend 200 membres, ont voté en faveur de la suppression des lois de lustration.

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(Partie démocratique civique), l’Alliance démocratique civique et du Parti chrétien démocrate, formant l’aile droite du Parlement. En effet, ils ont considéré ce projet comme inefficace et inapplicable (…). Ce mécontentement s’est manifesté par le dépôt de 99 amendements (…) dont 40 furent adoptés, provoquant un durcissement de la loi26

».

92. La loi sur les grandes lustrations privilégie la procédure administrative au détriment de la procédure judiciaire. Les commentateurs de la lustration tchécoslovaque, soulignaient que ce choix était justifié par un souci « d’efficacité », la procédure administrative s’avérant plus courte et moins hasardeuse que la procédure judiciaire. La mise en œuvre de cette dernière risquait de provoquer la violation d’une règle fondamentale de droit à savoir la condamnation d’une personne de façon rétroactive pour des faits qui n’étaient pas incriminés lorsqu’ils ont été commis. Un autre argument favorable à la procédure administrative était lié à un éventuel manque de preuves contenues dans les dossiers de la StB en raison de leur destruction. La procédure administrative, au centre de laquelle le législateur tchécoslovaque a placé le Ministère des affaires intérieures, a permis de mettre en place une vérification plus uniforme que d’éventuels procès devant les tribunaux visant l’épuration au cas par cas. Comme l’a souligné Magdalena Hadjiisky, « les promoteurs de la procédure administrative faisaient

valoir que la problématique principale était non pas la ré-légitimation de l’Etat, mais la défense de la démocratie27 ».

93. Les dispositions de la loi sur les grandes lustrations organise le processus de lustration en trois étapes : 1) la définition des postes concernés par la vérification ; 2) la procédure et les modalités de cette vérification et 3) la constitution d’une commission indépendante pour contrôler l’ensemble du processus28

.

26 ANDRE Jérémy, « La lustration en République tchèque, Hongrie et Albanie : de sa « nécessaire » émergence à son application souvent incertaine », Revue de Justice Constitutionnelle Est-Européenne, n° 2, 2004, p. 161. Voir aussi : KUNC Jiri, « Loi sur épuration : tragédie ou triomphe », La Nouvelle Alternative, n° 24, 1991, pp. 54-57.

27 HADJIISKY Magdalena, op. cit., p. 102.

28

D’après MASSIAS Jean-Pierre (dir.), Droit constitutionnel des Etats d’Europe de l’Est, 1ère édition, Paris, PUF, 1999, p. 51.

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a) Les postes concernés par les conditions préalables supplémentaires : première étape de la lustration

94. La loi établit un très large catalogue des postes appartenant à l’appareil de l’Etat29

, il s’agit des postes à pourvoir à la suite d’une procédure élective, par la voie de nomination ou de désignation. La personne se portant candidat à ces postes est soumise à la vérification. Ainsi, sont visés les postes dans les domaines suivants :

- L’administration publique centrale : les organes de l’administration étatique de la République fédérale tchèque et slovaque, de la République tchèque et de la République slovaque30 ; la Chancellerie présidentielle ; le Bureau de l’Assemblée fédérale, les Bureaux des Conseils nationaux tchèque et slovaque ; l’Office du gouvernement fédéral, l’Office du gouvernement dela République tchèque et l’Office du gouvernement de la République slovaque31.

- L’Armée tchécoslovaque et le Ministère fédéral de la défense (les postes les plus élevés au sein de l’Armée, d’un rang de colonel et général ainsi que des fonctions des attachés militaires32).

- La justice : les Secrétariats des Cours constitutionnelles au niveau fédéral et des Républiques ; les Secrétariats de la Cour suprême au niveau fédéral et des Républiques ; la Haute cour administrative33 ; les fonctions de juge, assesseur, procureur, notaire de l’Etat, médiateur de l’Etat ; les fonctions accordées aux personnes en formation en vue d’exercer les fonctions de juge, procureur, notaire de l’Etat et médiateur de l’Etat34

.

- Les offices dans les unités des collectivités territoriales (postes de responsable des collectivités territoriales et ceux des fonctionnaires de rang supérieur35).

- Les médias : la télévision, la radio et l’Agence de presse tchécoslovaques, tchèques et slovaques36.

29 § 1, al. 1, lettres a)-g), al. 2, 3, 4 et 5 de la loi. Après la dissolution de l’Etat fédéral, ce catalogue s’applique uniquement aux institutions étatiques de la République tchèque.

30

§ 1, al.1, lettre a).

31 § 1, al.1, lettre d).

32 § 1, al. 1, lettre b et al. 2.

33 § 1, al. 1, lettre d).

34

§ 1, al. 4.

53 - L’économie nationale37 : les entreprises d’Etat ; les organisations publiques ; les entreprises financières au sein desquelles l’Etat était un actionnaire majoritaire ; les fonds de commerce étranger ; les Chemins de fer de l’Etat tchécoslovaque ; les fonds de l’Etat, institutions monétaires de l’Etat, Banque nationale de la République tchécoslovaque ; certains types d’activité économique exigeant l’obtention d’une licence 38

(en relation avec l’armement, le nucléaire et l’équipement médical39

).

- L’enseignement supérieur et la recherche : le Présidium de l’Académie tchèque des sciences et le Présidium de l’Académie slovaque des sciences40

; les fonctions électives au sein des universités, approuvées par le Sénat de l’université et la faculté41

.

- Le service de renseignement fédéral, les forces de police fédérale et les gardes du Château42.

95. Le législateur tchécoslovaque n’a pas introduit dans ce catalogue les fonctions de député à l’Assemblée fédérale et aux Conseils nationaux tchèque et slovaque ni celles de sénateur43 contrairement à l’approche adoptée notamment par le législateur polonais (cf. infra, 347). La lustration concerne uniquement les employés de l’Etat, et non les représentants du peuple. Ce choix peut être justifié par la légitimité démocratique qu’apporte le suffrage universel direct. Les électeurs décident si la personne compromise dans le passé possède ou non la légitimité pour être député ou sénateur.

96. Comme l’indique son intitulé, la loi impose « certaines des conditions requises » devant être remplies par les candidats aux postes qu’elle énumère au § 1. La loi prévoit deux critères d’exclusion, le premier basé sur l’exercice de postes ou fonctions compromettants et le second sur le fait de collaboration. Le candidat à ces postes (la loi emploie l’expression le « citoyen ») en est exclu si, entre le 25 février 1948 au 17 novembre 1989, il a exercé des

36 § 1, al. 1, lettre e).

37 Il s’agissait des postes des dirigeants de ces entreprises ainsi que des cadres supérieurs et de leurs subordonnés directs (§ 1, al. 1, lettre f) et al. 3).

38

§ 1, al. 5.

39 Précision effectuée par HUBENY-BELSKY Annabelle, op. cit., p. 174.

40 § 1, al. 1, lettre d).

41 § 1, al. 3.

42

§ 1, al. 1, lettre c).

43 La loi constitutionnelle du Conseil national tchèque du 16 décembre 1992, portant Constitution de la République tchèque (No 1/1993 Sb.) énonce à l’article 15, al. 2 que « Le Parlement comprend deux chambres, la Chambre des députés et le Sénat », ils comptent respectivement deux cent députés et quatre-vingt-un sénateurs in LESAGE Michel, Constitutions d’Europe centrale, orientale et baltes, Paris, La documentation Française, 1995, p. 266.

54 postes ou fonctions au sein de la StB ou du parti communiste, s’il était collaborateur des services secrets ou s’il a suivi ses études universitaires dans des établissements soviétiques d’enseignement. Le législateur a également accordé à la loi sur les « grandes lustrations » un caractère décommunisant, puisqu’elle vise les anciens membres de l’appareil du PCT44

. Ainsi, sont exclus des postes énumérés au § 1 de la loi, les citoyens qui pendant la période en référence étaient :

- Officiers du Corps national de la sécurité engagés par la StB45 ;

- Enregistrés dans les dossiers de la StB en tant qu’agents, résidents, propriétaires de locaux de conspiration loués par les services secrets, informateurs, collaborateurs idéologiques de la StB46 ;

- Collaborateurs conscients47. La définition de collaboration a fait l’objet de nombreuses critiques, compte tenu de son étendu très large. A part des collaborateurs inscrits en tant que tels dans les dossiers de la StB, la loi a prévu une catégorie de collaborateurs conscients (volontaires), dénommée « catégorie C ». Il s’agissait des personnes enregistrées dans les dossiers de la StB comme « confident », « candidat à la collaboration secrète » ou « collaborateur secret ». Ce concept, très controversé et ayant de nombreux détracteurs, notamment en ce qui concerne l’application des dispositions de la loi à des « candidats à la

collaboration » a entraîné finalement la suppression des dispositions concernées. Environ

70.000 personnes ont été enregistrées par la StB en tant que « candidats à collaboration », 4.000 ont choisi la procédure de la lustration facultative. Jusqu’en novembre 1992, la commission spéciale n’a analysé que 600 cas, parmi lesquels quinze ont été qualifié de « collaborateurs conscients ». D’après Jaroslav Basta, membre de la commission spéciale en charge de mener les procédures de lustration, cette catégorie de collaborateurs ne devrait pas figurer dans la loi48 ;

44 En 1980, 14% des citoyens tchécoslovaque étaient membres du parti communiste, ce chiffre s’élevait à 20% en Roumanie, 18% en RDA, 13% en Bulgarie, 12,5% en Pologne et 10% en Hongrie selon SMOLAR Aleksander, op. cit., p. 165.

45

§ 2, al.1, lettre a.

46 § 2, al.1, lettre b.

47 § 2, al.1, lettre c) et al. 2.

48 BREN Paulina, « Lustration in the Czech and Slovak Republics. The Independent Appeals Commission » in KRITZ Neil (dir.), Transitional justice, How Emerging Democracies Recon with Former Regimes, Washington D.C., United States Institute of Peace Press, 1995, vol. II, Country Studies, pp. 556-557.

55 - Officiers de la Milice civique49 ;

- Secrétaires du Parti communiste tchécoslovaque ou slovaque à partir du niveau du comité de district, membres du présidium des comités de district, membres du Comité central du Parti communiste tchécoslovaque et du Parti communiste slovaque, membres du Comité central du PC, membres du Bureau exécutif travaillant en Bohème à l’exception de ceux ayant exercé ces fonctions pendant la période du 1er janvier 1968 au 5 mai 196950. Ainsi, comme l’a souligné Jiri Malenovsky, ancien juge à la Cour constitutionnelle tchèque, la loi tchécoslovaque a accordé une sorte de « pardon » aux cadres dirigeants du PCT qui ont exercé leur fonction exclusivement pendant le « Printemps de Prague51 » et qui ont été ensuite exclus du parti. De ce fait ils sont exemptés de la procédure de lustration52 ;

- Employés de l’appareil du parti communiste chargés de la mise en œuvre de la politique du corps national de sécurité53 ;

- Membres du Comité d’action du Front national après le 25 février 1948, de la commission de vérification après le 25 février 1948 et des commissions de vérification et de normalisation mises en place après l’écrasement du « Printemps de Prague » à savoir le 21 août 196854 ;

49 § 2, al. 1, lettre f).

50 § 2, al. 1, lettre d).

51

Le « Printemps de Prague » est considéré comme la « tentative de réforme la plus audacieuse venue de l’intérieur du système communiste vingt ans avant la perestroïka de M. Gorbatchev ». Alexander Dubcek (1921-1992), qui est devenu le Secrétaire général du PCT le 5 janvier 1968, était le personnage clé de cet événement. Ce processus de réforme a vu naître le « socialisme à visage humain ». A. Dubcek proposa notamment l’abolition de la censure, la liberté de la presse, la redéfinition du rôle du parti communiste, l’égalité des nations tchèque et slovaque au sein de l’Etat fédéral. Le « Printemps de Prague » a été brutalement écrasé par l’arrivée des forces du pacte de Varsovie dans la nuit du 20 au 21 août 1968 (cinq Etats du pacte sont intervenus, à savoir l’URSS, la Bulgarie, la Pologne, la Hongrie et la RDA, alors que la Roumanie et l’Albanie n’ont pas participé à l’opération). Au total 108 personnes ont perdu la vie, 500 ont été gravement blessées et des centaines d’autres légèrement blessées lors de l’occupation des troupes du pacte de Varsovie. En avril 1969, A. Dubcek est remplacé par Gustav Husak. Commença alors la période de normalisation (le retour à la normale ou à la norme communiste) qui durera jusqu’à la « Révolution de velours ». Le début de la normalisation coïncida avec des purges massives visant à débarrasser le PCT des membres non loyaux à la normalisation. Ainsi, leur passé fut l’objet de fouilles minutieuses. Au total plus de 300.000 membres du PCT ont été contraints de quitter ses rangs. Voir : COURTOIS Stéphane (dir.), op. cit., pp. 471-472, HUBENY-BELSKY Annabelle, op. cit., pp. 55-63, CASTELLAN Georges, Histoire des peuples d’Europe centrale, Domont, Librairie Arthème Fayard, 1994, pp. 464-465, le site de l’Institut d’études sur les régimes totalitaires est en partie consacré à cet événement : http://www.ustrcr.cz/en/project-1968-1969 (06/10/2011).

52 MALENOVSKY Jiri, « Les lois de lustration en Europe Centrale et Orientale : une « mission impossible » ? », RQDI, vol. 13, n° 1, 2000, p. 199.

53

§ 2, al. 1, lettres d et e).

56 - Etudiants à l’école du KGB à Moscou55 et dans d’autres établissements russes d’enseignement supérieur de ce type (notamment l’Université près le Ministère de l’intérieur de l’URSS, réservée aux officiers des services de sécurité publique, le Collège politique près le Ministère de l’intérieur de l’URSS) ainsi que les étudiants de troisième cycle ou personnes suivant les cours, au delà de trois mois dans ces établissements56.

b) La procédure et les modalités de la vérification : deuxième étape de la lustration

97. Le citoyen intéressé à occuper un poste est tenu de présenter à son employeur (organe compétent pour la désignation, la nomination ou l’élection du candidat) le certificat de lustration ainsi que l’affidavit57. La principale différence entre ces deux documents concerne leur auteur. Le premier est délivré par le Ministère des affaires intérieures (ci-après, le MAI) sur la base des documents disponibles dans les dossiers de la StB. Le second est une sorte de déclaration sur l’honneur. L’affidavit est établi par le citoyen lui-même, il y confirme qu’il n’exerçait pas de fonctions dirigeantes au sein du PCT58

et qu’il n’a pas suivi d’études dans les établissements universitaires soviétiques59.

98. La procédure de délivrance d’un certificat de lustration constitue une autre spécificité de la loi. Le Ministère fédéral des affaires intérieures est désigné comme l’organe compétent en charge de délivrer les certificats de lustration. Les citoyens envisageant de pourvoir les postes énuméré au § 1 s’adressent eux-mêmes à la commission afin qu’elle leur délivre le certificat de lustration. Cependant, cette obligation, vise uniquement les citoyens nés avant le 1er décembre 197160, donc ceux qui au moment de la « révolution de velours », étaient majeurs et par conséquent, responsables de leurs actes.

99. Les dispositions de la loi prévoient également une lustration facultative : elle permet à tout citoyen âgé d’au moins 18 ans d’obtenir un certificat de lustration du MAI, même s’il n’envisage pas d’être candidat à un poste dans l’administration étatique. Les seules conditions

55 Il s’agit de la Haute école de Félix Dzerjinski près le Conseil des ministres de l’URSS, elle a été fondé en 1930.

56 § 2, al. 1, lettre h).

57 L’affidavit est un terme latin du verbe affido, signifiant littéralement « il a affirmé », parfois employé pour désigner une déclaration faite sur la foi du serment, d’après CORNU Gérard, Vocabulaire juridique, Paris, Quadrige/PUF, 2002, p. 36.

58 ZIFCAK Spencer, « Rozrachunek z przeszloscia na Wegrzech i w Czechach, ujecie konstytucyjne » (« Règlement avec le passé en Hongrie et en Tchéquie, l’approche constitutionnelle »), Ius et Lex, n° II 1/2003, p. 213.

59

La loi précise que l’affidavit vise les fonctions définies à § 1, al. 1, lettres d-h).

57 à remplir sont l’authentification de la signature ainsi que le paiement d’un timbre fiscal61

. Cette disposition permet aux citoyens de connaître le statut qui leur avait été attribué par la StB. La voie de la lustration facultative est également accessible aux proches d’une personne décédée leur permettant d’obtenir un certificat la concernant62

.

100. Deux catégories de certificats sont à distinguer : le certificat de lustration positive, constatant que le citoyen a collaboré avec la StB et le certificat de lustration négative, constatant que le citoyen n’a jamais collaboré avec la StB. Le certificat est délivré dans un délai de 60 jours. Le candidat est tenu de le présenter à son employeur (chef de l’organe dont le poste est à pourvoir par le candidat) dans un délai de 30 jours à compter de sa réception63. 101. Lorsqu’il s’agit de postes pourvus par nomination des plus hautes institutions de l’Etat64, ces dernières s’adressent au MAI afin qu’il délivre un certificat sans délai pour la personne qui fera l’objet de la nomination. Il s’agit alors d’une sorte d’initiative d’office. 102. Le concept tchécoslovaque consistant à se baser sur les informations contenues dans les dossiers de la StB et repris par d’autres Etats, peut surprendre. D’un côté, il condamne les services secrets du régime communiste et d’un autre, il accorde une fiabilité à leurs documents puisque le MAI fonde ses décisions sur ces informations. Par conséquent, le législateur légitime les sources de la StB, tout en discréditant les services de sécurité en tant qu’institution65

.

103. La délivrance par le MAI d’un certificat de lustration positive a des conséquences directes sur les relations de travail du citoyen concerné. Deux cas de figure peuvent être distingués, le citoyen est déjà embauché ou il est candidat à une embauche. Dans le premier cas, le citoyen/employé est contraint de présenter un préavis de démission adressé à l’employeur dans le délai de 15 jours à compter du jour de sa réception. S’il omet cette obligation, l’employeur a le droit de le licencier, de procéder à sa dégradation ou de le

61 § 8, al. 2.

62

La lustration facultative était certainement justifiée au moment de l’adoption de la loi, étant donné qu’en 1991 l’accès des citoyens aux dossiers de la StB n’était pas possible. Par cette voie, chaque citoyen a obtenu la possibilité, s’il le souhaitait, de demander la délivrance d’un certificat et de prendre, de manière indirecte, connaissance de son dossier.

63

§ 6, al. 2 et al. 3.

64 Il s’agissait notamment du Président de la République fédérative tchèque et slovaque, du Présidium de l’Assemblée fédérale, des Présidiums du Conseil national tchèque et du Conseil national slovaque, du gouvernement fédéral et gouvernements fédérés, du Procureur de la République fédérative tchèque et slovaque et des Procureurs des républiques fédérées (§ 7, al.1).

58 reclasser à un poste pour lequel les « conditions requises » n’étaient pas exigées. Dans le second cas de figure, le futur employeur refuse de l’embaucher66.

104. Le fait que le MAI se base uniquement sur les informations contenues dans les dossiers des archives des services secrets pour la délivrance des certificats est très controversé. Les méthodes de travail utilisées par leurs agents et la destruction partielle des archives de la StB, représentent un risque significatif qu’une personne se voie accusée de collaboration sur la base d’une documentation incomplète avec des conséquences non négligeables.

c) Les voies juridiques de contestation du certificat de lustration positive : troisième étape de la lustration

105. La loi dans sa version originale, modifiée ensuite, a accordé au citoyen le droit de contester un certificat de lustration positive. Cependant, ce droit a été restreint par le

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