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PARTIE 4 : PROBLEMATIQUE ET METHODOLOGIE

3. Illustration de la démarche analytique

Afin d’illustrer la démarche analytique qui a été suivie pour traiter l’ensemble des cas, nous allons développer l’exemple de l’exercice portant sur la confusion -é/-er pour les élèves de 13 ans. Pour rappel, les élèves sont invité·e·s dans le premier exercice à choisir la bonne graphie parmi plusieurs propositions. Cet exercice comporte 5 items relatifs à la confusion -é/-er. Chacun de ces items a été codé sous une forme dichotomique où la modalité 0 correspond à une réponse fausse et la modalité 1 à une réponse juste. Ainsi

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la somme de ces items fournit, pour chaque élève, un score compris entre 0 et 5. Plus la valeur de ce score est proche de 5, plus l’élève est performant·e. En moyenne, au prétest, les élèves du groupe témoin obtiennent un score de 3.0 et ceux et celles du groupe expérimental de 3.33. Au posttest ces chiffres sont respectivement de 2.77 et 3.67. Les résultats de l’ANOVA semblent indiquer que les différences de scores ne sont pas à imputer au seul hasard de l’échantillonnage et qu’il existe un effet spécifique du groupe sur les résultats obtenus (Tableau 3). Toutefois, comme nous l’avons mentionné précédemment, dans la mesure où les conditions d’application de l’ANOVA ne sont pas totalement vérifiées, il est indispensable d’éprouver la robustesse de ce résultat en mettant en œuvre d’autres analyses que sont les tests non paramétriques de comparaison des moyennes et les modèles de régression.

Tableau 3 - Résultats de l'ANOVA pour les scores à l’exercice 1 sur la confusion -é/-er Élèves de 13 ans

Le test de Mann-Whitney nous permet tout d’abord de conclure que les deux scores obtenus au prétest ne sont pas différents l’un de l’autre puisque la différence de 0.33 n’est pas statistiquement significative (Tableau 4). Ainsi, nous pouvons considérer que les deux groupes d’élèves ont le même niveau au prétest sur l’objet orthographique évalué dans l’exercice. Lors du posttest, les scores moyens obtenus à ce même exercice sont respectivement de 2.77 et 3.67 pour les groupes témoin et expérimental, soit une différence de 0.90. Sur la base des résultats du test de Mann-Whitney, cette différence

Source Somme

Mesures Hypothèse de sphéricité 0.164 1 0.164 0.191 0.663 0.001

Greenhouse-Geisser 0.164 1 0.164 0.191 0.663 0.001

Huynh-Feldt 0.164 1 0.164 0.191 0.663 0.001

Borne inférieure 0.164 1 0.164 0.191 0.663 0.001

Mesures x Groupe Hypothèse de sphéricité 5.255 1 5.255 6.134 0.015 0.045

Greenhouse-Geisser 5.255 1 5.255 6.134 0.015 0.045

Huynh-Feldt 5.255 1 5.255 6.134 0.015 0.045

Borne inférieure 5.255 1 5.255 6.134 0.015 0.045

Erreur (Mesures) Hypothèse de sphéricité 111.367 130 0.857 Greenhouse-Geisser 111.367 130 0.857

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peut être considérée comme statistiquement significative. En d’autres termes les deux groupes ne possèdent plus le même niveau lors de la seconde mesure et le groupe expérimental obtient, en moyenne, de meilleurs résultats.

Tableau 4 - Significativité des différences entre groupes témoin et expérimental pour les scores à l'exercice 1 sur la confusion -é/-er

Élèves de 13 ans

Le test de Wilcoxon qui permet de tester la significativité de l’évolution des résultats entre prétest et posttest pour un même groupe vient conforter ce résultat. En effet, pour le groupe témoin le passage d’un score moyen de 3.0 à 2.77 se révèle non significatif et traduit l’absence d’évolution des résultats sur l’objet orthographique évalué (Tableau 5).

En revanche, dans le groupe expérimental, l’augmentation des scores de 0.33 point entre le prétest et le posttest est statistiquement significative et s’interprète comme une amélioration des performances entre les deux mesures.

Tableau 5 - Significativité de l'évolution des scores à l'exercice 1 sur la confusion -é/-er Élèves de 13 ans

Sur la base des résultats à ces deux tests statistiques, nous pouvons supposer qu’il existe bien un avantage en faveur du groupe expérimental qui a bénéficié d’une approche innovante de l’enseignement de l’orthographe. Ceci est confirmé par la régression linéaire où le coefficient estimé associé au groupe expérimental est positif et statistiquement significatif, ce que nous pouvons interpréter comme le fait que deux élèves qui possèdent

Groupe

Score moyen prétest 3.00 3.33 0.33 -1.318 0.188 ns

Score moyen posttest 2.77 3.67 0.90 -3.120 0.002 Sig.

ns = non significatif; Sig. = significatif au seuil de 5%

Test de Mann-Whitney

Groupe témoin 3.00 2.77 -0.23 -1.235 0.217 ns

Groupe expérimental 3.33 3.67 0.33 -2.370 0.018 Sig.

ns = non significatif; Sig. = significatif au seuil de 5%

Test de Wilcoxon

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le même niveau au prétest n’obtiennent pas, en moyenne, le même résultat au posttest en fonction du groupe dans lequel ils ou elles ont été scolarisé·e·s, l’appartenance au groupe expérimental constituant un avantage (Tableau 6).

Tableau 6 - Résultats de la régression linéaire pour les scores à l'exercice 1 sur la confusion -é/-er Élèves de 13 ans

Paramètres Coefficients Erreurs-types

T Prob.

critique

Sig.

Constante 0.104 0.391 0.266 0.791 ns

Résultat au prétest 0.661 0.070 9.441 0.000 Sig.

Groupe Expérimental

(réf. = groupe témoin) 0.680 0.213 3.197 0.002 Sig.

R2

ns = non significatif; Sig. = significatif au seuil de 5%

45.4%

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Partie 5 : Résultats

Nous allons à présent exposer les résultats de cette recherche. Dans la partie 4 consacrée à la méthodologie, nous avons justifié les choix que nous avons faits pour sélectionner les données mobilisées et la façon dont nous les avons analysées. Ces résultats vont être répartis en quatre chapitres.

Avant de concevoir le dispositif expérimental et d’entamer la collaboration avec les enseignantes, nous avions besoin de connaitre d’une part leurs pratiques grâce aux classeurs et aux entretiens, et d’autre part les capacités orthographiques des élèves grâce aux tests (chapitre 1). Ces données sont celles récoltées lors de l’année 2017-2018 et elles constituent ce que nous avons envisagé comme une phase exploratoire. Nous avons ensuite passé une année sur le terrain avec trois équipes d’enseignant·e·s qui constituent le groupe expérimental pour coconstruire et tester deux séquences innovantes. Nous avons mesuré les progrès des élèves grâce aux tests déjà utilisés lors de la phase exploratoire et c’est en comparant les résultats des élèves du groupe expérimental avec ceux du groupe témoin que nous avons pu mesurer les effets du dispositif expérimental (chapitre 2). Les données du groupe témoin ont été récoltées durant les années 2017-2018 et 2017-2018-2019 auprès d’enseignantes ayant travaillé selon leurs habitudes.

Il apparait que certains résultats du groupe expérimental, particulièrement pour les élèves de 11 ans, sont en demi-teinte : les élèves n’ont pas autant progressé que nous aurions pu l’espérer suite à la lecture de certaines recherches. Comment l’expliquer ? La démarche expérimentée serait-elle favorable uniquement pour les élèves plus âgé·e·s ? Nous allons chercher des éléments de réponse dans l’analyse des classeurs (chapitre 3) et dans l’analyse des séances de formation (chapitre 4).

Chapitre 1 : Phase exploratoire : pratiques habituelles de l’enseignement de l’orthographe et capacités

orthographiques des élèves

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Comme exposé dans la partie 4 consacrée à la méthodologie, la phase exploratoire a été conçue pour accéder aux habitudes de travail concernant l’enseignement de

31Les données de ce chapitre ont fait l’objet de deux publications en 2019. Une partie des textes a été reprise dans ce chapitre.

Petrucci, S. (2019). Pratiques de l’orthographe chez quatre enseignantes genevoises : des traces aux discours. Repères. Recherches en didactique du français langue maternelle, (60), 221-239.

Petrucci, S. (2019). Les capacités orthographiques en 8P à Genève : les enjeux de la morphographie.

Forumlecture. 3/20

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l’orthographe et pour connaitre les capacités orthographiques des élèves. Ce sont les données recueillies durant l’année 2017-2018 dans les classes de deux enseignantes du primaire (Paola et Pauline) et de deux enseignantes du secondaire (Sylvie et Stéphanie) que nous allons analyser. Nous commencerons donc par observer les classeurs et les entretiens menés avec les enseignantes. Grâce à la lecture des classeurs nous cernerons quels sont les objets enseignés dans ces quatre classes, puis les entretiens viendront éclairer les choix. Enfin, nous analyserons les tests passés par les élèves en début et en fin d’année scolaire pour identifier précisément ce qui s’avère problématique pour des élèves de 11 et 13 ans. C’est notamment sur la base de ces résultats qu’a été décidé le contenu des séances de formation pour le groupe expérimental qui se sont déroulées l’année suivante.

1. Données issues des classeurs

A partir des données collectées au moyen des classeurs, nous allons dresser un premier tableau de l’enseignement habituel de l’orthographe dans les quatre classes concernées.

Nous allons tenter de savoir quels sont les objets enseignés et dans quel volume ils apparaissent dans les classeurs, quelles sont les unités les plus fréquemment travaillées et enfin à quelles tâches recourent les enseignantes selon les objets enseignés.

1.1 Objets enseignés

Pour mener à bien nos analyses, nous avons relevé l’ensemble des tâches proposées dans le cadre de chaque activité et nous les avons catégorisées en utilisant la typologie décrite dans la méthodologie (chapitre 4 de la partie 4) et qui est inspirée des catégories de Gourdet (2017) adaptées de Simard et al. (2010). Dans un premier temps, nous allons décrire dans leur globalité les données récoltées au moyen des classeurs remplis par les deux enseignantes du primaire et les deux enseignantes du secondaire. Nous essaierons de voir s’il y a des points de convergence et de divergence entre les degrés, puis entre les classes au sein d’un même degré. Pour cela, nous avons recensé dans un même tableau l’ensemble des tâches réalisées dans les quatre classes (Tableau 7).

En 8P, l’observation des objets enseignés nous montre que 37 et 48 tâches ont été proposées aux élèves. Dans les deux classes, la totalité de ces tâches portait au moins en partie sur l’orthographe grammaticale. Dans la classe de Pauline, les objets enseignés sont variés et nombreux ce qui laisse penser que l’enseignante a essayé de balayer l’ensemble des objectifs du plan d’études romand. Il n’y a pas d’activité spécifique sur l’orthographe lexicale dans le classeur. Nous apprendrons lors des entretiens que l’orthographe lexicale est travaillée en même temps que l’orthographe grammaticale dans des dictées. Dans l’autre classe de 8P, Paola a traité moins de faits orthographiques et elle est revenue deux fois, sur deux d’entre eux, au cours de l’année : l’accord sujet/verbe

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et l’accord dans le groupe nominal. Nous notons donc une moins grande diversité, mais probablement un souci de consolider les acquis des élèves.

Tableau 7 - Tâches par objet enseigné

Lorsque nous observons le détail des objets enseignés, il apparait que l’enseignement des homophones représente dans la classe de Pauline près de 40% des tâches. Viennent ensuite l’accord sujet/verbe (27%) et l’accord du groupe nominal (12%). Dans l’autre classe de 8P, les homophones sont également enseignés par Paola, mais ils ne représentent que 16%. Ce sont l’accord sujet/verbe (40%) et l’accord du groupe nominal qui sont les plus enseignés. Viennent ensuite toutes les dominantes du plurisystème enseignées par le biais de la dictée (21%). La comparaison des deux classes de 8P indique que les mêmes objets sont enseignés puisque les enseignantes ont toutes deux traité les objectifs fixés par le plan d’études romand (les homophones grammaticaux qui figurent dans la rubrique « orthographe lexicale » et l’accord dans le groupe nominal ainsi que l’accord du verbe avec le sujet qui figurent dans la rubrique « orthographe grammaticale ») en utilisant les fiches et manuels issus des moyens d’enseignement correspondant. Cependant, l’observation du nombre de tâches nous amène à penser que les enseignantes ont pris des orientations différentes : Pauline aborde de nombreux objets, tandis que Paola se concentre sur un nombre réduit d’entre eux en revenant à deux reprises dans l’année sur les mêmes objets.

Passons à présent aux deux classes du cycle d’orientation où nous relevons peu de points de convergence entre les deux classes de 10CO. Dans les deux classeurs, il est difficile d’identifier de façon précise et spécifique les objets enseignés. Dans la classe de Sylvie, la place accordée à l’enseignement de l’accord du participe passé est très importante, mais à côté de ces exercices plutôt classiques, nous relevons certaines activités plus originales comme les exercices sur les catégories d’erreurs et les questions sur les représentations des élèves (Figure 14 - Figure 15).

Primaire

Nombre % Nombre % Nombre % Nombre %

Orthographe

grammaticale+lexicale Dictée (textes ou phrases) 1 2,1 % 8 21,6 % 6 85,7 % 1 3,2 %

Orthographe lexicale Dictée (mots) 0 0,0 % 0 0,0 % 0 0,0 % 1 3,2 %

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Figure 14 - Questions sur les représentations des élèves - Classeur de Sylvie

Figure 15 - Questions sur les représentations des élèves - Classeur de Sylvie

Enfin, nous remarquons que Sylvie est la seule enseignante à travailler sur la notion d’accord avec ses élèves et sur la confusion entre les terminaisons des verbes du premier groupe à l’infinitif et les terminaisons verbales des participes passés. Or, nous avons pu voir précédemment que ce fait orthographique occasionnait une proportion importante des erreurs en production écrite que ce soit en 8P comme en 10CO.

Dans la classe de Stéphanie, les faits orthographiques ne sont pas traités de façon spécifique et isolée. Toutes les dominantes du système orthographique sont traitées simultanément, le plus souvent lors de dictées qui exercent l’orthographe grammaticale et l’orthographe lexicale en même temps. Enfin, contrairement aux classes de 8P, il est plus difficile au cycle d’orientation de repérer le traitement des objectifs du plan d’études romand (notamment « application et vérification systématique de l’accord »). Cela s’explique en partie par le fait que les enseignantes n’ont quasiment pas recours dans ces classes à des manuels et fiches issus des moyens d’enseignement romands, car ceux-ci ne sont pas adaptés au niveau de leurs élèves. Elles sont donc obligées de fabriquer leurs supports à partir de différentes sources pour répondre aux besoins de leurs élèves.

1.2 Catégorisation et dénombrement des tâches

Nous allons examiner si des tendances se dessinent selon le degré pour la tâche, l’unité (mot, groupe de mots, phrase ou texte) et l’objet enseigné. Le nombre de tâches varie considérablement d’une classe à l’autre : de 7 à 48 (Tableau 7). La tâche réduite de restitution d’une forme normée (T1) est la plus fréquente dans les classes de Paola, Pauline et Sylvie (Figure 16). Nous trouvons ensuite la tâche de transformation (T3) qui

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représente 21% en 8P et 12% dans la classe de Sylvie en 10CO. Dans la classe de Stéphanie, nous ne relevons que deux tâches différentes : l’écriture sous la dictée pour 85% des tâches et la révision orthographique pour 15%. Certaines tâches sont pratiquées avec une faible fréquence : la révision orthographique et la cacographie ou encore la tâche d’explicitation que seule Sylvie pratique. Enfin, les tâches de production ne représentent globalement que 7% des tâches avec des chiffres variant de 0 à 10% selon les classes.

Figure 16 - Catégorisation des tâches

L’analyse des tâches proposées aux élèves nous amène à constater que l’orthographe est fréquemment enseignée au moyen de tâches réduites ou de transformation (T1 et T3).

Il s’agit d’activités différées et décrochées de toute situation de communication telles qu’elles ont été définies par Jaffré (1986), Ducancel (1988) ou encore Allal et al. (2001).

Au primaire, l’orthographe est essentiellement abordée à travers des fiches à compléter dont les consignes demandent le plus souvent aux élèves de « choisir », « compléter »,

« transformer », rarement d’« écrire » ou de réfléchir sur les faits orthographiques. Dans le contexte français, une enquête de la DEPP de 2012 (Raffaëlli & Jégo, 2013) était arrivée aux mêmes conclusions en montrant que la séance composée d’une leçon et d’exercices d’entrainement est très largement pratiquée dans les classes de CM2 et de

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collège. Nous pouvons nous interroger sur la capacité de ce type de tâches à améliorer les capacités orthographiques des élèves notamment en situation de production textuelle.

Dans quelle mesure le transfert des connaissances peut-il se faire ? Il s’agit d’un problème récurrent dans l’enseignement de l’orthographe que les enseignant·e·s résument souvent ainsi : « Les élèves connaissent la règle mais ne l’appliquent pas. » Pour comprendre ce qui se joue dans cette situation, nous pouvons nous référer à la théorie de l’apprentissage d’Anderson (1983) qui distingue les savoirs déclaratifs (connaissance d’une règle) des savoirs procéduraux (appliquer la règle) ou à la distinction établie par Fayol et Largy (1992) entre le « savoir que » et le « savoir-faire », expliquant ainsi que le chemin peut être long vers l’automatisation des procédures.

Stéphanie est la seule enseignante qui a recours à la révision orthographique pour travailler l’orthographe. Nous observons, en revanche, dans les classes de Pauline, Paola et Sylvie un enseignement plutôt traditionnel de l’orthographe avec une utilisation de fiches d’exercices qui invitent essentiellement à des tâches réduites de restitution d’une forme normée ou à des tâches de transformation. Dans ce type d’activités, la réflexion des élèves est très peu sollicitée et les exercices sont coupés de tout projet de communication. Il faut cependant noter que certaines activités dans les classes de Stéphanie et Sylvie s’organisent autour de tâches plus innovantes (tâches d’explicitation et tâche de révision orthographique) invitant les élèves à réfléchir sur leurs erreurs et à revenir sur les textes qu’ils et elles ont produits. Il semble donc qu’au milieu d’un enseignement plutôt traditionnel émergent des pratiques plus innovantes. C’est ce que Schneuwly et Dolz (2009, p. 63) ont identifié comme une forme de sédimentation de pratiques anciennes dans les pratiques nouvelles : « Les nouveautés dans l’enseignement sont généralement ancrées dans les pratiques anciennes et, a contrario, les pratiques anciennes ont tendance à revenir quand les nouvelles montrent leurs limites. »

En termes de volumétrie, dans les deux classes de 8P, le nombre de tâches est bien plus élevé qu’en 10CO (Tableau 7). Cela s’explique par le type d’activité et par le type de support choisis par Pauline et Paola. Prenons l’exemple d’une fiche Corome (Annexe 11) portant sur « la relation GN-GV : accord du verbe ». Cette fiche a été utilisée dans la classe de Paola en mars et dans celle de Pauline en novembre. L’objectif du plan d’études romand travaillé est la maitrise de l’orthographe grammaticale de l’accord sujet-verbe :

« Accord du verbe avec un sujet inversé » (L1-26 fonctionnement de la langue pour les 7e et 8e années du primaire). Au total, pour cette activité, Paola a utilisé 4 pages du fichier comportant au total 9 exercices (pages 112, 116, 118, 119 ; exercices 3, 4, 5, 13, 14, 15, 19, 20 et 21). Chaque exercice comprenant entre 1 et 2 consignes, nous comptabilisons pour l’ensemble de cette activité 13 tâches. Pauline a utilisé la même fiche mais a sélectionné les pages 111 et 112 avec 5 exercices et 8 tâches. Pour une même activité décrite dans la fiche de synthèse, nous comptabilisons donc 13 tâches pour Paola et 8 pour Pauline.

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Regardons à présent, le classeur de Stéphanie : nous ne trouvons pas cette multiplicité de tâches. À une activité (« dictée n°7 ») ne correspond qu’une seule tâche (« écriture sous la dictée »). Ainsi, il convient de garder à l’esprit que le dénombrement des tâches ne donne aucune indication sur la durée de la séance et sur l’ampleur du travail effectué en classe.

1.3 Unités travaillées

Pour chaque tâche, nous nous sommes demandé quelle unité était travaillée. Allons-nous observer une résonance avec des travaux d’Allal et al. (2001) indiquant qu’enseigner l’orthographe en lien avec la production textuelle était plus bénéfique que la pratique des exercices isolés pour des élèves de 9-12 ans ? Dans les classes de Paola, Pauline et Sylvie, l’unité la plus fréquente est la phrase (entre 68% et 80%) ; viennent ensuite, très loin derrière, le texte et le mot ou groupe de mots (Tableau 8). Chez Stéphanie, le texte est traité exclusivement, attestant d’une différence très importante entre les deux enseignantes de 10CO. Seule cette enseignante semble être sensibilisée à l’intérêt de travailler l’orthographe en lien avec le texte si nous nous basons uniquement sur l’analyse des classeurs. Nous pouvons aussi nous demander si les autres enseignantes n’ont pas fait figurer d’activités portant sur les textes car, pour elles, cela relèverait davantage de la production textuelle que de l’orthographe.

Tableau 8 - Unité travaillée dans chaque activité

1.4 Tâches et objets enseignés

Nous allons à présent examiner si des tâches sont plus fréquemment employées pour enseigner certains objets (Tableau 9). En ce qui concerne l’accord sujet/verbe, l’accord du participe passé et l’accord du groupe nominal, la majorité des tâches est de type T1, T2, T3, c’est-à-dire des tâches réduites de restitution d’une forme normée, des tâches d’identification et des tâches de transformation. Autre fait remarquable : pour enseigner les homophones, les enseignantes ont recours presque exclusivement à des tâches de type T1 avec cependant quelques tâches de production (3 occurrences).

Nombre % Nombre % Nombre % Nombre %

Groupe de mots 6 12,5 % 3 8,1 % 0 0% 1 3,6 %

Mot 0 0% 2 5,4 % 0 0% 2 7,1 %

Phrase 38 79,2 % 28 75,7 % 0 0% 19 67,9 %

Texte 4 8,3 % 4 10,8 % 7 100 % 6 21,4 %

Total 48 100 % 37 100 % 7 100 % 28 100 %

Enseignante

Pauline Paola Stéphanie Sylvie

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Tableau 9 - Croisement type de tâche / objet enseigné

1.5 Synthèse sur les données issues des classeurs

Ces analyses des données issues des classeurs nous apprennent que l'orthographe grammaticale est majoritairement travaillée en 8P comme en 10CO, et ce le plus souvent

Ces analyses des données issues des classeurs nous apprennent que l'orthographe grammaticale est majoritairement travaillée en 8P comme en 10CO, et ce le plus souvent