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Référence : Desgagné, S. (1994). À propos de la discipline de classe : Analyse du savoir professionnel d’enseignantes et enseignants du secondaire en situation de parrainer des débutants, Séminaire sur la Représentation, Centre interdisciplinaire de recherche sur l’apprentissage et le développement en éducation (CIRADE), Département de psychopédagogie, Faculté des sciences de l’éducation, Université Laval, Université du Québec à Montréal.

Sujet : Texte qui résume les résultats d’une recherche doctorale portant sur le savoir professionnel d’enseignants expérimentés du secondaire, en situation de parrainer des débutants en ce qui concerne la discipline de classe.

Problématique :

Concept de savoir professionnel : Il représente le savoir d’expérience ou savoir pratique lié à l’agir professionnel qui implique une certaine autonomie de jugement face à l’indétermination des situations. Le concept réfère aussi à ce que Schön (1983, 1987) appelle le « savoir-dans-l’action ». Ce savoir-dans-savoir-dans-l’action constitue un répertoire, une théorie de savoir-dans-l’action que l’enseignant se construit peu à peu au fil de son expérience.

L’auteur explique le choix de se centrer sur la discipline de classe :

- C’est une des difficultés la plus fréquemment rencontrée par les débutants (Veenman, 1984).

- Un parrainage portant sur la discipline permettrait de répondre aux besoins exprimés par les débutants.

- « On peut penser qu’il s’agit là d’un ordre de problèmes qui, plus que tout autre, renvoie à l’indétermination des situations et donc, à la nécessité, pour le praticien, de se développer un savoir-dans-l’action. » (p. 4) La gestion de la discipline implique donc l’autonomie de jugement de l’enseignant.

Méthodologie :

Ethnométhodologie : « Courant de recherche qui s’intéresse à investiguer les significations que construisent les membres d’une communauté donnée et qui leur permettent de se comprendre entre eux et de coordonner leurs actions en vue de contrôler un environnement qu’ils partagent. » (p. 6) Fait appel à la réflexivité afin de permettre l’explicitation du code de significations.

Ici, on fait appel à la réflexivité par le parrainage : les enseignants expérimentés sont amenés à expliquer leur code aux débutants et aux chercheurs. Cette approche a permis de conceptualiser le savoir-dans-l’action relié à la discipline de classe.

La sélection des mentors s’est effectuée selon 4 critères : le volontariat (tout enseignant volontaire ayant un brevet et possédant une expérience de 3 à 5 ans minimum), la compétence (reconnue dans le milieu, évaluée par la direction ou par un comité de sélection), la réflexivité (capacité à analyser sa pratique et à expliciter les différentes facettes du savoir déployé) et l’affinité (tempérament et style d’enseignement compatibles).

Une conceptualisation proposée au savoir des mentors :

Deux logiques de reconstruction du savoir par les mentors : logique narrative (récit personnel effectué par un mentor) et logique structurelle (ce qui est commun à tous les mentors).

Le concept de programme d’action stratégique : Désigne le savoir-dans-l’action reconstruit par le mentor afin d’expliciter au novice son mode de fonctionnement face aux problèmes de discipline.

Selon ce concept, inspiré de Doyle (1986), le mentor se construit un cadre de référence qui lui permet de gérer les problèmes de discipline, mais aussi de proposer aux élèves un certain mode de participation souhaité (permet de centrer l’action sur ce que l’on veut voir se passer en classe). Le programme d’action instauré par l’enseignant doit être stratégique pour inciter les élèves à l’adopter. Il doit donc tenir compte de l’imprévisibilité des élèves et posséder une certaine flexibilité afin de permettre la négociation entre ce qui est souhaité par l’enseignant et ce qui est souhaité par les élèves.

Les composantes du programme d’action stratégique :

Une position stratégique (finalité) : « Faire apprendre » qui s’accompagne de « maintenir l’ordre », fonction qui s’actualise différemment d’un mentor à l’autre (par exemple : « la relation au groupe » , « le bien-être des individus », « l’implication des élèves », etc.

Des orientations stratégiques : Représentent les différentes possibilités offertes au mentor pour diagnostiquer et résoudre les problèmes de discipline. Les orientations stratégiques sont de 4 ordres : pratique, technique, moral et limite.

Orientation pratique : Orientation centrale : Lignes de conduite personnelle de l’enseignant.

Orientation technique : Exigences institutionnelles (règlements de l’école) Orientation morale : Obligations éthiques (responsabilité sociale)

Orientation limite : Limites que reconnaît l’enseignant à sa responsabilité personnelle, institutionnelle et morale.

Selon l’orientation : une conduite, un enjeu, une résolution :

La démarche de résolution d’un problème de discipline se base sur trois aspects : une conduite, à partir de laquelle l’enseignant établit un diagnostic, un enjeu, qui établit les conditions de la négociation et une résolution qui permet de choisir et d’actualiser une solution.

La conduite : L’enseignant construit des lignes de conduite qui établissent le mode de participation souhaité et permettent de gérer les tentatives de non-participation, tout en laissant une certaine flexibilité à l’élève.

Afin d’installer et maintenir ces règles de conduite, l’enseignant utilise diverses mesures : 1) Mesures d’installation : formulation des directives

2) Mesures d’ajustement : adaptation au type d’élève, au niveau, au groupe, au moment de la journée, de la semaine ou de l’année, etc.

3) Mesures de prévention : Élèves nécessitant un peu plus d’attention

4) Mesures d’exception : dérogation au système pour tenir compte de circonstances particulières

5) Mesures de stimulation : encouragement des élèves à maintenir la ligne de conduite

L’enjeu : L’enjeu renseigne le mentor sur les conditions d’interaction dans lesquelles la participation va être négociée et sur les conditions dans lesquelles les problèmes de discipline vont être résolus.

Ainsi, l’enjeu correspond, chez un premier enseignant, à la négociation de l’autorité, dans laquelle les deux acteurs (enseignant et élève) doivent éviter de « perdre la face ». Pour un second enseignant, l’enjeu renvoie à l’établissement d’un lien de confiance et à son maintien, tout en évitant les abus ou la perte de confiance.

La résolution : La résolution dépend du cadre de référence de l’enseignant (la conduite et l’enjeu). Les différents modes de résolution peuvent donc varier : intervention non-verbale (regard), intervention verbale, sortie de classe, rencontre, etc.

Conclusion :

1) Pour les mentors, « les problèmes n’existent pas en soi; ils n’existent qu’en fonction d’une certaine conception de la participation qu’un enseignant se donne. » (p. 28) Les problèmes de discipline sont donc en lien avec la conception de l’enseignant quant à la participation souhaitée en classe. C’est grâce à cette conception que l’enseignant peut être proactif (proposer un certain mode de participation) et qu’il peut réagir avec cohérence devant les tentatives de non-participation.

2) Selon les mentors, « les problèmes ne sont pas quelque chose de « paralysant » qu’il faut à tout prix éviter, mais quelque chose d’ « habilitant » dont il faut profiter. » (p.

29). Les problèmes de discipline permettent donc à l’enseignant d’actualiser son programme d’action pour l’adapter aux élèves qu’il rencontre.

3) Les mentors mettent en évidence l’importance, lors de l’élaboration du programme d’action, de tenir compte de sa propre personne (programme d’action, finalité, lignes de conduites et stratégies personnalisés).

4) Les mentors insistent aussi sur l’importance de tenir compte du contexte spécifique lors de l’élaboration du programme d’action (maintenir une certaine souplesse).

5) Enfin, les débutants doivent tenir compte de l’historicité des événements, c’est-à-dire de l’instauration initiale d’un programme d’action en début d’année, puis de son évolution au fil du temps.