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Les facteurs démographiques et la pression temporelle au volant 143

Chapitre 7 : Qui est concerné par la pression temporelle au volant ? 140

II. Les facteurs démographiques et la pression temporelle au volant 143

II.1 Âge des conducteurs

Des effets liés à l’âge des conducteurs émergent de l’enquête en bord de route. Pour rappel, en raison des contraintes temporelles et pour faciliter la saisie informatique avec le matériel dont nous disposions, les données relatives à l’âge ont été recueillies par classes. Les participants se répartissent dans les proportions suivantes : 7,93 % de moins de 25 ans, 44,98 % de 25 à 45 ans, 33,48 % de 46 à 60 ans et 13,66 % de plus de 60 ans. La figure 21 présente la répartition des répondants sous pression temporelle situationnelle (sur le trajet en cours) et la répartition des répondants qui rapportent ressentir au moins « parfois » de la pression temporelle au volant en fonction des différentes classes.

Figure 21: pourcentage par classe d’âge des répondants ayant déclaré être moyennement, beaucoup ou extrêmement sous pression temporelle durant le trajet en cours (groupe EP-P ; histogramme de gauche) et des conducteurs du groupe ayant une expérience de pression temporelle (groupe PTE ; histogrammes du centre et de droite). Les réponses retenues ici sont * P=parfois ; S=souvent ; TS= très souvent. Ces données proviennent de l’enquête menée en bord de route.

- Sur le trajet interrompu par la gendarmerie, un seul répondant (4 % du groupe sous pression temporelle au moment de l’arrêt, groupe EP-P) déclare être («beaucoup») sous pression temporelle ; il n’a pas souhaité préciser le motif de son déplacement. En proportion de leur classe d’âge, les répondants plus jeunes se répartissent équitablement.

- Concernant l’expérience générale de pression temporelle au volant (groupe PTE), les données des plus de 60 ans montrent qu’ils représentent 37,50 % (N=33) des répondants rapportant ne jamais conduire sous pression temporelle alors qu’ils ne composent que 13,66 % de la population interrogée (χ²(1, N=227)=7,25 ; p<.01). De plus, 8 répondants (9,1 % du groupe PTE) déclarent être «rarement» (N=4) ou parfois» (N=4) pressés au volant mais aucun ne déclare l’être « souvent » ou « très souvent ».

Ces données doivent être considérées conjointement avec le fait que 15 des 31 retraités20 inclus dans l'échantillon déclarent conduire «souvent» ou «très souvent» pour leurs activités. Parmi les 9 seniors (29 %) qui ont une expérience de conduite sous pression temporelle (1 sous pression temporelle au moment de l’arrêt et 8 ayant une expérience de pression temporelle), 6 (soit 75 %) rapportent se déplacer souvent dans le cadre de leurs activités, 1 parfois et 1 rarement.

Toujours concernant la pression temporelle expérientielle, les données des répondants âgés de moins de 61 ans (N=130) font émerger que :

- 67,69 % des répondants font, au moins rarement, l’expérience d’une pression temporelle au volant.

- le taux de personnes de moins de 61 ans fréquemment concernées par la pression temporelle au volant (« souvent » et « très souvent ») est de 15 % (Figure 21).

- les plus jeunes sont nombreux à rencontrer des situations occasionnelles de conduite sous pression temporelle (Figure 21 ; différence importante entre l’histogramme central excluant la réponse « parfois » et l’histogramme de droite qui l’inclut).

Les conducteurs de 25 à 45 ans et de 46 à 60 ans ne se différencient pas significativement. Au total, l’histogramme de droite de la figure 21 (incluant les participants ayant déclaré être au moins « parfois » sous pression temporelle au volant) illustre au mieux l’effet de l’âge avec, une sous représentation des plus âgés sous pression temporelle.

Des données assez similaires sont obtenues dans l'hétéro-évaluation des conducteurs pressés (gendarmes et conducteurs tout-venant). Les répondants sont interrogés sur la fréquence à laquelle conduisent sous pression temporelle des groupes d'âge différents (moins de 25 ans, 25-45 ans, 46-60 ans et plus de 60 ans). Les réponses sont résumées dans la figure 22.

20 2 répondants de plus de 60 ans ont encore une activité professionnelle ; ils déclarent n’être jamais sous pression temporelle au volant.

Figure 22 : estimations en pourcentage de la fréquence de conduite sous pression temporelle (jamais, rarement, parfois, souvent, très souvent) des moins de 25 ans (<25), des 25-45 ans, des 46-60 ans et des plus de 60 ans (>60 ans) par les gendarmes (à gauche) et les conducteurs tout-venant (à droite), données provenant des questionnaires d’hétéro-évaluation.

Les gendarmes et les conducteurs tout-venant confirment l'inégalité des ces classes d'âge face à la pression temporelle au volant (pour les conducteurs tout-venant : χ²(12, N=49)=133,27 ; p<.001 ; pour les gendarmes : χ²(12, N=100)=256,21 ; p<.001).

- Les conducteurs de plus de 60 ans sont décrits comme étant moins souvent confrontés à la pression temporelle au volant, derrière les 46-60 ans et les conducteurs de moins de 25 ans à 46 ans (Figure 22 et Tableau 10).

- Toutefois, dans cette étude, aucune différence significative n’apparaît entre les 25-45 ans et les conducteurs plus jeunes, les deux classes d’âge étant considérées comme celles qui conduisent le plus souvent sous pression temporelle (Figure 22 et Tableau 10).

Tableau 10: comparaisons des classes d’âge de conducteurs en fonction de la fréquence de conduite sous pression temporelle estimée par les conducteurs tout-venant et des gendarmes en hétéro- évaluation.

Moins de 25

ans 25-45 ans 46-60 ans Plus de 60 ans

Moins de 25 ans 3,35 19,01** 64,50*** 25-45 ans 2,19 32,43*** 78,52*** 46-60 ans 36,1*** 55,82*** 36,32*** Gendarmes Plus de 60 ans 107,95*** 143,02*** 74,44*** Conducteurs tout-venant

χ²(4, N=100) pour les conducteurs tout-venant et χ²(4, N=49) pour les gendarmes avec *p<.05, **p<.01, ***p<.001

Dans l’auto-évaluation hors contexte (comparant la conduite avec/sans pression temporelle), il n'y a aucun effet significatif lié à l'âge sur la fréquence de la conduite sous pression temporelle dans l’échantillon interrogé (χ²(8, N=110)=12,18 ; ns). Cette absence d’effet n’est pas en contradiction avec les résultats précédents dans la mesure où seuls des répondants de 23 à 60 ans ont été interrogés.

II.2 Sexe des conducteurs

Pour rappel, la population interrogée en bord de route comprend 46,70 % de femmes et 53,30 % d’hommes.

- Concernant l’intensité de la pression temporelle (information disponible uniquement dans cette étude), les données mettent en évidence que :

o parmi les 25 participants du groupe sous pression temporelle avant le contrôle par la gendarmerie, on dénombre 15 femmes et 10 hommes, ce qui correspond à 21,62 % des femmes et 8,75 % des hommes de l’échantillon. Cette représentation plus importante des femmes est significative (χ²(1, N=25) = 5,89 ; p <.05).

o Toutefois, sur l’ensemble de la population interrogée, l’intensité de la pression temporelle lors du trajet en cours est décrite comme plus élevée par les hommes que par les femmes (U=324,5 ; p <.05 ; N=177). - Concernant la fréquence de conduite sous pression temporelle, il ne semble pas y avoir de différences liées au sexe des conducteurs interrogés en bord de route (groupe ayant une expérience de pression temporelle ; χ²(1, N=88)=0,09 ; ns). Le ratio d’hommes est, cependant, significativement plus important que celui des femmes dans la population qui déclare ne jamais conduire sous pression temporelle (41,74 % des hommes contre 28,37% des femmes ; χ²(1, N=64)= 3,33 ; p=.067).

o De même, aucun effet du sexe sur la fréquence de conduite sous pression temporelle n’apparaît chez les répondants de l’auto-évaluation hors

contexte (comparant la conduite avec et sans pression temporelle ;

χ²(4, N=110)=5.74 ; ns). Les gendarmes estiment également qu’il n’existe pas de différences liées au sexe (Figure 23 ; χ²(1, N=49)=0,02 ; ns).

o Cette absence de différence inter-sexe n’est toutefois pas corroborée par les conducteurs tout-venant, qu'ils soient de sexe féminin ou masculin. Tous

estiment que les hommes sont plus susceptibles de conduire «souvent» ou «très souvent » sous pression temporelle que les femmes (Figure 23 ; χ²(1, N=100)=48,74 ; p<.001).

Figure 23: estimations en pourcentage de la fréquence à laquelle les femmes et les hommes conduisent sous pression temporelle (jamais, rarement, parfois, souvent, très souvent) selon les gendarmes (à gauche) et selon les conducteurs tout-venant (à droite). Données provenant du questionnaire d’hétéro- évaluation.

Au total, il est difficile de conclure à une réelle différence de fréquence de pression temporelle au volant en fonction du sexe des conducteurs. Selon les données recueillies en bord de route, les femmes seraient plus souvent sous pression temporelle au volant mais de manière moins intense que les hommes. Pour les gendarmes, les femmes conduiraient aussi souvent que les hommes sous pression temporelle. En revanche, les conducteurs tout-venant estiment que les hommes sont plus souvent pressés lorsqu’ils conduisent. Une explication possible est que l'intensité de la pression temporelle conduit les hommes à s’en plaindre plus que les femmes. Un tel phénomène a été, par exemple, souligné dans la littérature par Bolger, DeLongis, Kessler et Wethington, (1989) qui montrent que les hommes rapportent plus que les femmes leur stress lié au travail à la maison, travail à propos duquel ils se plaindraient plus fréquemment que les femmes (Garcia & Hacourt, 2004). A cela s’ajoute le fait que la pression temporelle est souvent liée socialement à des postes à responsabilité, encore aujourd’hui davantage occupés par les hommes que par les femmes. Toutefois, si des contraintes familiales existent en parallèle des contraintes imposées par l’activité professionnelle, la fréquence de pression temporelle serait majorée (Baxter, 2009) chez celui ou celle qui doit gérer ces deux types de contraintes. Par exemple, Dumontier et Pan Ké Shon, (2000) ont

montré que le temps occupé à la gestion des contraintes familiales est inégalement réparti entre les hommes et les femmes. Alors que les hommes en couple passent en moyenne 1h20 par jour aux tâches parentales, les femmes, qui ont également un emploi à temps plein y passent 3 h.

Par conséquent, tout ou partie de l’évaluation de la prévalence de la pression temporelle au volant en fonction du sexe des conducteurs a pu être influencée par des effets compensatoires entre la fréquence et l’intensité de la pression temporelle mais aussi entre l’expérience personnelle et l’image sociale de la pression temporelle.

III. Les facteurs professionnels et la pression temporelle au volant