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Les réseaux de promoteurs de l’éducation physique du sapeur-pompier Logiques de diffusion, 1914-

B. Une codification distinctive d usages gymniques de l’officier de « valeur »

III. Posture fédérale de réduction des écarts matériels et symboliques

3. Investir la territorialisation

Le cadre organisationnel de la lutte contre l incendie en syndicats intercommunaux ou en système départemental, est emparé en 1927 par l’instance fédérale, singulièrement en la personne de Jules Lerondeau511, propriétaire immobilier soissonnais, entré dans la carrière

pompière en qualité de sapeur volontaire à Creil (Oise), en 1883. Chef de bataillon de la compagnie des sapeurs-pompiers de Soissons depuis 1924, il officie comme premier vice- président de la fédération nationale des sapeurs-pompiers français. Il se fait le spécialiste et le promoteur-prescripteur du maillage des services de lutte contre l incendie, en marquant sa préférence pour l institutionnalisation du nouage départemental512, puisqu il met en réseau de protection toutes les communes. Son projet traduit une position fédérale de défense de l occupation territoriale des agents occasionnels, tout en renforçant sa logique de modernisation. En effet, loin de minimiser son intégration, le plan assure une rénovation de son équipement et de sa professionnalité. Il organise des centres de secours principaux institués dans les villes les plus importantes, composées de professionnels et de permanents, pourvus d'engins de déplacement prompt (fourgon-pompe et autopompes), agissant sur un rayon de vingt-cinq kilomètres. À ces centres sont associés des services secondaires, devant être équipés de moto- pompes remorquées ou transportées, assurant une couverture d un périmètre de dix à douze kilomètres. Les communes ayants un corps de sapeurs-pompiers le préservent, il s insère dans le système. Les localités dépourvues de moyens de lutte contre les incendies, doivent souscrire un abonnement pour bénéficier de la protection contre les sinistres. Lorsque ces municipalités sollicitent un centre pour intervention, des frais sont dus, fixés par coût kilométrique, par engin de secours mobilisé, par heure de fonctionnement et d’activité des sapeurs-pompiers. Ce système structure un "marché de fournitures"513, assurant l équipement en matériels modernes des corps de sapeurs-pompiers. « Bien mieux, on le fortifie, on le perfectionne, on améliore, s il y a lieu, on enrichit son matériel. On dote les plus petites localités d un seau-pompe et de quelques

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« Au nom de la Fédération Nationale des Sapeurs-Pompiers, le Lieutenant-Colonel COLLINET s’élève contre les projets d’arrêtés dont l’application entraînera sans aucun doute la disparition des Sapeurs-Pompiers volontaires qui servent avec bonne volonté et dévouement, mais aussi gratuitement, il ne faut pas l’oublier. Quant à l’aptitude au commandement, elle est aussi bien le fait d’un entrepreneur, d’un chef d’entreprise, parmi lesquels se recrutent d’ailleurs la plupart des Officiers volontaires. », « Commission paritaire de la Protection contre l’incendie. Procès verbal », Le Sapeur-pompier, 64e année, n° 546, octobre 1953, pp. 210-211.

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Archives nationales. Base Léonore, dossier : LH/1603/88.

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Conférence sur l organisation départementale et intercommunale contre le feu, faite au 42e congrès fédéral de Saint-Dié (Vosges) en 1927. « Rapport du Commandant Lerondeau sur le Service d’Incendie départemental et intercommunal », Le Sapeur-pompier, 38e année, n° 242, 1er décembre 1927, pp. 371-372.

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Strowski Stéphane, docteur en droit, « Syndicat intercommunal ou service départemental », Le Sapeur-pompier, 50e année, n° 475, janvier 1938, p. 9.

extincteurs qui pourront étouffer un sinistre dans l œuf. »514. Cette coordination est réalisée ou en cours de mise en œuvre dans onze départements sur quatre vingt neufs en 1938515

. Sous la conduite promotionnelle et légaliste de cet entrepreneur, avec l’appui de mises en œuvre, le législateur adopte son rapport et le diffuse aux préfets pour renseigner et aider la création de cet agencement de services d incendie. "L organisation de l avenir"516 est instituée par le décret-loi du 12 novembre 1938 relatif à l Administration départementale et communale.

Ce système protectionniste véhiculé et expérimenté initialement par des pro- professionnalistes, est capté par les gestionnaires fédéraux, en vue de contrôler le processus de territorialisation, en assurant la formalisation et la promotion de conventions, dans lequel les agents occasionnels maintiennent leur existence sociale dans ce jeu collaboratif. D’autant plus, au regard de l’opportunité du dispositif pour dynamiser la rénovation des conditions matérielles et symboliques de ces sauveteurs, l’extrayant de l’archaïsation. En effet, les communes aux budgets incompatibles à l’organisation d’un service équipé de moyens actuels et de pompiers exercés, dans cette configuration, peuvent se dispenser de le faire et privilégier la souscription à un centre d’intervention environnant.

Il s’inscrit également dans une rupture fédérale de projeter la fondation d’un corps par commune. En 1938, sur 38.011 communes françaises, 14.250 possèdent un service contre l incendie517. Les bourgmestres ont la mission de cesser, par les moyens appropriés, les fléaux publics tel l’incendie, sauf que la liste des dépenses obligatoires de la loi municipale du 05 avril 1884 ne dresse pas l’impératif de constituer une organisation pompière. Prime l’autonomie de décision des maires sur la création ou non. S’enregistrent sur la période, des dénonciations vives et critiques dans la corporation sur cette clause de jurisprudence, surlignant la contradiction qu’il est préférable pour une commune de ne rien prévoir pour vaincre l’incendie, au lieu d’avoir un service sous peine de poursuites en responsabilité civile s’il se montre défaillant. Légalement, les fédéraux ne peuvent avoir recours au principe d’obligation envers les administrateurs communaux, mais dans le contexte promotionnel de la départementalisation des services de lutte contre l incendie, ils agissent pour l obtention d une modification réglementaire. Un tournant juridique, une "véritable révolution administrative"518 s’institutionnalise avec la circulaire du 11 janvier 1939519 relative à l’ordonnancement départemental et communal. Est décidée, en 21ème dépense obligatoire à l’article 8 de la loi municipale du 5 avril 1884, l exigence de financement en personnel et en matériel relatifs aux services de défense et de secours contre l’incendie, lesquels sont administrés dans le cadre communal, intercommunal ou départemental520. C est un renversement incitatif, désormais, les municipalités n ayants rien établi pour lutter contre le feu sont sous le joug de procès.

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Strowski Stéphane, « Syndicat intercommunal ou service départemental », Le Sapeur-pompier, 50e année, n° 475, janvier 1938, p. 11.

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Le Pas-de-Calais en 1928, Seine-et-Oise et Meuse en 1929, L’Oise en 1930, Eure-et-Loir en 1932, Les Ardennes en 1933, Seine & Marne, 1934, Haute-Garonne en 1937, Aisne, Aube, Loire-Inférieure en cours de réalisation.

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Commandant Lerondeau, « 1937-1938. La Séance continue », Le Sapeur-pompier, 50e année, n° 475, janvier 1938, p. 5.

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Strowski Stéphane, « Syndicat intercommunal ou service départemental », Le Sapeur-pompier, 50e année, n° 475, janvier 1938, p. 9.

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Strowski Stéphane, avocat, docteur en droit, « Une circulaire », Le Sapeur-pompier, 51e année, n° 490, avril 1939, p. 75.

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Journal Officiel du 22 janvier 1939.

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Deux facteurs conjecturaux déterminent la politisation accélérée de ce projet. L'incendie du grand magasin des Nouvelles Galeries de Marseille le 28 octobre 1938521, faisant soixante treize morts. Une dense polémique médiatisée sur la responsabilité de la gestion municipale des sapeurs-pompiers marseillais, pointant la vétusté du matériel et des incohérences dans l opérationnalité est alimentée. En outre, à la même date le 35e congrès du parti républicain, radical et radical socialiste, tient ses assisses à Marseille. Des personnalités politiques assistent à la catastrophe, Édouard Daladier, président du Conseil, Édouard Herriot, maire de Lyon et président de l Assemblée nationale, et Albert Sarraut, ministre de l Intérieur. Consécutivement, le corps des sapeurs-pompiers municipaux est dissous et substitué par une unité militaire de marins-pompiers (décret-loi du 29/07/1939). Le maire Henri Tassot est destitué, et la ville mise sous la tutelle de l État jusqu en 1944.

L’intégration effective des sapeurs-pompiers dans la Défense passive, en novembre 1938, faisant suite à des demandes réitérées de la fédération (1930, 1933,…) d'associer les sapeurs- pompiers communaux dans ce dispositif vital de sécurité hexagonale, relatif à la protection et l’organisation des secours en cas de bombardements aériens.

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