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1. États-Unis : Entre mobilité volontaire et dispersion contrainte

1.1.4 De Gautreaux à MTO : la classe comme substitut de la race

Pour atteindre par une voie indirecte les objectifs de déségrégation raciale et d’accès équitable au logement dans les territoires suburbains, les États-Unis privilégient depuis plusieurs décennies déjà la mobilité des personnes (logique tenant-based) plutôt que la construction de logements subventionnés (logique project-based). L’aide à la mobilité des personnes est beaucoup moins visible et engendre par conséquent moins de résistances que les nouvelles constructions (Goetz 2003a). Même s’il a souvent été remarqué que l’intérêt grandissant de la politique fédérale pour la mobilité des ménages pauvres a joué au détriment des aides à la pierre, réputées plus coûteuses (Hartung, Henig 1997), son potentiel de déségrégation apparaît beaucoup plus élevé que celui de la construction de logements sociaux.

Cette méthode de déségrégation fut recommandée dès 1968 par la Commission présidentielle sur le logement, connue sous le nom de Commission Kaiser. En 1971, le Congrès a approuvé un dispositif appelé Experimental Housing Allowance Program, qui devait durer dix ans avant son éventuelle généralisation. Mais l’administration Nixon et le Congrès, tout deux réticents à l’égard d’une politique de construction de logements abordables dans les banlieues, n’attendirent pas les résultats et créèrent le Section 8 Program, en 1974, dans le cadre du Housing and Community Development Act. Ce programme comportait un volet d’aide à la pierre, mais il n’eut pas la même postérité que son volet d’aide à la personne qui attribue à des ménages à faibles ressources, souvent issues des minorités, un « certificat » qu’ils peuvent utiliser pour louer un logement sur le marché privé, les autorités locales du logement payant la différence entre 30% du revenu des ménages et le montant d’un « loyer équitable » (fair

utilisés que dans le territoire de compétence de l’autorité locale du logement. Son potentiel de dispersion était donc limité et c’est pourquoi le Congrès a créé en 1983 un programme expérimental appelé « Housing Vouchers » fonctionnant selon les mêmes principes, mais ne comportant aucune restriction géographique. Reflétant l’accent porté sur l’augmentation de la gamme de choix des bénéficiaires, les deux programmes ont été fusionnés en 1998 dans le Housing Choice Voucher Program (que l’on continue de désigner couramment comme le Section 8 Program). Avec près de 3,4 millions de ménages, les bénéficiaires de vouchers étaient trois fois plus nombreux en 2005 que les locataires de logements sociaux27.

Les aides à la personne sont a priori plus efficaces pour assurer la mobilité résidentielle des minorités car les logements privés bon marché sont géographiquement plus dispersés que les logements sociaux. Mais à l’encontre de la rhétorique officielle prompte à mettre en avant la liberté de choix de ces ménages détenteurs de vouchers, leur mobilité résidentielle apparaît en vérité très contrainte. Les logements privés accessibles demeurent concentrés dans les villes- centres et les territoires suburbains les moins favorisés, les évaluations ayant montré que le niveau des loyers « justes » était trop bas pour donner accès aux quartiers favorisés, en particulier sur les marchés tendus (Pendall 2000). Le manque d’entrain des bailleurs privés à participer à un programme drainant son lot de paperasseries administratives représente un autre obstacle. Le refus fréquent de prendre pour locataires des porteurs de vouchers serait une nouvelle façon socialement acceptable de discriminer en fonction de la race et de l’ethnicité (Beck 1996), ce qui a conduit plusieurs État (comme le New Jersey ou le Massachusetts) à étendre la protection du Fair housing à cette catégorie (Abravanel et al. 2002).

La réticence existe aussi du côté des bénéficiaires du Section 8 Program qui rechignent à s’installer dans des quartiers blancs par crainte d’un milieu inhospitalier, des discriminations réelles ou ressenties, ou encore parce qu’elles ne veulent pas se couper de leurs réseaux familiaux et amicaux ou des services collectifs et lignes de transports publics dont elles ont besoin (Cunningham et al. 2000 ; Basolo, Nguyen 2005). La combinaison de la discrimination (réelle ou ressentie) et de la distribution géographique du logement bon marché se traduit ainsi par une forte limitation des territoires effectivement accessibles, beaucoup de familles trouvant finalement à se loger dans des quartiers moyennement ou très pauvres (Devine et al. 2003). D’autant qu’une toute petite minorité d’autorités locales du logement informent les

27 Une proposition de loi de la majorité démocrate élue au Congrès en 2006 a proposé d’augmenter de 1,5

bénéficiaires sur les opportunités de logement dans les quartiers à faible niveau de pauvreté (Maney, Crowley 2000).

C’est dans ce but que le Section 8 Program s’insère souvent dans des dispositifs locaux, appelés « mobility programs », qui incitent ou obligent leurs bénéficiaires à s’établir dans des quartiers à faible concentration de pauvres ou, plus rarement, de minorités (Goetz 2003b). Certains de ces programmes ont été ordonnés par les tribunaux en guise de réparation des discriminations subies du fait de la localisation des logements sociaux ou de leur procédure d’attribution. La plupart de ces décisions judiciaires proposent aux habitants des quartiers ségrégués de se reloger dans des quartiers à majorité blanche ou mixtes.

Le dispositif mis en place dans la foulée de l’affaire Gautreaux est la matrice de cette méthode de déségrégation. Dorothy Gautreaux était une activiste résidente d’un ensemble de logements sociaux (public housing) de Chicago, situé dans un quartier presque entièrement noir. Un premier jugement rendu dès 1966 par un tribunal local avait reconnu le caractère ségrégatif de l’implantation des logements sociaux à Chicago, lesquels avaient été confinés dans des quartiers composés de 75 à 95% de Noirs, et de l’attribution de ces logements qui faisait jouer des quotas d’accueil maximal des Noirs dans les rares grands ensembles construits dans des quartiers blancs. Le jugement obligeait la Chicago Housing Authority (CHA) à bâtir 700 logements sociaux dans des quartiers à majorité blanche et à faire en sorte que 75% des constructions ultérieures y soient également réalisées. Un jugement d’appel rendu en 1971 étendit la condamnation au HUD, contraignant l’agence fédérale à mettre au point, conjointement avec la CHA, un plan de déségrégation applicable sur l’ensemble de l’aire métropolitaine de Chicago.

L’échelle d’application de ce plan, approuvée par une décision de la Cour Suprême de 1976, fut regardé comme un aspect crucial de l’affaire Gautreaux car, pour la première fois, la responsabilité des communes suburbaines dans la ségrégation des minorités pauvres était reconnue. Mais afin de contourner l’inertie, voire la franche hostilité de ces territoires « d’accueil » (y compris dans des quartiers de banlieues à majorité noire !), il a finalement été décidé de confier à une association le soin de tirer au sort plus 7 000 familles volontaires, résidentes ou en attente d’un logement social, pour leur offrir un voucher. Une condition était posée : le relogement devait se faire dans un quartier comprenant moins de 30% de Noirs, moyennant une aide intensive au relogement, sans quoi le voucher passait entre les mains d’une autre famille. Comme 20% à peine des ménages déménageaient effectivement vers un quartier blanc, il a fallu chercher d’autres participants au programme jusqu’à ce que soit

atteint l’objectif de 7 100 familles déménageant vers un quartier non-minoritaire (Rosenbaum, Rubinowitz 2000 ; Polikoff 2006).

La relative réussite du programme Gautreaux a été attribuée à la sélection soigneuse des familles participantes et aux précautions prises pour éviter de recréer des poches de concentration dans les quartiers d’accueil, afin de prévenir toute réaction de rejet (Rosenbaum, Rubinowitz 2000). D’où ce paradoxe relevé par E. Goetz : les programmes de mobilité doivent rester discrets et les participants triés sur le volet pour être efficaces et politiquement acceptables, mais cette modestie même fait qu’ils n’atteindront jamais la taille critique pour déconcentrer de façon substantielle les minorités pauvres (Goetz 2003b)28. Le

HUD l’a reconnu lui-même, indiquant à propos du programme Gautreaux qu’il avait marché « parce que son impact sur la composition raciale des quartiers est resté imperceptible. Sur

une période de 15 ans, le programme Gautreaux a relogé environ 5 600 familles dans des territoires à faible concentration de minorités de Chicago et des 115 communes de banlieue d’une aire métropolitaine de plus de 8 millions de personnes. L’impact de cette action sur un lieu quelconque est trop faible pour provoquer des peurs ou des résistances au sein de la majorité blanche des banlieues »29.

Le programme Gautreaux a inspiré de nombreuses expériences de mobilité résidentielle. Qu’ils soient d’initiatives judiciaires ou non, ces mobility programs reposent sur principe identique consistant à fournir une aide intensive pour lever les barrières à l’installation dans de nouveaux quartiers, tant du côté des locataires, que des propriétaires ou des habitants des quartiers d’accueil. En pratique, ce mobility counseling apporte une information très circonstanciée sur les mérites comparés de différents quartiers de destination (et éventuellement sur leur composition ethno-raciale) aux ménages désirant déménager ; une liste de bailleurs potentiel est établie et les participants sont mis en relation avec eux, le service de mobilité jouant un rôle de médiateur ; les participants peuvent être également accompagnés dans leurs visites d’appartements ; ils peuvent aussi bénéficier de services personnalisés pour traiter de problèmes d’endettement, d’éducation, de formation, d’emploi, de santé ou tout autre aspect pouvant constituer un frein à la mobilité et à leur stabilité résidentielle future ; enfin, un suivi post-relogement est souvent assuré. Ces diverses formes

28 A contrario , voir Polikoff (2006) qui estime envisageable d’étendre le prototype de Gautreaux à une large

échelle.

d’assistance sont fournies, selon les cas, directement des autorités locales du logement ou par le truchement d’associations ou de sociétés privées (Turner 1998 ; Rizor 2005).

Plusieurs dizaines de ces dispositifs de mobility counseling étaient recensées dans une trentaine d’agglomérations à la fin des années 90, certains résultant de procédures judiciaires. Ils étaient alors soutenus par le HUD dans le cadre d’un programme fédéral intitulé Regional Opportunity Counseling, mais que l’administration Bush a supprimé. Hormis le programme d’aide à la personne de droit commun, le Section 8 Program (dont les conditions d’utilisation ont été également durcies sous l’administration Bush)30, les initiatives fédérales sont restées

ténues. A l’exception d’un petit programme expérimental de la fin des années 70 (le Regional Housing Mobility Program), abandonné sous l’administration Reagan, il fallut attendre le début des années 90, pour que le HUD en initie un nouveau, lui aussi de nature expérimentale. Mis en œuvre par l’administration Clinton sous le nom de Moving to Opportunity (MTO), il concernait cinq villes (Baltimore, Boston, Chicago, Los Angeles et New York) au sein desquelles des familles étaient sélectionnées pour déménager vers des quartiers de classes moyennes. Cette expérimentation avait été suggérée au HUD, à la fin des années 80, par des acteurs du procès Gautreaux qui voulaient voir adopter un dispositif de déségrégation raciale. Il leur fut répondu que le HUD ne soutenait pas ce type de politiques race-conscious, même s’il ne s’opposait pas à ce qu’elles soient conduites sous d’autres auspices (Polikoff 2006). Un représentant du HUD le confirme :

« Si les programmes locaux de mobilité ont la dimension raciale à l’esprit, c’est tant mieux, mais nous n’avons pas de politique de cette nature ».

Par un choix politique délibéré, les décideurs fédéraux ont donc évité toute catégorisation ethno-raciale à propos du programme MTO, lequel était présenté comme une initiative de déségrégation économique (Goering 2003). Les familles participantes au programme MTO allaient dans se voir attribuer des vouchers, comme dans le programme Gautreaux, mais les critères retenus pour la définition des quartiers d’origine et de destination seraient strictement socio-économiques : les familles étaient sélectionnés dans des quartiers comprenant plus de 40% de pauvres (au sens du recensement) et le taux de pauvreté des quartiers d’accueil ne devait pas excéder 10% (Goering, Feins 2003). MTO ressemble en cela à la plupart des dispositifs locaux de mobilité qui ne résultent pas de décisions judiciaires, lesquels définissent les quartiers de destination par un critère économique et non racial (Rizor 2005).

L’un des concepteurs du programme précise :

« MTO n’a pas été créé en réponse à une violation des droits civiques et on ne pouvait donc pas développer légalement une approche fondée sur un critère racial ».

Les deux démarches ne sont pas contradictoires car MTO repose sur l’hypothèse d’une corrélation élevée entre les niveaux de ségrégation raciale et de pauvreté, tout comme la plupart des dispositifs racialement neutres de mobilité résidentielle (Turner, Williams 1997). Dans le cas de MTO, il s’agissait à l’évidence d’une variable de substitution puisque plus de 60% des participants étaient Noirs et 30 % Hispaniques, et parce que les quartiers de destination comprenant un taux de pauvreté inférieur à 10% étaient a priori des quartiers où les minorités ethno-raciales sont peu nombreuses. Le HUD s’en est expliqué de façon transparente dans un document publié en 1994 sous le titre Residential Mobility Programs :

« MTO reproduit beaucoup des traits du programme Gautreaux (…) Cependant, il existe une différence fondamentale entre les deux modèles : alors que le programme Gautreaux visait un objectif explicite d’intégration raciale, MTO est centré sur les bénéfices en termes d’opportunités décrits par les chercheurs. Ainsi, plutôt que la race c’est la résidence dans un quartier de grande pauvreté qui devient le critère opérationnel de participation au programme, et les territoires vers lesquels les familles peuvent déménager sont définis par la faible concentration de pauvreté (moins de 10%) plutôt que par leur composition raciale. En pratique, bien sûr, la corrélation élevée entre race et concentration de la pauvreté dans les grandes métropoles rend probable que les caractéristiques des participants et leurs lieux de destination seront substantiellement identiques dans les deux programmes. Néanmoins, ce changement d’importance semble ranger MTO dans la catégorie des programmes de lutte contre la pauvreté, ou plus précisément à l’envisager comme une initiative visant l’auto- suffisance ou l’empowerment qui définit dans des termes économiques les barrières auxquelles se heurtent les habitants des quartiers pauvres ».31

L’un des objectifs centraux de MTO était d’affiner la connaissance du comportement des ménages face à une incitation à la mobilité et une fois installés dans de nouveaux quartiers. Une répartition des 4 610 familles sélectionnées a été opérée de manière aléatoire entre trois groupes : un groupe expérimental bénéficiant de vouchers utilisables exclusivement pour emménager dans le parc privé situé dans des zones à faible concentration de pauvreté, moyennant un accompagnement poussé pour faciliter leur mobilité32 ; un groupe-témoin

disposant d'allocations ordinaires (Section 8) utilisables pour se reloger, sans se voir assigner de lieu particulier et sans recevoir d’assistance particulière pour organiser le déménagement ; un second groupe-témoin résidant comme les autres dans des quartiers ayant un taux de

31 Source : HUD, Residential Mobility Programs, op. cit. (trad. pers.)

32 Cette assistance, apportée par des associations nonprofit, a consisté à mettre les familles en relation avec des

bailleurs privés prêts à s’engager dans le programme, à les aider à s’adapter à leur nouvel environnement, à les conseiller sur la gestion de leur budget et à leur rendre visite après le déménagement.

pauvreté d’au moins de 40%, mais ne bénéficiant d’aucune allocation ni d’aide particulière pour déménager.

L’évaluation du programme a montré que moins de la moitié des familles du premier groupe avait effectivement déménagé contre près des deux tiers de celles du second groupe qui n’étaient pas contraintes dans leurs choix de localisation. Parmi celles qui ont déménagé, 74,7 résidaient dans des quartiers à faible taux de pauvreté (moins de 10%) en 1997, puis ce chiffre est descendu à 66,6% trois ans plus tard (ces chiffres étaient respectivement de 14,5% et 12,1% pour le second groupe). Si les effets du programmes ont donc été sensibles en termes de déségrégation économique, ils ont été beaucoup plus limités en termes de déségrégation raciale, surtout si on les compare avec le programme Gautreaux, puisque seuls 41,5% des ménages ayant déménagé vivaient dans des quartiers comportant moins de 10% de Noirs en 1997, cette proportion étant tombée à 22,4% en 2000 (les chiffres étaient respectivement de 20,4% et 20,1% pour le second groupe). Un autre résultat important, qui signale là aussi une différence importante avec le programme Gautreaux, est que la plupart des familles bénéficiaires de MTO ayant effectivement déménagé sont restées dans les limites de la ville- centre ; les déménagements vers les banlieues à majorité blanche ont été très minoritaires pour tous les groupes (Feins 2003). Et celles qui ont déménagé vers des quartiers blancs de banlieue sont souvent revenues au bout de quelques temps dans des quartiers plus pauvres et racialement plus ségrégués (Orr et al. 2003).

Pour certains observateurs, l’inégale distribution territoriale de l’offre en logements bon marché a été le facteur explicatif majeur de cette déconvenue. Les participants ont déménagé là où se trouvaient ces logements et où les bailleurs étaient présumés plus réceptifs. Comme le précise un évaluateur du programme :

« N’importe quel expert urbain pensait, au début des années 90, qu’il y avait une corrélation élevée entre race et revenus. Nous nous attendions nous-mêmes à ce que l’utilisation d’un critère économique se traduise par un niveau d’intégration raciale du même ordre. On s’est trompé car la probabilité de trouver des quartiers noirs non pauvres n’est pas nulle. Et ce n’est pas seulement à cause des préférences des familles, mais parce que les logements locatifs privés et abordables étaient dans des quartiers noirs, où les risques de discrimination sont également moins importants ».

D’autres observateurs en concluent là aussi qu’une aide à la mobilité prenant en compte la composition raciale des quartiers est plus efficace en termes de déségrégation raciale que des dispositifs aveugles à cette dimension. Parce que la ségrégation urbaine n’est pas qu’une affaire de revenus, la pauvreté ne serait pas pertinente en tant que substitut (proxy) de la race

(Hendrickson 2002). Des représentants d’associations nationales de promotion du logement équitable confirment cette limitation :

« Tout le monde dit que les politiques sont color-blind, qu’il faut donner sa chance à tout le monde d’aller vivre dans un quartier non pauvre, quelle que soit sa race. C’est la ligne officielle. Mais ça ne marche pas comme ça dans la pratique ».

« Le revenu est une mauvaise approximation de la race. On a vu par exemple dans le programme MTO que les gens étaient discriminés à cause des vouchers à partir d’un argument économique, même si la raison véritable était raciale ».

Lorsqu’ils sont race-conscious, comme dans le programme Gautreaux, les dispositifs d’aide à la mobilité cherchent non seulement à orienter les participants vers des quartiers blancs, mais à agir aussi sur les déterminants raciaux de la mobilité. C’est à ce titre que les participants sont informés sur le climat racial et l’hospitalité des quartiers de destination, sachant que plus de la moitié des participants au programme Gautreaux ont fait état d’agressions à caractère raciste, lesquelles s’estompent cependant au bout de quelque temps (Rosenbaum, Rubinowitz 2000). Ainsi, bien que moins visible que la construction de logements sociaux, les démarches de déségrégation résidentielle fondées sur la mobilité individuelle suscitent malgré tout des réactions d’opposition dans les communes d’accueil. L’existence d’un critère économique n’y change rien puisque l’on a observé la rébellion d’une banlieue blanche et ouvrière de Baltimore contre le programme MTO, en 1994, alors que moins de 300 familles devaient déménager et que les territoires en question n’étaient pas qualifiés pour les recevoir (leur taux de pauvreté n’était pas assez bas). Mais MTO fut annoncé en même temps que la démolition de logements sociaux à Baltimore, financée par le programme HOPE VI, et la rumeur a couru que des milliers de résidents de ces logements sociaux allaient débarquer, dans un contexte d’inquiétude liée aux pertes d’emplois industriels dans la région. Une association de résidents soutenue par des politiciens locaux opportunistes menèrent une intense campagne médiatique pour dire « non » à MTO. Le Congrès a alors envisagé de mettre un terme définitif à

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