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PARTIE 4 : PROBLEMATIQUE ET METHODOLOGIE

4. Description des deux séquences

4.1 Description du canevas

Cette séquence d’activités est destinée à articuler le fonctionnement de la langue et la production écrite. Chaque séquence est centrée sur des objets orthographiques précis : l’accord sujet-verbe et l’accord au sein du GN pour la séquence 1 ; les terminaisons des verbes en /E/. Ce canevas repose sur :

25 Le rupteur apparait dans une des ressources pour enseigner l’orthographe sur Eduscol.

https://cache.media.eduscol.education.fr/file/Etude_de_la_langue/90/9/RA16_C4_FRA_etudelangue-OrthogrAccords-dm_619909.pdf

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- Un mouvement dynamique : partir du texte, décontextualiser pour alléger le cout cognitif, revenir à la situation complexe de production d’un texte ;

- Un équilibre entre l’exercice visant l’automatisation et l’écriture favorisant le réinvestissement des connaissances en situation de production.

Plus précisément, nous avons structuré les séquences autour des principes suivants : - prendre appui sur l’enseignement du genre (Dolz & Schneuwly, 1998a, 1998b ;

Marmy Cusin, 2012) pour favoriser le développement des capacités langagières des élèves. Les genres travaillés (récit d’aventure et récit mythologique) ont été choisis en fonction du nombre de rencontres qu’ils occasionneraient avec les objets orthographiques ciblés dans notre recherche ;

- créer des situations d’apprentissage qui soutiennent la mise en relation et la contextualisation des savoirs spécifiques pendant la réalisation d’une activité complexe (Allal et al., 2001 ; Brown, Collins & Duguid, 1989). L’approche adoptée dans notre séquence consiste à intégrer dans une activité de production textuelle se déroulant en plusieurs phases des tâches dont l’enjeu est de mobiliser des savoirs spécifiques d’orthographe en vue de leur application et de leur consolidation en contexte ;

- intégrer des outils et activités innovants pour enseigner l’orthographe (Bonnal, 2016 ; Geoffre, 2014).

Le canevas de séquence proposé aux enseignantes lors des séances de formation est composé des étapes suivantes :

1. Pour la production initiale, les élèves doivent écrire un court texte à partir d’une phrase d’amorce. Le genre est choisi en fonction de l’objet orthographique que l’on souhaite travailler afin de provoquer des occurrences. Ce premier écrit est conservé par l’enseignant·e et il est réutilisé pour l’avant-dernière étape. Dans la séquence de Dolz et Schneuwly (2009), cette étape est à la fois un « instrument de régulation » (p. 96) pour l’enseignant·e et « le premier lieu d’apprentissage de la séquence » (p. 97) pour l’élève.

2. La deuxième étape est l’observation de corpus. A partir de phrases ou d’extraits de textes, les élèves doivent observer l’objet orthographique déjà mobilisé lors de la production initiale. Selon leur avancement dans l’apprentissage de l’orthographe, ils et elles doivent rappeler des règles déjà apprises ou formuler des hypothèses sur le fonctionnement de cet objet.

3. Il est alors possible de procéder à l’élaboration de procédures et à la création d’outils afin de stabiliser les savoirs orthographiques mobilisés. Les outils proposés sont extraits de travaux récents en didactique de l’orthographe :

- Les balles d’accord (Brissaud & Cogis, 2011 ; Cogis, 2005 ; Geoffre, 2014 ; Jaffré & Ducard, 1994) : elles matérialisent les relations morphosyntaxiques dans le GN ou entre le sujet et le verbe.

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- Les tirettes (Brissaud & Cogis, 2011 ; Sève & Amboise, 2009) : elles permettent de travailler sur les chaines d’accord et d’en favoriser la compréhension et l’appropriation. Le principe est simple : les élèves constituent des phrases acceptables du point de vue de l’orthographe grammaticale en sélectionnant des déterminants, des noms et des verbes dans des listes qui leur sont proposées (Annexe 3). En faisant coulisser les unes après les autres les listes de mots dans la réglette de sélection, ils et elles procèdent à des combinaisons qui respectent les règles d’accordet qui mettent en évidence les contraintes qui les dirigent, ce qui favorise des relations entre « pratique langagière et point de vue formel sur la langue » (Sève & Amboise, 2009, p. 122). Ces auteurs justifient ainsi les bénéfices de la manipulation (p. 122) : « Ces concepts embryonnaires, à la fois enracinés dans les manipulations bricoleuses qui les ont vu éclore mais disponibles à la théorisation, constituent le chainon intermédiaire entre pratique langagière et point de vue formel sur la langue ».

- Les tableaux des lettres finales des verbes (Dion & Serpereau, 2009) : ils fonctionnent comme un « dispositif éclair » (p. 89) amenant les élèves à dépasser leur angoisse face à une conjugaison qui présente de si nombreuses formes qu’elle semble impossible à maitriser.

Lettres finales

Possibles Impossibles Je E - S - X - I - ⦰ T Tu S - X - E (impératif) T Il, elle, on D - A - T - E - ⦰ S

Nous S

Vous S - Z

Ils, elles NT S

- Les tableaux de synthèse de conjugaison : cette activité est inspirée du travail décrit par Brissaud et Cogis (2011) pour « observer les désinences » (p. 242).

présent imparfait futur

je je je

tu tu tu

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4. Lors de la production simplifiée, les élèves mobilisent et réinvestissent en situation d’écriture leurs savoirs. Il s’agit d’un écrit court et toute l’attention est focalisée sur un unique objet orthographique.

5. Lors de la phase d’institutionnalisation, des constats sont établis (Aeby Daghé, 2009 ; Sensevy, 2003). Cette phase se situe dans « les moments de l'étude singularisés par l’instauration dans la classe d'un rapport « officiel » à un savoir ou savoir-faire » (Reuter, 2013, p. 123) afin de fixer de manière explicite et conventionnelle « le statut d’un savoir pour construire un apprentissage dont l’élève sait qu’il peut l’utiliser dans des circonstances nouvelles et que le maitre peut l’exiger » (Schneuwly, Cordeiro & Dolz, 2005, p. 88). Ce concept est issu de la didactique des mathématiques (Sensevy, 2003) et a été repris en didactique du français (Aeby Daghé, 2009). Concrètement, un certain nombre de gestes professionnels sont constitutifs de cette phase d’institutionnalisation. Dans leurs observations menées en classe, Schneuwly, Cordeiro et Dolz identifient trois opérateurs correspondant à cette phase du travail : la généralisation, la modalisation et la décontextualisation/recontextualisation. Aeby Daghé le définit comme « un arrêt dans l’avancement de la séquence d’enseignement (2017, p. 33) et définit trois marqueurs (p. 34) :

- « la reprise d’une composante de l’objet enseigné, sous une forme généralisante qui universalise sa portée ;

- sa décontextualisation et recontextualisation en écho aux usages qui peuvent et doivent en être fait dans un contexte autre que celui de l’activité en cours ; - son caractère prescriptif impliquant que les élèves retiennent la dimension

institutionnalisée qui peut dès lors être évaluée. »

Dans notre séquence, cette phase d’institutionnalisation peut se matérialiser sous la forme d’une leçon, d’une synthèse ou d’une carte mentale commune à l’ensemble de la classe.

6. Des activités d’entrainement sont proposées sous la forme d’exercices afin d’automatiser les connaissances. Le nombre et la difficulté de ces exercices sont adaptés au niveau des élèves. De nombreux exercices portent sur l’unité phrase pour alléger le cout cognitif et permettre aux élèves de concentrer leur attention sur l’objet orthographique ciblé dans la séquence. Toutefois, plusieurs exercices portent sur l’unité texte pour entrainer les élèves à réfléchir sur des situations où les chaines de référence entraineront des difficultés orthographiques (Schnedecker, 2019).

7. Un retour sur la production initiale est effectué. Les textes produits par les élèves lors de la première étape leur sont rendus afin qu’ils et elles puissent corriger les erreurs en s’appuyant sur leurs nouvelles connaissances et sur les outils construits collectivement. Pour plus de facilité, il a été convenu lors des séances de formation que les enseignantes pouvaient remplacer ce retour individuel sur la production initiale par un travail collectif de correction sur un texte construit par l’enseignante à partir des

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travaux des élèves. Ce texte doit contenir les erreurs les plus fréquentes des élèves en rapport avec l’objet orthographique travaillé.

8. La production finale vient clore cette séquence. Un nouveau texte est produit par les élèves. La phrase d’amorce est proche de celle proposée lors de la première étape et aucune difficulté supplémentaire ne doit venir s’ajouter. Dans la séquence de Dolz et Schneuwly (2009), cette étape « est le véritable lieu d’intégration des savoirs construits et exercés » (p. 94).