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Philippe Meier *

A. Les instruments de nature privée

17. La gestion patrimoniale peut avoir été déléguée à un tiers (privé ou professionnel) par un contrat de gestion ou d’autres contrats bancaires, qui relèvent, en règle générale, directement ou par renvoi (notamment dans le cas de l’art. 425 al. 2 CO pour le contrat de commission) du contrat de man-dat (art. 394 ss CO)43. A défaut d’un tel mandat, la gestion des affaires pa-trimoniales sera, en cas d’incapacité de l’intéressé, souvent poursuivie par des membres de la famille (notamment le conjoint, qui ne fera que respecter le devoir d’assistance et de fidélité qui est le sien, cf. art. 159 al. 3 CC), sur la base des règles de la gestion d’affaires (art. 419 CO)44. Nous ne traiterons

40 Etant rappelé que la mesure de curatelle (largement la plus fréquemment prononcée, cf. RDT 2007 338 : 8955 des 11 359 nouvelles mesures prononcées en 2006 selon la statistique tutélaire suisse) ne déploie pas comme telle d’effets sur la capacité civile (art. 417 al. 1 CC).

41 Cf. p. ex. ATF 5C.32 et 5C.33/2004 du 6 octobre 2004 c. 4.3.1 ; ATF 127 I 6, 19 ; ATF 124 III 5, 7.

42 Message Tutelle, 6726. « Déficience mentale » serait politiquement plus correct que « maladie mentale », et « trouble psychique » que « faiblesse d’esprit ». Pour une critique générale du chan-gement de terminologie dans le nouveau droit, cf. Alberti.

43 Lombardini, 451 et 501. Sur le mandat comme institution juridique type pour la représentation volontaire des personnes âgées ou incapables : Stettler, n. 148.

44 Sur cet instrument : Breitschmid 2007, 224 ; Stettler n. 107 ss, n. 210 s. ; Stettler 1983, 9 ss ; Stettler 2002, 727. L’art. 166 CC est également invoqué parfois s’agissant du pouvoir des époux. Cela ne nous paraît pas adéquat, car malgré les termes utilisés, l’on n’a pas affaire ici à un véritable système de représentation, comparable à la représentation volontaire ou à la repré-sentation légale : l’effet de l’art 166 CC réside dans le fait que l’époux qui agit lui-même, en son propre nom (et non au nom de l’autre époux ou d’une « entité familiale », cf. Meier / de Luze, 387), engage également la responsabilité du conjoint.

pas plus avant de cette question, puisque la mise en œuvre des règles de la gestion d’affaires suppose précisément que l’intéressé n’ait pas pu ou voulu régler spécifiquement le sort de son patrimoine une fois qu’il serait devenu incapable de le gérer45. Nous ne traiterons pas non plus de la simple procu-ration (art. 32 CO), par laquelle la personne octroie à un tiers les pouvoirs nécessaires pour exécuter en son nom et pour son compte (représentation di-recte avec pouvoirs) certaines missions spécifiques de représentation qu’elle ne peut plus assumer elle-même. La gestion patrimoniale présuppose en effet un rapport juridique qui va au-delà d’une simple représentation de nature ponctuelle46.

18. Ces instruments juridiques ne sont pas soumis à une forme spéciale de lege lata, ni à aucun contrôle particulier s’agissant de la capacité de discer-nement de la personne qui contracte47. On appliquera les règles générales.

19. La validité de tels contrats trans- ou post-mortem a fait l’objet de nombreuses discussions48. La validité post-perte de discernement n’a pour l’heure pas reçu les mêmes « égards ».

20. Il faudra distinguer deux situations : les parties ont convenu d’une clause prévoyant le maintien du contrat au-delà l’incapacité (voire sa mise en œuvre à ce moment-là seulement, nous ne distinguerons pas par la suite) (let. b) ou n’ont rien prévu (let. a).

a) Absence de clause post-perte de discernement49

21. Aux termes de l’art. 405 al. 1 CO, le mandat finit par l’incapacité du mandant (« durch eintretende Handlungsunfähigkeit », « perdita della capacità ci-vile), « à moins que le contraire n’ait été convenu ou ne résulte de la nature de

45 L’on peut néanmoins se demander s’il y a toujours acte urgent et agissements conformes aux intentions présumables de la personne incapable, lorsque celle-ci dépend en permanence de l’aide de son entourage et qu’il en va d’une gestion durable de son patrimoine ; cf. sur ce point Stettler 1983, 10.

46 Un rapport contractuel sous-tend généralement, même si ce n’est pas systématiquement, une représentation volontaire (sur cette question : BK-Fellmann, CO 396 n. 42 ss ; CRO-Chappuis, CO 32 n. 6 ; Hofstetter, 50 s.).

47 Breitschmid / Reich, 152 ss et références.

48 P. ex. BK-Fellmann, CO 405 n. 70 ss ; BK-Zäch, CO 35 n. 46 ss ; Chappuis, CO 35 n. 13 ; CRO-Werro, CO 405 n. 12 ss avec références ; Gauch / Schluep / Schmid / Rey, n. 1370.

49 Une telle clause aura en général une formulation analogue à celle-ci : « Le mandat de gestion conservera sa validité jusqu’à réception par la Banque ou par le Mandant de cette révocation ; le présent mandat demeurera valable même en cas de mort, de déclaration d’absence, de perte de

Perte du discernement et planification du patrimoine – droit actuel et droit futur l’affaire »50. L’art. 35 al. 1 CO prévoit une règle analogue pour la procuration, en se référant à la « perte de l’exercice des droits civils » (« Verlust der Handlungs-fähigkeit », « perdita della capacità civile »). L’utilisation de termes identiques en allemand et en italien confirme, s’il était besoin, que les deux dispositions doivent être interprétées de la même façon.

22. Le prononcé d’une interdiction est une cause de privation de la ca-pacité civile active (art. 17 CC)51. Elle met fin au mandat, respectivement au pouvoir de représentation52. Mais la perte du discernement a le même effet53, de par l’art. 17 CC également. La ratio legis (impossibilité d’instruire et de surveiller le mandataire) et des raisons pratiques (nécessité en règle générale d’un avis médical) supposent toutefois que seule la survenance d’une incapacité de discernement de nature durable entraîne un tel effet54. Des incapacités passagères ne privent en effet pas nécessairement le mandant de donner des instructions, de demander des comptes, voire de révoquer le mandataire55. De même, un simple empêchement de fait (difficultés de dépla-cement, peine à lire, etc.) ne mettra pas fin au mandat comme tel ; si les ins-tructions et la surveillance ne peuvent plus être assurées, un curateur (art. 392 ch. 1 CC) pourra cependant ici aussi être désigné à cette fin56.

23. Dans la mesure où l’incapacité durable empêche le mandant d’ins-truire, de surveiller et de révoquer le mandataire, il nous paraît d’emblée

50 Le § 672 BGB prévoit une règle inverse (présomption de non-extinction en cas d’incapacité) :

« Der Auftrag erlischt im Zweifel nicht durch den Tod oder den Eintritt der Geschäftsunfähigkeit des Auftraggebers. Erlischt der Auftrag, so hat der Beauftragte, wenn mit dem Aufschub Gefahr verbunden ist, die Besorgung des übertragenen Geschäfts fortzusetzen, bis der Erbe oder der ge-setzliche Vertreter des Auftraggebers anderweit Fürsorge treffen kann ; der Auftrag gilt insoweit als fortbestehend. » ; l’art. 2003 CCFr connaît en revanche une règle analogue à l’art. 405 CO (« le mandat finit (…) par la tutelle des majeurs (…). »).

51 La curatelle, qui n’a pas d’effet sur la capacité civile (art. 417 al. 1 CC), ne met pas fin au mandat.

A notre sens, le conseil légal gérant devrait avoir les mêmes effets que l’interdiction (art. 395 al. 2 CC), de même que le conseil légal coopérant, lorsque le mandat porte sur des affaires visées à l’art. 395 al. 1 CC (dans le même sens : BK-Fellmann, CO 405 n. 38 ss, ainsi apparemment que BK-Zäch, CO 35 n. 13).

52 Sur la justification historique de cette solution au regard du rapport de confiance et sur la solu-tion différente du droit allemand : BK-Fellmann, CO 405 n. 31 s.

53 Outre les auteurs cités à la note suivante, cf. aussi Tercier / Favre n. 5323 (qui se réfèrent de façon générale à l’art. 17 CC) ainsi que Engel, Partie générale, 399. Contra, sans véritable mo-tivation : BK-E. Bucher, CC 19 n. 334 ; cf. aussi E. Bucher, AT, 554, où cet auteur donne comme contre-exemples les cas d’ivresse ou de sommeil… mais le problème est selon nous résolu par l’exigence d’une incapacité durable (cf. aussi BK-Fellmann, CO 405 n. 34 ; BK-Zäch, CO 35 n. 14).

54 BK-Zäch, CO n. 13 s. ; BK-Fellmann, CO 405 n. 28, n. 34 ; CRO-Werro, CO 405 n. 9 ; Stettler, n. 195 ; Stettler 1983, 7.

55 P. ex. BK-Fellmann, CO 405 n. 34 ; Stettler, n. 195.

56 Cf. aussi BK-Zäch, CO 35 n. 15.

exclu d’admettre que le mandat patrimonial puisse se poursuivre au vu de

« la nature de l’affaire »57. On réservera néanmoins le devoir du mandataire de continuer la gestion si l’extinction du mandat met en péril les intérêts du mandant incapable, jusqu’à ce que son représentant (le cas échéant provi-soire, art. 386 CC) soit en mesure d’y pourvoir lui-même (cf. art. 405 al. 2 CO).

Les services supplémentaires fournis donneront droit à rémunération58. 24. Dans les rapports internes, le mandat s’éteint eo ipso et ex nunc, dès que le mandataire a connaissance ou devrait avoir connaissance de la cause d’extinction (survenance de l’incapacité), soit au plus tard au moment de la publication de l’interdiction si une telle mesure est prononcée (art. 375 al. 3 CC), puisque celle-ci lui est opposable comme à tout tiers59. Le pouvoir de représentation du mandataire envers les tiers s’éteint aux mêmes conditions (art. 37 al. 1 CO), indépendamment de ce que savent ces tiers (les pouvoirs peuvent s’éteindre avant dans les rapports externes, si le tiers a connaissance de la cause d’extinction alors que le mandataire ne l’a pas encore, cf. art. 37 al. 2 CO)60. La preuve de l’interdiction est aisée à rapporter (cf. art. 375 CC) ; pour l’incapacité de discernement, on répartira le fardeau de la preuve selon ce qui a été exposé supra sous ch. 12. Il appartiendra au mandant (et désor-mais à son mandataire tutélaire) d’établir que le mandataire avait connais-sance ou aurait dû avoir connaisconnais-sance de cette incapacité s’il entend s’opposer à des prétentions fondées sur l’art. 406 CO61.

25. Si le mandant recouvre ultérieurement la capacité civile pleine et en-tière, le mandat ne renaît pas : un nouveau contrat devra être conclu62. 26. Par ailleurs, le représentant (ou l’autorité tutélaire agissant elle-même dans les cas simples63) peut décider de « maintenir » le mandat (en réalité de le renouveler) après la survenance de l’incapacité64. Dans un tel cas, la question de la surveillance n’est toutefois pas réglée. Il appartient à l’autorité

57 Cf. en revanche en matière bancaire, la présomption du continuation du mandat en cas de décès posée par l’ATF 101 II 117, 120 ; cf. aussi TC NE, RJN 2007 106, 109. Pour un cas de continuation de mandat malgré l’incapacité, cf. l’exemple du contrat de soins médicaux donné par BK-Fellmann, CO 405 n. 90.

58 CRO-Werro, CO 405 n. 15. Pour les détails sur ce devoir : Fellmann, CO 405 n. 106 ss ; BK-Gautschi, CO 405 n. 18a ss.

59 BK-Fellmann, CO 406 n. 7 s., n. 16 ss ; BK-Zäch, CO 35 n. 19 ; E. Bucher, AT, 555.

60 BaK-Watter / Schneller, CO 35 n. 15 ; BK-Fellmann, CO 406 n. 7 s. ; BK-Zäch, CO 35 n. 94, n. 99 ; E. Bucher, AT, 555.

61 BK-Fellmann, CO 406 n. 23.

62 Cf. ATF 46 II 411 s. (pour un cas de suspension de faillite), ainsi que BaK-Watter / Schneller, CO 35 n. 14 ; BK-Fellmann, CO 405 n. 127 ; BK-Gautschi, CO 405 n. 13b ; BK-Zäch, CO 35 n. 92.

63 Sur cette faculté de l’autorité, cf. p. ex. ATF 107 II 105 ; ATF 86 II 206 ; ATF 69 I 213.

64 BaK-Weber, CO 405 n. 5 ; BK-Zäch, CO 35 n. 44 ; CRO-Werro, CO 405 n. 11. Cf. aussi ATF 64 II 220

Perte du discernement et planification du patrimoine – droit actuel et droit futur ou au mandataire tutélaire d’exercer cette surveillance à la place de la per-sonne incapable (obligation de soumettre régulièrement des rapports et des comptes, contrôle de la gestion par des personnes formées professionnelle- ment, etc.)65.

b) Accord post-perte de discernement

27. L’art. 405 al. 1 CO permet aux parties de convenir d’avance de prolon-ger le contrat au-delà de l’incapacité du mandant (cf. aussi art. 35 al. 1 in fine CO). Une telle convention peut être expresse ou tacite ; elle ne doit pas néces-sairement se référer à l’art. 405 CO et peut être convenue dans la convention de base ou par déclaration séparée66.

28. En opposition avec le texte de la loi, mais dans le respect du but de la disposition, une partie de la doctrine a soutenu que la perte de l’exercice des droits civils du représenté entraînait impérativement l’extinction des pou-voirs, la réserve apportée par la loi (clause contraire ou nature de l’affaire) ne visant que l’hypothèse de la mort. Ces auteurs sont d’avis que les pouvoirs doivent prendre fin avec l’incapacité : celui qui est limité de par la loi dans sa capacité d’agir ne saurait consentir à étendre sa capacité civile au-delà de sa privation ex lege, faute de quoi la continuation des pouvoirs réduirait à néant le but de protection auquel tendent les règles sur la capacité civile67.

29. La nature dispositive de ces dispositions a toutefois été confirmée par le Tribunal fédéral, en tout cas pour la perte d’exercice par suite d’incapacité de discernement68. Notre Haute Cour laisse en revanche ouverte la question de savoir si une interdiction ne devrait pas, compte tenu du but protecteur des mesures tutélaires institutionnelles, conduire à une extinction impéra-tive (avec la faculté pour le représentant légal de conférer à nouveau des pou-voirs si cela est toujours dans l’intérêt du représenté, cf. supra ch. 26)69. 30. La doctrine a relevé, bien avant cet arrêt, qu’admettre une poursuite du mandat au-delà de l’incapacité soulevait « des problèmes délicats en ma-tière d’instructions et de reddition de comptes, plus particulièrement lorsque

65 Stettler 1983, 8.

66 BaK-Weber, CO 405 n. 9 ; BK-Fellmann, CO 405 n. 68 ; CRO-Werro, CO 405 n. 12. Pour l’art. 35 al. 1 CO : BK-Zäch, CO 35 n. 42 ; CRO-Chappuis, CO 35 n. 10. Pour un exemple, cf. supra note 49.

67 Cf. p. ex. BK-Gautschi, CO 405 n. 10a ; BK-Zäch, CO 35 n. 16, n. 83 ; Engel, 399.

68 ATF 132 III 222 (procuration procédurale). Dans le même sens : BaK-Watter / Schneller, CO 35 n. 4 ; BK-Fellmann, CO 405 n. 30 s., n. 89 ; CRO-Chappuis, CO 35 n. 11 ; Hofstetter, 56, 66. Pour une situation où la procuration de l’avocat a été jugée invalide faute pour le mandant d’avoir en-core la capacité de discernement au moment de l’octroyer, cf. ATF 5A_134/2008 du 16 avril 2008 c. 2.2.

69 Dans ce sens : Gauch / Schluep / Schmid / Rey, n. 1371, ainsi que l’arrêt du Kassationsgericht zurichois, in RSJ 1949 221 n. 91, avec une motivation détaillée et fort convaincante.

la prestation de service porte sur une gestion de biens »70. Même si l’on devait se rallier à la solution du Tribunal fédéral, voire l’étendre au cas d’interdic-tion formelle, il incombe à notre sens au mandataire, qui n’est plus surveillé et qui n’a plus de cocontractant capable à qui rendre des comptes, d’informer l’autorité tutélaire de la situation pour lui permettre de prendre les mesures éventuellement nécessaires71. Cette obligation relève du devoir de diligence du mandataire (et non d’une obligation d’avis prévue par la loi, comme aux art. 369 al. 2 CC ou encore à l’art. 333 al. 3 CC)72 et va plus loin que le droit de chacun de signaler un cas à l’autorité de protection (que la procédure canto-nale ou les règles fédérales octroient ensuite au « dénonciateur » la position de partie ou non73). Ce devoir existe également lorsque le mandataire n’est pas un professionnel, mais un proche, dont les intérêts s’agissant de la conserva- tion et de la fructification du patrimoine pourraient diverger de ceux de la personne concernée une fois celle-ci incapable de discernement. On ne de-vrait admettre qu’avec beaucoup de réserve une présomption de loyauté des proches, en tout cas en matière patrimoniale74, et certainement pas dans un cas comme celui-ci où le danger d’abus est patent.

31. Ce devoir d’information s’apparente :

– au devoir du mandataire de mettre le mandant en garde contre des ins-tructions déraisonnables que celui-ci lui donnerait (protection du man-dant contre lui-même)75 ;

– au devoir du mandataire, dans le cas des mandats post-mortem, d’aviser les héritiers des pouvoirs qui lui ont été conférés, pour leur permettre de modifier les instructions données, voire de révoquer le mandat76.

70 Stettler, n. 197 ; Stettler 1983, 8.

71 Dans le même sens : Stettler 1983, 8. Ce que dit la doctrine qui plaide pour le caractère impé-ratif de la règle (cf. supra ch. 28), à savoir qu’il serait « contraire à la nécessaire protection de l’incapable que le mécanisme de la représentation puisse se poursuivre, alors qu’il n’aurait plus aucun moyen de la contrôler » (Engel, 399), doit au moins permettre d’imposer ce devoir d’in-formation au mandataire.

72 On notera que selon d’aucuns le droit cantonal pourrait élargir le cercle des personnes obligées de signaler, par exemple aux proches ou aux médecins privés (BK-Schnyder / Murer, CC 369 n. 178 ; ZK-Egger, CC 369 n. 65 ; contra : BK-Kaufmann, CC 369 n. 37 ; Meier 1996, 94 en note), de même qu’il peut prévoir une obligation analogue pour les autres mesures tutélaires ou cas d’interdiction (cf. p. ex. BK-Schnyder / Murer, CC 370 n. 223).

73 Cf. p. ex. BK-Schnyder / Murer, CC 369 n. 177, CC 373 n. 83, ainsi que Meier 1996, 94 avec d’autres références, notamment à l’ATF 112 II 479, 481.

74 Sur cette mise en garde : Stettler, RDT 7 ; Meier 1996, 89, 100. Cf. pourtant le Message du Conseil fédéral, qui pose une présomption de concordance entre les intérêts de l’incapable et les intentions du proche (Message Tutelle, 6693).

75 Cf. p. ex. ATF 108 II 197 ; cf. aussi CRO-Werro, CO 397 n. 11 ; Tercier / Favre, n. 5149.

76 Cf. CJ GE, SJ 1995 212 c. 4 et TC NE, RJN 2007 106, ainsi que BK-Fellmann, CO 405 n. 78 ;

Perte du discernement et planification du patrimoine – droit actuel et droit futur 32. La question de la levée du secret professionnel ne devrait en principe pas se poser : l’avocat qui gère le patrimoine de son client n’est pas soumis à l’art. 321 CP, faute d’activité typique d’avocat77. Néanmoins, par mesure de précaution, le mandataire pourrait vouloir solliciter l’autorisation de l’auto-rité de surveillance (art. 321 al. 2 CP)78. Si celle-ci reçoit la requête, elle tien-dra compte du but de protection de personnes en situation de faiblesse que visent tant les règles sur la capacité civile que celles relatives aux mesures tutélaires. Ce n’est qu’en présence de situations exceptionnelles (doutes réels sur le véritable état de santé de l’intéressé, influence exercée par des tiers, p. ex. des proches de l’intéressé, sur l’avocat, etc.) que la levée du secret de-vrait être refusée. L’autorité ne dede-vrait notamment pas se laisser influencer par le fait que d’autres personnes, non soumises à l’art. 321 CP, pourraient aviser les autorités de tutelle mais ne le font pas : leur inaction peut être due à des considérations très égoïstes, sans compter que l’avocat, non seulement est un confident privilégié, mais voit son propre statut contractuel mis en péril par la situation d’incapacité qui se présente.

33. Ce devoir (qui entraîne la responsabilité du mandataire en cas d’inac-tion, art. 398 CO79) peut être lourd de conséquences : la personne concernée peut avoir confié à son mandataire des informations confidentielles (que l’on songe à la « créativité » fiscale qui peut être la sienne) qu’elle ne souhaite pas voir exploiter par un mandataire tutélaire soumis au contrôle des autorités de tutelle. Dans la mesure toutefois où la surveillance et l’instruction du mandataire ne sont plus possibles, les intérêts objectifs présumés du man-dant devenu incapable doivent l’emporter. C’est au demeurant ce que prévoit l’art. 397a révisé du CO, qui accompagne le nouveau droit de la protection de l’adulte : « lorsque le mandant est frappé d’une incapacité de discernement probable-ment durable, le mandataire doit en informer l’autorité de protection de l’adulte du domicile du mandant pour autant que la démarche paraisse appropriée au regard de la sauvegarde de ses intérêts. ». A notre sens, compte tenu des considérations qui précèdent, la marge de manœuvre du mandataire est réduite à néant, malgré la teneur de la nouvelle disposition.

77 Cf. p. ex. ATF 112 Ib 606 (avocat gérant de fortune), les ATF 115 Ia 197, 199 et 114 III 105, 107 (avocat administrateur), ainsi que l’ATF 8G.9/2004 du 23 mars 2004 c. 9.1.

78 Pour un ex. de refus de lever le secret de l’avocat dans un cas analogue, cf. en revanche SJ 2007 II 297 s.

79 On peut se demander en quoi peut consister la spécificité du dommage subi. Si le mandataire viole ses obligations s’agissant de la gestion comme telle, sa responsabilité sera engagée à l’égard du mandant que l’information à l’autorité ait été donnée ou non. Mais on peut concevoir que le mandat offre une latitude très grande au gestionnaire, autorisé, voire incité à procéder à des placements très spéculatifs, alors que l’autorité, dûment informée, n’aurait consenti qu’à une gestion plus conservatrice. Dans un tel cas, le mandataire encourt une responsabilité direc-tement liée à l’omission d’informer.

34. Cette approche protectrice stricte est encore confirmée par la systé-matique même de la loi. En effet, l’art. 392 ch. 1 CC prévoit que l’autorité tuté-laire instituera une curatelle, le cas échéant d’office, lorsqu’un majeur ne peut

34. Cette approche protectrice stricte est encore confirmée par la systé-matique même de la loi. En effet, l’art. 392 ch. 1 CC prévoit que l’autorité tuté-laire instituera une curatelle, le cas échéant d’office, lorsqu’un majeur ne peut