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III Représentations populaires de la physiologie et de la cause instrumentale de l'hypertension artérielle

La causalité a toujours été un thème central en anthropologie médicale. A. Zempléni (1985) a démontré, après l’étude de nombreux textes anthropologiques provenant de sociétés traditionnelles, que ce terme de « cause » soulevait quelques problèmes de définition et d’usage. En effet, une certaine confusion règne autour de ce concept qui tient à la pluralité des causes d’une même maladie. Ainsi, selon cet auteur, le diagnostic de maladie comporte au plus quatre opérations et questions correspondantes. La première question a trait à la découverte du nom de la maladie. Les trois autres questions (comment la maladie est-elle survenue ? Qui ou quoi l’a produite ? Pourquoi est-elle survenue en ce moment, sous cette forme et chez cet individu ?) concernent les « causes » de la maladie :

- La cause instrumentale ou immédiate c’est-à-dire le moyen ou le mécanisme empirique ou non de l’engendrement de la maladie ;

- La cause efficiente c’est-à-dire l’agent responsable qui détient la force efficace qui produit la maladie ;

- La cause ultime c’est-à-dire la recherche de l’origine de la maladie, par la recherche de l’événement ou de la conjoncture historique dont l’éventuelle reconstitution rend intelligible l’irruption de la maladie dans la vie des individus.

Cette terminologie étiologique présente l’avantage de rendre compte des différents niveaux de questionnement que provoque l’événement-maladie. A. Zempléni fait remarquer, à juste titre, que les « causes » de la maladie ont toujours été abordées, par les anthropologues, du point de vue des thérapeutes. Les anthropologues ont alors supposé que les usagers partageaient les représentations du thérapeute qu’ils choisissaient et son interprétation du mal. La médecine biomédicale pour appréhender son objet « la maladie » a privilégié la cause instrumentale. Cette approche biomédicale, centrée sur les mécanismes et moyens d’engendrement de la maladie est-elle partagée par la pensée populaire ? En d’autres termes,

les préoccupations étiologiques de nos répondants se centrent-elles aussi sur l’identification de la cause instrumentale ?

Si nous résumons les discours recueillis, l'hypertension artérielle est perçue comme une difficulté de la circulation du sang dans les artères car celles-ci sont moins souples, ce qui explique l'augmentation de la pression artérielle (pour onze personnes). Cette conception est donc imprégnée des explications fournies par le discours médical : « C'est une pression, une tension dans les artères et les veines qui est supérieure à la norme » (8). Cette perception est beaucoup plus proche de la manière dont la pensée profane se représente le corps humain. Parmi ces individus, un a fournit l'explication suivante : « c'est parce que le sang circule trop vite ». D'autres personnes interrogées restent plus évasives et préfèrent parler de « difficulté de la circulation du sang » (9). Cette « difficulté » s'explique par différentes raisons qui ne sont pas toujours conformes aux lois de la biologie et de la médecine : « sang trop épais » (7), « trop de sang dans le corps » (1), « sang pas assez oxygéné » (1). L'hypertension artérielle, c'est aussi « le sang qui monte à la tête » (1), « un truc qui submerge, qui monte, qui envahit le cerveau mais cela ne concerne pas seulement le sang mais plutôt tout ce qui est liquide dans le corps » (1), « c'est quelque chose qui gonfle avec un besoin que cela sorte » (1). Ces dernières définitions, moins imprégnées par le discours médical, font émerger les premières représentations populaires de la physiologie et, en particulier la place du sang.

1) Le sang dans la physiologie populaire

Dans la physiopathologie populaire, « le corps-machine, fait de pompes et de tuyaux, enferme un corps animé universellement par le rythme de liquides et des chairs vivantes, là où justement s’épuisent les investigations scientifiques » (Durif, 1992 : 71). Le sang, principal liquide du corps occupe une place à part. La fonction du sang, pour la pensée populaire, a déjà été analysée par d’autres études (Lagadec, 1985 ; Roux, 1988 ; Dos Santos, 1988) : « La vie, dans ce corps machine, est véhiculée par le sang, dont la circulation symbolise la révolution de la vie. Toute perturbation du mouvement circulaire du sang dans le corps peut engendrer une maladie. Qu'il soit accéléré ou ralenti, voire figé, qu'il soit en excès ou vienne à manquer, qu'il soit épaissi, que son extériorisation soit empêchée, et la santé est altérée. Dans son mouvement circulaire, le sang subit une épuration qui le régénère. Épuration et régénération du sang sont les deux principes physiologiques élémentaires qui assurent la santé de l'individu, comme la pureté de l'eau et le renouveau de la végétation du printemps symbolisent dans l'imaginaire populaire l'éternité d'un paradis terrestres ou céleste » (Eck-Sarradon, 2003 : 317). Le sang est le principe de vie et de force. Il possède les mêmes vertus que l'eau : comme l'eau, il purifie à condition qu'il soit vivant c'est-à-dire chaud et clair, opportunément et convenablement répandu dans le corps.

Ainsi en allant du connu, le sang, avec toutes ses caractéristiques, vers l’inconnu, l'hypertension artérielle, les interviewés peuvent décrire ce dysfonctionnement. Ils transposent le connu sur l’inconnu, le connu étant ce qui est facile à imaginer et qui correspond à leurs représentations de la physiologie populaire : le « sang épais », « trop de sang dans le corps », « le sang pas assez aéré ». En perdant sa fluidité ou son abondance habituelle, le « sang » perturbe le fonctionnement habituel du corps, et du coeur, exprimé en terme de « force »: Rémi, 62 ans, chauffeur routier : « Ca fatigue le cœur parce que le sang est trop épais, je pense, du coup, il a dû mal à circuler, donc le cœur force et cela le fatigue beaucoup plus vite. »

Benoît, 60 ans, pompier : « Les tuyaux se bouchent et donc la pression augmente à l'intérieur parce que cela circule mal et le cœur est obligé d'accélérer pour palier la déficience du débit du sang. Ca fait monter la pression. »

Edouard, 63 ans, cadre : « Le sel fixe l’eau donc cela accroît le débit dans les vaisseaux sanguins et cela tend les parois et ça fait monter la tension »

Dans l’hypertension artérielle, le processus physiologique populaire qui engage le sang est se réfère plus à la représentation mécaniste (associant coeur-pompe, vaisseaux- tuyaux, débit-force motrice), qu’à la représentation symbolique d’un sang pur ou impur.

La nomination et la description des symptômes nous permettent d’énumérer les principaux mécanismes de dysfonctionnement du sang dans l’hypertension artérielle, présents dans la physiologie populaire :

- la surpression provoquée par l’élévation de la température du sang qui engendre une modification de sa consistance, une liquéfaction plus importante et le conduirait donc à une surpression qui s’échappe du corps ou ne s’échappe pas.

- la compression provoquée par une difficulté du sang à circuler qui est engendrée par des obstructions (artères moins souples, artères bouchées) ou par un sang trop épais.

Quelques métaphores sont d’ailleurs utilisées par les personnes interrogées, souvent accompagnées d’une gestuelle assez significative aussi bien pour la surpression que pour la compression. Ainsi les images de la « cocotte-minute » et de la « marmite qui bouillonne » illustrent le mécanisme de surpression. Le mécanisme de compression n’a, lui, pas été évoqué par une image, mais il a été fréquemment mimé.

2) Les nerfs dans la physiologie populaire

Si le sang est l'élément qui véhicule la vie dans les représentations populaires du corps, un autre élément moins apparent doit cependant retenir notre attention. Il n'est plus besoin de prouver que la physiopathologie populaire a une vision mécaniste du corps : « le corps (…) est une machine constituée de pièces qui s'emboîtent, s'articulent, et dont le "dé- placement" génère des douleurs. Cette machine est mue par une énergie, un fluide magnétique ou fluide électrique, transportée principalement par les nerfs, mais aussi par le sang. Comme dans le modèle électrique, il y a dans le corps une énergie négative et une énergie positive. La première est inhibitrice et peut engendrer des douleurs ; la seconde, stimulante, permet de lutter contre l'apparition des maladies, mais elle peut aussi être en excès ou faire défaut, déséquilibrant alors le réseau électrique corporel avec ses conséquences sur la santé de l'individu (…). Fatigue ou hyperexcitation sont les conséquences les plus fréquentes de ce déséquilibre » (Eck-Sarradon, 2003 : 317).

Nous ne pouvons pas également oublier que la fatigue est un symptôme majeur de l'hypertension artérielle pour nos répondants. Pour eux, « nerfs » et fatigue sont parfois associés. Ainsi quand les nerfs sont fatigués, le corps dysfonctionne. De plus, une des causes de l'hypertension artérielle fréquemment citée par nos répondants (nous le verrons plus tard), demeure la « tension nerveuse ». Ainsi, les « nerfs » ont un rôle décisif dans l'architecture du corps puisqu'ils permettent à l'énergie, au fluide magnétique ou électrique de circuler. Les « nerfs » sont donc présents dans la physiopathologie populaire bien qu'ils demeurent plus latents dans les discours recueillis que le sang. Pour quelques personnes interrogées, quand

« la tension est basse », elles sont fatiguées. « L'hypertension peut, plus

qu'exceptionnellement, avoir une fonction positive et équilibrante : comme attribut naturel, charge supérieure d'énergie et comme capacité d'adaptation et de défense de l'organisme contre la fatigue » (Durif-Bruckert, 1994 : 57)

Une nouvelle fois la nomination de certains symptômes comme « La tension dans la nuque », « la mâchoire qui se crispe » atteste de la présence et du rôle tenu par les « nerfs ».

Ils évoquent principalement une tension incontrôlable qui apparaît soudainement dans le corps. Les personnes interrogées précisaient qu’elles étaient « toutes tendues » que « leurs muscles, leurs nerfs restaient tendus », tout en essayant de mimer cette sensation.

Rappelons la conception des « nerfs » mise à jour par Durif-Bruckert afin de mieux comprendre l'expression « tension nerveuse ». Les « nerfs », gros ou petits sont nombreux et partout. « Il semble particulièrement difficile d'en saisir la réalité anatomique. Difficile aussi d'en cerner la fonction physiologique et les connexions qu'ils entretiennent avec l'ensemble de la mécanique corporelle » (Durif-Bruckert, 1994 : 98). Les « nerfs » propagent dans tout l'organisme une matière, représentée comme fluide et très souvent blanchâtre pour la distinguer du sang, appelée fréquemment « influx nerveux » et assimilée quelquefois à un courant. C'est une sorte d'énergie subtile et précieuse qui rythme la tenue et les mouvements du corps. Les « nerfs » ont pour fonction de faire passer les ordres du cerveau au reste du corps. Ils permettent l'échange entre le cerveau, grand décideur et coordinateur, et le corps. Ils sont au service l'un de l'autre, ce qui est de l'ordre du sensible, caractéristique de la chair et, ce qui renvoie au rationnel, le propre de la pensée et du cerveau. Ainsi, la volonté, le désir, l'envie, l'intention, le sentiment, l'émotion, la manière d'être et de ressentir sont intimement liés aux « nerfs » dans la pensée populaire. Concluons sur cette question avec cet auteur, « le système nerveux dans son ensemble est ainsi décrit (…) comme une structure médiane entre le corps matière et l'esprit. Ce que l'on nomme ordinairement les « nerfs » représente le support physiologique d'une interaction constante entre le domaine des sensations et des affects et celui de la raison et de la spiritualité, ce qui laisse pressentir toute l'importance de leur rôle dans la perception de la santé » (Durif-Bruckert, 1994 : 108).

3) Le climat et l’altitude, des causes instrumentales

Il est parfois, pour les interviewés, impossible de définir ce qu'est l'hypertension artérielle mais cela ne les empêche nullement d'avoir des explications, des interprétations sur les raisons de l'apparition de l'hypertension artérielle. Certains phénomènes naturels, comme le climat ou l'altitude, sont perçus et présentés comme une cause ou un facteur déclenchant : Clémentine, 43 ans, ouvrière : « J'ai une fragilité cardiaque et quand il fait froid, si je sors dehors sans me couvrir, j'ai du mal, mon cœur ne régule plus comme un être humain normal. Cet été, je n'ai pas pu, c'était atroce, j'en ai pâti, j'ai fait une déshydratation alors que je buvais comme tout le monde. (…) Par exemple, aujourd'hui, il y a du vent si je sors dehors sans me protéger, cela me prend et je prends des bourdonnements dans les oreilles. Ca, c'est fréquent et c'est presque plus embêtant que les papillons. Le bourdonnement dans les oreilles, c'est terrible ».

Paula, 56 ans , commerciale: « On a commencé à chercher une maison à la campagne, dans une moyenne montagne, puisque c'était ce que le médecin m'avait conseillé, pas trop haut et surtout pas au bord de la mer… (…) C'est-à-dire que c'est vrai que, j'avais remarqué quand même, que la Côte d'Azur, le mistral, les chaleurs extrêmes me fatiguaient énormément et j'en avais parlé à mon médecin. (…). On allait en vacances à la montagne. (…). Et moi, je me sentais bien à la montagne, moi qui était une passionnée de la mer, qui croyait que jamais de ma vie, je pourrais me passer de la mer et bien là, j'ai trouvé une sérénité, quelque chose qui me remplissait de.., je ne sais pas, j'étais béate. (…) Il paraît que les altitudes moyennes, au- dessus de 500 mètres, c'est meilleur pour les gens qui souffrent d'hypertension mais il ne faut pas vivre au-dessus de 1500 mètres parce que mon mari est originaire de St-Véran. On y est allé 2 fois et moi, ce qui ne me plaisait pas c'était d'avoir la sensation de ne pas avoir assez d'air. On me disait : "c'est normal, il y a moins d'oxygène parce qu'on est plus haut". Mais bon cela n'a rien à voir avec la pression, la sensation d'être oppressée. Hier, le télésiège

arrivait à 2800 mètres, et bien je suis redescendue avec le télésiège parce que je me sentais incapable de redescendre parce que je me sentais oppressée, comme si je perdais une partie de mes capacités physiques. Je ne sais pas c'est comme si vous n'étiez pas dans l'atmosphère qui vous correspond pourtant je trouvais le paysage splendide surtout avec le ciel que l'on a en ce moment. J'ai commencé à me sentir bien à partir de 1500 mètres. »

Damien, 70 ans, ouvrier : « Je pense que le fait d'habiter constamment à 1200 mètres d'altitude peut peut-être déclencher l'hypertension. Parce que le fait que la vie soit plus dure peut, peut-être, être un facteur favorisant ou déclenchant. Moi, je connais un gars, j'ai toujours des repères, qui habitait là-haut dans un chalet, à 1500 mètres d'altitude et qui avait une cinquantaine d'année. Et un jour, il me dit : "je fais de la tension, je fais de la tension, là, là, là." Le docteur lui avait mis une centrale (holter tensionnel) qu'il portait tous les jours pour se vérifier la tension 24 heures sur 24. Et puis il est allé habiter à S, c'est à 600 mètres et bien, depuis, il a plus de tension. Alors l'altitude, c'est une possibilité. Je pense que chaque personne est un cas et cela me paraît difficile de le généraliser à tout le monde. On est tous des cas uniques ! »

Louis, 64 ans, employé : « Par contre, je pense que notamment quand nous sommes en Haute- Savoie, ils ont un air plus léger, je pense que ma tension est plus basse. »

Le vent, le froid et la chaleur favorisent les "montées de tension". À travers les conceptions d'une maladie, les individus parlent souvent de leur rapport au monde et à leur environnement. L’altitude comme attribution causale de l’hypertension artérielle demeure difficilement explicable. Est-ce par une pensée analogique, que nos répondants établissent un lien entre une haute altitude qui donnerait une haute pression artérielle ? Les différentes altitudes correspondraient-elles à des pressions atmosphériques plus ou moins contraignantes pour le corps, à des niveaux de compression différents ? Cette tentative d’analyse ne semble pas pertinente pour Louis qui semble, lui, associer l’air léger de la Haute-Savoie avec une tension basse : l’air léger contribuerait-il à aérer le sang et à faire mieux circuler le sang ?

Les saisons ont aussi leur influence : les saisons ont un cycle, le corps aussi.

Laure, 68 ans, employée de maison : « A l'automne et au printemps, j'ai plus de tension, je me sens plus fatiguée ».

Emile, 75 ans, cadre supérieur : « On pourrait dire que l'été, la tension doit être supérieure à celle du printemps ou de l'hiver à cause de l'environnement, de la température… Ca me semblerait pas anormal disons ».

Philippe, 57 ans, employé : « Je ne ressens plus de symptôme sauf cet été, j'étais en montagne, j'ai eu des vertiges, j'ai cru que j'allais tomber. C'est vrai que cet été, il faisait très chaud et j'avais un travail très physique. La chaleur n'est pas bénéfique pour l'hypertension. Ah ça c'est sûr, pas bon du tout comme le froid d'ailleurs surtout que là en ce moment, je travaille dehors ! »

Les proverbes français attestent du lien que l’individu a depuis longtemps entre la succession des saisons dans leurs relations avec la santé et les maladies (Loux, 1979). Le printemps est évocateur du renouveau de la vie végétale illustré par la montée de la sève mais également de la montée des humeurs dans le corps, le moment critique où le sang bouillonne et se transforme. De même, l'automne, époque des feuilles mortes, est une période dangereuse, pour les malades, les personnes sans force, manquant de « sève ». Ces deux saisons sont marquées par les désordres sanguins (Moulinié, 1998). Dans la pensée populaire, les personnes âgées décèdent plus au printemps et surtout à l'automne car ce sont des saisons difficiles pour le corps. Certains proverbes français (Loux, Richard, 1978) démontrent cette méfiance vis-à-vis de l'automne : « Vieux et malades, quand tombent les feuilles, enterrés » ou encore «Quand les feuilles tombent, les vieillards deviennent faibles et les malades dépérissent ». Dans la correspondance entre le corps et le cosmos, prégnante dans la pensée

populaire, la recherche d’un nouvel équilibre par les modifications de l’état du sang à l’automne et au printemps fait écho aux équinoxes, mouvements d’expansion qui cherchent leur situation d’équilibre ou d’harmonie.

L'été est, lui aussi, tenu pour responsable (cas d’Emile et de Philippe) à cause de ses chaleurs étouffantes. Mais cette crainte de la chaleur repose certainement plus sur le mécanisme de surpression présent dans la physiologie populaire. Indépendamment de la température extérieure, la santé physique nécessite un état d'équilibre entre le chaud et le froid (Loux, 1979 ; Bougerol, 1985) : l'excès de chaud comme une fièvre est un signe important d'une quelconque maladie et inversement, une sensation de froid est aussi considérée comme le signe d'un dysfonctionnement.

Dans ses représentations du corps, l'homme est toujours resté en lien avec la nature. Si le corps de l'homme est à ce point parent avec le déroulement des saisons, c'est qu'il est composé, selon les croyances, comme tous les êtres et toutes les choses appartenant à la nature, des mêmes éléments et des mêmes propriétés :

« Et il (le médecin acupuncteur) envisageait, comme il était branché sur des choses un peu parallèles, il envisageait d’autres causes, par exemple les cyclones, les hauts vents d’altitude qui auraient pu éventuellement, comment dire…., avoir des effets sur les individus les plus sensibles » (Édouard, 63 ans, cadre qui vivait à le Réunion)

Ainsi à travers l’attribution causale du climat et de l’altitude, par nos répondants, apparaissent quelques vestiges des théories humorales, encore présentes dans les conceptions populaires de la maladie et dans les discours médicaux (« je crois profondément à l’influence des saisons sur la maladie » M8)

L'idée que les saisons font varier les humeurs développée par les médecins du Corpus hippocratique, a traversé les siècles et s’explique par l'importance du chaud et du froid dans les représentations de la santé, il n'est pas surprenant que aient développé. Cette conception humorale a été réinterprété par le discours savant selon la succession des paradigmes